Algérie en phase
avec le mouvement du monde
Juillet 1962-juillet 2017 :
Qu'avons-nous réalisé de pérenne ?
Chems Eddine Chitour
Le Pr
Chems Eddine Chitour
Jeudi 6 juillet 2017
«
Il aura à apprendre, je sais, que les
hommes ne sont pas tous justes, ne sont
pas tous sincères. Mais enseignez-lui
aussi que pour chaque canaille il y a un
héros; que pour chaque politicien
égoïste, il y a un dirigeant dévoué...
Qu'il apprenne de bonne heure que les
tyrans sont les plus faciles à
flatter... Enseignez-lui, si vous
pouvez, les merveilles des livres...
Mais laissez-lui un peu de temps libre
pour considérer le mystère éternel des
oiseaux dans le ciel, des abeilles au
soleil, et des fleurs au flanc d'un
coteau vert. À l'école, enseignez-lui
qu'il est bien plus honorable d'échouer
que de tricher... Apprenez-lui à écouter
tous les hommes mais apprenez-lui aussi
à filtrer tout ce qu'il entend à travers
l'écran de la vérité, et à n' en retenir
que ce qui est bon Apprenez-lui toujours
à avoir une immense confiance en lui
même, parce que dès lors, il aura une
immense confiance envers l'Humanité.
C'est une grande exigence, mais voyez ce
que vous pouvez faire... Il est un si
bon garçon, mon fils ! »
Lettre d'Abraham Lincoln au
précepteur de son fils Cette merveilleuse recommandation
d'Abraham Lincoln est là pour nous
indiquer ce que devrait être l'éducation
qui permet l'enthousiasme. Je veux
marquer le 55e anniversaire de
l'indépendance de l'Algérie en parlant
de l'Education .
L’aura de
l’indépendance et ce qu’elle est devenue
Souvenons nous à
l’indépendance, nous étions tout feu
tout flamme La lune était à portée de
mains. Nous avions l’ambition de
soulever des montagnes Nous étions
libres ! La révolution de novembre
était un phare qui guidait les pays qui
luttaient pour leur indépendance . Il
n’était pas rare de croiser les
révolutionnaires algériens dans les rues
d’Alger ; Nelson Mandela ;à Samora
Machell, Les Blacks Panthers et
même l’icône Che Guevara montraient
au monde par leur présence que
l’Algérie « Mecque des
révolutionnaires » était véritablement
le maitre étalon de la Révolution des
peuples opprimés .
Qu’était elle
devenue cette indépendance attendue
pendant 132 ans ? Qu’avons-nous fait
pour être fidèles à nos martyrs ?Cette
indépendance s'est faite grâce au
sacrifice de tout un peuple et notamment
de ceux qui donnèrent leur vie et à qui
on ne rend pas un hommage particulier,
leur sacerdoce étant squatté par une
évanescente famille révolutionnaire qui
dicte la norme en squattant les idéaux
de novembre pour en faire une rente.
Notre pays est un
pays qui se cherche, qui peine à se
déployer, qui prend du retard, qui vit
sur ce qui reste d'une rente car elle
n'est pas celle de l'effort, de la
sueur, de la créativité L'Algérie de
2017 importe pratiquement tout, a perdu
son savoir-faire que l'on tente
difficilement de réhabiliter. Nous
n'avons plus la foi et pire nous n'avons
pas su la transmettre aux générations
montantes comme un moteur feu sacré qui
nous faisait espérer en l'avenir avec
100 fois moins de moyens actuellement
Qu'est-ce
qu'être indépendant ?
Qu'est-ce qu'être
indépendant ? quand on est dépendant à
80% pour sa nourriture, à 100% pour sa
construction, les transports, quand on
est dépendant à 100% pour ses achats de
tous les jours.
Qu’est ce qu’être
indépendant quand notre loi des finances
est indexée sur les convulsions
erratiques d’un baril de pétrole ?
Notre mimétisme de l'Occident ne
concerne que la dimension consommation
et non dans celle du travail, de
l'effort, de l'intelligence et de
l'endurance. L'Algérien ne pense pas, il
dépense, l'Algérien veut, sans effort,
tout et tout de suite.
