Palestine
Le responsable de B’Tselem : Pourquoi je
me suis exprimé à l’ONU contre
l’occupation
Capture
d'écran PalSol
Mercredi 26 octobre 2016
Il n’y a aucune chance que la société
israélienne, de son bon vouloir et sans
aucune aide, mette fin au cauchemar. De
trop nombreux mécanismes isolent la
violence que nous mettons en œuvre pour
contrôler les Palestiniens.
Je me suis exprimé aux Nations Unies
contre l’occupation parce que j’aspire à
la qualité d’être humain. Et les êtres
humains, lorsqu’ils sont responsables
d’une injustice envers d’autres êtres
humains, ont l’obligation morale de
réagir.
Je me
suis exprimé aux Nations Unies contre
l’occupation parce que je suis
israélien. Je n’ai pas d’autre pays. Je
n’ai pas d’autre citoyenneté ni d’autre
avenir. J’ai grandi ici et y serai
enterré. Je me soucie du destin de cet
endroit, du destin de ses habitants et
de son destin politique, qui est aussi
le mien. Et, au vu de tous ces liens,
l’occupation est un désastre.
Je me
suis exprimé aux Nations Unies contre
l’occupation parce que les collègues de
B’Tselem et moi-même, après tant
d’années de travail, sommes arrivés à
plusieurs conclusion. En voici une : la
réalité ne changera pas si le monde
n’intervient pas. Je soupçonne notre
gouvernement, dans son arrogance, de
savoir cela et, de ce fait, de s’occuper
à répandre la peur d’une telle
intervention.
Une
intervention du monde contre
l’occupation est tout aussi légitime que
n’importe quelle question de droits
humains. Et ce d’autant plus qu’il
s’agit d’un thème tel que notre pouvoir
sur un autre peuple. Ce n’est pas un
problème israélien interne, mais une
question internationale, c’est flagrant.
Voici une autre conclusion : il n’y a
aucune chance que la société israélienne
de son bon vouloir et sans aucune aide,
mette fin au cauchemar. De trop nombreux
mécanismes font un cas à part de la
violence que nous mettons en œuvre pour
contrôler les Palestiniens. Trop
d’excuses se sont accumulées. Il y a eu
trop de peurs et d’angoisse – des deux
côtés – au cours des 50 dernières
années. Au bout du compte, j’en suis
sûr, Israéliens et Palestiniens mettront
fin à l’occupation, mais pas sans l’aide
du monde.
Les
Nations Unies, c’est beaucoup de choses.
Beaucoup sont problématiques, certaines
complètement insensées. Je ne les
approuve pas. Mais les Nations Unies
c’est aussi l’organisation qui nous a
donné un État en 1947 et cette décision
est la base de la légitimité
internationale de notre pays, celui dont
je suis citoyen. Et chaque jour de
l’occupation nous fait non seulement
croquer avec délice la Palestine, mais
aussi détruire la légitimité de notre
pays.
Je ne
comprends pas ce que le gouvernement
veut que les Palestiniens fassent. Nous
avons régi leurs vies depuis près de 50
ans, nous avons déchiqueté leur terre en
petits morceaux. Nous exerçons un
pouvoir militaire et bureaucratique avec
grand succès et nous nous arrangeons
parfaitement avec nous mêmes et avec le
reste du monde.
Qu’est
ce que les Palestiniens sont supposés
faire ? S’ils osent manifester, c’est du
terrorisme populaire. S’ils appellent à
des sanctions, c’est du terrorisme
économique. S’ils utilisent des moyens
légaux, c’est du terrorisme judiciaire.
S’ils se tournent vers les Nations
Unies, c’est du terrorisme diplomatique.
Il
s’avère que quoi que fasse un
Palestinien à part se lever le matin et
dire « merci patron, merci maître, c’est
du terrorisme. Qu’attend le
gouvernement, une lettre de reddition ou
la disparition des Palestiniens ? Ils ne
disparaîtront pas.
Nous
ne disparaîtrons pas non plus, ni ne
nous tairons. Nous devons le répéter
partout : l’occupation ne résulte pas
d’un vote démocratique. Notre décision
de contrôler leurs vies, pour autant que
cela nous convienne, est une expression
de violence et non de démocratie. Israël
n’a pas de raison valable de continuer
ainsi. Et le monde n’a pas de raison
valable de continuer à nous traiter
comme il l’a fait jusqu’à présent – que
des mots et pas d’action.
Je me
suis exprimé au Conseil de Sécurité de
l’ONU contre l’occupation parce que je
suis optimiste, parce que je suis
Israélien, parce que je suis né à Haïfa
et que je vis à Jérusalem, et parce que
je ne suis plus un jeune homme et que
chaque jour de ma vie a été marqué par
le contrôle que nous exerçons sur eux.
Et parce qu’il est impossible de
continuer ainsi.
Nous
ne devons pas continuer ainsi. Je me
suis exprimé au Conseil de Sécurité de
l’ONU contre l’occupation parce que
j’aspire à la qualité d’être humain.
Hagai El-Ad est le directeur
exécutif du groupe de défense des droits
humains
B’Tselem.
Discours
de Hagai El-Ad lors d’un débat sur les
colonies au Conseil de Sécurité des
Nations Unies, B’Tselem
Hagai El-Ad pour
Haaretz
Traduction SF pour l’AURDIP
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