Analyse
Le Brexit ou la prison de l'UE
Israël Adam Shamir
Israël
Adam Shamir
Vendredi 6 septembre 2019 Les bouledogues ont
une réputation de "froide persistance
dans ce qu'ils entreprennent", comme le
disait ce bon Abraham Lincoln du général
Grant: "Il s'accroche comme un
bouledogue; une fois qu'il plante ses
crocs quelque part, personne ne peut lui
faire lâcher le morceau", disait-il. La
Master classe de l'UE pourrait donner
aux chiens-chiens une bonne leçon de
serrage de mâchoires. Bien des Etats
européens ont tenté de se libérer de la
prison des "nations européennes", mais
ils ont tous échoué.
Est-ce que BoJo,
comme ils appellent leur flamboyant
Boris Johnson, le Premier ministre
britannique, va réussir son coup là où
les autres se sont plantés? Lui aussi,
c'est un bouledogue dans son bon droit;
il croit à la cause qu'il défend; il
jouit du soutien populaire et de la
haine des professionnels de la
politique. En tout cas, il est le seul à
avoir une chance de gagner. Et s'il
gagne, la domination des élites hostiles
recevra un terrible soufflet.
Même si le mercredi
4 septembre il a subi une défaite, ce
n'est pas la fin de l'histoire. La
grosse caisse n'a pas encore retenti. Il
y a encore bien d'autres voies ouvertes
à un homme tenace pour sortir
l'Angleterre de l'UE vers la fin du mois
d'octobre. Le soutien massif au parti du
Brexit aux élections est envisageable.
Un Brexit dur, sans accord, sans l'aval
du parlement, c'est aussi techniquement
possible.
La bataille pour le
Brexit n'est pas une bataille avec ou
contre l'Europe. Les Européens sont avec
BoJo contre leurs propres élites. Les
Français rêvent d'un Frexit, et même les
Grecs préfèreraient un Grexit à leur
situation actuelle de pays mis en pièces
par l'austérité. Chaque fois qu'on a
demandé aux peuples s'ils voulaient
rester dans l'UE, cette organisation non
démocratique entièrement possédée et
dirigée par des élites hostiles, ils ont
répondu NON avec des rugissements. La
liste est longue. En 2005, les Français
avaient voté NON à la Constitution
européenne, les Hollandais répondant
NEE; d'autres gouvernements ont vite
compris le message et habilement annulé
les référendums prévus. La Norvège, la
Suisse, l'Irlande, le Groenland, le
Danemark, la Grèce avaient voté NON.
Mais les élites hostiles n'ont pas
considéré ce NON comme une réponse.
Chaque fois, ils ont mis en place un
subterfuge, en posant une nouvelle
question lors d'un nouveau vote, ou,
plus souvent, ils ont décidé qu'on
n'avait aucun besoin de referendum. Dans
le cas de la Grèce, les gens avaient
voté NON, mais le parti au pouvoir a
rétorqué "c'est pas grave", avant de
répondre OUI à leur place.
Les nations les
plus importantes, celles qui donnent des
subsides, en Europe occidentale, veulent
se retirer, ce qui n'est pas surprenant.
L'UE est gérée par une commission non
élue, tandis que le Parlement européen
n'a pratiquement pas de pouvoirs. L'UE
promeut l'immigration massive qui dilue
et remplace la population native; elle
promeut obsessivement des perversions
sexuelles comme nouvelle norme; elle est
violemment antichrétienne; elle adore
l'énergie verte très chère et les taxes
sur les carburants. Elle travaille main
dans la main avec les médias de masse
qui sont aussi horribles que ceux de
l'Amérique. L'UE prescrit l'austérité
pour les classes moyennes et
inférieures, elle taxe les revenus du
travail; elle est généreuse avec les
banques et les banquiers; seuls les
nouveaux Etats européens votent OUI,
dans la perspective de prébendes de
l'UR. Les plus enthousiastes sont la
Lituanie, la Slovaquie et la Macédoine
du nord, et ce n'est guère la compagnie
la plus souhaitable pour un beau pays
comme la Grande Bretagne. L'UE a été
décrite comme l'outil américain pour
gérer l'Europe occupée, mais l'élection
de Trump a révélé que c'est plus
compliqué. Il y a maintenant deux
Amériques, celle de Trump et de ses
soutiens nationalistes, et l'autre
Amérique, internationaliste et libérale;
celle-ci sera en pleine symbiose avec
l'UE. Et c'est pour cela que BoJo, ami
de Trump et proaméricain, veut que le
Brexit se réalise.