Qu’est ce qu’être
indépendant quand on donne aux Algériens
des habitudes de consommation qui ne
sont pas le fruit de l’effort nous en
remettant par fatalisme aux
événements qui nous ballottent et qu’on
s’enfonce dans le farniente du « tidjara
chtara » " "le commerce c'est de la
débrouille" qui confirme l’atavisme qui
nous colle à la peau ; les Arabes n’ont
jamais été des bâtisseurs, mais des
jouisseurs qui n’inventent rien,
installés dans les temps morts et se
détruisant mutuellement sous les yeux
ravis d’un Occident qui dicte la
norme. Thomas Friedman du New York Times
avait raison de dire s’adressant
aux Arabes comparés à Israël :
« Au moment où vous vous cherchez des
poux dans la tête, Israël invente des
puces électroniques »
Qu'est-ce qu'être
indépendant quand notre système
éducatif est en miettes e que nous
allons plein gaz sur la scolastique et
les élèves se contentant de répéter
d'une façon convulsive des "vérités"
qui n'ont plus court et nous éloignent
de la science et de la modernité bien
comprise. Nous le voyons avec la casse
des dernières défenses immunitaires que
sont les formations technologiques
(ingéniorat)?
Quoi qu´on dise, et
sans faire dans la théorie du complot,
les regards sont braqués sur l´Algérie.
Braises mal éteintes du régionalisme,
l'échec du vivre ensemble, l'appât du
gain et pour notre malheur, l'étendue du
pays, sa richesse en hydrocarbures et en
terres agricoles, sont autant de
critères de vulnérabilité. On ne nous
laissera pas tranquilles, un pays avec
sa profondeur stratégique, son potentiel
énergétique, ses différents climats...
son potentiel archéologique et
touristique.
Le monde avance
avec une vitesse V. Pour avoir une idée
de ce que c'est que le pouvoir de
l'intelligence, nous devons prendre
exemple sur les meilleurs. En 2011,
l'Ocde a classé Israël, le pays, au
niveau d'éducation le plus élevé au
monde, après le Canada. Toute évolution
réelle est indexée sur le savoir ou la
connaissance. En 1984, Steve Jobs (le
patron de Microsoft) affirme «le
logiciel, c'est le nouveau baril de
pétrole». La connaissance mondiale
double environ tous les 9 ans.
Il m'est de ce
fait apparu utile de consacrer ce 55e
anniversaire à la situation délicate que
vit le système éducatif. S'il est avéré
que la gestion économique est discutable
malgré une rente cumulée de 700
milliards de dollars, la grande erreur
des gouvernants depuis l'indépendance
est de ne pas s'être occupés du système
éducatif qui n'a jamais pu se redresser.
L'Ecole étant devenu le creuset des
luttes idéologiques. D'un côté les
artisans de l'arabisation à marche
forcée au nom d'une langue liturgique et
d'un arrimage à une métropole moyen
orientale qui ne nous a ramené que des
avanies. De l'autre les nostalgiques de
ce qu'ils appellent la modernité et qui
pense que notre bonheur est d’être dans
le giron de la Francafrique !!
Le combat
idéologique concernant l'école
avait connu son acmé avec Lacheraf qui a
voulu laver les écuries d'Augias. Il
perdit son pari et nous avons eu l'école
fondamentale puis les différents
ministères surtout pendant la décennie
noire où les enseignants ont payé le
prix fort le grand djihad- mais ne sont
toujours pas reconnus comme des vrais
moudjahed car ils ont combattu
l'ignorance et y ont laissé leur vie-
Ce fut ensuite la
mise en place d'une commission de
réforme qui avait donné l'illusion que
nous avions divorcé avec les vieux
démons. Hélas, nous n'avons jamais vu la
version finale. Depuis le système
éducatif poursuit sa descente aux
enfers, abandonné des pouvoirs publics
qui s'en souviennent chaque année en
septembre, pour que la rentrée ait lieu
sans vagues.
Etat actuel des
lieux du système éducatif
Près de
10,5 millions d'élèves 18.826 écoles
primaires, 4.427 collèges, 2.370 lycées,
97 universités. Voilà pour le
quantitatif pour un budget de 1050
milliards de DA soit une moyenne de
100.000 DA soit encore 8 à 10 fois moins
par comparaison avec les pays européens
(8000 à 13.000 euros). Plus de 90% de ce
budget sont constitués par une masse
salariale.
