Opinion
Gaza, l’Ukraine et l’escroquerie
de l’impérialisme des « droits de
l’Homme »
Bill Van Auken
Photo:
D.R.
Vendredi 1er août 2014
Mercredi 30
juillet, on a vu à Gaza des atrocités
successives qui ont clairement montré à
tous ceux qui ont des yeux pour voir
qu’Israël est en train de mener une
guerre de terreur contre des civils. Son
objectif est de briser la volonté du
peuple palestinien en assassinant les
enfants, en détruisant les maisons et en
ramenant une population entière à l’âge
de pierre.
La Force de défense
israélienne (IDF) a d’abord frappé une
école gérée par l’ONU au camp de
réfugiés de Jabaliya où quelque 3.000
personnes fuyant leurs domiciles avaient
cherché refuge et où au moins 16
personnes ont été tuées et plus de 125
blessées. Ensuite, en plein milieu d’un
cessez-le-feu annoncé par l’IDF, des
obus se sont abattus sur une place de
marché bondée à Shejaiya, tuant 17
personnes et en blessant plus de 200.
Au moment où
arrivaient de Gaza les images horribles
de ces massacres, les journaux
annonçaient que le gouvernement Obama
avait convenu avec l’UE d’imposer des
sanctions généralisées, non pas contre
Israël, mais contre la Russie.
Les actions
punitives menées par les Etats-Unis et
l’UE sont organisées dans le contexte
d’une campagne de propagande
provocatrice et mondiale qui rend
Moscou, et le président Vladimir Poutine
personnellement, responsables du crash
en Ukraine orientale du vol MH17 de la
Malaysia Airlines et de la mort de ses
298 passagers et membres d’équipage.
Tout en accusant
Poutine et les milices anti-Kiev
d’Ukraine orientale d’assassinat en
masse, Washington et ses alliés
observent un silence assourdissant sur
le meurtre de plus d’un millier de
civils dans la région, au moment où le
régime ukrainien (qu’ils ont mis en
place en février dernier grâce à un coup
d’Etat ayant à sa tête des fascistes)
continue de pilonner des quartiers
habités avec des tirs d’artillerie et de
roquette.
En dépit des
sanctions et des dénonciations
occidentales, Washington n’a pas
présenté le moindre élément de preuve
comme quoi le vol MH17 avait été abattu
par un missile tiré par les forces
anti-Kiev ou encore fourni par Moscou.
Au lieu de cela, il a fait état de
vidéos et d’enregistrements sonores
affichés sur YouTube par l’agence de
renseignement ukrainienne qui est
notoire pour sa fabrication
d’accusations sans fondement contre la
Russie. L’énorme appareil de
renseignement américain n’a fourni
aucune photo satellite, interception de
communication ou quoi que ce soit
d’autre pour appuyer les allégations
portées contre le gouvernement Poutine.
L’armée russe en
revanche a publié des données et des
informations de ses services de
renseignement qui suscitent
d’importantes questions relatives à ce
que dit l’Occident. Ces données montrent
que les forces pro-Kiev disposaient d’au
moins trois batteries anti-aériennes
déployées dans la région le jour du
crash et que juste avant le crash, un
avion ukrainien armé de missiles air-air
avait volé non loin de l’avion malaisien
à une distance permettant de le toucher.
Cette preuve concrète – et la demande
formulée par la Russie qu’une enquête
impartiale soit ouverte – ont été en
grande partie passées sous silence dans
la presse occidentale ou écartées pour
être de la « propagande » et des «
théories de complot. »
Si les
circonstances exactes du crash du Boeing
777 sont encore à élucider de façon
définitive, deux choses elles, sont
claires. D’abord, que la région qu’il a
survolée avait été transformée en zone
de guerre du fait de l’intervention des
Etats-Unis et de l’Allemagne pour faire
tomber le gouvernement ukrainien élu. Et
ensuite, alors que ni Moscou ni les
soi-disant séparatistes n’avaient quoi
que ce soit à gagner de cette tragédie,
celle-ci a fourni à Washington et à ses
marionnettes de Kiev le moyen de rallier
des puissances occidentales auparavant
réticentes à sa campagne provocatrice et
extrêmement dangereuse contre la Russie.
Quels que soient
les doutes qui subsistent quant aux
événements d’Ukraine orientale, il
n’existe pas l’ombre d’un doute quant à
la responsabilité du carnage de Gaza où
le nombre d’enfants tués dépasse à lui
seul celui de toutes les victimes du vol
MH17. La direction sioniste d’Israël,
après avoir échoué à réprimer l’héroïque
résistance palestinienne a réagi avec
une furie démoralisée, détruisant des
quartiers entiers, bombardant des écoles
et des hôpitaux et tuant quelque 1.400
personnes, dont 90 pour cent étaient des
civils.
