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La cavale du général Khaled Nezzar
accusé de crimes de guerre
Gilles Munier
Mercredi 14 août 2019 Le général à la
retraite Khaled Nezzar, 81 ans, devrait
comparaitre devant un tribunal suisse
les 6 et 9 septembre, puis les 15 et 16
octobre prochain, pour être jugé pour
crimes de guerre. Répondra-t-il à la
convocation ?
En fuite en Espagne, Nezzar est
théoriquement menacé d’extradition
depuis que le Tribunal militaire de
Blida a émis contre lui, le 6 août
dernier, un mandat d’arrêt international
pour « complot et atteinte à l’ordre
public ». Mais, il n’a pas de raison
de s’inquiéter car une accusation
à caractère politique n’a aucune chance
d’être enregistrée par Interpol,
et de plus les pays de l’Union
Européenne n’extradent pas les fugitifs
risquant la peine de mort.
Tout laisse à
penser qu’Ahmed Gaïd Salah, chef
d’Etat-major de l’armée, s’est
débarrassé du boulet Nezzar en le
laissant filer à l’étranger. Ce
dernier s’est transformé en général de
série Z, plutôt ridicule, pour appeler à
la sédition dans l’ANP sur You
Tube. La vidéo l’assure d’encourir
vraiment la peine de mort à Alger, mais
surtout d’acquérir plus
rapidement le statut de réfugié
politique en Espagne.
L’affaire Nezzar
en Suisse (rappel)
Reconnaissant
l’ancien ministre de la Défense Khaled
Nezzar à la sortie d’une banque
genevoise en octobre 2011, un Algérien
porte immédiatement plainte pour l’avoir
fait emprisonner arbitrairement et
torturer entre 1992 et 1994, plainte
aussitôt soutenue per Trial
International, ONG qui lutte contre
l’impunité des crimes de guerre.
Interpellé le 20
octobre à l’hôtel Beau rivage (300 à
500 euros le nuit), Nezzar est
« entendu » par le Ministère
public de la Confédération (MPC). Il
est relâché le lendemain contre la
promesse de répondre aux convocations
qui lui seronnt adressées par la
justice. Ou plutôt - selon des
sources bien informées- grâce à une
intervention expresse menaçante du
régime Bouteflika.
Nota :
L’’ONG Trial
International (Track Umpinity Always)
appuie actuellement cinq citoyens
algériens torturés entre 1990 et 1994.
Elle accuse Khaled Nezzar - ancien
ministre de la Défense puis membre du
Haut Comité d’Etat (HCE), instance
dirigeant le pays après le coup
d’Etat contre le président Chadli
Bendjedid - d’avoir « ordonné,
autorisé et incité les agents de la
fonction militaire et publique à exercer
des actes de tortures, de commettre des
meurtres, des exécutions
extrajudiciaires, disparitions forcées
et autres actes constituant des
violations graves du droit international
humanitaire ».
Rentré en Algérie,
Nezzar contre-attaque.
Une pétition rédigée par l’un de ses
proches, est lancée en décembre 2011
pour demander aux « pouvoirs publics
algériens » d’intervenir pour mettre
un terme à la procédure engagée par la
justice helvétique.
En mai 2013,
apparemment assuré de retourner en
Algérie, Nezzar est auditionné par le
juge d’instruction du Tribunal fédéral
de Lausanne.. Il fanfaronne dans la
salle d’audience en se présentant comme
celui qui a sauvé le pays du
«terrorisme islamique », alors que
les accusations portées contre lui font
état de tortures, d’exécutions sommaires
et de disparitions. Le soutien bruyant
d’une vingtaine de supporters venus
d’Alger avec lui, installés dans un bar
situé devant le tribunal,
irrite le procureur.
En 2016, le nombre
d’Algériens portant plainte contre
Nezzar passe à cinq et les pressions du
régime d’Alger sur Genève se font de
plus en plus sentir. En mars, Muriel
Berset Kohen, ambassadrice de Suisse à
Alger -
informe les procureurs chargés du
dossier Nezzar que la poursuite de
l’enquête est «une bombe à
retardement en ce qui concerne les
relations bilatérales» entre la
Suisse et l’Algérie.
En 2017, Algérie
Watch
rapporte que le pouvoir algérien
demande à la Suisse d’abandonner les
poursuites contre Nezzar. A la manœuvre
à l’époque : Saïd Bouteflika
(Monsieur Frère) et Abdelmalek
Sellal, Premier ministre. Tous deux sont
aujourd’hui incarcérés sur ordre d’Ahmed
Gaïd Salah.
En janvier 2018 :
coup de théâtre ! Le général à la
retraite pavoise : la baisse drastique
des échanges commerciaux entre l’Algérie
et la Suisse oblige le procureur fédéral
à
classer l’affaire, arguant qu’il n’y
avait pas de conflit armé en Algérie
entre 1992 et 1994.
Les victimes font
évidemment appel.
Génocidaire
présumé
Marc Bonnant,
l’avocat de Nezzar, ne cache pas sa
satisfaction, mais il craint tout de
même que la décision soit cassée. Il a
raison : le Tribunal Pénal Fédéral
(TPF) annule
le classement de l’affaire six mois
plus tard et l’élargit même à la
question de crime contre l’humanité.
Depuis, Hirak
oblige, la justice suisse met les
bouchées doubles pour juger Nezzar. Son
avocat suisse Marc Bonnard, surnommé
« le Mozart du barreau », le
présentait comme le
« héros du peuple algérien ». Il
devrait lire les commentaires suscités
par les
tweets de son client et par son
appel sur You Tube. Nezzar y fait
figure de « génocidaire présumé »
et, avec les généraux Toufik et
Tartag, - anciens chefs de la
police politique – d’homme parmi les
plus haïs du peuple algérien.
A suivre…
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