Dans un monde de la
technologie suprême, les sciences et le
technologie ont été exclus par
bêtise et paresse. Il est plus simple de
conditionner des cohortes de jeunes en
les endoctrinant par une scolastique qui
exclut la rigueur scientifique d’autant
que par paresse, on va toujours vers la
facilité. Les laboratoires des travaux
pratiques ont été graduellement exclus
et les élèves se trouvent orientés
vers un fourre tout : le baccalauréat
sciences qui n’a de sciences que le
nom . Toutes les matières se
valent ; Il n’y a pas de singularité
mettant en valeur les sciences avec un
fort coefficient. Résultat des courses
les élèves en science peuvent réussir
avec des faibles notes en sciences
expérimentales mathématiques, physique
et chimie . il suffit pour cela qu’ils
ait des notes généreuses en arabe, en
anglais, en français en « sciences
islamiques » en histoire et en sport…
En fait, problème
des filières scientifiques c'est
qu'elles sont engluées dans un magma
d'une douzaine de matières .En Algérie
on peut réussir au bac science avec de
faibles notes en math et en physique
chimie biologie. . Il y a à peine 2 %
de candidats au bac math et math
technique, les bacs lettres et sciences
se partagent le reste. En Iran 25% des
étudiants vont dans les disciplines
technologiques ce chiffre est de 35 % en
Allemagne !
Cette filière
mathématique ainsi que celle
mathématiques techniques sont condamnés
à court terme. Nous aurons alors atteint
le fond : Plus d’esprit critique qui
favorise la raison mais abrutissement
dont on voit les preuves tout les jours
avec l'abandon d'un certain nombre
d'acquis qui faisait que les Algériens,
appelés à tort les Arabes
d'Occident,avaient une façon moderne
d'appréhender l'avenir. Le constat est
que le curseur est totalement du côté
d'un retour vers l'obscurantisme dont
nous pensions avoir eu raison dans le
dernier combat pendant la décennie
rouge.
Ce cap vers
l'irtationnel est en partie décrit par
une productivité faible mais aussi une
disparition des disciplines
scientifiques . Ainsi une enquête
réalisée en 2013 montre que sur 1.000
élèves au primaire, 657 arrivent en
cinquième année primaire, 550 en
première année d'enseignement moyen, 397
en quatrième année d'enseignement moyen,
150 en première année secondaire et 41
élèves seulement, soit 4% décrochent
leur Bac sans redoublement. Les 959
élèves restants font l'objet de
redoublement, d'abandon ou d'échec
scolaire. En clair la productivité du
système est dérisoire
En Europe en
moyenne c'est 80 % d'une classe d'âge .
Ces 4% qui arrivent à l'université
réussissent dans le meilleur des cas à
peine 50 % pour aller enrichir la
cohorte des chômeurs et une bonne partie
des cursus ne sont pas en phase avec la
réalité sociale. Quant à la formation
professionnelle elle gère le quotidien
et n'a jamais été à l'honneur, les
élèves s'y orientant par l'échec.
Quatre millions de
diplômés ont été formés par l'université
algérienne en cinquante ans d'existence
les bacheliers que nous recevons ne
maîtrisent aucune langue, n'ont pas lu
un livre dans leur vie, ne savent pas
rédiger une lettre et de plus les
disciplines scientifiques ont régressé
dangereusement qualitativement et
quantitativement. Enfin, un constat
grave, il y a un total clivage entre les
trois sous-systèmes ; chacun s'occupe de
sa chapelle et chacun est jaloux de ses
prérogatives. Il fut une époque
lointaine du fait qu’en théorie le
baccalauréat étant le premier diplômes
universitaire, les présidents de jury du
baccalauréat étaient des enseignants
du supérieur qui devaient contribuer à
arrêter les dérives populistes des
scores de réussite brejnéviens au bac.
Un bac pour les retardataires et les
absents ?
