Tendances de
l'Orient
Conférence de Genève:
La Russie met fin aux illusions
américaines
Ghaleb Kandil
Photo:
D.R.
Lundi 17 février 2014
Les paris américains de pousser la
Russie à exercer des pressions sur la
délégation syrienne à la conférence de
Genève II, pour l'amener à modifier ses
positions de principes, ont échoué. La
profonde déception de Washington est
apparue dans les comptes rendus de la
réunion tripartite, vendredi à Genève,
entre la Russie, les Etats-Unis et
Lakhdar Brahimi. Lors de cette
rencontre, le vice-ministre russe des
Affaires étrangères, Guennadi Gatilov, a
fait preuve d'une grande fermeté en
s'opposant aux Américains et à la
partialité de l'émissaire international.
Le déroulement des négociations de
Genève prouve l'absence de tout
compromis déjà convenu, comme l'on cru
certains milieux politiques et
diplomatiques dès le début de la
conférence. Il doit être clair à tous
les analystes que la relation entre la
Russie et l'Etat syrien est bâtie sur un
solide partenariat et une alliance, et
non pas sur le suivisme, comme c'est le
cas dans la relation entre les
oppositions syriennes et leurs maitres
américains, arabes et occidentaux.
Le dossier syrien est l'espace dans
lequel sont en train de se former les
nouvelles équations de partenariat entre
les deux pôles russe et américain. Dans
ses efforts visant à retrouver sa place
sur la scène internationale, la Russie
se base sur un solide roc, assuré par la
résistance de l'Etat syrien, la
progression de ses troupes sur le
terrain et un vaste soutien populaire
que même les pires ennemis de la Syrie
ne peuvent plus nier.
Dans ses efforts visant à construire ce
nouveau partenariat international, la
Russie agit d'égal à égal avec les
Occidentaux, même si au début de la
conférence, elle a fermé les yeux sur le
retrait de l'invitation adressée à
l'Iran et la limitation de la
représentation de l'opposition syrienne
à la seule délégation de la Coalition
nationale. Les Russes ont fait tomber,
vendredi, d'un seul coup, les illusions
américaines, en soutenant à fond la
position de la délégation
gouvernementale syrienne qui est
intransigeante dans les priorités: la
lutte contre le terrorisme doit passer
avant toute autre question politique,
car elle constitue le pilier de tout
futur accord inter-syrien.
Washington tente d'imposer le concept
développé par Richard Haass d'un
partenariat international... dirigé par
les Etats-Unis! C'est ce que les
Américains tentent de faire en Syrie, en
essayant d'orienter vers ce concept le
processus politique et diplomatique
engagé pour régler la crise dans ce
pays. Mais cette tentative va à
contre-courant des rapports de force sur
le terrain, qui permettent à l'Etat
syrien, qui tire sa force de son armée
et du soutien d'une grande partie de la
population, de placer le monde devant
deux alternatives: un compromis bâti sur
un partenariat dans la lutte contre le
terrorisme, appuyé par des résolutions
internationales fermes contre tous les
Etats impliqués dans le soutien aux
mouvements terroristes; ou la solution
militaire grâce aux propres moyens de
l'Etat syrien, qui imposerait un fait
accompli sur le terrain.
Grâce à ses renseignements et aux
sondages d'opinion qu'il a menés,
l'Occident sait pertinemment que la
popularité du président Bachar al-Assad
est inébranlable. Le fait que le
président syrien soit la cible des
Etats-Unis n'a fait que renforcer sa
popularité et son image de leader
populaire incarnant la volonté syrienne
de résister au terrorisme et de défendre
l'indépendance et la souveraineté
nationales.
La Russie a voulu adresser un message
fort de solidarité avec la Syrie, son
peuple et son leader, lequel s'est
attiré l'admiration des hommes libres de
ce monde avec sa volonté de résistance.
La position de Moscou a été aidée par
une gestion intelligente et courageuse
des négociations de Genève par la
délégation gouvernementale. Il n'est pas
un hasard que des manifestations de
soutien au président Assad, à la
délégation gouvernementale à Genève et à
l'armée arabe syrienne, aient lieu dans
les régions troubles de Syrie. Les
images des foules à Daraa, Deir Ezzor et
les autres villes du pays sont
éloquentes.
La Russie est convaincue qu'elle est la
cible du terrorisme takfiriste parrainé
par des pays évoluant dans l'orbite
américaine. Elle est aussi victime de
pressions en Ukraine et dans d'autres
régions, qui constituent sa zone
d'influence historique. Le ministre
russe des Affaires étrangères, Serguei
Lavrov, s'est dressé devant l'arrogance
américaine et face au projet de bouclier
anti-missile, qui constitue une menace
directe pour les équilibres mondiaux. Ce
projet est explicitement dirigé contre
la Russie et son allié iranien.
Cela signifie que la priorité de l'Etat
syrien de combattre le terrorisme est
aussi celle de défendre la Syrie, la
sécurité de ses alliés et la stabilité
du monde. Il est tout à fait naturel que
la position de la Russie à la conférence
de Genève soutienne cette priorité,
défendue par la délégation
gouvernementale syrienne, surtout que
l'Etat syrien a pris en compte, ces
trois dernières années, et à plus d'une
reprises, les intérêts de son allié
russe.
La relation entre la Russie et la Syrie
est bâtie sur une alliance organique et
stratégique, basée sur la crédibilité,
la compréhension et le respect mutuel.
La Syrie est un partenaire essentiel de
la Russie et non pas un pays vassal, à
l'instar de la relation entre les
Etats-Unis et leurs "alliés".
Pour toutes ces considérations,
l'illusion du compromis russo-américain
convenu d'avance est tombée vendredi à
Genève... et s'est évaporé avec elle les
plans américains de faire primer "le
transfert du pouvoir" sur la lutte
contre le terrorisme.
L'armée arabe syrienne se chargera, sur
le champ de bataille, de convaincre ceux
qui sont encore bercés par ces
illusions, que tous leurs paris sont
perdants.
Le sommaire des Tendances de l'Orient
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour
|