Les amis belges de Shalom Arshav
Une
trêve avec le Hamas : oui, mais seulement à Gaza
Yossi Alpher
Yossi Alpher Nouveau
cycle de violences dans la bande de Gaza et alentour. Une trêve
est à l’ordre du jour avec le parti islamiste. Mais elle doit
se limiter à Gaza. Etendre le cessez-le-feu à la Cisjordanie y
ouvrirait la voie d’une prise de pouvoir par le Hamas, au détriment
de l’Autorité Palestinienne et du Fatah, partenaires de négociations
de paix avec Israël.
Bitterlemons 11 - 17 mars 2008
Les deux dernières semaines ont
vu une série familière d’événements. Israël a exercé ses
représailles contre des terroristes palestiniens tirant des
roquettes depuis Gaza. S’ensuivit une escalade. La ville
d’Ashkelon et ses 100.000 habitants furent entraînés dans le
cercle de feu des missiles ennemis. Israël répliqua par une
modeste opération terrestre et aérienne. Celle-ci coûta la vie
à un grand nombre de Palestiniens, surtout des combattants du
Hamas. L’Egypte intervint avec une proposition de tahdiya,
ou pause dans les combats. Israël et le Hamas, chacun redoutant
le prix d’une escalade supplémentaire, semblèrent y répondre
par un signe positif.
Le Premier ministre Olmert démentit
avoir accepté une pause. Son cabinet venait juste d’ordonner
aux Forces de Défense d’Israël (FDI) de détruire les capacités
de tir par roquettes - mission impossible. De son côté, le
ministre de la Défense Ehud Barak parle toujours de préparatifs
pour une offensive majeure sur Gaza. Mais Olmert a déclaré
qu’Israël ne viserait aucune cible à Gaza si aucune attaque
sur Israël n’était lancée depuis la Bande. Exercice de
double-langage qui, selon la plupart des observateurs, sous-entend
l’acceptation de la tahdiya. Les Egyptiens seraient occupés à
transformer la pause en cessez-le-feu plein et entier ou hudna.
Du moins, ils le tenteraient. Ils chercheraient à étendre leur médiation
de manière à y inclure les conversations Israël-Hamas engagées
de longue date sur un échange de prisonniers. De même ils l’élargiraient
à de nouveaux arrangements quant aux passages frontaliers de
Gaza. On intégrerait à leur gestion l’Autorité Palestinienne
(AP) basée en Cisjordanie. Au moins symboliquement.
Côté palestinien, le
cessez-le-feu ne fut jamais total. Sauf durant quelques jours de
calme plat, des roquettes continuèrent à être tirées par
intermittence sur Israël. L’une d’elles frappa Ashkelon juste
après la visite de la ville par Olmert. Israël évita de
riposter sur Gaza. Pourtant selon ses estimations le Hamas est
capable, si il le désire, de faire cesser toute attaque sans
exception. A la place, à Bethléem en Cisjordanie, Israël
intercepta et liquida quatre terroristes du Jihad islamique
palestinien (JIP). Le JIP riposta par des tirs de roquettes depuis
Gaza. Le Hamas laissa faire. A son tour Israël lança des
attaques aériennes contre des objectifs du JIP. Peu après un
Palestinien résident de Jérusalem assassina huit jeunes étudiants
juifs d’un séminaire. Le Hamas et le Hezbollah fêtèrent l’évènement.
On peut, bien sûr, considérer
l’attaque d’objectifs du JIP en Cisjordanie comme peu urgente.
Affirmer qu’elle constituait une provocation délibérée de la
part d’Israël, manigancée par Barak pour saboter la pause à
Gaza. On peut aussi plaider qu’il aurait été plus sage pour
Israël de réduire son activité sécuritaire, de laisser
tranquille des terroristes « retraités » et de démanteler
en Cisjordanie les barrages superflus, comme étape destinée à
renforcer l’AP de Mahmoud Abbas et Salam Fayyad. D’un autre côté,
Israël a pour obligation d’éliminer les terroristes connus
dans une zone où il n’a jamais en aucune manière signé de
cessez-le-feu.
Si, comme à l’heure où j’écris,
le conflit actuel à Gaza et alentour se limite au tir
intermittent de Qassam, il est possible de restaurer d’une manière
ou d’une autre une variante de la tahdiyia. Dans la mesure où
un assaut majeur des FDI sur Gaza constitue une opération extrêmement
risquée et potentiellement onéreuse, il semble certainement
judicieux de laisser l’Egypte développer une série
d’arrangements entre Israël et le Hamas. Ils pourraient
faciliter la vie dans la Bande et ses environs, en particulier si
leurs résultats n’affaiblissent pas l’AP en Cisjordanie.
Mais ici se cache le piège. Dès
lors que le Hamas insiste pour étendre une tahdiya à la
Cisjordanie, Israël a toutes les raisons d’en rejeter la
demande. Et l’AP installée en Cisjordanie comme la Jordanie
voisine ont toutes les raisons de se méfier. Assurément, le
dispositif de sécurité d’Israël en Cisjordanie est excessif.
La présence permanente d’implantations et d’avant-postes
au-delà de la barrière de séparation constitue indiscutablement
un problème majeur de sécurité. Le gouvernement Olmert n’a
pas fait grand chose pour l’alléger. Mais la demande par le
Hamas d’un cessez-le-feu en Cisjordanie doit être comprise
comme une tentative flagrante d’affaiblir le Fatah, partenaire négociateur
d’Israël. Voire même de l’écarter du pouvoir comme à Gaza.
L’AP éprouve d’énormes
difficultés à combattre les terroristes de Cisjordanie. Elle
commence seulement à contenir l’activité criminelle (non pas
terroriste) dans certaines zones clefs. Une complaisance israélienne
envers la demande du Hamas de cesser ses efforts pour intercepter
les terroristes en Cisjordanie entraînerait un double effet négatif.
A court terme, elle dépeindrait le Hamas sous les traits du représentant
le plus fort et le plus efficace des aspirations et besoins
palestiniens. Cela affaiblirait le Fatah et l’AP. A long terme,
elle ouvrirait la porte à une prise du pouvoir par le Hamas en
Cisjordanie.
Si le Hamas désire réellement la
paix et la tranquillité dans la bande de Gaza, pour
l’administrer et y édifier une société islamique, il sait
maintenant que le gouvernement Olmert possède suffisamment de
bonnes raisons, et sent suffisamment la pression publique et
internationale pour conclure une trêve. Mais à Gaza. Seulement
à Gaza.
Traduction Kol Shalom
Yossi Alpher est
codirecteur de bitterlemons.org et bitterlemons-international.org.
Il est ancien directeur du « Jaffee Center for Strategic
Studies » et ancien conseiller principal du Premier Ehud
Barak.
Source : www.bitterlemons.org
Publié le 9 avril 2008 avec l'aimable
autorisation de Kol Shalom.
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