Dans un
réquisitoire sans concession le
professeur Abdelkader Khelil décrit la
malvie du système éducatif et sa
descente aux enfers du fait de la triche
comme sport national Il écrit : Tout le
monde doit savoir que « zéro fuite » est
une utopie parce que notre société
traîne derrière elle un boulet, celui de
la carence criarde en matière de civisme
! Il faut aussi relever la mobilisation
sans précédent des forces sécuritaires
(…) Oui ! Force est de constater qu'on
triche assez souvent pour devenir «
représentants du peuple » sous l'habit
usurpé de député ou de sénateur, voire
ministre par défaut même de très, très
courte durée ! ! Qu'on triche avec le
fisc en ne payant jamais d'impôts …Alors
! Pourquoi s'étonner de la triche
lorsqu'elle provient de nos jeunes aux
examens, quand leurs ainés, apprentis
grands tricheurs sont là pour leur
indiquer la voie à suivre? (…) Triste
société que celle qui comme la nôtre
fait du tricheur d'aujourd'hui : le
cadre de la « nation estropiée » de
demain ! Et dire qu'autrefois, la triche
se limitait juste à d'insignifiants
pense-bêtes introduits dans les
chaussettes, collés sur l'avant-bras ou
cachés dans des stylos à plume… ! (…)»
(1)
A toutes les
avanies notamment le feuilleton de la �’atba
( le seuil) le sujet du bac étant indexé
sur le niveau d'avancement du plus
faible lycée . Depuis quelques années la
triche est devenue au fil des ans une
performance. Cette année on est au
chevet des tricheurs et des lèves tard.
Un scoop ! La session exceptionnelle
organisée au profit de 104 000 candidats
retardataires aura lieu du 13 au 18
juillet avec une pause le vendredi 14
juillet C'est de mon point de vue, le
signe d'une dégénérescence de la
symbolique du bac. A la demande de
parents d'élèves dont les enfants sont
arrivés, on remet en marche une machine
lourde à gérer, que celle d'organiser un
nouveau bac.
Qu'on le fasse
pour 1000, ou 100.000, le scénario est
le même, il faut mettre en place des
sujets qui ont demandé 3 mois pour la
session normale et trois semaines pour
le bac des retardataires. Cette décision
ne repose pas sur un argumentaire solide
Pourquoi ne pas étendre la session aux
candidats recalés de la session de juin.
Comment reconnaître un retardataire d'un
absent ? En fait on s'achemine vers une
deuxième session pour les candidats
absents. Pour l'équilibre des chances
des syndicats ont proposé une deuxième
session pour tous ceux qui ont échoué en
juin ! Cela fera alors une jurisprudence
l'année prochaine si le bac est toujours
maintenu, les élèves demanderont deux
sessions C'est une réaction en chaine
qui va chambouler tout de proche en
proche l'enseignement supérieur dont le
calendrier des inscriptions donc l'année
universitaire va démarrer une fois de
plus bien après le mois de septembre.
En définitive,
avons-nous une école qui fait réussir?
Une université vue comme un ascenseur
social? Rien de tout cela! L'école a été
qualitativement un échec. Nous avons
beaucoup d'étudiants mais que valent ils
? La tentation de faciliter qui consiste
à implanter une université dans chaque
wilaya est une erreur ! Une université
cela ne se décrète pas ! Il faut
respecter les critères universels en
terme de niveau du corps enseignant, de
disponibilité de moyens pédagogiques,
laboratoires, équipements, bibliothèques
mais aussi aspect tout aussi importants
d'espaces de détentes pour le sport. Le
niveau est déplorable, nous le voyons
aussi dans le supérieur qui reçoit ces
bacheliers mal formés et qui seront par
la force des choses mal pris en charge
aggravant ainsi définitivement le gap
par rapport aux normes de compétences
universelles
Que doit on faire : Les mesures de
bon sens ?
Le problème
est le suivant. Devons nous condamner
définitivement le savoir en Algérie en
tournant le dos à la science et à la
technologie ? L'échec du système
éducatif est de faire dans la facilité,
l'absence du raisonnement logique et en
définitive la condamnation des jeunes à
ne jamais réfléchir par eux-mêmes mais
être livrés pieds et poings liés à des
discours rétrogrades qui gangrènent le
corps social . Aucun pays ne peut se
passer d'une élite, même si ce mot sent
encore le soufre en Algérie du fait
d'une vision égalitariste L'Ecole
algérienne est à une croisée de chemins.
L'éducation a besoin de se remettre en
cause se moderniser, recycler ses
enseignants..
