Rapport
La France et le phénomène des «jihadistes»:
l’arroseur arrosé
Alahed
Mercredi 4 juin 2014
La France s'active ces jours-ci sur deux
axes. D'une part, elle poursuit son rôle
comme fer de lance contre la Syrie et
son régime, et se mobilise, de l'autre
part, dans une tentative de contrer le
péril de ceux qu'elle désigne de «jihadistes».
Sur le premier plan, le rôle de la
France est flagrant dans l'objectif de
déférer la Syrie devant la Cour pénale
internationale. Sur le second plan, ce
pays a pris des mesures de sécurité qui
ne se limitent pas à la poursuite des
réseaux de l'enrôlement des Français
pour combattre dans les rangs des
groupes terroristes en Syrie, mais qui
touchent aussi à l'éducation et la
formation des individus et surveillent
tout changement dans leur conduite ainsi
que l'internet et les médias sociaux.
Sur les deux plans, il ne semble pas que
la France ait réussi. Sa dernière
tentative au Conseil de Sécurité a été
avortée par le veto sino-russe. En
effet, le projet de résolution avancé
par la France est placé par des
analystes dans le contexte des
tentatives de brouillage contre
l'échéance présidentielle syrienne,
puisque la victoire du président Bachar
Assad est intolérable pour la France.
Sinon, comment peut-on expliquer
l'indulgence à l'égard des groupes
terroristes tels l'Etat Islamique en
Irak et au Levant (EIIL), le front Al-Nosra
et le Front islamique au sein des
instances internationales au moment où
ces groupes constituent, avec leurs
combattants étrangers, un souci majeur
pour les gouvernements occidentaux, y
compris la France ?
La France : une politique tordue
L'écrivain et chercheur français et
libanais, René Nabaa évoque une
politique française «tordue», adoptée
par le ministère français représenté par
Laurent Fabius qui ne trouve aucun
embarras à se prononcer en faveur des
terroristes. «Cet homme avait rencontré
dernièrement Abdel Karim Belhadj afin
d'élaborer des plans politiques en
Lybie, au moment où Belhadj était
poursuivi par l'Otan tout au long de dix
ans, dans le contexte de la guerre
contre le terrorisme». M. Nabaa donne un
autre exemple sur la politique française
dite «tordue». «Durant la libération des
otages français enlevés par les rebelles
syriens pour une période d'un an, Fabius
a préféré axer son discours sur
l'hypothèse de l'utilisation du gaz du
chlore dans les batailles en Syrie, sans
aucune allusion à la ligne de conduite
vile des ravisseurs.»
Si la France se distanciait de toute
action contre ces groupes terroristes en
Syrie, auprès des instances
internationales, elle parait intensément
active dans le but d'empêcher
l'extension de ces groupes vers le
territoire français, surtout des
combattants français et occidentaux qui
ont rejoint leurs rangs sur la scène
syrienne.
Un plan gouvernemental.... mais
«On parle en France d'un plan
gouvernemental approuvé le mois dernier
et élaboré par le nouveau ministre de
l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. Le plan
qui s'inscrit dans le cadre d'une
stratégie basée sur l'action des
services de renseignements, la
surveillance et l'immunisation contre
«l'islam radical», est formé de quatre
parties :
1- La promulgation d'une nouvelle loi
qui autorise l'interdiction des «jihadistes»,
jeunes ou âgés, de quitter le territoire
français. Cette loi confère aux parents
le droit de demander aux autorités
d'interdire leurs fils ou filles mineurs
de quitter la France, en cas d'indices
sur des penchants «jihadistes».
2- Renforcer la guerre contre les
cellules aux «tendances jihadistes»,
l'expulsion des personnes impliquées et
la saisie des propriétés des
institutions ou des associations
impliquées dans de telles activités.
Dans ce même contexte, le gouvernement
français se prépare à renforcer la
surveillance sur le réseau internet, vu
le rôle de ce dernier dans l'enrôlement
des combattants étrangers, notamment
adolescents.
3- La coopération internationale entre
Paris et les autres pays ayant les mêmes
craintes ou ceux dont les territoires
sont des passages pour les combattants
étrangers vers la Syrie.
4- Aider les familles qui se trouvent
dans l'impossibilité de faire face aux
comportements de leurs fils, à travers
la mise en place d'un bureau national
pour «l'écoute et l'orientation», dont
le rôle serait d'assister les familles à
réhabiliter et réintégrer dans la
société, les individus ayant enclin à
l'esprit jihadiste».
Selon les propos de M. Nabaa,
«l'efficacité de ce plan sur la scène
française intérieure sera partielle.
D'une part, Paris sera plongée dans
l'embarras à l'égard des «jihadistes»
qui sont théoriquement ses alliés, et
motivés par le même objectif. D'une
autre part, ressortent les motifs
derrière le phénomène de la
participation de combattants étrangers à
la guerre en Syrie. En effet, la
propagande officielle française avait
notamment encouragé ces hommes à
combattre le régime syrien tout au long
de trois ans, durant lesquels l'occident
a orienté l'opinion publique en sa
faveur, sans aucune allusion à l'afflux
des «jihadistes», puisque le but était
de rempoter la guerre indépendamment des
moyens utilisés pour cette fin. S'ajoute
à cette propagande un sentiment fort de
frustration, résultant de la vie
quotidienne difficile dans un pays qui
souffre d'une crise économique et de la
recrudescence de l'islamophobie. Des
faits qui ont renforcé le désire de
combattre en Syrie». «En fin de compte,
l'arroseur est arrosé », explique M.
Nabaa.
«Les efforts de la France pour sortir de
l'impasse ne seront pas faciles, mais ce
pays le tentera toujours. Le
gouvernement français organisera entre
le 9 et le 20 juin, une série de
conférences dans lesquelles se
prononceront des experts dans la lutte
antiterroriste et des représentants
d'associations expertes dans les groupes
extrémistes et d'autres qui planchent
sur les droits de l'enfant.
C'est une opportunité pour la France,
non seulement pour détourner les regards
de la réélection du président syrien,
mais aussi de la corruption dont souffre
la classe politique française, puisque
les dangers qui menacent le gouvernement
français ne sont pas limités à celui des
jihadistes. De ce fait, le gouvernent
français œuvre afin de polir son image
et de récupérer la confiance des
Français sur la scène locale et des
gloires perdues sur la scène
internationale».
Le
dossier Syrie
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