Syrie
Qu’attend donc le Pape, pour défendre le
Christ
souffrant en tous ces souffrants ?
Père Elias Zahlaoui

Père Elias Zahlaoui dans son bureau à
l’Eglise Notre Dame de Damas © Nadine
Zelhof
Samedi 9 mai 2020
Réponse à un ami d’Occident
Damas, 5 avril 2020
Mon ami,
En septembre 2018,
vous m’aviez offert en cadeau, le
nouveau livre du Pape François, ʺLe Nom
de Dieu est Miséricordeʺ, dans une
édition française, parue en 2016, chez
Robert Laffont.
Je savais que mes
lettres ouvertes au Pape François, ainsi
d’ailleurs qu’à ses deux Prédécesseurs,
devaient vous paraître quelque peu
injustifiées ou exagérées.
Pourtant je n’avais jamais reçu de
réponse directe de Rome.
Je me suis donc mis
à lire ce livre. Croyez bien que j’ai eu
soin de prendre tout mon temps, pour en
découvrir la teneur profonde. Hélas, ce
fut pour moi une profonde déception.
Dois-je vous
rappeler ce que j’avais spontanément
écrit au bas de la dernière page, à
l’encre rouge, dès que je l’avais
terminé ? Je vous l’avais
transcrit aussitôt, dans la lettre
électronique, que je vous avais adressée
alors.
Il m’en coûte
terriblement de reproduire aujourd’hui
ce texte. L’idée ne me serait jamais
venue, de devoir le divulguer un jour,
devant le grand public. Mais
aujourd’hui, je me dois de le faire.
Sachez bien que je le fais en prêtre
catholique. Car je suis prêtre, et
prêtre de 88 ans, et donc candidat à
tout instant, à quitter ce monde, et à
comparaître devant ce Jésus que j’ai
essayé d’aimer et de servir.
Cependant, je dois
d’abord préciser que le Pape François
finissait son livre par cette phrase :
« Souvenons-nous toujours des mots
de St Jean de la Croix : ʺAu
soir de notre vie, nous serons jugés sur
l’amour.ʺ ».
J’ai donc aussitôt
écrit d’une traite :
«Quel
amour ?!«Crier la
vérité de l’injustice, devenue pratique
universelle et quotidienne de TOUT
l’Occident, n’est-ce pas une façon plus
vraie et plus réaliste de vivre
l’amour ?
«Ce que j’ai
lu dans ce livre est digne d’un curé,
mais indigne d’un Pape.» (3/10/2018)
Cependant, il me
faut signaler que la première Encyclique
du Pape François, ʺEvangeliigaudiumʺ (La
joie de l’Evangile), publié en 2013,
avait paru constituer un engagement
audacieux et décisif, de l’Église
catholique, pour combattre enfin
l’injustice monstrueuse, dont sont
victimes les milliards, oui les
milliards de laissés-pour-compte, à
travers le monde. Cette Encyclique
me semblait jaillir de la veine même qui
avait dicté au Pape Jean-Paul II, ses
fameuses quatre-vingt-quatorze
déclarations de repentir. Elles
figurent toutes dans le fameux livre du
journaliste italien, Luigi Accatoli,
lui-même ami de Jean-Paul II, ʺQuand le
Pape demande pardonʺ. Il n’est pas
inutile de signaler que ce livre avait
paru en 1997, en trois éditions à la
fois : italienne, anglaise et française.
Pour ma part,
prêtre de l’Église Catholique, j’y avais
même vu l’expression tant attendue,
d’une volonté de libération définitive,
du mirage désastreux qu’a constitué pour
TOUTE l’Église, tant d’Orient que
d’Occident, l’alliance avec le pouvoir
politique, inaugurée depuis l’empereur
Constantin en 313.
Hélas, cette
ʺpercéeʺ théologique n’eut jusqu’à ce
jour, aucune suite. Pourtant
faut-il être aveugle, pour ne pas voir
que le monde entier ne fait, de jour en
jour, que basculer dans l’horreur de
guerres successives, savamment
programmées et diversifiées, dont celle,
hors norme, menée par 140 pays, les
États-Unis en tête, contre ma patrie, la
Syrie, depuis plus de neuf ans ?
En outre, pour ne
pas mésestimer l’intelligence supérieure
ʺhumanitaireʺ des États-Unis, je dois
signaler aussi l’embargo total imposé à
la Syrie, et prorogé même en ce temps
catastrophique du Coronavirus ! En
effet pour les américains qui adorent
respecter les lois de la Terre et du
Ciel, comme jamais peuple ne les a
respectées, la Syrie est un pays
ʺvoyouʺ !
