Opinion
Le messager de la
coexistence
Soraya Hélou
Mgr Béchara Raï
Mercredi 12 octobre
2011
Dans les petites villes comme dans
les grandes cités, face à une foule
enthousiaste ou avec des interlocuteurs
en petit comité, le patriarche maronite
tient le même langage : il faut à tout
prix préserver la présence chrétienne
dans la région. En dépit de la campagne
menée par le lobby du 14 mars auprès de
l’administration américaine contre Mgr
Béchara Raï, croyant ainsi peser sur ses
discours et sur ses opinions, celui-ci
n’a pas changé d’une virgule ce qu’il
avait déjà déclaré devant ses
interlocuteurs officiels français et qui
lui avaient valu tant de critiques bien
peu diplomatiques de la part des
autorités françaises et très politiques
de la part des piliers du 14 mars au
Liban.
Devant les Libanais d’origine
installés depuis des décennies aux
Etats-Unis, le patriarche maronite a
rappelé l’importance du Liban dans
sa diversité religieuse et communautaire
ainsi que le rôle des maronites dans la
formation de l’identité libanaise. A ses
interlocuteurs inquiets des menaces qui
pèsent sur les chrétiens et sur les
démocraties occidentales face au danger
islamiste, le patriarche a parlé
d’avenir, de fusion islamo-chrétienne et
d’intérêts communs à toutes les
communautés. Mgr Raï a délivré à toutes
les étapes de son parcours américain des
messages simples et clairs souvent
nouveaux dans la bouche d’un si haut
responsable de l’Eglise maronite. Il a
ainsi parlé d’entente, d’héritage
culturel religieux qu’il faut continuer
à transmettre de génération en
génération, cet héritage étant le
contraire du repli sur soi. Avec une
patience et une courtoisie extrêmes, il
a répondu à toutes les questions posées
par les émigrés libanais, vantant
l’importance du Liban et la nécessité
d’y préserver l’équilibre démographique
en poussant les Libanais à enregistrer
leurs enfants dans les consulats du
Liban. Mieux qu’un dirigeant politique,
plus qu’un leader, le patriarche
maronite a appelé les Libanais de
l’étranger à ne pas abandonner leur pays
d’origine et surtout il les a poussés à
croire en son avenir car il y va de
l’avenir de la région. Il a rappelé aux
maronites qu’ils ne doivent plus avoir
la peur des minorités car leur Eglise
est à la dimension du monde. S’il a
évité les pièges politiques, Mgr Béchara
Raï a montré à tous ses détracteurs
qu’il est porteur d’un message universel
de coexistence entre toutes les
communautés, montrant que le modèle
libanais peut survivre et apporter des
solutions aux crises d’intégration qui
ébranlent le monde occidental.
Mgr Raï a aussi parlé de justice, de
communion et d’amour, rappelant que
l’intérêt du Liban et de son
environnement prime pour lui toute autre
considération puisqu’il est vital de
préserver la présence chrétienne dans la
région, alors que les régimes
occidentaux ont eu d’autres priorités.
D’ailleurs le massacre de Coptes en
Egypte est venu confirmer ses
appréhensions et ses appels à s’assurer
de la relève avant d’appeler à un
changement qui pourrait se transformer
en catastrophe pour les chrétiens comme
ce fut le cas en Irak. Il a montré ainsi
qu’il n’était pas seulement un berger
soucieux de son troupeau, mais un
visionnaire qui a sincèrement à cœur les
intérêts de sa communauté et de la
région. Les Libanais des Etats-Unis ne
s’y sont pas trompés, se rendant en
masse à toutes les étapes de son
parcours américain, avides de le voir,
de l’écouter et de se faire
photographier à ses côtés, lui qui a
transformé chacune de ses escales
américaines en messe. Sous le ciel
américain, le patriarche maronite est
devenu le messager de la coexistence, de
l’entente et le défenseur des intérêts
des chrétiens de la région , non de ceux
qui se sont pendant longtemps présentés
comme leurs parrains alors qu’ils
n’étaient que leurs fossoyeurs.
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