La semaine dernière marquait trois ans depuis le désengagement
[de Gaza]. Pour une écrasante majorité d’Israéliens, l’attitude
envers ce désengagement est ambivalente : d’un côté, il y a le
sentiment que l’expérience a échoué ; de l’autre, nous sommes
heureux de ne plus nous trouver à Gaza. Mais aussi, le
traitement réservé aux évacués nous fait honte ; en revanche,
nous sommes fiers du fait que l’Etat s’est montré capable
d’exécuter quelque chose une fois la décision prise. Il existe
encore d’autres opinions, selon à qui l’on parle.
Mais il y a un endroit où la controverse
n’existe pas. Au pays des colons, le désengagement est toujours
une blessure à vif. Il a modifié non seulement leur rapport à
l’Etat d’Israël, mais aussi les rapports entre eux. La direction
politique des colons s’est effondrée, et aujourd’hui, le
mouvement est emmené par des groupes incontrôlés de jeunes gens
qui montrent ouvertement leur dégoût d’Israël et de ses
institutions.
Cette colère leur fait perdre tout contrôle.
Pas un jour ne passe, ou quasiment, sans affrontement avec les
forces de sécurité. Un colon vole le fusil d’un soldat. Un
groupe d’enfants hurle « Nazis » en direction d’un détachement
de réservistes chargés de les protéger. Des jeeps du
commandement central sont bloquées. Une voiture de police a ses
pneus déchirés au cutter.
Lorsqu’un colon est arrêté, ils font le siège
du commissariat et tentent de faire sortir leur camarade par la
force. Ils sont furieux contre l’armée, n’ont que du mépris pour
la loi et refusent l’autorité de l’Etat. C’est le cas dans la
colonie sauvage de Migron, avec les infiltrations quotidiennes
dans la colonie évacuée de Homesh [évacuée en même temps que la
bande de Gaza, ndt] et sur les lieux du Tombeau de Joseph, ainsi
que dans des colonies comme Yitzhar et Tapouah’.
Et, comme toujours, ils font le travail de
leurs rivaux politiques, car bien mieux encore que n’importe
lequel des discours mous de Yossi Beilin, ils définissent
l’endroit où ils vivent comme "pas Israël".
Terre sans loi, sans respect, où des gens
différents de nous vivent et se comportent selon des codes que
nous ne comprenons pas. Terre qui a rejeté toutes les valeurs
fondamentales qui nous réunissent, nous les Israéliens : le
respect pour les soldats de Tsahal, le sens de la solidarité, la
conscience que la police accomplit un travail épuisant dans des
conditions impossibles.
Ces gens-là créent une situation où, quand le
jour sera venu et les accords signés sur la pelouse de
Washington, il sera bien plus facile de renoncer à cette terre,
qui ne nous appartient pas. Cette terre où ce ne sont pas
seulement les lois et les paysages qui sont différents. Les gens
aussi.