Site d'information sur la Palestine, le Moyen-Orient et l'Amérique latine

 

Palestine - Solidarité

 

Retour :  Accueil  Sommaire Yossi Alpher  -  Massacres à Gaza  -  Originaux  -  Analyses  -  Mises à jour


Bitterlemons.org

Les erreurs d'Obama
Yossi Alpher


Yossi Alpher

19 Octobre 2009 Edition 38

Il y a énormément de raisons pour lesquelles le processus de paix israélo-palestinien n'a pas encore été relancé via une initiative américaine. Les manouvres du premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et de sa coalition gouvernementale en sont une, la faiblesse de l'autorité palestinienne et de l'OLP sous la direction de Mahmoud Abbas en est une autre. Les Etats arabes modérés y sont aussi pour quelque chose. Mais à présent, les erreurs du Président Obama sont  les plus évidentes.

Le plan d'Obama pour faire redémarrer le processus de paix par un gel véritable de la colonisation et des ouvertures diplomatiques discrètes des pays arabes semblaient à première vue être une bonne idée. Avec une
Autorité Palestinienne ayant connue de réels succès dans les domaines de la sécurité et des réformes institutionnelles, il était logique de réclamer aux autres parties qu'elles travaillent réellement à la réalisation des obligations respectives de la Feuille de route  (les ouvertures arabes sont une exigence de la phase II de la Feuille de route). De plus, la poursuite de la colonisation est en contradiction avec l'engagement de Netanyahu concernant un « Etat juif ». Le gouvernement Netanyahu n'aurait pas chuté sur la question du gel des implantations, les nouveaux ministres et députés de la Knesset tout juste élus ayant tout intérêt à protéger leurs sièges, et donc à éviter une crise gouvernementale.

Mais Obama semblait penser qu'il pourrait avancer simplement grâce à  « l'engagement », sans aucune pression. Cela correspond parfaitement à sa vision des relations internationales, bien qu'il doive être souligné que l'engagement d'Obama concernant Israël est loin d'atteindre le niveau personnel et émotionnel de son engagement envers le monde arabo-musulman. Sans surprise, ni Netanyahu, ni les pays arabes modérés, Arabie Saoudite en tête,  ne se sont conformés aux requêtes d'Obama. Alors que l'acteur le plus faible, Mahmoud Abbas, s'est saisi avec enthousiasme de la demande de gel de la colonisation. L'administration Obama était capable de s'adapter aux réponses évasives de Netanyahu et de faire oublier son exigence, ce
qui est évidemment plus difficile à faire pour Abbas.

D'autres erreurs ont suivi. Obama et Mitchell se sont aperçus un peu tard des possibles conséquences négatives d'un succès égyptien dans la médiation entre le Fatah et le Hamas visant à réunifier la direction politique palestinienne avant de renouer les négociations avec Israël. En cas de succès des égyptiens, le Hamas mettrait la main sur de nouveaux leviers de pouvoir à Ramallah tandis que la perspective d'élections
palestiniennes incluant le Hamas pourrait remettre encore à plus tard toute négociation sérieuse. Plutôt que de perdre son temps à pousser les saoudiens à faire quelques ouvertures diplomatiques vers Israël, Obama
aurait dû se concentrer sur l'Egypte.

Effectivement, l'administration américaine ne pouvait prévoir les effets négatifs du rapport Goldstone  sur les crimes de guerre commis durant l'offensive sur Gaza en janvier dernier. Mais la tentative de persuader Abbas d'éviter d'utiliser s'est avéré un échec contreproductif vis-à-vis du président palestinien déjà en position difficile.

Puis il y a eu l'acceptation du prix Nobel de la paix. Le Moyen Orient est la région du monde où la vision d'Obama est la plus énergiquement appliquée. Mais jusqu'à maintenant, ses réalisations y sont limitées : avoir renoué le dialogue avec l'Iran et commencé le retrait d'Iraq, Mais rien de concret concernant le conflit israélo-arabe. Constituant un symbole difficile à surpasser, le prix Nobel pourrait bien être un boulet plus qu'une bénédiction pour Obama dans l'imbroglio israélo-arabe. Il aurait pu décliner ce prix, au moins pour l'instant, s'attirant ainsi le respect général dans cette partie du monde.

A présent, imaginons qu'en dépit de ces erreurs et contretemps, Obama réussisse à réunir les équipes de négociateurs de Netanyahu et Abbas. Cela réclame une forte crédibilité car ni Obama ni Mitchell  ne savent à quoi ils vont devoir faire face. Même si Netanyahu lui-même est honnêtement prêt accepter une véritable solution à deux Etats - ce qui aujourd'hui n'est qu'une hypothèse - sa coalition ne l'est pas. Ce qui signifie la
possibilité d'une crise gouvernementale et des élections anticipées en Israël, d'autant que Netanyahu ne fait rien pour faciliter une éventuelle entrée de Tzipi Lvni et de Kadima au sein d'une coalition alternative.
S'agissant de Mahmoud Abbas, peu importe la pression du Hamas ou le propre refus du président de l'OLP - comme par exemple lors des négociations avec Ehoud Olmert - sur des solutions de compromis aux problèmes centraux, il n'en demeure pas moins le meilleur partenaire pour un accord sur les frontière, mais pas sur Jérusalem ni sur la question des réfugiés. Mais il faudra encore le convaincre de signer un accord partiel avec les israéliens.

Cela nous ramène à notre point de départ : la résolution prise par l'administration Obama de se concentrer sur le problème palestinien d'abord, et de manière énergique, plutôt que sur les négociations entre Israël et la Syrie. Il est vrai que Damas n'a guère fait preuve de volontarisme concernant les exigences préliminaires et les « tests » d'Obama au sujet de l'Irak notamment. Là encore, Obama semble compter sur son « engagement » mais ne fait pas preuve de mordant. Cependant, contrairement à Mahmoud Abbas à Ramallah, le régime de Bashar Assad dispose d'une marge de manouvre pleine et entière à Damas, et Assad a indiqué qu'il connaissait le prix à payer pour récupérer le Golan.

A court terme, un accord israélo-syrien est un meilleur pari pour Washington, avec de meilleures chances de succès et des conséquences régionales (relatives à l'Iran) plus importantes qu'un accord partiel israélo-palestinien. Il pourrait même s'avérer très bénéfique pour les voix modérés parmi les palestiniens. Mais cela n'arrivera que si Obama fait preuve de plus d'acharnement et de cohérence.

Yossi Alpher est coéditeur de bitterlemons.org et ancien directeur du Centre pour les Etudes Stratégiques de l'Université de Tel-Aviv.

Traduction : Yoël Amar  pour



Source : Liste de diffusion La Paix Maintenant


Avertissement
Palestine - Solidarité a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Moyen-Orient, de l'Amérique latine et de la Corse.
L' auteur du site travaille à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui lui seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas Palestine - Solidarité ne saurait être tenue responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont elle n'a pas la gestion, Palestine - Solidarité n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
Pour contacter le webmaster, cliquez < ici >

Retour  -  Accueil Ressources  -  Analyses  -  Communiques  -  Originaux