La Foire du Livre de Turin s'est ouverte
hier. Sur fond de polémique. Israël est l'invité d'honneur.
On aura tout entendu. « Il ne faut pas confondre
la culture et la politique ». « Boycotter la
Foire, c'est refuser la paix, voire nier l'existence
d'Israël , vouloir sa destruction et sa disparation ».
Le Président de la République italienne a
décidé, après avoir entendu l’appel au boycottage, d’inaugurer
en personne la Foire le jeudi 8 mai : ce
n’est pas un acte politique… mais uniquement culturel, nous
dit-on. Bien sûr ! Et la polémique enfle et grossit…récupérée
par l’ambassadeur d’Israël en Italie qui salue le geste du
Président qui refuse de se plier aux diktats de ceux qui, en
boycottant, « veulent délégitimer Israël ». L’ambassadeur se
pose en victime et il est le seul, semble-t-il, à parfaitement
comprendre la portée politique du geste du Président italien.
Sombre ironie.
Israël encore victime des intolérants, des
extrémistes et des fous ! Le refrain continue, la chanson a fait
ses preuves. Quelle honte encore…
A l’heure où l’on parle du boycottage de la
Chine, on a au moins la décence de parler des victimes
tibétaines. C’est effectivement la moindre des choses ! Mais
dans le cas présent… rien, pas une ligne dans les journaux, pas
un reportage sur les chaînes de télévision et de radio : le
peuple palestinien n’existe pas ! La bande de Gaza, le blocus,
la prison, le ghetto, la famine … ce n’est rien ! Les exécutions
sommaires et la torture...des détails ! Le mur de la honte
n’enferme rien ni personne. La politique des colonies de
colonisation ne vole la terre de personne ! Rien, ou si peu, sur
la souffrance d’un peuple, son déni d’existence et de droit…
A la foire de Turin, la victime est Israël et le
droit à l’expression. Les Palestiniens n’existent pas, ni leur
oppression continuée, ni leur souffrance !
J’ai honte de cette classe politique et de ces
medias, honte de ceux qui veulent tant leur plaire, honte encore
de ces Arabes et/ou de ces musulmans et/ou de ces citoyens de
service, courtisans courbés sans dignité.
Ma tristesse est révolte. Calme révolte,
confiante patience. L’Histoire, c’est une promesse, se
souviendra…
La victoire n’est pas celle que l’on croit ...
© 2008 Tariq Ramadan