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L’hubris des dirigeants américains
Alain Corvez
Mardi 17 septembre 2019
Allocution du
Colonel
(CR) Alain
Corvez au
Forum Syndical International de Damas
(8 et 9 septembre
2019).
Les observateurs
objectifs des événements tragiques de
Syrie savent tous qu'il ne s'agit pas
d'une crise sociale interne à cette
vieille nation du monde arabe, connue
pour sa tradition ancienne de
cohabitation harmonieuse entre ses
multiples communautés, juives,
musulmanes et chrétiennes, mais du
déploiement de l'impérialisme
occidental, dirigé par l'alliance
américano-sioniste, à laquelle
s'agrègent ses vassaux européens et
arabes, pour renverser un gouvernement
qui n'a pas accepté de se soumettre à
ses exigences.
Cet impérialisme du
mal dissimule plus ou moins ses visées
derrière de sempiternelles fausses
allégations de protection des
populations ou de lutte contre un
terrorisme barbare qu'il a lui- même
créé et, s'affranchissant des règles
internationales, justifie ses
interventions militaires, directes ou
par des factions complices, sous de faux
prétextes, utilisant une presse complice
pour faire accepter ses exactions.
Depuis
l'effondrement de l'Union Soviétique,
les États-Unis sont atteints d'un «
hubris », d'une démesure, qui les
persuade, du moins leurs dirigeants,
qu'ils sont la « nation indispensable,
la nouvelle Jérusalem », qui doit guider
le monde vers le destin unique du « mode
de vie américain.»
Il me semble que
Donald Trump a compris l'erreur d'une
telle conception opposée à la réalité
d'un monde multipolaire qui se met en
place inéluctablement: ses discours de
campagne de 2016 le prouvent. Mais s'il
s'efforce de se libérer des forces qui
l'empêchent d'appliquer son programme et
qui le menacent quotidiennement depuis
son élection. Il doit en permanence
donner des gages d'obéissance à ces
évangélistes et sionistes pour ne pas
être menacé de destitution ou subir
d'autres avanies plus radicales, ces
derniers le rappelant constamment à leur
conception de la suprématie de
l'Amérique et du dollar. D'où ses
déclarations et décisions
contradictoires, parfois à quelques
heures d'intervalle seulement.,,
Les drames de notre
époque proviennent en grande partie de
ce fait : la première puissance mondiale
n'est pas dirigée par son gouvernement
mais par des groupes de pression plus ou
moins officiels, notamment celui des
sionistes associés aux évangélistes, et
propage ses désordres internes à
l'ensemble du monde.
Son deuxième mandat
devrait être différent car certaines
déclarations de dirigeants, comme
certains votes des assemblées, semblent
indiquer que la majorité de l'importante
diaspora juive américaine , convaincue
depuis longtemps que le puissant mais
minoritaire AIPAC (1) influence le
gouvernement et le Congrès et décide de
la politique étrangère, estime que ce
soutien indéfectible à la politique
israélienne extrémiste dessert la
politique américaine, et même celle
d'Israël, et entendrait maintenant ne
plus laisser ces fanatiques, puissants
mais minoritaires, imposer leurs vues
contraires aux intérêts des États-Unis.
On sait que
l'intervention militaire de la Russie en
Syrie, a été initiée en septembre 2015 à
la demande du gouvernement syrien en
difficulté, au moment où les augures
occidentaux ne donnaient plus au
Président Bachar el Assad que quelques
jours ou quelques semaines avant d'être
renversé par les islamistes. Elle a
rapidement rétabli la situation et, sans
les manœuvres dilatoires occidentales,
aurait déjà permis d'en finir avec les
hordes sauvages qui terrorisent encore
les populations civiles dans la région
d'Idlib et sur les rives Est de
l'Euphrate, hordes protégées par les
forces occidentales qui n'ont pas encore
reconnu leur défaite.
On sait que le
Hezbollah est intervenu dès le début des
événements, jugeant que le Liban était
directement menacé par les actions
islamistes, à l'intérieur et à
l'extérieur de ses frontières,
On sait aussi que
l'Iran dont l'action déterminante a été
d'un grand secours à l'Armée syrienne,
est intervenu parce qu'il se savait la
cible suivante d'une «coalition
occidentale» agissant au profit
d'Israël. L'entente entre l'Iran, le
Liban, la Russie et la Syrie se fonde
sur des intérêts stratégiques
communs qui dépassent les personnalités
au pouvoir à Téhéran, Beyrouth, Moscou
ou Damas et nécessite une coordination
de leurs géopolitiques qui n'a rien à
voir avec les humeurs que certains
journalistes croient déceler chez les
uns ou les autres.
