France-Irak
Actualité
Palestine : Le temps d’une jeunesse
Bouchan Hadj-Chikh
Lundi 25 mai 2015
Par Bouchan Hadj-Chikh
(revue de presse : Le Soir d’Algérie -
24/5/15)*
Le secrétaire d’état américain, M.
John Kerry, a fait cette déclaration à
la télévision sioniste le 3 Mai dernier.
Une déclaration qui a surpris même les
observateurs locaux. Qu’a-t-il dit ? Il
a demandé – j’ose à peine l’écrire
quoique je me fasse peu d’illusions à ce
sujet – que Tel Aviv autorise le
gouvernement américain à reprendre sa
place au sein de l’UNESCO. Pas moins. Et
pourquoi donc ? Parce que, sur
recommandation de l’AIPAC – American
Israeli Public Affairs Committee,
le lobby sioniste auprès de
Washington - le Congrès a voté, en
1990, la « Public Law 101- 246 »
qui lui interdit de financer l’ONU, ou
toute institution spécialisée du système
des Nations-Unies, qui accorde à l’Organisation
de Libération de la Palestine un
siège en tant qu’état membre. Et voici
comment et pourquoi les Etats-Unis se
trouvent piégé, auto-expulsé de ce forum
culturel et scientifique International.
Au cours de cette interview, le
secrétaire d’état US a souhaité que
l’AIPAC soit incitée à demander au
Congrès la levée de cette loi, ou d’en
voter une autre qui la rendrait caduque,
afin, dit-il, que les Etats-Unis
puissent participer aux débats – en
renouant avec le financement de l’UNESCO
– pour défendre les intérêts américain
et de l’entité sioniste.
Le porte-parole de l’ambassade
américaine a ajouté ceci à cette
occasion : maintenir cette loi c’est
permettre aux autres Etats de déterminer
où ils peuvent réduire l’influence des
États-Unis dans ces assemblées dites
universelles, et ce faisant, «
rendre beaucoup plus difficile pour les
Etats- Unis la poursuite de nos intérêts
nationaux ».
Une supplique, en quelque sorte. Qui
indique bien qui tient réellement le
manche. Cela renvoie à un entretien
entre M. Bill Clinton et M. Benyamin
Netanyahu. S’entendant dicter les
volontés de ce dernier dans la conduire
des affaires américaines au Moyen Orient
et, dès lors, dans le cours des choses
dans le monde, il interrompit son
interlocuteur en lui crachant, dans sa
frustration, « mais qui est donc la
première puissance mondiale ? ».
L’histoire ne dit pas si le nouvel élu
de Tel Aviv lui a rigolé au nez ou pas.
L’ancien président des Etats-Unis
découvrait sur quel pied dansait le
monde. Comme le découvre, heureusement
pour lui en fin de second et dernier
mandat, M. Barak Obama qui, en
poursuivant les négociations sur le
nucléaire Iranien jusqu’à atteindre « un
deal » - non encore définitif et
toujours sujet à l’approbation du
Congrès - s’attire les foudres de
la même entité. Avec, cette fois, un
apport de taille. Celui du nouveau roi
d’Arabie Saoudite et des Emirs du Golfe.
Ces derniers venant en soutien du
premier sous le fallacieux prétexte
d’une « guerre »
Shiites-Sunnites en perspective.
Voilà où en sont les choses. Une
collusion d’intérêts assaisonnée de
risques d’interventions militaires qui
embraseraient le monde.
Toutes ces gesticulations
géopolitiques nous font oublier la
nature coloniale de l’occupation des
territoires palestiniens et les
souffrances endurées, depuis 1948, par
un peuple embastillé. Ainsi, après le
bombardement sans retenue de la bande de
Gaza, la haute cour de Tel Aviv a
autorisé « le défilé de Jérusalem »,
à travers les quartiers musulmans de la
vieille ville, en dépit des
recommandations des Organisations Non
Gouvernementales de tous bords. Sous
réserve d’éviter des incidents. On nous
précise que les « juges » ont
pris cette décision « le coeur lourd ».
Comme le ridicule et les décisions
illégales, scandaleuses, ne tuent plus
depuis longtemps, ces mêmes « juges
», dans leur mansuétude, précisent,
dans leur arrêt, qu’à cette occasion,
les arabes auront droit de garder leurs
magasins ouverts et d’entrer et de
sortir de leurs domiciles. Authentique.