Doit on continuer
le parcoeurisme un héritage colonial
avec le Bac , ou privilégier le
raisonnement ? Il est temps de revoir
cela. Faut-il concevoir des épreuves
jugeant plus le raisonnement, la
logique, l'esprit de synthèse que le
parcoeurisme et la restitution de cours
? Andreas Schleicher directeur de
l'éducation et des compétences, chargé
de la politique de l'éducation, au sein
de l'OCDE nous dit : « Le monde moderne
se moque bien de ce que vous savez. Il
s'intéresse à ce que vous savez en
faire.
Il a besoin de gens créatifs, capables
de croiser les sujets. Mieux encore à
force de vouloir caporaliser l'élève
dans un enseignement sans imagination on
atrophie son enthousiasme à l'invention
tout en jouant… Il nous faut former le
maitre capable de faire réussir l'élève
en l'instruisant par le jeu.
De mon point de
vue, du fait que le système éducatif est
un système à temps de réponse long, il
ne faut pas se leurrer, il nous faut
tous ensemble y aller graduellement avec
un maitre-mot : comment améliorer l'acte
pédagogique qui se décline différemment
selon les paliers de l'école et à
l'université. L'idée est de partir de
l'embouchure pas de la source.
Graduellement on remonte à la source
pour savoir quels sont les considérants
à mettre en place, en amont d'abord,
dans le secondaire.
La formation
professionnelle doit suivre les besoins
réels de l'économie nationale et au
moins doubler ses capacités l'école ne
fait plus rêver. Il nous faut la
réhabiliter. Notre système éducatif
devra être la priorité des priorités Ce
n'est pas du jour au lendemain que nous
aurons un système parfait. Nous devons
revoir les programmes pédagogiques dans
l'éducation où on peut penser dès à
présent à un baccalauréat du
développement durable dont les
prolongements seront pris en charge dans
les métiers aussi bien à la formation
professionnelle que dans l'enseignement
supérieur.
Par ailleurs, dans un monde où les
langues sont des vecteurs identitaires
de civilisation, de consommation et
d'accès à la technologie : un postulat
de base est de former de parfaits
bilingues ou trilingue Aller vers les
langues du futur sur les 20 prochaines
années est une obligation quatre langues
seront dominantes, l'anglais, le
chinois, l'allemand et le russe. Doit-on
enseigner ces matières scientifiques en
français ou faire le saut qualitatif qui
nous permet de sauter une étape qui se
posera tôt ou tard aller sans état d'âme
en allant même d'une façon progressive
vers l'anglais scientifique
Les lycées
d'excellence et les olympiades de
mathématiques
Une élite sélectionnée sur la base des
mathématiques ne doit pas souffrir de
retard. Il nous faut mettre en place dès
à présent une vingtaine de lycées
d'excellence. Les effets d'annonce
actuels reposent sur du vent. Ce n'est
pas comme cela qu'on sélectionne les
meilleurs. Il faut avoir commencé et
s'inscrire dans la durée pour repérer
sur les 25.000 établissements, les
génies en herbe Les mathématiques, les
sciences devraient avoir plus de la
moitié (60%) dans les bacs scientifiques
et au moins 40% dans les autres
disciplines. Les enseignants doivent
détecter les petits génies dès la
sixième et graduellement les encourager
en mettant à leur disposition un lycée
spécifique avec toutes les commodités,
une bourse confortable et surtout en
leur affectant les meilleurs
enseignants. Cela ne peut se faire que
si on est convaincu que c'est une cause
nationale qui doit mobiliser tout le
système éducatif, notamment le supérieur
par grande discipline (CPN)
mathématiques, physique-chimie,
informatique, sciences du vivant,
sciences naturelles. Favoriser le
vivre-ensemble avec les échanges
inter-wilayas, inter-lycées, inter-
universités, il est nécessaire de
spécialiser les universités pour éviter
la consanguinité régionale synonyme
d'effritement identitaire, faire ce que
fait le service national et ce que
devrait faire le ministre de la jeunesse
responsable de 75% de la population,
Pour un diplôme
de fin d'études secondaires qui remplace
le bac
Où allons
nous avec des cohortes au bac qui vont
dépasser le million ? Par comparaison
nous avons plus de candidats que la
France. Peut on continuer ainsi à
mobiliser les forces de police de
gendarmerie voire de l'armée pour un
examen dont la finalité est discutable ?
