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Rebelle
Tariq Ramadan
Tariq Ramadan
Mercredi 14 octobre 2009
On aura
tout acheté, tout vendu, tout soldé.
Où sont passés les rebelles ? Dont le « Non ! » est un signe, la
résistance un étendard ?
Où sont passés les rebelles ? Dont la conscience est amour,
l’intelligence un espoir ?
Les
consciences endormies, la pensée uniforme, le consensus des
généreux. « Il faut être » ouvert, bon, pacifiste et humain.
« Il faut »… dans l’air du temps, de notre temps, il y a des
mots, des illusions et bien des mises en scène.
A nos
frontières se meurent de honte, de souffrances et de doutes, les
"clandestins", les « sans » papiers, les « sans » argent, les
« sans » mémoire. Nos mots les accueillent, nos cœurs les
réchauffent et nos actes les nient.
On aura
tout acheté, tout vendu, tout soldé
Où sont passés les rebelles ? Dont le « Non ! » est un signe, la
résistance un étendard ?
Où sont passés les rebelles ? Dont la conscience est amour,
l’intelligence un espoir ?
Notre
poésie, notre lâcheté. Les beaux mots pour ne rien changer. La
Nature qui s’abîme, les peuples que l’on oppresse, de Chine, de
Palestine, d’Irak, d’Afghanistan et de l’Afrique entière. Nos
valeurs sont si belles, leur destin si laid : coupables de tout,
responsables de rien.
Des bleus
au cœur, à l’âme, à l’amour. Des vies de plus en plus
artistiques…qui gardent de l’art l’illusion et bafouent
l’expression. Sans création… des désirs, de l’émotion, un art
sans art. Le divertissement des ennuyés, le goût des libres sans
liberté.
On aura
tout acheté, tout vendu, tout soldé.
Où sont passés les rebelles ? Dont le « Non ! » est un signe, la
résistance un étendard ?
Où sont passés les rebelles ? Dont la conscience est amour,
l’intelligence un espoir ?
Cette
jeunesse qui dit « non » avec les armes de sa soumission. Qui
crie les mots de sa liberté enchaînée aux barres de sa prison.
Colonisés par l’ennui, en mal de « nouveau », d’ivresse et
d’oubli. Libres de penser qu’il n’est plus de pensée libre et
heureux de pouvoir le crier et… le penser. Enchaînés.
Quelle
douleur habite ce monde ? Quelle folie vente sur nos êtres ?
Dans l’univers des perroquets qui répètent et des moutons qui
suivent…qui donc a ce pouvoir de faire de nous des
moutons-perroquets, heureux, en troupeau, négociant les
souffrances, noyés d’espérances.
On aura
tout acheté, tout vendu, tout soldé.
Où sont passés les rebelles ? Dont le « Non ! » est un signe, la
résistance un étendard ?
Où sont passés les rebelles ? Dont la conscience est amour,
l’intelligence un espoir ?
Sommes-nous vivants ? Sommes-nous morts ? La symphonie des
larmes, le concert des tristesses, le chant des solitudes, la
marche des brisés… Le vide, la force. Et… murmuré à l’Un, confié
à l’ami et offrir à l’amour ces quelques mots, ces larmes.
Sentir
tout au fond, très au fond, au cœur du cœur de soi, la tristesse
des étoiles, la plainte des forêts, la nature des Hommes. La
tempête des vents réveillant le souffle, et le courage, et
l’amour, et les fraternités.
On aura
tout acheté, tout vendu, tout soldé.
Où sont passés les rebelles ? Dont le « Non ! » est un signe, la
résistance un étendard ?
Où sont passés les rebelles ? Dont la conscience est amour,
l’intelligence un espoir ?
J’ai eu
envie de pleurer. Envie de partir.
Je cherche encore et je n’ai rien trouvé.
Ni les rebelles libérés du pire.
Ni le courage des cœurs en liberté.
© Tariq Ramadan 2008
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