MADANIYA
Le coup de Skhirat, cinquante ans après. ½
Jaafar Al Bakli
Mardi 7 juillet 2020
L’auteur dédie ce texte à la mémoire de
Mehdi Ben Barka, le plus illustre
supplicié marocain.
Le récit de Jaafar
Al Bakli, Universitaire tunisien,
chercheur sur les questions de l’Islam,
spécialiste de l’histoire politique des
pays arabes, notamment les pays du
Golfe.
Note de la
Rédaction
https://www.madaniya.info/
Le coup d’État de
Skhirat est la première tentative de
coup d’État militaire contre le régime
de Hassan II, alors roi du Maroc; la
seconde ayant été le «coup d’État des
aviateurs». Ce putsch avorté a eu lieu
le 10 juillet 1971 dans le palais royal
situé dans la petite localité de Skhirat.
Hassan II fêtait son 42e anniversaire
dans cette résidence d’été qui
accueillait pour l’occasion un millier
d’hôtes venus du monde entier, répartis
entre les différents pavillons et les
tentes caïdales.
Cette tentative de
coup d’État a été menée par le général
Mohamad Medbouh, l’instigateur qui avait
pour mission de dégarnir la garde du
palais. Le général Medbouh était secondé
par le lieutenant-colonel M’hamed Ababou,
chargé d’investir le palais avec ses
troupes et de s’emparer des points
stratégiques de Rabat.
Un troisième
complice le colonel Chelouati, un intime
du général Mohamad Oufkir, qui joua un
rôle trouble dans cette affaire, devait,
avec ses compagnons de l’état-major,
rallier l’ensemble de l’armée; contrôler
le pays et coordonner l’intervention, de
même que la diffusion des communiqués à
la radio. L’opération mobilisa 1.400
cadets de l’École militaire des
sous-officiers d’Ahermoumou.
Le carnage fit une
centaine de tués et environ 200 blessés
parmi les invités du roi. Hassan II
sauva sa vie en se cachant plusieurs
heures dans un «dressing-room» jouxtant
la salle du trône et protégée par sa
garde personnelle.
Parmi les victimes
figuraient:
- Ahmed Bahnini,
Premier ministre du Maroc de 1963 à
1965 ;
- Henri Dubois-Roquebert,
médecin de la famille royale et ami
du roi Mohammed.
- Marcel Dupret,
ambassadeur de Belgique au Maroc.
- Omar Ghannam,
directeur du Centre
cinématographique marocain.
- Pierre Kremer,
chef cuisinier de l’hôtel de la tour
Hassan de Rabat.
- Max Magnan,
directeur de la Compagnie du sucre
au Maroc.
Parmi les cadets,
près de 200 furent pris dans les tirs
croisés de leurs camarades et une
centaine furent abattus lors de la
tentative de putsch; 74 officiers et
sous-officiers furent condamnés à des
peines allant de un an de prison à la
perpétuité en février 1972; 10 officiers
supérieurs (dont quatre généraux) furent
exécutés. L’ensemble des cadets fut
radié du corps militaire marocain.
Bagne de Tazmamart
Jusqu’en 1991, les
autorités marocaines ont nié l’existence
du bagne de Tazmamart. Sur les 58
officiers incarcérés, seulement 28 ont
survécu aux conditions inhumaines du
bagne.
Fin de la note
I- Le caporal
piétine le général
A peiné agé de
vingt ans, le caporal pointa son
revolver sur les dignitaires du régime
marocain et leur ordonna de s’étendre
par terre, s’adressant à eux sur un ton
véhément: “Couchez vous par terre et ne
bougez pas”.
Saisis de panique,
les dignitaires marocains n’ont pas tenu
compte de cette injonction, jugeant plus
avisé de prendre la fuite pour échapper
aux assaillants, se bousculant les uns,
les autres pour se placer à l’abri….
tels des ânes subitement libérés de
leurs enclos. Le sous officier tira une
salve en l’air. Les dignitaires se
raidirent comme pétrifiés par le bruit
de la détonation.
A- Ahmad Reda
Guédira
Le conseiller du
roi et son commensal régulier, telle une
autruche blessée, courait dans tous les
sens, la tête enfouie entre ses deux
mains comme pour la protéger.
Trébuchant, il ne parvint pas à se
relever, terrorisé par la peur.