Dans la grande majorité des pays, le
baccalauréat est un diplôme de fin
d'études secondaires, l'entrée à
l'université se fait sur concours en
fonction des possibilités d'accueil et
surtout ce ne sont que les meilleurs qui
rentrent. On ne sait pas où cela va
mener; à cette cadence d'inscription
nous aurons les 2 millions d'étudiants
bien avant 2020. Un pays comme la France
ou l'Iran ont environ 2,5 millions
d'étudiants. Le niveau de ces étudiants
est sans commune mesure avec celui des
étudiants algériens.
En Algérie, pour cette année, plus de
760 000 candidats ont passé le
baccalauréat. L'organisation du
baccalauréat exige de par sa
lourdeur ,son cout et la mobilisation de
dizaines de milliers de personnes des
dispositions de plus en plus difficiles
à mettre en place Aura-t-on, dans
le futur les moyens de le faire ? Est-il
nécessaire de le faire en dehors de la
dimension symbolique ? On ne sait pas où
cela va mener ; à cette cadence
d'inscriptions nous aurons 1 million de
candidats au bac. Peut on mobiliser
chaque année 600 à 700 milliards pour un
résultat auquel on peut aboutir
autrement les 2 millions d'étudiants
bien avant 2020. Un pays comme l'Iran ou
la France ont environ 2,5 millions
d'étudiants. C'est une évidence : l'Etat
ne pourra pas prendre en charge tous les
étudiants uniquement à l'université.
Dans la grande
majorité des pays, il existe un diplôme
de fin d'études secondaires, l'entrée à
l'université se fait sur concours en
fonction des possibilités d'accueil de
chaque filière étant entendu qu'on offre
une place à chacun en fonction de ses
aptitudes pédagogiques Le diplôme de fin
d'études secondaires (DFES) qui
remplacerait le bac ne fait que
consacrer la situation actuelle d'entrée
par concours en utilisant comme critère
les notes du bac. Cela permettrait de
faire en fin le programme jusqu'au 30
juin et non pas un arrêt en fin avril !
La mise en place de
cette nouvelle vision du bac transformé
en DFES pourrait être annoncée pour être
appliquée aux nouvelles cohortes qui
rentrent dans le secondaire en septembre
2020. Un mixage des notes de l'année
avec le bac blanc organisé localement
permettrait d'aboutir à des lauréats qui
ont clôturer d'une façon satisfaisante
le secondaire. L'inscription à
l'université répondra à d'autres
critères spécifiques à l'université
généralement un concours d'entrée. Le
candidat pouvant se présenter à
plusieurs concours Ajoutons que ce sont
des centaines de milliards qui seront
économisés en plus de toute la
mobilisation stressante qui sera
évitée.
Que doit faire
l'université ?
Il nous
faut un cap et une vision du futur.
Partout dans le monde, l'université
traditionnelle «L'université de papa»
est morte. L'université du nouveau
siècle est une entreprise du savoir où
seuls les plus compétents, quelles que
soient leurs origines réussiront et
seront rétribués à la juste mesure de
leurs efforts. Un Etat stratège doit
donner sa chance à toutes et à tous,
mais il est évident que chacun
s'arrêtera là où ses capacités peuvent
le faire aboutir. Il nous faut avoir le
courage la patience et la détermination
de revoir les programmes pédagogiques
pour les rendre crédibles et en
phase avec la réalité du monde.
Cependant, il est très important de ne
pas sacrifier a la mode des
spécialités dans le vent mais sans
lendemain notamment dans les disciplines
économiques financières, il me parait
important que l’étudiant acquière les
fondamentaux du socle de base fait à la
fois d’humanités bien enseignées mais
aussi de disciplines scientifiques
ouvertes sur l’universel qui feront de
l’étudiant un citoyen responsable qui
appréhende le monde à travers sa propre
grille et non pas à travers celle
des autres
Dans le même ordre,
nous devons donner un destin
technologique à ce pays et il est
scandaleux que les formations
d'ingénieurs aient été supprimée dans
les universités au profit d'un LMD dont
on découvre graduellement les errements
et les limites. Il est nécessaire de
réhabiliter les formations
technologiques d'une façon franche On
prête à la tutelle l'intention de
supprimer la publication scientifique et
pis encore l'inscription au doctorat
serait permise aux titulaires d'un
master. Nous aurons de ce fait des
bataillons de docteurs. Partout dans le
monde, l'université traditionnelle,
«l'université de papa», a vécu.
