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El-Watan
Disparition de Georges
Habbache
Un combattant intransigeant
T. Hocine
George Habache
28
janvier 2008 Le leader
palestinien Georges Habbache est mort samedi dans le capitale
jordanienne à l’âge de 82 ans. Mais
l’histoire retiendra son parcours peu ordinaire pour avoir
consacré soixante années de sa vie à la cause de son peuple.
Toute une vie avant de s’éclipser puis de disparaître à tout
jamais. « Il est décédé samedi peu après 20h à l’hôpital »,
s’est contenté de dire l’ambassadeur de Palestine à Amman,
Atallah Khairy. Il a affirmé que Georges Habbache avait été
« hospitalisé il y a dix jours à Amman à la suite de
problèmes cardiaques ». Né à Lydda (aujourd’hui Lod, en
Israël) en 1925, il était malade depuis quelques années et
avait décidé de vivre en Jordanie, pays d’origine de son épouse.
Reste son message, puisque quelques jours avant sa mort, selon un
membre de son mouvement, il avait recommandé que la lutte
continue jusqu’à la libération de la Palestine. Et c’est là
d’ailleurs où réside l’essentiel de son parcours. Avocat
intransigeant du nationalisme palestinien, tribun révolutionnaire
enflammant ses auditoires par son charisme, Georges Habbache avait
fondé le FPLP à la fin de l’année 1967. Habbache avait quitté
la direction du FPLP en 2000. Le FPLP anime alors l’aile dure de
la résistance portée vers l’action armée. Et il en a mené,
et certaines étaient spectaculaires, ce que lui reprochait le
Fatah de Yasser Arafat. La Jordanie, où Georges Habbache est décédé
samedi, avait été son premier ennemi. Le FPLP s’était fait
connaître par les détournements d’avion en Jordanie et
Habbache avait appelé à la chute du régime, avant
l’affrontement sanglant de septembre 1970 (septembre noir) entre
l’OLP et l’armée jordanienne qui conduira à l’élimination
de la résistance en Jordanie. Le FPLP s’était également
illustré par des attentats contre des avions de la compagnie israélienne
El Al, des sabotages d’oléoducs et des attaques d’ambassades
israéliennes. Ou encore plus récemment, la liquidation tout
aussi spectaculaire puisqu’elle ne manque pas d’audace du
ministre israélien du Tourisme, au cinquième étage d’un hôtel
de Tel Aviv, en riposte à l’assassinat quelques jours plus tôt
de Abou Ali Moustapha qui avait succédé à Georges Habbache à
la tête du FPLP. Membre influent de la résistance palestinienne,
il avait toujours voulu préserver cette tendance pour avoir
assisté, mais sans jamais prendre part aux combats fratricides
interpalestiniens comme ceux des années 1980 au Liban, et
partant, assurer cette fameuse autonomie de décision
palestinienne. Cette sagesse et surtout ce bon sens apparaîtront
dans toute leur dimension lors de la réunion en 1991 à Alger du
CNP (Conseil national palestinien), avec, à son ordre du jour, la
tenue quelques jours plus tard à Madrid de la conférence pour la
paix au Proche-Orient. Bien entendu, lui le partisan de la lutte
armée connu pour son intransigeance, y était opposé. Mais il se
soumettra à la tendance générale. Et là, l’histoire
retiendra que pour la première fois de son histoire, le CNP,
entendre par là le défunt dirigeant Yasser Arafat, avait
substitué la règle de la majorité à celle du consensus qui prévalait
alors. Arafat avait remporté une victoire. Mais en réaction,
Georges Habbache avait refusé de faire de l’opposition.
« On passe, nous dira-t-il alors, de révolution jusqu’à
la victoire, à unité jusqu’à la victoire. » Depuis sa
retraite, il devait se dire qu’il avait bien raison de ne pas
croire à une quelconque volonté de paix israélienne. Mais
Arafat aussi ne manquait pas d’arguments en interpellant tous
ceux qui auraient d’autres choix, et cela après avoir constaté
que le monde avait changé, et que toutes les frontières arabes
avec la Palestine étaient hermétiquement fermées. Malgré tout
ce bon sens, Habbache avait quelques coups de colère. Comme
pendant la première Intifadha palestinienne déclenchée en décembre
1987. Il n’a pas manqué de dénoncer un prince arabe qui avait
offert 18 millions de dollars pour acquérir un poulain irlandais,
alors que les Palestiniens se battaient et étaient chaque jour
proches du désastre humanitaire. « Il faut que les Algériens
et l’opinion arabe connaissent cette vérité », nous
disait-il. Acheté aux enchères pour remporter des prix, ce
poulain, apprendra-t-on plus tard, n’a jamais participé à la
moindre course. Habbache s’en va sans renier ses principes, même
si des membres, souvent influents de son organisation, s’en éloigneront,
ou qu’ils chercheront à tempérer, se persuadant que la négociation
était possible. Droits de reproduction et de diffusion réservés
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