Imaginatif, il eut recours à un
stratagème pour échapper à un sort
fatal: il simula la mort. Il demeurera
trois heures durant étendu sous un
soleil de plomb sur le green du Golf du
palais royal de Skhirat.
B- Abdel Hadi
Boutaleb
Le ministre des
Affaires étrangères a cherché à gagner
la plage toute proche. Par malchance, il
est atteint au pied par les éclats d’un
projectile. Il se jeta sur une dune et
roula sur le sable pour échapper au
regard des assaillants, se brisant les
lunettes de soleil qu’il portait ce
jour-là. Se relevant au terme de sa
course, il offrait le spectacle d’un
homme borgne, son oeil droit recouvert
d’un verre noir, l’oeil gauche dégagé
sans lunettes.
A peine relevé, un
sous officier s’empara d’Abdel Hadi
Boutaleb et l’entassa au dessus d’Abdel
Latif Filali, ministre de l’Enseignement
supérieur, lui même placé au dessus de
Mohamad Charkaoui, beau frère d’Hassan
II dont il avait épousé la sœur.
Un empilement de
ministres terrorisés en fait. Un
spectacle pathétique et honteux à la
fois (1).
Plus tard, les sous
officiers, pour justifier leur
comportement aberrant, ont plaidé le
principe de obéissance hiérarchique et
de la discipline militaire, l’ignorance
de l’identité des conjurés.
En fait, le général
M’hamed Ababou, qui a co-dirigé avec le
général Medbouh, l’aide de camp du Roi,
le coup d’état militaire, n’avait pas
donné instruction à ses subordonnés
d’humilier les dignitaires du régime, ni
de maltraiter les officiers supérieurs
des Forces Armées Royales (FAR). Par
excès de zèle, les sous-officiers se
sont déchainés dans l’accomplissement de
leur mission.
L’un des plus
jeunes officiers supérieurs l’armée
marocaine, Directeur de l’école de
formation des sous officiers d’Ahermoumou,
qui deviendra par la suie Ribate Al
Kheir, Ababou périra lui-même au cours
de cette tentative de putsch.
C- Le général
Idriss Ben Ammar Al Alami
Ainsi un caporal de
l’académie militaire d’Ahermoumou a
placé sous ses bottes le Général Idriss
Ben Ammar Al Alami, ministre des
Postes,, ancien chef d’Etat- major de
l’armée et inspecteur général des FAR,
piétinant le général en s’esclaffant de
rire. Le général Idriss est demeuré
silencieux, subissant l’affront avec
stoîcisme (2).
D- Mahjoudi
Ahardanne
Craignant que le
caporal, livide, ne décharge son
chargeur sur sa personne à la moindre
protestation, Mahjoubi Ahardane,
ministre de la Défense, était étendu par
terre, les deux bras levés au ciel en
signe de capitulation.
Un sous officier
l’aperçoit et lui ordonne de se
déchausser. M. Ahardane obtempère. Puis
sur ton méprisant, le sous officier lui
ordonne de se déshabiller. Ahardanne se
rebiffe alors et s’écrit: «AH Non, Je ne
suis pas un singe»(3). A la réponse du
ministre de la défense, les assaillants
éclatèrent de rire.
L’un d’eux,
apercevant le Gateau d’anniversaire du
Roi, vida son chargeur dans la pièce
montée, en guise de défouloir.
Un capitaine,
originaire de la même province que
Mahjoubi Ahardane, intercéda alors
auprès des assaillants pour obtenir un
sauf conduit au ministre de la défense
et chef du «Mouvement Populaire».
E- Le Colonel
Kherraba.
Savourant sa
boisson alcoolisée dans une loge
ambulante évoluant dans les jardins du
palais, le Colonel Kherraba était dans
l’ignorance la plus complète des
événements qui se déroulaient dans
l’enceinte du Palais royal de Skhirat.
Sa dégustation sera
brutalement interrompue par l’entrée en
force d’une escouade de militaires qui
l’ont aussitôt délesté de son élégant
uniforme d’officier marocain et l’ont
jeté à terre, tout nu.
S’estimant bafoué
dans sa dignité, tremblant de rage, il
s’adressa aux soldats en ces termes: «Je
suis le colonel Kherraba. Personne ne me
touche». Sans daigner lui répondre, les
soldats retournèrent leurs armes dans sa
direction pour lui asséner des coups de
crosse, avant de le jeter à terre et de
l’étendre aux côtés de ses collègues.