«L'université du nouveau siècle est une
entreprise du savoir où seuls les plus
compétents, quelles que soient leurs
origines réussiront et seront rétribués
à la juste mesure de leurs efforts.»
Aucun pays au monde ne peut avancer
technologiquement s'il ne forme pas
d'ingénieurs et de techniciens.
L'Algérie a autant besoin d'ouvriers, de
techniciens, de maçons, de plombiers que
d'ingénieurs ou de médecins. Des
passerelles rigoureuses doivent être
mises en place pour évoluer ; un
technicien peut devenir ingénieur s'il
en a les aptitudes.
Quelques soient la santé financière
du pays il est important d'avoir une
élite du neurones.
Ce n'est ni
celle de la naissance ni celle de
l'argent. Dans les grandes disciplines
(Sciences exactes, Métiers de
l'ingénieur, Droit, Médecine Economie.
Nous devons mettre en place des
institutions à taille humaines de
formation et de recherche environ 50.000
personnes soit 10 à 15000 diplômés de
top niveau qui sont là pour garantir la
pérennité de l'Etat. Pour cela les
programmes des écoles du moyen et des
lycées en amont devraient poser les
prémices de ces métiers.
A titre d'exemple,
dans le domaine du développement humain
durable, c'est à l'école que l'on
formera l'éco-citoyen de demain. En
terminale, la compétence acquise dans ce
diplôme de fin d'études secondaires
(DFES) qui remplacerait le bac) serait
le préalable aux formations au
développement humain durable.
Les dérives constatées plus haut ont des
solutions qui ne peuvent être mises que
par une étroite coordination. Il y a une
nécessité absolue d'une coordination des
trois sous-systèmes. Quand on enseigne
les mathématiques, cela devrait aller de
l'école primaire vers l'agrégation de
mathématiques dans un continuum global
mis en œuvre par le comité pédagogique
de mathématiques De plus il devrait y
avoir une collaboration pour une
synergie des moyens. Dans l’achat et
l’intégration des équipements
pédagogiques
L'éthique à
réhabiliter
700 000
enseignants font du mieux qu'ils
peuvent dans l'anonymat le plus strict.
Force est de constater que nous ne
savons pas récompenser l'effort et le
mérite. Tout le monde est logé à la même
enseigne. Ce qui stérilise toute
initiative pour l'amélioration de l'acte
pédagogique qui n'a pas été jusqu'à
présent la priorité. le pays donne
l'impression d'avancer sans son école et
sans son université.
Le système éducatif
est gangrené par la corruption. De plus
l'enseignant est livré à lui-même car il
n'y a pas de sanction des élèves et
étudiants contrevenants. La mort
d'enseignant est un signe inquiétant et
l'Etat doit sévir avec la plus extrême
rigueur. En plus de ces chasseurs de
primes, il y a le plagiat, il a la
triche au bac. La corruption est encore
plus grave, puisqu'il s'agit de former
l'élite de demain. Il semble que la
fraude soit devenue un sport national en
Algérie. De plus les enseignants de
plus en plus vulnérables coincés entre
une administration qui souvent leur
demande de tricher en leur âme et
conscience, des étudiants de plus en
plus libres de s'ingérer par la force
dans le système de notation, par la
force des choses, ne voulant pas avoir
d'histoires cèdent à leurs corps
défendant car ils sont seuls face aux
problèmes. De compromis en compromis on
arrive à la compromission voire à une
mercuriale des notes qui peuvent être
achetées de différentes façons ( menace,
et vente pure et simple au plus offrant)
. Que devient alors le niveau des
diplômés et que peut on faire de ces
diplômés au rabais ?
Le scandale des fuites au bac nous
interpelle. Rien ne peut se faire sans
éthique. C'est peut-être le premier
chantier qu'il faut lancer pour
réhabiliter le système éducatif. La
charte de l'éthique aurait pu si elle
était appliquée servir de garde-fou. Il
est nécessaire de la remettre sur rail
dans les trois piliers du système
éducatif car elle fixe les droits et les
devoirs de chaque acteur de la
communauté de l'éducation, et de
l'enseignement; les enseignants, les
étudiants et l'Administration qui ne
doit pas outrepasser ses prérogatives
Il faut
réhabiliter l'effort et le mérite en
séparant le bon grain de l'ivraie, les
besogneux des tricheurs, coupables
doublement de compromettre l'avenir des
générations futures. Une charte de
l'éthique bien expliquée aux acteurs de
la communauté du système éducatif
(enseignants, administratifs, élèves
étudiants) emportera l'adhésion du plus
grand nombre. Les chefs d'établissement
ne devraient pas l’être à vie ce sont
des enseignants qui sont là pour une
mandature limitée. Ils doivent
s'interdire d'interférer dans le
pédagogique et résister à la tentation
du score, du chiffre, de plaire. L'acte
pédagogique ne concerne que les
enseignants..