On a beau me dire
que le Pape s’est fait modeste, simple,
proche des humbles et des réfugiés de
toutes sortes, qu’ʺonʺ lui présente.
J’ai beau lire aussi les titres
flamboyants de ses discours, ou de ceux
de ses représentants, publiés
régulièrement dans l’organe officiel du
Vatican, ʺL’Osservatore Romanoʺ !
Je ne puis ignorer le fait flagrant
qu’il n’a jamais condamné les fauteurs
de guerres, et les semeurs d’horreur, de
terreur, de faim et de mort à travers le
monde. Et pourtant, il ne peut pas
ne pas savoir, que ces puissances
veulent, même au prix d’une guerre
nucléaire, qu’elles préparent sans
arrêt, au cœur de l’Europe, et plus
particulièrement en Italie, même et
surtout en ce temps de Coronavirus, pour
imposer définitivement leur hégémonie
totale sur le monde !
Qu’attend-il ? Que
craint-il ?
Le Christ à sa
place, les aurait-Il ménagés, comme le
Pape François le fait régulièrement,
tout comme ses prédécesseurs ?
Pourtant il est le
Représentant de Jésus-Christ, et rien
d’autre que Son Représentant ! Quelle
dignité à nulle autre pareille !
Or le Christ s’est
totalement et définitivement IDENTIFIÉ
avec toute personne humaine, et surtout
avec tous ceux qui souffrent
d’injustice, de faim, de froid, de
maladie, bref d’atteintes à leur
dignité, leur liberté, leur vie ! Et
ceux-là, faut-il le rappeler, furent de
tout temps, et sont toujours, l’immense
majorité de l’humanité !
Qu’attend donc le
Pape, pour défendre le Christ souffrant
en tous ces souffrants ? N’est-il pas le
Représentant de Celui qui s’est laissé
crucifier pour avoir dit la vérité sur
Dieu et l’Homme ? Le Temple de
Jérusalem, dont le Christ, pourtant doux
et humble de cœur, a violemment chassé
les vendeurs, était-il plus saint que le
Temple de notre Terre ?
Oui, qu’attend-il
pour condamner au nom du Christ même,
les politiciens destructeurs à la fois,
de l’Humanité et du Monde ?
Ami,
Pour tout cela,
sachez que lors de cette soirée de
prière, sur la place St
Pierre, le 27 mars dernier,soirée sans
précédent dans l’histoire, je
m’attendais à un sursaut vraiment
prophétique, de la part du Pape ! Pour
une fois, le Pape se trouvait SEUL, face
à Dieu et à toute l’humanité ! Qui
aurait pu imaginer une telle scène ? Le
monde entier, terrifié par le
Coronavirus, avait les yeux braqués sur
lui. Pour la première fois dans
l’histoire, le Pape avait la chance,
sous les caméras de télévision du monde
entier, de se libérer de toute
contrainte, intérieure institutionnelle,
et extérieure politique, pour agir en
tant que Représentant du Christ, présent
réellement dans les milliards de
souffrants en quête de dignité.
Je m’attendais à ce
qu’il déclare urbi et orbi, vouloir
séparer à jamais, le passé de l’Église,
jalonné de tant de compromissions avec
les pouvoirs politiques et financiers,
d’un présent et d’un avenir qui se
veulent réellement et courageusement au
service de tous, et particulièrement des
souffrants. Un certain saint syrien, du
nom d’Irénée, évêque de Lyon, n’avait-il
pas déjà dit au deuxième siècle : ʺLa
gloire de Dieu, c’est l’homme vivantʺ ?
Oui, je m’attendais
naïvement à un tel sursaut !
Hélas, j’avoue que
ce moment de prière sur la Place St
Pierre, fut pour moi l’un des plus
tristes de l’histoire du christianisme.
Mon ami,
Dans une semaine,
nous fêtons la Résurrection du Christ.
Quand fêterons-nous
la Résurrection de Son Église ?
Père Elias Zahlaoui
Damas, ce 5/4/2020
Le père Elias
Zahlaoui, prêtre de Syrie à l’église
Notre-Dame de Damas, est connu de nos
lecteurs. Ses écrits exposent
inlassablement les mensonges relayés par
les médias occidentaux sur la Syrie,
plus grave, leur ignominieuse complicité
avec les groupes terroristes. Avancé en
âge, souffrant pour son peuple massacré
depuis 2011 par ces groupes extrémistes
[considérés à tort comme des « rebelles
pro démocratie » y compris par les
médias traditionnels suisses] Elias
Zahlaoui n’a jamais cessé depuis 2011
d’en appeler à revoir la politique
criminelle engagée, notamment en France,
par les présidents Sarkozy et Hollande
contre le peuple syrien. [Silvia
Cattori]
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