2- Le gâteau
d’anniversaire du Roi, un défouloir aux
mutins.
Comment expliquer
un tel déchainement de violences
d’officiers subalternes à l’encontre de
ministres, d’officiers supérieurs, de
dignitaires du régime, serviteurs
obséquieux du trône, dont la malchance
et la crainte pour leur vie les ont
conduit à abdiquer toute dignité,
s’étalant aux pieds des mutins pour les
implorer ?
Les mutins
étaient-ils animés par la haine? Par une
volonté de représailles? De l’insolence
pure? Ou alors par pure bêtise et
immaturité? La réponse se trouve
probablement dans une synthèse de toutes
ses motivations.
Les mutins
appartenaient tous à la classe la plus
défavorisée de la population marocaine.
Ils avaient été abasourdis par ce qu’ils
avaient découvert au Palais Royal de
Skhirat. Le spectacle festif dispendieux
a agi comme un déclic, libérant de
pulsions jusque là enfouies.
L’un d’eux,
apercevant le gâteau d’anniversaire du
Roi, vida son chargeur dans la pièce
montée, en guise de défouloir, laissant
se déverser un flot de chocolat sur la
nappe.
3- Le couscous
du Roi
Des fruits de mer à
perte de vue. De toutes sortes. La table
du Roi était abondamment fournie:
homards, langoustes, crevettes,
écrevisses, saumon importé de l’Océan
Pacifique, caviar importé d’Iran, des
moutons en broche à perte de vue
rôtissant pour le traditionnel méchoui.
Le tout arrosé de spiritueux aussi rares
que précieux: alcool, liqueurs, bière
bavaroise ainsi que de toute une gamme
de champagne français.
Un sous-officier
entrepris de délester les hôtes du roi
de leurs bijoux, des montres et des
chaines en or et de les entreposer dans
un camion.
Un autre s’est
précipité sur un plateau de couscous
abondamment agrémenté en viandes variées
et en légumes. Un collègue tenta de le
dissuader. «Le temps nous est compté et
nous ne pouvons nous égarer dans des
agapes», lui dit-il.
D’un éclat de rire
illuminant tout son visage, le mutin
répliqua: «C’est l’unique occasion de ma
vie de goûter un couscous royal».
4- Le Makhzen
versus As-Siba
La soumission d’As-Siba,
le meilleur cadeau du colonisateur
français au Maghzen.
Ces deux termes
antinomiques ont rythmé l’histoire du
Maroc.
Le terme «Makhzen»,
littéralement «magasin», désigne, dans
le langage courant au
Maroc, à la fois le Pouvoir marocain
et un système de népotisme et de
privilèges de grandes familles reposant
sur leur proximité avec ce Pouvoir.
Avant le
protectorat, le Makhzen était
l’appellation du gouvernement du Sultan
du Maroc et reposait quasi-exclusivement
sur les grandes familles
arabo-andalouses ou de l’aristocratie
religieuse (chorfas) des grandes villes
du Maroc telles que Fès principalement,
Rabat, Salé ou Marrakech.
As Siba signifie,
lui, étymologiquement, l’abandon et par
extension «anarchie»,
en ce que les provinces négligées par le
pouvoir central ont constitué un lieu de
contestation politique et social.
Au cours de son
histoire le Maroc a connu des périodes
d’instabilité socio-politique. Certaines
régions du Maroc ne connaissaient pas
l’influence de l’État, notamment le Haut
et le Moyen Atlas, dans le RIF. Il
existait l’expression «bilad al
makhzen», qui désigne l’espace où l’État
exerce son autorité et s’oppose à «bilad
as siba», espace non soumis à l’autorité
centrale du pays.
Pour Henri
Terrasse, éminent représentant de
l’historiographie de la période
coloniale, le «blilad as siba» était non
seulement l’incarnation d’une autorité
makhzénienne contestée, mais également
un frein à l’apparition d’un État
moderne.
Le Maroc n’a pas
toujours appartenu aux Marocains.
