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El Watan
Crise du nucléaire iranien : El Baradeï et
la boule de feu
T. Hocine
22 juin 2008 Que peut-il bien se passer
actuellement en ce qui concerne le dossier du nucléaire iranien,
marqué par un blocage total des positions aussi bien du groupe
des six, que du principal concerné, c’est à dire l’Iran qui ne
cesse de réaffirmer que tout est négociable sauf la suspension
et encore moins l’arrêt du processus d’enrichissement de
l’uranium ?
Ce sont d’abord des informations parues dans la presse
américaine, faisant état d’un plan d’attaque et même de
préparatifs israéliens en ce sens. De telles informations
paraissaient tellement sérieuses et dangereuses qu’elles ont
suscité des réactions alarmistes de la part du directeur général
de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Mohamed
El Baradeï est, en effet, monté au créneau en estimant qu’ « une
frappe militaire (contre l’Iran) serait à mon avis pire que
toute autre chose (...). Elle transformerait la région du
Moyen-Orient en une boule de feu », a-t-il estimé, sur une
chaîne de télévision arabe. Il a ajouté qu’il serait incapable
dans ce cas de continuer à diriger l’AIEA. Toujours selon M. El
Baradeï : « une frappe militaire provoquerait le lancement d’un
plan d’urgence pour la fabrication d’une arme atomique avec le
consentement de tous les Iraniens, y compris ceux qui vivent en
Occident. » Déclarant ne pas voir dans l’état d’avancement
actuel du programme nucléaire iranien « un risque imminent » de
prolifération, Mohamed El Baradeï a indiqué qu’il n’aurait pas
sa « place (à la tête de l’AIEA) en cas de frappe militaire
contre l’Iran ». Les Etats-Unis ont, quant à eux, affirmé, le
même jour, qu’ils privilégiaient toujours la voie diplomatique
dans le dossier nucléaire iranien, suite aux informations selon
lesquelles Israël préparerait son armée à une éventuelle attaque
contre les installations nucléaires iraniennes. « Nous voulons
une solution diplomatique à ce problème », a déclaré
l’ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, Zalmay Khalilzad. « J’ai
vu l’article dans le journal. Notre point de vue est connu, il
serait inacceptable que l’Iran se dote d’armes nucléaires (...)
mais maintenant nous sommes dans la phase de diplomatie », a
précisé l’ambassadeur. M. Khalilzad qui répondait à une question
sur des informations de presse selon lesquelles des manœuvres
militaires israéliennes lancées, au début du mois, semblaient
destinées à préparer l’armée à une éventuelle attaque contre les
installations nucléaires iraniennes, selon des responsables
américains. Un responsable du Pentagone, cité par le New York
Times, a estimé qu’un des objectifs de cet exercice était
d’adresser un message montrant qu’Israël était prêt à une action
militaire si les efforts diplomatiques échouaient à obtenir de
Téhéran qu’il renonce à produire des armes nucléaires. Le 6
juin, le vice-Premier ministre israélien, Shaoul Mofaz,
déclarait que : « si l’Iran poursuit son programme d’armement
nucléaire, nous l’attaquerons. » M. Mofaz avait cependant
souligné qu’une telle opération ne pourrait se faire qu’avec le
soutien des Etats-Unis. Interrogé sur un éventuel succès de la
voie diplomatique, le porte-parole du département d’Etat, Sean
McCormack, a reconnu vendredi qu’un succès n’était pas encore à
l’ordre du jour. « On n’en est pas encore arrivés au point où
l’Iran — et ce régime — a changé de comportement », a-t-il
affirmé. Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a mis
en garde de son côté contre un risque de répétition avec l’Iran,
de l’intervention américaine en Irak, qui avait été justifiée
par de « soi-disant » preuves de l’existence d’un programme
nucléaire irakien. La politique de chaque Etat « doit être
fondée sur des faits. Vous vous souvenez des faits, ces
soi-disant faits qui ont été présentés avant que l’Irak ne soit
attaqué », a-t-il ironisé, lors d’une conférence à Moscou.
« Nous avons demandé à de nombreuses reprises à nos collègues
américains et israéliens, qui se disent parfaitement certains
que l’Iran est en train de se doter de la bombe atomique, de
fournir des informations factuelles soutenant cette assertion.
Pour l’heure, nous n’en avons pas vues », a ajouté M. Lavrov. Un
important dignitaire religieux iranien a aussitôt mis en garde
Israël contre une éventuelle attaque contre son pays, affirmant
que la riposte de l’Iran serait « terrible ». Hier pourtant, le
porte-parole du gouvernement iranien, jugeait tout simplement
« impossible » une éventuelle attaque israélienne. Gholamhossein
Elham a affirmé, par ailleurs, que son pays refusait toute
négociation avec les grandes puissances sur son programme
nucléaire basée sur la suspension (la suspicion) de
l’enrichissement d’uranium. La boucle est ainsi bouclée, si bien
entendu on s’en tenait strictement à ce dialogue de sourds, où
le seul élément vérifiable c’est que si Israël est une puissance
nucléaire, elle ne doit ce statut qu’à la complicité de
l’occident.
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réservés © El Watan 2006.
Publié le 23 juin 2008.
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