Le vivre ensemble plus que jamais
nécessaire
Après avoir
parlé du système éducatif et des voies
et moyens de redresser les dérives
criardes, rien ne peut se faire sans une
société apaisée qui conjure les démons
du régionalisme et la chape de plomb
d'une idéologie à des années lumières de
notre islam maghrébin qui est en train
de travailler le corps social. Nous
devons prôner avant tout le vivre
ensemble Nous devons avec un consensus
de la société pour militer pour une
école tournée vers l'avenir, une école
protégée des convulsions politiques et
idéologiques. L'Ecole est le bien
commun, nous devons veiller sur
l'éducation de nos enfants. L'école
ouverte, fascinée par l'avenir, avec une
identité plurielle et assumée, sans
faire de la langue arabe et de la
religion un fonds de commerce.
En son temps, le service national
participait à l'édification du pays en
faisant que les Algériens se connaissent
véritablement du Nord au Sud d'Est en
Ouest. Qu'avons-nous fait de tout cela ?
Nous avons un lycée par grande ville une
université par wilaya. Le jeune nait,
fait ses études travaille en ne sortant
pratiquement pas de sa ville.
La grande erreur
est de permettre à chaque université,
certaines sans compétence aucune,
d'ouvrir toutes les spécialités au lieu
de les répartir judicieusement. Le
ministère de la jeunesse en charge de
75% de la population a - t-il les moyens
de sa politique? Peut il mobiliser
sainement la jeunesse dans des activités
sportives intellectuelles, et ludiques
autrement que l'Internet dévoyé ou de
s'occuper d'une équipe off shore? A-t-on
vu le sport à l'école et à l'université,
l'organisation d'un championnat inter
-wilaya, région, lycée, national? A-t-on
vu des compétitions interwilaya,
inter-lycée ? Le ministère de la
Jeunesse devrait être avec le système
éducatif la cheville ouvrière de la
mobilisation de la jeunesse s'il y a un
cap.
La situation du pays impose plus que
jamais, un consensus politique sur les
grands défis qui seront là quels que
soient les pouvoirs en place, mais qui
risquent, s'ils ne sont pas pris en
charge, rapidement d'être de plus en
plus difficiles à gérer. Le meilleur
hommage que l'on puisse rendre à nos
martyrs est d'aller vers la science du
parler vrai et d'inciter les jeunes à
l'effort, à l'endurance et à la
performance L'Algérie du million de
martyrs vaut mieux que cela. En son
temps, la Révolution de Novembre fut à
la fois un miracle et une belle
réussite.
Comment faire
émerger de nouveaux révolutionnaires
capables d'impulser cette Révolution qui
fait son Graal de l'économie de la
connaissance ; un autre djihad aussi
important qui permettra à l'Algérie de
garder son rang dans un monde de plus en
plus crisique où nous pourrons survivre
que scientifiquement et que ne comptant
que sur nous même en tant que créateurs
de richesse. Cela ne pourra se faire
,outre le consensus qu'avec le parler
vrai.
Je plaide pour une école qui joue le
rôle d'ascenseur social, qui donne la
chance à tout le monde et qui ne laisse
personne sur le bord de la route. Je
plaide pour une Algérie du futur,
fascinée par l'avenir. Il nous
faut changer de paradigme. Ne pas miser
sur la rente. C'est à cette seule
condition que nous mobiliserons les
Algériennes et les Algériens qui se
sentiront alors acteurs de leur destin
donnant ce faisant la pleine mesure de
leurs talents Bonne fête aux Algériennes
et aux Algériens qui ont encore et
malgré tout l'Algérie au cœur.
Amen
Pr. Chems Eddine
Chitour *
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5246796
*Professeur - Ecole
Polytechnique Alger
Publié le 7 juillet 2017 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
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