Le Makhzen, lieu de
résidence du souverain et du pouvoir
central avec son cortège de magnificence
et de licence, tirait sa substance de
son pouvoir financier et économique, le
commerce et l’industrie, symboles de la
prospérité et du développement, évoluant
au milieu de courtisans empressés
intimement convaincus des vertus de
l’obéissance, de la docilité, voire de
la résignation.
As-Siba se
présentait comme l’antithèse du Makhzen.
Une zone à l’abandon, désertique,
montagneuse, de forêts et de vallons.
Une zone négligée, méprisée, humiliée,
d’une grande diversité de langues et de
coutumes. Mais une zone rompue à la
révolte, à la désobéissance, à la
violence et à l’insurrection.
As-Siba se situait
hors de l’orbite du Makhzen, dans la
décennie 1920, jusqu’à l’arrivée des
Français lesquels s’appliqueront à
mater, par le feu et le sang, cette zone
rebelle du Haut et du Moyen Atlas, ainsi
que la région de Rio de Oro, dans le
Sahara occidental.
La soumission du
Bilad As Siba a été le meilleur cadeau
offert par les Français au Royaume, à
leur retrait du Maroc en 1956
5- Les griefs de
la population du Rif à l’encontre du
Makhzen: Une vaste conjuration
franco-espganole autour du Makzen pour
neutraliser Abdallah Al Khattabi.
Recrue d’épreuves,
la populaiton du Rif gardait en mémoire
les propos du Sultan Youssef au Maréchal
Philippe Pétain, demandant au chef du
régime de Vichy de dépêcher des soldats
au Maroc pour combattre Mohamad Ben
Abdallah Al Khattabi: «Débarrassez nous
de ce rebelle», avait imploré le sultan.
Paré de son titre
de «Vainqueur de Verdun», mais néanmoins
désormais collaborateur du régime nazi,
Philippe Pétain se proposait de mater le
vainqueur des Espagnols, Al Khattabi,
l’artisan de la proclamation de la
«République du RIF».
Pour la réalisation
de cet objectif, le Makhzen avait mis à
la disposition des assaillants plusieurs
dizaines de milliers de soldats
représentant 40 brigades, placés sous
les ordres de 60 généraux. L’Espagne,
par désir de revanche, volera au secours
du Makzen pour la mise au pas du RIF,
dépêchant en renfort cent mille soldats
espagnols.
Une vaste
conjuration franco espagnole autour du
Makhzen pour neutraliser Abdallah Al
Khattabi.
La population du
Rif n’a jamais oublié cet épisode. Pas
plus qu’ils n’ont oublié comment la
Frabc ea poris en otages les femmes et
les enfants des combattants rifains pour
les contraindre à la reddition.
6 – Hassan II et
le RIF en 1958
Les gens du Rif
n’ont pas oublié non plus le
comportement d’Hassan au RIF, en 1958,
deux ans à peine après la restauration
de la dynastie alaouite et la
proclamation de l’indépendance du
Royaume chérifien.
A la tête d’une
force de 20.000 soldats, Hassan II, à
l’époque prince héritier et commandant
en chef des Forces Armées Royales (FAR),
s’est lancé à la reconquête du RIF.
Hassan II suivait
la bataille, à l’aide de jumelles,
depuis un hélicoptère survolant le champ
de bataille. Le commandement
opérationnel de la bataille avait été
confié au commandant Mohamad Oufkir,
futur ministre de l’intérieur et l’un de
ses grands conspirateurs et
tortionnaires du régime.
Des villages
entiers ont été rasés. Des milliers de
personnes forcées à l’exode.
Lorsque les
rebelles ont jeté leurs armes, Moulay
Hassan a voulu plaisanter avec le
commandant Oufkir. Les prisonniers ont
comparu devant lui et ont été contraints
de lui baiser les deux faces de sa main,
en signe de soumission.
A la fin de la
cérémonie, Oufkir dégoupilla une grenade
et la plaça à l’intérieur de la capuche
de la djellaba d’un prisonnier prosterné
devant le prince héritier. L’explosion
de la personne a déchiqueté plusieurs
personnes, suscitant l’hilarité de
Moulay Hassan et du commandant Oufkir.
Les gens du RIF
n’ont pas oublié ce long récit de leur
calvaire infligé par les hommes du
Makhzen.
Les cadets de
l’Académie militaire d’Ahermoumou
étaient parfaitement conscients du fait
qu’ils étaient originaires du RIF, du
Bilad As Siba, le pays laissé à
l’abandon.
