Opinion
L'Algérie, la Libye et les « analystes »
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Lundi 13 octobre 2014
Il y a trois ans, à en croire les
« analyses » qui sévissaient dans la
presse, d’ici et d’ailleurs, l’Algérie
était tout sauf en phase avec la
« révolution » en Libye. A cause de son
refus de soutenir les
« révolutionnaires » libyens,
c'est-à-dire les bombardiers de l’OTAN,
elle avait la pire des positions sur la
question. Une position qui la mettait au
ban des nations. Jugeons-en. Le 1er
septembre 2011, sollicité par le Journal
du Dimanche (JDD), pour sa perspicacité
supposée, Luis Martinez, spécialiste du
Maghreb et directeur de recherches à
Sciences Po, y va de cette conclusion : « l'Algérie
a parié sur l'échec de l'opération de
l'Otan en Lybie, considérant, à tort,
que la France et le Royaume-Uni allaient
se perdre dans les sables libyens et que
Kadhafi resterait très longtemps au
pouvoir. Elle pensait qu'au final on
appellerait l'Algérie pour devenir le
pays médiateur pour sortir la Libye et
l'Otan de cette situation d'impasse.
Mais cela n'a pas été le cas ». Il a
eu raison, juste le temps que la réalité
rattrape l’OTAN. Plus loin, le JDD
voulait savoir si l’Algérie était
isolée. M. Martinez est non seulement
affirmatif mais considère que c’est « un
pays qui soulève davantage
d'interrogation et d'inquiétudes que
d'espoir et d'opportunités ». S’il
s’est relu, ces jours-ci, il doit, au
moins, souhaiter que personne ne relise,
comme lui, ce qu’il a dit. Et il n’est
pas le seul, juste la veille, le 31 août
2011, dans Libération, pour José Garçon,
une « spécialiste » notoire de
l’Algérie, le « pouvoir algérien »
fait « figure de dinosaure dans une
Afrique du Nord en marche vers les
libertés ». On ne sait pas ce
qu’elle pense, aujourd’hui, de cette
marche. Le 18 septembre 2011, cité par
le site marocain aufait.ma, un
ancien ministre de la culture, Abdelaziz
Rahabi, qui, sûr de son fait et du haut
d’une compétence dont il est difficile
de trouver les références, avait déclaré
que « l’autorité de décision en
Algérie a fait preuve d’amateurisme
affligeant sur la Libye » et qu’
« en attendant, nous avons beaucoup à
apprendre des différentes expériences du
réveil arabe ». A contrario, loin de
ces « analyses » ampoulées ou
boursouflées, le 27 août 2011,
Henry Ensher, ambassadeur des Etats-Unis
à Alger, qui savait de quoi il
retournait et pour qui les mots ont une
certaine valeur, a été plutôt
pragmatique en disant : « nous
respectons beaucoup le rôle de l'Algérie
dans cette crise et nous savons que
l'Algérie est dans une position très
difficile car la Libye est un pays
voisin ». Le 09 octobre 2014, le
ministre algérien, délégué aux Affaires
maghrébines et africaines, Abdelkader
Messahel, a accueilli, à Alger, Deborah
Jones, envoyée spéciale des Etats-Unis,
ainsi que Jonathan Powell, l’envoyé
spécial du Premier ministre britannique
pour la Libye. Avec les mêmes mots, tous
les deux ont déclaré : «nous
partageons la même approche que
l’Algérie pour la résolution de la crise
libyenne». La veille Bernardino M.
Leoni, l’envoyé spécial des
Nations-Unies pour la Libye, avait dit
que l’initiative algérienne est «la
meilleure pour une solution en Libye».
Et maintenant, que dire ?
Ahmed.Halfaoui
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