Son principal
adversaire Jeremy Corbyn lui aussi rêve
d'un Brexit pour sortir l'Angleterre de
l'UE néolibérale et la mettre face à son
avenir socialiste, mais il marche sur
des œufs, parce qu'il veut éliminer
Boris Johnson et prendre sa place
personnellement au 10 Downing Street. Il
flirte avec les anti-Brexit parce qu'il
a besoin de toutes les voix pour gagner,
et il craint qu'en cas de réussite du
Brexit, Johnson ne devienne imbattable.
Autrement dit, il est aussi partisan du
Brexit que BoJo, quoique pour des
raisons différentes.
D'autres personnes
ont d'autres raisons et d'autres buts;
aucun doute, la cause du Brexit est très
populaire dans le peuple malgré la
torture subie depuis trois ans. Les
récentes élections au Parlement européen
l'ont prouvé: une nette majorité a voté
pour les candidats qui soutenaient le
Brexit. Si la démocratie signifie le
choix du peuple, le Brexit est l'acte le
plus démocratique que l'Angleterre
puisse poser, même si dans ce but le
Parlement de Westminster doit être mis
hors jeu.
Le Parlement
britannique de 2016 a créé une fenêtre
d'Overton inattendue, et les gens se
sont rués dedans. Les élites avaient mal
calculé leur coup quand elles avaient
considéré les Anglais comme parfaitement
domestiqués. C'est un peuple malin qui
savait que c'était une occasion à
saisir, et qu'il pouvait gagner; et il a
voté NON. On en aurait tous fait autant.
Les élites étaient choquées, comme les
élites hostiles des US ont été choquées
par la victoire de Trump. Et elles ont
aussitôt commencé à œuvrer pour inverser
ce résultat, exactement comme leurs
pairs américains. Ce sont des gens
têtus, c'est le moins qu'on puisse dire.
Le referendum en Grande Bretagne a eu
lieu en juin 2016, et depuis lors les
élites font tout ce qu'elles peuvent
pour empêcher la volonté populaire de
s'imposer.
Le Guardian
est un quotidien anti-Brexit. Autrefois
j'ai été un fervent lecteur du
Guardian; c'était un journal de
gauche jovial, avec John Pilger, Seamus
Milne et d'autres bons garçons et bonnes
filles, un choix évident pour Julian
Assange et son Wikileaks. Depuis, il a
basculé à 180 degrés, et c'est devenu un
torchon qui donne la nausée à tout le
monde anglophone. J'ai perdu tout
intérêt pour sa ration journalière de
gens avec des noms exotiques qui
décrivent les micro-agressions dont ils
souffrent; les féministes contre les
quolibets grossophobiques, les
transgenres à la recherche de toilettes
publiques; les juifs redoutant le
méchant Corbyn, les vieilles dames de 75
ans courant après leur premier orgasme
(je n'exagère pas) et d'autres sujets
qui m'indiffèrent complètement.
Depuis ces trois
dernières années, le Guardian n'a
pas laissé passer une occasion de faire
peur aux Brexiteurs. Il n'y aura plus
rien à manger, le pays va s'effondrer,
il n'y aura plus de lois ni d'ordre,
prophétisent-ils. Pour moi, c'est autant
d'arguments pour un Brexit; quoi que le
Guardian vous recommande, cela ne
peut pas être bon pour vous.
The Economist
est un autre cas funeste, qui prêche
contre le Brexit. Jadis un bon magazine,
c'est devenu la voix des banquiers. Le
"Social Justice Warrior" trotskiste a
rejoint les banquiers, dans une
combinaison peu fréquente. Ce n'est pas
souvent que the Economist et
The Socialist Worker parlent d'une
même voix.
Les Anglais qui ont
voulu et voté pour le Brexit se
retrouvent décrits comme des racistes et
des chauvinistes. Je n'apprécie pas le
racisme, qui est une idéologie destinée
à égarer et à diviser; mais les
antiracistes sont encore pires.
L'antiracisme est l'idéologie de la
conquête et du remplacement. Les
conquistadors étaient antiracistes,
alors que les autochtones d'Amérique
pourraient être vus comme des racistes,
parce qu'ils se battaient contre les
envahisseurs.
Si la Grande
Bretagne était un pays normal, comme il
y a cinquante ans, elle foncerait dans
le Brexit comme un couteau dans le
beurre. Mais sa classe ouvrière a été
pise en pièces par la Thatcher, Londres
est devenu une résidence de choix pour
les riches Arabes et Russes, qui ont les
Polonais et les Indiens pour
domestiques. La nouvelle population
cosmopolite ne s'intéresse pas à
l'Angleterre ni au peuple anglais, et
eux aussi ont le droit de vote. Ils
préfèrent l'UE, l'entité supranationale
qui est bonne pour les finances et pour
les immigrants.