7- Vive notre
seigneur Ababou. Que Dieu lui vienne en
aide.
M’hamed Ababou est
sorti de la salle du trône ordonnant à
son escorte de protéger les lieux où
s’était dissimulé Hassan II.
Les cadets avaient
sous leur contrôle la totalité des
invités dont ils s’étaient emparés et
jeté à terre, étendus à plat ventre sous
un soleil de plomb. Ababou ordonne alors
à ses hommes d’aligner les captifs en
colonne de trois en vue de passer en
revue ses otages.
A son passage des
dignitaires du régime poussaient des
vivats en son honneur, le félicitant,
lui souhaitant bonne chance. Ces
opportunistes à tout crin s’imaginaient
ainsi s’attirer les sympathies du chef
des mutins. Mais le chef rebelle n’en a
visiblement pas cure.
Ainsi Allal Al
Fassi, chef du Parti Al Istiqlal, a
voulu se plaindre des blessures qui’il
avait subies du fait des tirs. «Plus
tard, Si Allal. Nous verrons cela plus
tard», le coupa Ababou.
Un ancien collègue
d’Ababou sort des rangs pour saluer le
chef des mutins, mais ce fait n’a pas eu
l’heur de lui. Le directeur de
l’Académie militaire d’Ahermoumou logea
une balle dans l’estomac de l’insolent,
le tuant sur le coup.
Les autres
personnalités ont été prises de panique
à la vue de cette exécution sommaire.
Sous un soleil de plomb, terrorisées par
la peur, elles étaient noyées de sueur.
Au fur et à mesure que le temps
s’écoulait, leur supplice devenait
insupportable.
Sur une rangée
étaient alignés ministres, généraux,
cuisiniers, hommes de religion,
ambassadeurs, consuls.
Moulay Abdallah,
atteint au bras et à la cuisse ployait
sous l’effet d’une hémorragie. Ababou
ordonne que le frère cadet du Roi et les
autres personnes âgées soient dégagés du
lot et mis à l’ombre et abreuvés d’eau.
Le colonel
Boulhemis.
Le colonel
Boulhemis, chef de la gendarmerie
royale, a, lui, joué de la malchance.
Une vieille animosité nourrissait les
relations d’Ababou avec le colonel
Boulhemis: «Que le monde est petit, mon
colonel. J’attendais ce jour depuis une
éternité», lance le chef des mutins au
chef de la gendarmerie.
Boulhemis s’est mis
à implorer et à supplier Ababou.
Celui-ci le repoussa avec colère et
intima à un de ses sous officiers
d’ouvrir le feu sur son rival. Le
colonel Boulhemis tomba à terre baignant
dans ses excréments. Le général Gharban
et Le capitaine Boujema’a Al Assaly
connurent le même sort.
Ababou sort du rang
quatre généraux: Hamou Amouzehane, le
frère de l’épouse du Roi, Moustapha
Ahmarciche, Mohamad Habibi, et Boughnine
Al Khiyami, leur demandant de lui faire
acte d’allégeance et de soutenir le coup
d’état.
Comme ces 4
officiers supérieurs hésitaient à faire
droit à sa requête, Ababou plaça
d’office les 4 généraux dans une jeep en
leur donnant le temps de la réflexion
pour reconsidérer leur position.
8 -La capture du
Roi.
Au Palais de
Skhirat, la situation avait évolué en
faveur d’Ababou qui avait pris le
contrôle de la totalité de la scène: le
Roi, sa famille, le gouvernement, les
chefs militaires et des services de
sécurité, les chefs des partis
politiques marocains, les ambassadeurs
et consuls, les hommes d’affaires et les
banquiers.
Quel besoin
avait-il de demeurer sur place? Ababou
se devait d’achever sa mission: Se
rendre à Rabat avec ses hommes pour
annoncer au peuple «La «Révolution
contre le Roi», de s’emparer des
principaux rouages de l’état et de
constituer un «Conseil de la
Révolution».
Ababou ordonna à
son frère, le colonel Mohamad Ababou, de
demeurer sur place et de superviser le
contrôle de Skhirat en compagnie de 100
cadets. Lui, marchant sur la capitale en
compagnie du reste des mutins pour
achever sa tâche.