Dans le pire des systèmes, en dehors
de la période nazie, on n’a assisté à
tant de provocations, tant de
discriminations, tant de risques pour la
paix mondiale. Et ainsi va le monde vers
le précipice.
Ce redoublement de férocité, selon
les termes de la Charte des Nations
Unies, relèverait des plus sévères
sanctions. Et de mise au ban de la
communauté internationale. Reste à se
demander si cette communauté
internationale existe vraiment.
Paradoxalement, elle existe. Les
écrans de fumée de les trompe pas.
Jusqu’à ce jour, elle murmure. Le vote
d’intégration de la Palestine au sein de
l’UNESCO en est un. Les navires battant
pavillon suédois se dirigent vers Gaza
dans le silence total des medias. Ils
sont chargés d’aides et de produits
alimentaires. Le mouvement mondial de
boycott de l’entité sioniste en est un
autre. A l’intérieur même des
territoires occupés, des hommes et des
femmes qui ont participé aux exactions
commises à Gaza dénoncent leur
hiérarchie. Quand cette jeunesse ne
préfère pas quitter ces territoires
usurpés pour choisir l’exil. Et cette
reconnaissance diplomatique de l’Etat
Palestinien par le Vatican qui vient à
point nommé.
Qu’en est-il, pendant ce temps, dans
le monde supposé arabe, si peu enclin à
montrer une solidarité nécessaire et un
comportement d’êtres humains ? Ses
dirigeants ont autre chose à faire.
Comme se massacrer. Se dévorer.
Combiner. A jouer petitement pour la
survie de leurs systèmes. En somme, à
sous-traiter ce qui est inscrit dans
l’agenda des maitres de la région et du
monde. Pas toujours américains.
Je comprends fort bien, dès lors,
ceux qui se demandent ce que nous,
Algériens, faisons dans ce four, et s’il
ne nous faudrait pas claquer la porte
pour sortir respirer un peu de
fraicheur. Mais le voudrions nous que
cela nous serait difficile. Nous ne
disposons pas des moyens pour agir ni
dans un sens ni dans l’autre, en
d’autres termes en pesant sur cette
machine ou en se permettant de
l’abandonner. Alors nous sommes devenus
aphones.
Il fut un temps où, afin de défendre
l’idée de l’indépendance de l’Algérie,
des pays arabes montaient au créneau,
enflammaient les tribunes des
Organisations Internationales. Il fut un
temps où l’Irak incluait, au vu et au su
de toutes les nations du monde, dans son
budget national, l’aide attribuée au
peuple algérien. Il fut un temps où la
dignité de l’homme concernait tous les
peuples de la région, où la victoire de
Dien Bien Phu, en 1954, était celle de
tous les peuples de la planète, où
l’agression anglo-française et le
contrôle de Port Saïd, en Egypte, en
1956, furent stoppés net et les forces
d’invasion contraintes à rentrer armes
et plier bagages. Il fut un temps où les
Barbudos entraient victorieux à
la Havane, en 1958. Où les
Moudjahidine, descendus des maquis
en 1962, et les Moussebiline,
agissant à visage découvert dans les
villes et villages, libérées, fêtaient
la victoire saluée par la planète
Justice. Un temps où un Président -
que Dieu, le tout puissant, ait son âme
- défendait un « nouvel ordre
économique mondial » de la tribune
des Nations-Unies. De cette tribune d’où
un certain Yasser Arafat appela la
communauté des Nations à ne pas le
laisser abandonner la branche d’olivier,
de paix, pour l’obliger à faire le choix
de la kalachnikov, du combat.
Un temps que les jeunes de vingt ans,
à travers le monde, vont forcément
redécouvrir pour éviter le chaos en
guise d’héritage.
PS :
J’aime bien cette chanson dont je
vous livre les paroles :
« Ce monde je l’ai fait pour toi,
disait le père,
Je sais, tu me l’as dit déjà,
disait l’enfant.
Je n’en demandais pas tant ».
Photo : Yasser
Arafat à l’ONU
*Le
Soir d’Algérie (24/5/15)
(p.7)
© G. Munier/X.
Jardez
Publié le 25 mai 2015 avec
l'aimable autorisation de Gilles Munier
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