La majorité des
parlementaires est contre le Brexit. Il
détestent le Brexit presqu'autant qu'ils
détestent Corbyn: "trop de députés
tentent désespérément de détourner le
Brexit", disait le député John Baron.
"Trop de membres des Communes sont en
secret des gens qui veulent rester dans
l'UE et ils ont juste cherché à gagner
du temps trop souvent: ils devraient
reconnaître que ce qu'ils veulent
vraiment c'est la fin du Brexit".
Nous pouvons
écarter leurs explications, qu'ils
disent qu'ils veulent un "Brexit bien
ordonné", ou qu'ils veuillent bloquer le
"coup d'Etat de Boris Johnson". Ce
qu'ils veulent, c'est rester dans l'UE,
dans la structure à laquelle ils sont
reliés. Les professionnels de la
politique survivent grâce à leurs
réseaux, et les leurs, ce sont l'UE et
l'establishment américain
internationaliste.
En attenant les
Britanniques peuvent se féliciter
d'avoir fait échouer l'accord bricolé
par Mrs Theresa May. Cet accord était
probablement pire que de rester dans
l'UE, car il aurait remis l'Angleterre
au cœur de toute négociation de l'UE
sauf pour ce qui est du pouvoir
décisionnaire. La Grande Bretagne aurait
aussi dû payer plus de 40 milliards de
dollars, ou peut-être plus encore. L'UE
ne veut pas que la Grande Bretagne la
quitte, parce que c'est un donateur
capital; le Brexit pourrait ouvrir le
chemin hors de l'UE à d'autres Etats.
L'UE aura moins d'argent à dépenser pour
nourrir ses nouveaux membres pauvres de
l'Europe de l'Est, sans parler de la
misérable Ukraine. Toute l'influence que
l'UE a en Grande Bretagne s'est vue
mobilisée pour faire échouer le Brexit.
Maintenant, avec la nouvelle loi Benn,
l'UE va pouvoir compliquer vraiment le
travail à Boris Johnson.
Le meilleur Brexit,
c'est un Brexit dur, sans accord du
tout. Après son évasion, la Grande
Bretagne indépendante sera capable de
négocier pacifiquement de nouveaux
rapports avec l'UE. En bloquant la
solution No-Deal, les parlementaires
l'ont rendue presque impossible à
réaliser, et très coûteuse.
L'UE n'a pas envie
de décliner et de disparaître. Elle se
bat contre le Brexit en implantant une
nouvelle norme. Si l'Empire romain avait
été géré par les fonctionnaires de l'UE,
la Grande Bretagne en ferait encore
partie. Si les Russes avaient su qu'ils
pouvaient faire payer les Etats baltes
et l'Allemagne de l'Est pour avoir
quitté l'URSS et le Pacte de Varsovie à
hauteur de je ne sais combien de
milliards, l'OTAN ne se serait jamais
étendue à l'est. Boris Johnson a été
sermonné par Donald Tusk, le président
du Conseil européen, parce que son pays,
la Pologne, est un des principaux
bénéficiaires de l'aide européenne, tant
que le Royaume uni paye pour les nantis
polonais. Il ne veut pas voir la Grande
Bretagne prendre la tangente, comme tout
propriétaire d'esclaves déteste voir son
esclave reprendre sa liberté.
La débâcle du
Brexit est un signe de crise de la
démocratie. La volonté du peuple
britannique s'est vue contrecarrée à
répétition par les parlementaires élus
et par des administrateurs non élus. Il
en pratiquement été de même aux US, où
la volonté du peuple s'était clairement
exprimée à travers l'élection de Trump.
Ceux qui le soutiennent voulaient voir
les soldats rentrer chez eux, voulaient
nouer une amitié avec la Russie, en
finir avec l'immigration de masse, en
finir avec la diabolisation des hommes
blancs américains. Tous ces souhaits ont
été détournés par les membres du Congrès
et les domestiques non élus de l'Etat
profond. La volonté populaire devrait
prévaloir, en Angleterre comme en
Europe. Pour cela, l'immense pouvoir des
élites internationales hostiles devrait
se voir contenu; les médias devraient
être rendus au peuple, et les parlements
purgés de ceux qui parmi eux, se
soucient plus d'Israël que de leurs
propres pays. Certes, le Parti
travailliste serait capable d'assumer le
Brexit s'il n'était pas détourné de son
but par la chasse aux sorcières de
l'antisémitisme. Il y a une claire
corrélation entre la cause juive et la
causse de l'UE, mais cela pourra faire
l'objet d'un autre débat.
Israel Shamir : adam@israelshamir.net
Source: The
Unz Review
Traduction: Maria
Poumier
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