Al-Akhbar
Saudi Cables de Wikileaks : Le
régime saoudien
soutient le terrorisme
en Syrie depuis 2012
Elie Hanna
Jeudi 25 juin 2015
Dès 2012
l’Arabie saoudite s’est sérieusement
impliquée dans l’agression
quasi-universelle contre la Syrie,
considérant que 30 000 combattants bien
armés pouvaient mettre fin à la guerre
qui n’a toujours pas dit son nom, sans
attendre de savoir quel serait le
positionnement de la Russie. Elle a
soutenu les prétendus révolutionnaires
syriens en pilotant, avec la Turquie et
le Qatar, la formation d’un comité de
hauts gradés militaires faisant office
de trait d’union avec ladite Armée
Syrienne Libre [ASL] et ledit Conseil
National Syrien [CNS], considéré comme
l’unique représentant du peuple syrien
par le gouvernement français. Et, pour
parfaire son soutien militaire, elle a
travaillé à leur créer un environnement
favorable dans les régions frontalières
avec le Liban, l’Irak et la Jordanie [NdT].
En Juillet
2012, la Syrie a vécu les pires
violences :
-
le 16 Juillet, la
prétendue Armée Syrienne Libre déclarait
le début de son opération baptisée «
Volcan de Damas », transformant certains
quartiers de la capitale syrienne en
véritables zones de guerre.
-
le 18 Juillet, un
attentat à la bombe contre le siège de
la Sureté nationale, toujours à Damas,
faisait plusieurs victimes, dont le
ministre de la Défense Daoud Radjha, son
vice-ministre Assef Chawkat, le Général
Hassan Tourkmani, chargé de la direction
de la « Cellule de crise », et le
Général Hisham Ikhtiyar, chef de la
Sécurité nationale.
-
le 24 Juillet,
ladite « opposition syrienne »
envahissait Alep, et réussissait à
contrôler la moitié de la ville et une
grande partie de sa campagne.
Évènements
concomitants avec la nomination de
Bandar bin Sultan à la tête des services
du renseignement saoudien et sa mainmise
sur le « dossier syrien », alors que
Riyad affichait une ligne diplomatique
consistant à « arrêter le bain de sang »
et s’en tenait à son récit médiatique
d’une révolution pacifique en butte à un
régime lourdement armé ; le cabinet
royal présidé par le roi Abdullah bin
Abdul Aziz, en ce même mois de juillet
2012, allant jusqu’à déclarer « ses
regrets face à la grave escalade des
actes de violence du régime syrien »…
Mais voilà
que les dépêches confidentielles de la
diplomatie saoudienne, révélées
dernièrement par le site Wikileaks,
démontrent que l’Arabie saoudite s’est
sérieusement impliquée dans le soutien
et le financement de ladite « opposition
syrienne armée » dès les premiers mois
de la crise syrienne et que la
coopération turco-saoudienne a commencé
dès 2012, bien avant la visite du prince
héritier Mohammed bin Nayef à Ankara en
avril 2015, comme les médias le
prétendent.
SOUTENIR NÉCESSAIREMENT BURHAN
GHALIOUN À LA TÊTE
DU CNS
Ainsi, dans
une dépêche datée du 29 avril 2012,
signée par le directeur de l’agence des
renseignements saoudiens de l’époque,
Moukrine ben Abdelaziz, et par le
ministre des Affaires étrangères Saud
al-Fayçal, figurent les recommandations
suivantes :
« Concernant
l’importance d’agir pour aider
l'opposition syrienne et l'ASL, se
référer à ce qui a été convenu entre le
Royaume [l’Arabie saoudite], la Turquie
et le Qatar, pour la mise en place d'un
comité ou d’un groupe restreint à de
hauts responsables militaires qui
serviraient, en quelque sorte, de trait
d’union avec le CNS et l’ASL, en
insistant sur la nécessaire obligation
pour l’opposition de parler d’une même
voix et de s’unir sous la direction du
CNS, lequel a accepté d’unir ses membres
sous la direction de Burhan Ghalioun ;
car, actuellement, tout changement dans
sa direction entraînerait des divisions
dans les rangs de l'opposition ».
COLLABORER AVEC LA TURQUIE ET
PROFITER DU PLAN ANNAN
Ceci alors qu’une vingtaine de
jours plus tôt, le 8 Avril, Saud
al-Fayçal signait un document adressé au
« bienveillant regard » de son roi, dans
l’espoir de le convaincre de
l’opportunité d’une action coordonnée
avec la Turquie et d’une intensification
des contacts avec l’opposition
syrienne :
« Une action
coordonnée avec la Turquie est de la
plus haute importance. Malgré son propre
agenda concernant la Syrie et la région,
il serait opportun de profiter de son
positionnement pour augmenter la
pression sur la Syrie. Tout comme il est
très important
d'intensifier nos
contacts avec
l'opposition
syrienne et de l’exhorter à unir ses
rangs et à harmoniser ses positions
parce que cela
contribuerait à accélérer la
décomposition du régime et son
effondrement, et aussi de l’exhorter à
ne pas apparaître comme une entrave à la
mise en application du plan de
l’émissaire international Kofi Annan.