Et pourtant dans ce
cas précis, le gouvernement Obama
souligne que personne ne peut être tenu
pour responsable, sinon les Palestiniens
pour refuser de capituler. Tandis
qu’Obama déplore cyniquement les morts
de Gaza, Washington s’empresse pour
approuver une aide militaire d’urgence
de centaines de millions de dollars à
Israël, pour garantir que la tuerie
continue sans interruption.
Il est intéressant
de noter que l’un des architectes clé de
cette politique criminelle à deux faces
est Samantha Power, l’ambassadrice
américaine auprès des Nations unies.
Elle avait supervisé le vote de
Washington, le seul vote contre la
constitution d’une commission de l’ONU
pour enquêter sur les actions
israéliennes à Gaza. Elle a œuvré sans
relâche pour bloquer l’adoption par le
Conseil de sécurité de toute résolution
contraignante demandant l’imposition
d’un cessez-le-feu. Et elle a mis en
garde d’autres membres du Conseil que
même des déclarations non contraignantes
sur Gaza et toute attribution des
responsabilités à Israël constituait une
« ligne rouge » pour Washington.
Il importe de
rappeler que Mme Power est la personne
qui au sein du gouvernement Obama était
devenue chef de file de la politique
dite R2P (Responsibility to Protect –
‘responsabilité de protéger’) en tant
que fondement des interventions «
humanitaires. » Agitant le drapeau des «
droits de l’Homme », la justification la
plus hypocrite de toutes pour une guerre
impérialiste, Power fut la championne de
la guerre des Etats-Unis et de l’OTAN
pour un ‘changement de régime’ en Libye
à l’issue de laquelle Mouammar Kadhafi
fut renversé et assassiné et qui a
abouti à ce que maintenant, trois ans
plus tard, le pays est en proie aux
violences et au chaos.
Elle a également
joué un rôle clé dans la promotion de la
guerre par procuration des Etats-Unis
pour un changement de régime en Syrie,
aidant à fomenter une guerre civile
sectaire qui a tué plus de 100.000
personnes, pour invoquer ensuite cette
catastrophe créée par l’impérialisme
comme justification pour une
intervention plus directe. En février
dernier, elle avait recouru à des images
« d’enfants morts et mourants » en Syrie
pour appuyer sa demande que le Conseil
de sécurité adopte une résolution ayant
des « conséquences significatives sur le
terrain, » c’est-à-dire qui fournisse
une caution pseudo-juridique pour une
agression directe des Etats-Unis.
Les images d’«
enfants morts et mourants » venant de
Gaza ne suscitent aucune réaction de
cette sorte, prouvant une fois de plus
que toute morale est une morale de
classe et que les glandes lacrymales de
cadres impérialistes comme Samantha
Power ne s’activent que pour justifier
une agression, un pillage et la défense
des intérêts de l’oligarchie financière
américaine.
Compte tenu de son
bilan, l’impérialisme des droits de
l’Homme d’aujourd’hui fait en
comparaison paraître comme une cause
noble le vieux « fardeau de l’homme
blanc » des beaux jours du colonialisme.
Rien n’a été discrédité plus rapidement.
Chaque fois que Washington tente de le
colporter, partout dans le monde les
gens le reconnaissent comme la fadaise
que c’est.
Et pourtant, cela
n’a pas empêché toute une couche de la
pseudo-gauche de pendre le train
sanguinolent du R2P en marche. Un écart
minimal sépare les éléments comme Power
de groupes comme l’International
Socialist Organization ou
d’universitaires comme Juan Cole,
professeur à l’université du Michigan,
qui ont contribué à vendre l’agression
américaine comme une défense des «
droits de l’Homme ». Ils ont dans ce but
dépeint les guerres civiles menées par
des islamistes soutenus par la CIA en
Libye et en Syrie et le coup d’Etat
ukrainien à la tête duquel se trouvaient
des fascistes comme des « révolutions ».
La lutte contre la
guerre, que les événements de Gaza comme
de l’Ukraine mettent à l’ordre du jour
avec une urgence de plus en plus grande,
ne peut être menée que par une lutte
pour l’indépendance politique de la
classe ouvrière contre l’influence de
ces forces dont la politique exprime les
intérêts d’une couche de la classe
moyenne supérieure dont les privilèges
sont liés aux intérêts de
l’impérialisme.
(Article original
paru le 31 juillet 2014)
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Publié le 2 août 2014 avec l'aimable
autorisation du WSWS
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