Actualité
Daech caravane déambulant au
service des États-Unis
Antoine Charpentier
© Antoine-Noura
Charpentier
Mercredi 27 mars 2019
Il n’est plus un secret pour
personne que Daech et ses confrères sont
des outils aux mains des américains et
leurs alliés, employés pour des
objectifs multidimensionnels. Au premier
abord, ces groupuscules terroristes
créés par les États-Unis, comme
l’affirme Hillary Clinton, sont envoyés
afin de déstructurer et détruire
certains pays, notamment arabes,
soumettant leurs populations à des
diktats qui ne respectent en aucun cas
la dignité humaine, ainsi spolier leurs
richesses. Lorsque cette stratégie
échoue, comme c’est le cas en Syrie, les
américains et leurs alliés changent leur
fusil d’épaule et commencent à évoquer
« la lutte contre le terrorisme ». Ce
concept devient actuellement sur le plan
géostratégiques une arme de guerre pour
les mêmes objectifs que nous avons déjà
cités. Cependant la question qui se pose
est comment ceux qui créent le
terrorisme veulent en même temps le
combattre ?
La bataille
contre Daech dans le Baghouz, « dernier
fief de Daech » à l’est de la Syrie,
occupe une grande place dans l’actualité
et relève plusieurs ambiguïtés. Hakem
Al-Zamili, membre du mouvement Al-Sader
en Irak, affirme dans un entretien pour
la chaîne libanaise Al-Mayadeen que l’or
volé d’Irak en 2014 estimé à environ 50
tonnes, ainsi que 400 millions de
dollars se trouvent dans le Baghouz.
Ceci pose la question de savoir si
vraiment cette bataille a comme but d’en
finir avec Daech, ou si l’objectif des
américains et des forces kurdes est de
récupérer le butin, ce qui pourrait
constituer en partie un trésor de guerre
inestimable pour les forces kurdes de
Kassad, dans la suite de leurs projets
d’autonomie et d’indépendance.
Toutefois, la
fin de Daech dans le Baghouz est-elle
réellement la fin pure et dure de cette
organisation ?
Le président
américain Donald Trump a déjà déclaré le
6 février lors d’une réunion des pays
membres de l’alliance contre Daech, que
ce dernier a été décapité et que les
forces américaines œuvrent afin de
traiter « les résidus ». Toutefois, nous
constatons, notamment avec ce qui se
passe actuellement dans le Baghouz, que
Daech est encore présent et d’une façon
réelle et concrète. Ceci révèle les
contradictions stratégiques du président
Trump et de son administration, surtout
au sujet de la lutte contre le
terrorisme.
Dans son
livre Conflits sur le bord de l'Abîme,
Alwan Alam Al-Din cite Brousse Hauffman
expert du terrorisme à l’université de
Georges Tawn, qui affirme que : « Malgré
la mort d’un important nombre de
terroristes étrangers appartenant à
Daech, des milliers ont pu fuir la
Syrie, et aujourd’hui, il est certain
qu’un bon nombre d’entre eux se trouvent
dans les Balkans. Ils attendent sûrement
l’occasion pour se faufiler
clandestinement en Europe.[1] »
Quant à
Fidrane Dzihik, expert des Balkans à
l’institut international norvégien,
affirme dans le même ouvrage que : « Des
salafistes djihadistes se trouvent dans
les Balkans et disposent de grands
moyens. Ils ont dans leurs viseurs
plusieurs pays du continent européen.[2] »
Hormis que
l’Europe est menacée de nos jours depuis
les Balkans, le président Trump à son
tour la menace en évoquant la libération
de ses ressortissants qui se trouvent
dans les prisons des forces kurdes en
Syrie et qui ont participé aux combats
sous la bannière de Daech en Irak et en
Syrie. Ceci prouve deux choses, la
première est le niveau du partenariat
amricano-kurde, faisant carrément de
Trump le porte-parole et le décideur au
nom des forces kurdes de la Syrie
Démocratique ; la seconde chose est la
guerre sécuritaire que risque de
déclarer Trump à l’Europe, après de lui
déclarer la guerre économique.
Le ministre
affaires étrangères américain Mark
Pompeo, a quant à lui déclaré au début
du mois de février que Daech fuit vers
l’Afrique. La question que nous nous
posons est comment Daech qui est
encerclé à l’est de la Syrie, par ladite
coalition internationale, commandée par
les États-Unis et leurs alliés kurdes
peut aussi facilement partir vers
l’Afrique ? Y- a-t-il un lien entre
l’arrivée de Daech sur le continent
africain et les troubles, agitations et
tentatives de déstabilisations
qu’affrontent en ce moment certains pays
africains ? Ou cela relève-t-il
uniquement de l’ordre de la
coïncidence ? Il convient de préciser
que les forces de sécurités algériennes
ont récemment arrêté un groupuscule
important de terroristes sur leur
frontière avec le Niger, venant de la
banlieue nord d’Alep, tentant d’entrer
en Algérie.
Des
informations circulent en ce moment qui
consistent à affirmer que les convois de
l’armée américaine qui se retirent de la
Syrie vers l’Irak rapatrient avec eux
quelques 800 combattants de Daech qui
ont été prisonniers dans les geôles des
forces kurdes de Kassad.
Donc si nous
prenons en compte les propos d’Hillary
Clinton sur la contribution américaine,
dans la fabrication d’Al Qaeda, puis de
Daech, et les pratiques
politico-sécuritaires américaines, nous
constatons que la plupart du temps,
combattre le terrorisme signifie le
déplacer tout simplement d’un pays à un
autre ou d’une région à une autre, ou
lui permettre de circuler librement tout
en clamant le fait de le combattre.
Enfin rien
n’empêche de voir Daech ou des groupes
extrémistes de même tendance islamique
ou chrétienne en Amérique latine, dont
le but est d’affronter le pouvoir au
Venezuela et ses alliés. Surtout que le
scénario que prépare les États-Unis pour
le Venezuela est similaire à celui que
la Syrie affronte depuis huit ans et qui
a commencé sous la bannière du
« printemps arabes. »
Antoine
Charpentier écrivain et analyste
politique spécialiste du Moyen-Orient
[1]
A. N. AMINE EL-DINE, Conflits
sur le bord de l'Abîme,
Beyrouth, 2019, p. 12 (En arabe)
[2]
A. N. AMINE EL-DINE,
Conflits sur le bord de
l'Abîme……Op.cit. p.13
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