Il était 17H00
lorsqu’Ababou pris la direction de
Rabat. Un caporal qui avait été assigné
à Skhirat s’écrie alors: Que reste-t-on
à faire ici? C’est une place maudite.
Pourquoi la protéger?»
Un des gardes
entend des bruits en provenance des
toilettes, s’y dirige et ouvre la porte
d’entrée. Il est surpris de découvrir un
groupe de personnes cachées dans les
toilettes. Il leur ordonne de lever les
bras et de dégager les lieux. Obéissant
aux ordres, les hommes, empruntant la
marche des canards, sont sortis se
dirigeant vers le Golf royal.
Dans l’obscurité,
les mutins n’avaient pas pu identifier
ce groupe de prisonniers. Dans la clarté
du jour, un caporal s’approcha d’un
homme revêtu de l’uniforme des services
en charge du nettoyage des sanitaires,
le reconnaissant s’écria: LE ROI. C’EST
LE ROI.
Les soldats
entourèrent alors Hassan II. L’un d’eux
le tira brutalement par sa chemise, en
lui ordonnant de le suivre: «Toi, viens
avec nous».
Le roi obtempéra,
avant de s’arrêter net. Les soldats
s’agglutinèrent autour de sa personne et
commencèrent à le dévisager.
Un sous-lieutenant
ordonne à ses hommes de s’occuper du
Roi. Bras levé, le souverain est dirigé
vers un endroit isolé
Un lourd silence
s’empara des lieux un bref instant. Puis
soudain, une rafale retentit.
Notes
- Abdel Hadi
Boutaleb, ancien ministre marocain
des Affaires étrangères, a relaté en
personne les humiliations qu’il a
subies à Skhirat, notamment comme il
a été contraint de mettre ventre à
terre, puis son empilement au dessus
de Filali et Ckarkooui. CF à ce
propos son interview dans l’émission
«Témoin de son temps- Chahed A’la Al
‘Asr» 5eme épisode, 17 aout 2017-sur
la chaîne Al Jazeera du Qatar.
- Mohamad Ar
Rayess: «De Skhirat à Tazmamart,
billet Aller Retour vers l’enfer»,
Maison d’édition marocaine, 1 ère
edition- 2000. page 47
- ibidem Mohamad
Ar Rayess , page 34
Pour aller plus
loin sur le Maroc, sous le règne de
Hassan II
-
Jordanie-Maroc: Hassan et Hussein,
deux voltigeurs de pointe de la
diplomatie occidentale :
https://www.renenaba.com/hassan-et-hussein-le-modernisme-au-service-de-larchaisme/
- Hassan II: La
grande imposture :
https://www.madaniya.info/2018/11/17/maroc-israel-hassan-ll-la-grande-imposture/
- Le Safari
club, la chambre noire du
renseignement altantiste et de leurs
alliés monarchiques arabes (Maroc,
Arabie saoudite) : https://www.madaniya.info/2018/11/22/maroc-israel-le-safari-club-la-chambre-noire-du-renseignement-atlantiste-et-de-leurs-allies-monarchiques-arabes
A l’intention des
locuteurs arabophones, le récit de
Jaafar Al Bakli sur ces liens;
1ère partie
https://www.al-akhbar.com/Opinion/264649/%D8%A7%D9%86%D9%82%D9%84%D8%A7%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D8%B5%D8%AE%D9%8A%D8%B1%D8%A7%D8%AA-2-%D8%A7%D9%84%D9%83%D8%A7%D8%A8%D9%88%D8%B1%D8%A7%D9%84-%D9%8A-%D8%B7-%D8%A3-%D8%A7%D9%84%D8%AC%D9%86%D8%B1%D8%A7%D9%84
2me partie
https://www.al-akhbar.com/Opinion/265199/4%D8%A7%D9%86%D9%82%D9%84%D8%A7%D8%A8-%D8%A7%D9%84%D8%B5%D8%AE%D9%8A%D8%B1%D8%A7%D8%AA-3-%D8%B4%D8%B9%D8%A8%D9%8A-%D8%A7%D9%84%D8%B9%D8%B2%D9%8A%D8%B2-%D9%84%D9%82%D8%AF-%D8%B9%D8%AF%D8%AA-%D9%84%D9%83%D9%85
Partie 2/2
Le sommaire de René Naba
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