Syrie
Le rapport César ou
le marécage de la propagande
antisyrienne
François Belliot
Il s'agit,
selon toute apparence, d'une nouvelle
tentative de diaboliser
les autorités syriennes à un tournant
crucial de la guerre.
Dimanche 18 octobre 2015
Le 7 octobre a paru le livre de
Garance Le Caisne Opération César,
qui relate l’itinéraire d’un photographe
militaire syrien, dont le travail aurait
consisté jusqu’en août 2013 à prendre
des photos de cadavres d’opposants
supposés torturés par le « régime ». À
cette époque, il décide de fuir le pays,
emportant avec lui sur clé USB 55.000
photos des dépouilles de 11.000 Syriens.
Ce témoignage de César (et le livre
associé) a fait l’objet d’une couverture
médiatique massive faisant porter
l’accusation, comme d’habitude, sur
Bachar el-Assad et son régime. Il n’est
pas très difficile, toutefois, de
montrer qu’il s’agit là d’une énième
grossière opération de propagande.
Le rapport César sort au moment même
où la Russie entame une campagne de
frappes aériennes en Syrie contre les
groupes terroristes, en coordination au
sol avec l’armée syrienne, à la suite de
la décision unilatérale du gouvernement
français de mener des bombardements
cosmétiques dans l’est de la Syrie : à
point nommé, donc, pour rappeler à
l’opinion publique que Bachar el-Assad
et son régime demeurent infréquentables,
en diabolisant par ricochet la Russie.
Rappelons que ce ne serait pas la
première fois que les médias feraient la
promotion de dossiers sur
d’épouvantables massacres perpétrés par
des « rebelles » en les imputant au
pouvoir .
Ce rapport sent fortement le
réchauffé, voire le périmé. Il avait été
produit une première fois par le Conseil
national syrien (CNS) en janvier 2014
lors des pourparlers de Genève 2 dans le
but de mettre en difficulté la
délégation syrienne. Il est troublant
d’observer médias et politiques des pays
« amis de la Syrie » se saisir du même
rapport un an et demi après dans des
circonstances comparables.
Basé sur un unique témoignage,
anonyme de surcroît, ce rapport est
d’autant moins crédible qu’il existe
trop peu d’éléments dans ces photos
pouvant étayer précisément la
responsabilité du régime syrien. Il peut
tout aussi bien s’agir de victimes des
« rebelles » ou même de victimes
d’autres conflits, par exemple d’Irak ou
du Yémen.
La couverture médiatique massive de
ce rapport doit être comparée avec la
censure totale d’autres rapports
accablants pour les « rebelles ». On
songe, par exemple, au rapport de Human
Rights Watch d’octobre 2013 et à celui
des avocats turcs de janvier 2014. La
censure de ces rapports et des exactions
qui y sont rapportées jette
mécaniquement le doute sur le
spectaculaire mais fragile et incertain
rapport César.
D’ailleurs, les thuriféraires de ce
rapport seraient susceptibles d’être
juge et partie puisque ce sont tous, dès
l’origine, des adversaires déclarés des
autorités syriennes : le rapport a été
propulsé par un cabinet d’avocats
londoniens missionné par le Qatar. La
personnalité centrale de cette opération
est un membre du moribond Conseil
national syrien, Imadeddine Rachid. Les
révélations de César ont, en outre,
fourni matière, le 15 septembre dernier,
à un dépôt de plainte par le Quai
d’Orsay, pour crimes contre l’humanité,
par un certain Laurent Fabius qui, fin
2012, déclarait à propos des tueurs du
front Al-Nosra (lié à Al-Qaïda) qu’ils
« faisaient du bon boulot », ce
qui ne semble pas avoir choqué Garance
Le Caisne, qui s’est récemment
félicitée : « Laurent Fabius a été
très loin dans la critique de Bachar et
c’est une bonne chose. »
Il s’agit donc là, selon toute
apparence, d’une nouvelle tentative de
diaboliser les autorités syriennes à un
tournant crucial de la guerre.
Particulièrement mal ficelée, elle
témoigne de la fuite en avant des
politiques et médias français qui, pour
couvrir quatre années de mensonge
organisé, n’ont d’autre choix que de
s’enfoncer toujours davantage dans la
falsification des faits.
Publié sur
Boulevard Voltaire
Le
dossier Syrie
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