Opinion
Les Etats-Unis et leur révolution dans
le domaine du pétrole de schiste entre
la réalité et les illusions
Akil Cheikh Hussein
Photo:
D.R.
Samedi 26 avril 2014
Les
compagnies américaines vendent le
pétrole et le gaz dans le marché
intérieur à des prix inférieurs aux
frais de la production dans le but de
répandre l’illusion de l’entrée des
Etats-Unis dans une ère de prospérité
sans précédent.
«Une nouvelle ère stratégique» a débuté
en 2011 avec la mort de Ben Laden, le
retrait des dernières forces américaines
d’Irak et l’annonce, par les Etats-Unis,
qu’ils avaient l’intention de
rééquilibrer leur stratégie en
s’orientant vers l’Asie. A ces
événements s’ajoutent un troisième qui
n’a pas été suffisamment mis en évidence
bien qu’il soit d’une importance
majeure. Il s’agit de la réduction
rapide de la dépendance des Etats-Unis
dans le domaine de l’énergie.
Ce point de vue est exprimé par Bruno
Tertrais, maître de recherche dans la
Fondation pour la recherche stratégique
à Paris. En vérité, Tertrais n’est
qu’une voix qui, parmi beaucoup
d’autres, a chanté les louanges de la
«révolution américaine dans le domaine
de l’énergie», de l’«âge d’or du gaz» et
le pétrole de schiste qui «changera le
cours de l’histoire».
On peut évidemment négliger la valeur
stratégique des rumeurs qui ont circulé
au sujet de la mystérieuse disparition
de Ben Laden présentée comme une
victoire remportée par Washington. Quand
à ce qu’on appelle pétrole américain
«non conventionnel», on peut le classer
comme une troisième défaite qui s’ajoute
aux deux autres que représentent le
retrait d’Irak et de l’ensemble du
Moyen-Orient afin que les Etats-Unis
puissent aller se recentrer en
Asie-pacifique.
On sait que, grâce à l’usage de
nouvelles technologies dans le
traitement de certaines sortes de sables
et de roches, la production de pétrole
et de gaz a ces dernières années
enregistré une augmentation sensible aux
Etats-Unis. On est arrivé actuellement à
extraire 8 millions de barils de pétrole
brut contre 5 millions de barils en
2008.
On sait aussi que le président Obama a
euphoriquement qualifié cette évolution
de «grande affaire» et «un progrès
énorme sur la voie de l'indépendance
énergétique des Etats-Unis».
Dans le même ordre d’idées, des
prévisions affirmaient depuis 2011 que
les Etats-Unis pourraient doubler des
producteurs tels que la Russie et
l'Arabie Saoudite avant la fin de 2013.
Parallèlement à ces prévisions, on a
tant entendu parler des répercussions
économiques et géopolitiques de cet
événement qu’on voulait révélateur d’une
grandeur croissante des Etats-Unis…
Mais la réalité est une chose et la
propagande en est une autre. L’an 2013
s’est écoulé sans que les Etats-Unis ne
puissent garder que leur position en
tant que troisième producteur après la
Russie et l’Arabie Saoudite.
Depuis, des voix se sont fait entendre
pour fixer la date de la suprématie
américaine dans ce domaine au deuxième
trimestre de l’année 2014. D’autres
voix, moins
précipitées, ont considéré qu’il fallait
attendre jusqu’à 2017 ou 2020.
Là, on ne manque pas de s’étonner car,
les études sérieuses sont unanimes à
considérer qu’en l’an 2020 on assistera
au début de la chute très rapide de la
production du pétrole et de gaz de
schiste, et au retour des Etats-Unis à
leur place en tant que pays
exclusivement importateur et dépendant
sur ce plan.
Les raisons de ce recul s’expliquent par
le tarissement rapide des sources de
l’énergie non conventionnelle qui est dû
à la grande puissance des technologies
utilisées dans son extraction, mais
aussi à l’énormité des investissements
financiers qui épuisent les compagnies
travaillant dans ce secteur.
Ce recul se traduira certainement par de
grosses pertes qui s’ajouteront à celles
subies actuellement par les compagnies
en raison de leur conduite populiste et
démagogique: En vérité, et cela est une
question que les Etats-Unis s’en flatte
au lieu de l’éviter, la disparité est
très grande entre les prix du gaz dans
les marchés intérieurs aux Etats-Unis et
leurs prix dans d’autres pays. Par
exemple, le gaz se vend respectivement
au Japon et en Europe à des prix 5 fois
et 3 fois plus élevés que leurs prix aux
Etats-Unis. Cela signifie que le
consommateur américain sera obligé dans
quelques années, lorsque les années
maigres remplaceront l’âge d’or, de
payer son gaz à un prix 10 fois plus
cher si ce n’est pas plus.
De plus, il faut signaler le fait que la
violence des moyens utilisés dans
l’extraction de l’énergie non
conventionnelle cause de nombreux dégâts
à l’environnement. A ce propos, les
écologistes américains affirment que le
forage à grande échelle et la
destruction des couches des roches
souterraines augmenteront le risque des
tremblements de terre dans les zones
d’activités sismiques aux Etats-Unis.
Ils provoqueront également des
émanations gazeuses qui rendent encore
plus grave la pollution atmosphérique,
et des études scientifiques ont d’ores
et déjà prouvé qu’ils polluent les
sources souterraines d’eau potable.
Toutes ces données signifient que les
Etats-Unis -qui croupissent sous le
poids de la crise économique et dont
l’influence est en recul dans le monde-
sont en train d’épuiser leurs réserves
énergétiques dans une tentative de
répandre l’illusion qu’ils sont sur le
point d’entrer dans une nouvelle ère de
grandeur et de prospérité.
C’est ainsi qu’avec leur «révolution
énergétique» les Etats-Unis ressemblent
à une chandelle dont la lumière commence
à s’éteindre par manque d’huile, mais
qui en brûle d’un seul coup la dernière
goutte pour répandre, rien que pour un
petit moment, une lumière vive avant de
sombrer définitivement dans les
ténèbres.
Source: french.alahednews
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