Monde
Obama au secours de Daech
Bruno Guigue
© Bruno
Guigue
Dimanche 18 septembre 2016
Le
président des Etats-Unis va bientôt
tirer sa révérence. Mais avant de
rejoindre le club des conférenciers à
100 000 dollars, il aura commis un
nouveau forfait en Syrie. Le 17
septembre, pour la première fois, son
aviation a tué entre 60 et 80 soldats de
l'armée arabe syrienne à Deir Ezzor.
Loin d'être fortuite, cette attaque a eu
lieu au moment même où l'armée nationale
affrontait une offensive de Daech.
Le
Pentagone a déclaré qu'il s'agissait
d'une erreur, mais qui peut croire un
tel mensonge ? Cette version officielle
a d'ailleurs reçu sa première entaille
de la part de l'ambassadrice US à l’ONU.
Elle a admis devant le conseil de
sécurité que les USA étaient à l’origine
de cette frappe, mais elle en a minimisé
l'importance, en comparant cette bavure
"non intentionnelle" avec les "attaques
intentionnelles" de Damas contre des
civils. Curieuse explication !
La
thèse de l'accident, en réalité, ne
tient pas la route. Il suffit de
considérer les faits pour s'en rendre
compte.
-
Premièrement, le "modus operandi" de
l'attaque. Menée à quatre reprises par
plusieurs appareils de combat au sol,
elle a duré selon les témoins près de 45
minutes. Il ne peut donc s'agir de
l'opération erratique d'un pilote isolé
qui aurait mal compris les ordres reçus.
-
Deuxièmement, le lieu de l'attaque. La
position ciblée est Jebel Tudar, à 4
kilomètres au sud de l’aéroport de la
ville. Il s’agit d’une colline-clé pour
la défense de toute la zone, où 100 000
habitants sont encerclés par Daech.
C'est une position statique, occupée par
l'armée syrienne au su et au vu de tous
depuis des mois.
-
Troisièmement, le communiqué de victoire
de Daech. L'agence de propagande "Amaq",
en effet, a affirmé que le groupe
djihadiste avait pris le contrôle de la
colline où a eu lieu la frappe aérienne
de la coalition prétendument
anti-terroriste. Cette belle
coordination entre les USA et leurs
mercenaires officieux mérite d'être
soulignée !
-
Quatrièmement, l'invraisemblance totale
d'un appui aérien US à l'armée syrienne.
C'est la seule explication possible s'il
s'agit d'une "bavure", mais elle est
absurde. L'aviation occidentale n'a
jamais prêté main forte à l'armée
syrienne, pourquoi le ferait-elle ?
C'est la question que l'ambassadeur de
Russie vient de poser à l'ONU. La
réponse est évidente : il ne s'agissait
pas d'aider l'armée syrienne, mais
d'aider Daech.
Frapper l'armée syrienne au profit de
Daech, en effet, permet d'atteindre
trois objectifs. En soulageant le front
d'Alep, ce contre-feu allumé à
l'extrémité Est du pays brise le rêve
d'une reconquête du territoire national.
Il fragilise l'Etat syrien. Mais il
envoie aussi un message explicite à la
nébuleuse takfirie en mauvaise posture
depuis la reprise des quartiers Sud
d'Alep. Enfin, il conforte les alliés
régionaux de Washington dans la
poursuite de leur politique mortifère du
"chaos constructif" au moment où la fin
de mandat de Barack Obama pouvait
laisser craindre un certain
ramollissement de Washington.
On
savait le cynisme US sans limite, mais
il vient de faire un saut qualitatif.
C'est la première fois que les USA
agressent frontalement l'armée syrienne.
Cette nouvelle transgression a valeur de
test, et la réplique de l'axe
Moscou-Damas ne devrait pas se faire
attendre. Cette main tendue à
l'organisation terroriste montre que les
néocons n'entendent pas lâcher prise au
Moyen-Orient. La coïncidence de cette
attaque avec l'octroi de 38 milliards de
dollars à Israël est significative.
Contrairement à ce qu'on lit parfois,
Washington ne se désengage pas de la
région. Il continuera, demain, d'y semer
le chaos en armant le bras des tueurs en
tout genre.
Bruno
Guigue (18/09/2016)
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