Car celui qui commencera par exécuter ce
plan c’est le régime syrien, par le
retrait de ses forces des villes le 10
courant et l’arrêt des meurtres le 12
suivant. Par conséquent, l’opposition ne
devrait pas être tenue pour responsable
de l’échec du plan [de la solution],
pour ne pas attirer le blâme sur
elle-même ».
ARMER DAVANTAGE LES PRÉTENDUS
RÉVOLUTIONNAIRES
En mai 2012,
les membres de la « Cellule de crise »
ayant échappé à une première tentative
d’assassinat par empoisonnement,
l’ambassadeur de l’Arabie saoudite à
Beyrouth donne son sentiment sur les
implications de l’évènement au ministère
saoudien des Affaires étrangères :
« Les rumeurs
ne confirment pas le décès des membres
de la Cellule de crise syrienne,
notamment le décès de Assef Chawkat,
beau-frère du Président Al-Assad.
En revanche,
elles confirment que d’autres objectifs
ont été atteints en empêchant ses
membres de se réunir au complet, ce qui
gêne les plans de la Direction syrienne
sur le terrain.
Il se dit
aussi que quantité d’armes sont arrivées
à l’ASL par la Turquie, dont environ 300
RPG avec 12.000 coups et 400
mitrailleuses Kalachnikov. Les
observateurs
estiment que la
quantité limitée d’armes dont dispose
l’ASL l’empêche de recruter
de nouveaux membres et
partisans, et que si elle disposait
d’une quantité suffisante, elle pourrait
mobiliser 30
000 combattants capables de
mettre fin à
la situation en Syrie,
sans attendre
les décisions de la
Russie dont nul ne sait ce qu’elle veut
et quels sont ses
intérêts immédiats.
Les observateurs ne manifestent
pas de regrets quant à la fin
du rôle
du CNS qui n’a aucune
efficacité sur le terrain. Sa fin
amènera à cesser de parler d’une
opposition syrienne invitée à dialoguer
avec le Président Al-Assad,
pour ne plus parler que de révolution
contre son régime ».
FINANCER DAVANTAGE L’ASL POUR
RECRUTER PLUS DE COMBATTANTS
Quant à la
défaite de l’ASL dans la « capitale de
la révolution syrienne », l’ambassadeur
saoudien à Beyrouth se désole, auprès de
son ministère des Affaires étrangères,
en ces termes :
« Gonfler la
résistance des révolutionnaires à Baba
Amr, dans la ville de Homs, a
amplifié la
victoire remportée
par les
forces du Président
Al-Assad et
pourrait mener à
renforcer
la confiance en soi
du régime [syrien],
ou donner le sentiment
du peu d’intérêt des appels à armer
l’opposition.
Ce qui est
arrivé a semé des craintes quant à
l’existence d'accords internationaux aux
dépens des orientations et des priorités
des pays arabes qui soutiennent les
révolutionnaires, même si cela a ravivé
les espoirs de pouvoir inciter toutes
les parties à rechercher sérieusement
une solution politique.
Les
observateurs estiment qu’il est
nécessaire de continuer à soutenir la
résistance armée syrienne : en assurant
des salaires élevés à chaque recrue qui
déserterait l’Armée régulière ; en
fournissant des armes équivalentes à
celles possédées par le régime [syrien];
en soutenant les pays voisins de la
Syrie , en particulier la Jordanie ; et
aussi, en accordant un soutien financier
aux populations habitant près des
frontières syriennes avec le Liban et
l’Irak, afin qu’elles contribuent à la
formation d'un environnement favorable à
la révolution syrienne.
À cet égard,
il a été remarqué que dans le nord de la
ville d’Akkar [Liban], limitrophe de la
Syrie, des représentants du Courant du
Futur [14 Mars] commencent à le
critiquer, parce qu’ils se sentent
incapables d’aider les rebelles syriens
de quelque façon que ce soit, étant
donné la pauvreté qu’ils endurent
eux-mêmes dans cette région.
Il serait
probablement utile que les États
favorables à la révolution syrienne,
accordent d’urgence leur soutien
financier à cette région et aux régions
similaires dans d'autres pays, pour
améliorer leurs conditions de vie ; ce
qui contribuerait à faciliter leur
liaison avec l'intérieur syrien, surtout
qu’elles supportent déjà le fardeau de
l’accueil d’un grand nombre de réfugiés
syriens ».
Elie Hanna
24/06/2015
Source : Al-Akhbar [Liban]
http://www.al-akhbar.com/node/236341
Article
traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Le sommaire de Mouna Alno-Nakhal
Le
dossier Syrie
Le
dossier Arabie saoudite
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