Les Occidentaux et
leurs alliés arabes saoudiens, émiratis
et qataris, associés aux Turcs ont, dès
le début, alimenté les terroristes de
diverses obédiences en argent, matériel
et armement, ajoutant des sanctions
économiques qui pénalisent d'abord le
peuple syrien et contreviennent
totalement aux droits de l'homme qu'ils
prétendent défendre. Ils espéraient une
révolte contre le gouvernement qui, non
seulement ne s'est pas produite, mais a
soudé les Syriens derrière leurs
dirigeants car ils avaient bien compris
quelle était la source de leurs
malheurs.
Il faut dire et
répéter que ces terroristes, s'inspirant
de dévoiements divers de l'islam,
commettent des crimes odieux,
insoutenables, même pas bestiaux car les
animaux ne se comportent pas ainsi, dont
ils diffusent des images de propagande
de grande qualité grâce à des moyens
sophistiqués de communication que des
firmes occidentales leurs fournissent.
Leurs commanditaires sont multiples et
l'on assiste parfois à des combats entre
bandes rivales pour des raisons
conjoncturelles, mais prônant toujours
l'installation d'un régime de terreur
islamique à Damas. Grâce à la diplomatie
russe, seule capable de parler à tous
les protagonistes de la crise, Moscou
est parvenu à constituer une entente
fragile mais positive entre elle, l'Iran
et la Turquie dont les intérêts ne sont
pourtant pas tous identiques, mais qui a
permis des avancées substantielles au
cours de rencontres à Sotchi et Astana,
amenant Ankara à limiter son soutien à
certaines factions terroristes. Moscou
joue une partition délicate, cherchant à
donner des garanties de sécurité à
Israël, pays où environ un
million de ses ressortissants se sont
installés, c'est tout dire, et
poursuivant des échanges difficiles avec
les responsables américains, bien qu'il
sache parfaitement que ceux-ci font tout
pour empêcher la réussite de la solution
russe.
Mais les Américains
sont en perte d'influence localement.
Leurs trahisons successives des Kurdes,
comme leurs bombardements désastreux des
rives Est de l'Euphrate les rendent
maintenant indésirables même de la part
de leurs anciens alliés. La Turquie dont
la question kurde est une obsession
existentielle, malgré ses positions
souvent ambiguës a intérêt à conserver
l'appui russe que Moscou lui propose et
ne fait aucune confiance aux États-Unis.
Elle cherche, par différentes manœuvres,
à diviser les kurdes dans les trois
autres pays qui en abritent une
communauté importante mais ne peut que
constater que celles-ci préfèrent
majoritairement rester fidèles aux
gouvernements centraux de Damas, Bagdad
et Téhéran.
Je veux dire ici
aux Syriens qui m'écoutent que de
nombreux Français éduqués sont hostiles
à la politique d'ingérence et
d'alignement sur les objectifs odieux
des États-Unis. Ni le peuple français,
ni les peuples européens n'ont été
consultés sur cette politique. Quand on
voit les dommages humains considérables
de cette politique états-unienne contre
l'Iran, avec des sanctions portant sur
des produits de première nécessité comme
les médicaments; les dégâts économiques
pour les entreprises françaises et
européennes, il serait temps que la
France et l'Europe réalisent enfin que
les États-Unis ne sont plus un modèle ou
un allié fiable, mais un rival brutal
qu'aucun principe éthique n'arrête, pas
même les règles internationales
entérinées par l'ONU.
L'opinion publique
française me semble de plus en plus se
réveiller et dénoncer les excès
dramatiques d'un atlantisme devenu fou.
Il lui reste à convaincre ses
dirigeants, empêtrés dans des crises
internes et au sein de l'Union
Européenne, objets de pressions voire de
chantages, que leur propre intérêt est
de sortir de cette idéologie, car elle
est néfaste et pernicieuse.
Les sanctions
contre la Syrie doivent être supprimées
au plus vite, d'abord pour alléger les
souffrances du peuple, ensuite pour
préparer le retour inéluctable de cet
important pays arabe dans le concert des
nations où son rôle est attendu et se
précise de plus en plus. Sous la
conduite de ses dirigeants auréolés de
la victoire contre le terrorisme, le
peuple syrien pourra alors reconstruire
son pays détruit par le complot
occidental, avec toutes les qualités
qu'on lui connaît de courage et
d'ingéniosité, aidé par les alliés
puissants qui ne l'ont jamais abandonné
comme la Russie, la Chine, l'Iran et
bien d'autres.
(1) American Israël
Public Affairs Committee
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