Les enjeux
de la vie internationale
Gagnants ?
Charles Enderlin
© Charles
Enderlin
Vendredi 29 août 2014
En général, les guerres, de nos
jours, ne se terminent plus par un KO de
l’adversaire. Les États Unis, ont ils
remporté la victoire en Irak ? En
Afghanistan ? Nul ne peut donc
déterminer dés à présent le vainqueur du
conflit à Gaza. Pour cela, il faudra
certainement attendre des mois, sinon
des années.
Israël avait annoncé qu’il n’avait
pas l’intention de renverser le Hamas ou
de le vaincre, mais seulement de
l’affaiblir militairement. D’après ce
que l’on sait, c’est fait. Les tunnels
d’attaque, les galeries et les bunkers
souterrains dans lesquels l’organisation
islamique a investi des dizaines, peut
être des centaines, de millions de
dollars, ont été en grande partie
détruits. Le Hamas a perdu de nombreux
combattants parmi lesquels des chefs
militaires importants et utilisé une
grande partie de son stock de roquettes
qu’il aura du mal à compléter en raison
du bouclage de la frontière égyptienne.
Le blocus de la bande de Gaza n’est pas
encore totalement levé. Israël et
l’Égypte vont maintenir le contrôle des
matériaux de construction pénétrant dans
l’enclave palestinienne.
Netanyahu
préfère le Hamas à Gaza
En fait - et je le répète- on sait
que Benjamin Netanyahu a toujours
préféré un arrangement militaire avec
l’organisation islamiste – cessez le
feu, échange de prisonniers- à un accord
avec l’OLP de Mahmoud Abbas impliquant
des concessions territoriales en
Cisjordanie.
Pinhas Wallerstein, un ancien président
du Comité des implantations et un des
fondateurs du mouvement de colonisation,
l’a compris. Dans une interview à une
radio israélienne, il a félicité
Benjamin Netanyahu : « En acceptant
ainsi l'arrêt des combats et en
empêchant la prise de contrôle de Gaza
par l'Autorité autonome, le Premier
ministre a sauvé les implantations de
Cisjordanie. Si Mahmoud Abbas avait
récupéré Gaza, la communauté
internationale nous aurait obligés à
négocier avec lui et nous aurions perdu
la Judée et la Samarie. » Car,
Benjamin Netanyahu, craignait, plus que
tout, une résolution du Conseil de
sécurité, ordonnant, non seulement un
cessez le feu mais ressuscitant un
processus de paix en bonne et due forme.
Cela ne s’est pas fait.
Les acquis
du Hamas
Étouffé par Israël et l’Égypte, le
Hamas, voulait sortir de son isolement.
Il ne s’est pas effondré militairement,
et s’est attiré les bonnes grâces de
l’opinion publique occidentale. Mais,
politiquement, dans le monde arabe, il
n’a pas réussi à élargir ses soutiens au
delà de ses deux sponsors, le Qatar et
la Turquie. L’organisation islamiste est
toujours interdite en Égypte et en
Arabie saoudite, deux pays, qui avec les
Émirats arabes unis, ont quasiment
soutenu Israël dans ce conflit. Une
situation sans précédent dans la région.
Sur le terrain, ses acquis matériels
sont, pour l’heure, minces. A ce stade,
les policiers de l’Autorité autonome ne
sont pas encore déployés aux points de
passage contrôlés par Israël. L’aide
humanitaire qui passait déjà par le
territoire israélien, (y compris celle
envoyée par la Turquie), sera renforcée,
ce qui n’est certainement pas une grande
victoire pour le Hamas. La zone maritime
permise au pêcheurs de Gaza sera
doublée. Seule nouveauté, le poste
frontière de Rafah a été rouvert par les
Égyptiens et les convois d’aide y
passent. Mais, le Hamas ne pourra pas
revenir à la situation qui existait il y
a un an, lorsqu’il prélevait sa dime sur
tous les produits qui passaient par
quelques deux mille tunnels de
contrebande creusés sous la frontière
près de Rafah. Ils ont été presque tous
détruits par l’armée du général Sissi.
C’est pour surmonter cette asphyxie
économique que l’organisation islamiste
exige un port et un aéroport. Cela doit
être négocié d’ici un mois au Caire et
Israël, d’ores et déjà, dit non. On
verra si les égyptiens qui considèrent
le Hamas comme une organisation
terroriste au même titre que les Frères
musulmans l’accepteront. Pour ce qui est
de l’électricité et des carburants, le
Hamas dépend donc plus que jamais des
fournitures venues d’Israël.
Cessez le
feu identique
Au plan intérieur, il est encore trop
tôt pour évaluer l’état de l’opinion
publique à Gaza. Va-t-elle considérer
que l’élargissement de la zone de pêche
et une levée du blocus - dont
l’importance reste à déterminer -
valaient un tel sacrifice humain ?
Mahmoud Abbas, le président de
l’Autorité autonome, a rappelé, dans une
intervention à la télévision
palestinienne que ce dernier accord de
cessez le feu est identique à celui
proposé par les Égyptiens au début de ce
conflit et rejeté alors par le Hamas.
Actuellement, les gazouis fêtent surtout
l’arrêt des épouvantables bombardements
israéliens. En Cisjordanie, les appels à
une troisième Intifada sont restés sans
réponse.
Donc, attendons les prochaines
négociations du Caire pour savoir quel
accord sera conclu, ou si les combats
reprennent. D’ici là, il faut constater
qu’il n’y a ni gagnant, ni perdant.
Publié le 30 août 2014
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