Le ghetto de Gaza, un an après le
carnage
Nos gouvernants sont
complices de la barbarie israélienne
Silvia Cattori
Samedi 26
décembre 2009
Le 27 décembre 2008, en trois minutes, quatre-vingt
bombardiers F16 des forces de l’air israéliennes larguaient plus
de cent tonnes d’explosifs en allant du nord au sud, de Beit
Hanoun jusqu’à Rafah.
C’était le début de l’agression barbare dite « Plomb durci » ;
le début d’une guerre criminelle contre un peuple sans défense
qui allait faire, en trois semaines, 1’400 morts dont 400 femmes
et enfants, 5’300 blessés, mutilés, dont 2’400 femmes et
enfants, des dizaines de milliers de sans abris, au sein d’une
population civile déjà exsangue après les longs mois de
fermeture de Gaza par Israël ; un blocus total qui l’avait
privée de nourriture et de tous les produits nécessaires, comme
les médicaments, le gaz, le mazout, en violation de toutes les
conventions internationales.
Aujourd’hui, un an après ce
déluge de feu qui avait tout dévasté, la population de Gaza,
affaiblie, exsangue, tente désespérément de survivre au milieu
des ruines et des privations. Les hôpitaux manquent de
médicaments et de pièces de remplacement. Les infrastructures
d’adduction d’eau potable et d’évacuation des eaux usées sont
dans un état effrayant. La situation sanitaire met en danger la
santé des gens. Israël bloque également l’entrée des matériaux
nécessaires à la reconstruction.
Le laissez faire de la part
de l’Occident qui protège l’État voyou d’Israël, au lieu de le
mettre au ban des nations, est un immense scandale. Un million
et demi de personnes - dont plus de la moitié sont des enfants -
demeurent indéfiniment étouffées, enfermées au su et au vu du
monde dans ce qu’Israël, par son blocus hermétique, a transformé
en une effrayante prison.
Et nos lâches gouvernants qui
aiment tant à se présenter comme les défenseurs des Droits de
l’Homme, que font-ils face à cette situation ?
Absolument rien. Ils
participent aux commémorations de massacres qui se sont produits
il y a plus de 60 ans, mais ils ne veulent rien faire pour
contraindre Israël à mettre un terme au plus grand et terrifiant
crime contre l’humanité de notre époque :
le ghetto de Gaza. Un ghetto qui incarne le martyre de
tout un peuple laissé à l’abandon ; un martyre qui se déroule
sous leurs yeux pendant qu’ils se taisent ; alors qu’ils ont des
moyens d’agir, des moyens de faire entendre leur voix. Cela est
impardonnable. Et, pour les millions de gens qui se solidarisent
avec la population en détresse de Gaza, c’est un scandale
supplémentaire.
En dépit des nombreux appels
de personnalités éminentes [1],
en dépit des cris d’alarme de diverses instances de l’ONU [2],
en dépit du rapport Goldstone dénonçant les crimes de guerre
commis par l’armée israélienne [3],
nos gouvernements se refusent à exercer la moindre pression
réelle sur Israël pour mettre fin à cette situation scandaleuse.
Des dizaines de milliers de
citoyens révoltés par cette injustice ont commencé à se mettre
en mouvement et à agir pour tenter de briser ce blocus mortel
infligé à la population de Gaza. Ils sont partis par mer [4]
ou par terre [5].
Ils agissent pour isoler Israël comme jadis l’Afrique du Sud de
l’apartheid [6].
Ils dénoncent tous les États, directement ou indirectement
complices, et qui bafouent l’opinion de leurs peuples.
Le gouvernement de mon pays,
ainsi que tous les gouvernements qui collaborent avec Israël et
le laissent impuni, sont complices des souffrances qu’il inflige
à des centaines de milliers d’enfants traumatisés, complices des
punitions collectives qu’il impose à un million et demi de
personnes par le siège de Gaza.
Certains gouvernements y
participent directement, comme les gouvernements états-unien et
français qui s’emploient en ce moment à sceller la frontière sud
de la bande de Gaza par un mur métallique souterrain [7]
destiné à fermer tous les tunnels par lesquels un peu de
nourriture parvient encore à la population, et à affamer
celle-ci dans l’espoir qu’elle finisse par se retourner contre
le Hamas. Autrement dit, ils s’associent cyniquement, pour des
raisons politiques, à une punition collective qui viole
outrageusement le droit international.
Et ils s’associent à la
politique répressive du dictateur égyptien Hosni Moubarak, qui
s’ingénie à multiplier les obstacles au passage des convois
humanitaires organisés par des volontaires internationaux vers
Gaza.
En ce moment même, après un
long périple par la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne,
l’Autriche, l’Italie, la Grèce, la Turquie et la Syrie, les 150
véhicules et les 400 personnes du convoi d’aide humanitaire « Viva
Palestina 3 » [8],
partis de Londres le 6 décembre, se trouvent bloqués en Jordanie
à Aqaba, interdits d’entrée en Egypte depuis deux jours, et les
participants s’apprêtent à commencer une grève de la faim pour
obtenir le passage. C’est un grand événement dont notre presse
ne souffle mot, comme d’habitude quand il s’agit de dénoncer la
situation imposée à Gaza.
Le député britannique George
Galloway, qui voyage avec le convoi, a déclaré : « Israël
maintient le siège de Gaza depuis trois ans et demi en violation
du droit international. Il n’a laissé entrer aucune aide ou
matériaux pour la reconstruction après son attaque du début de
l’année. Notre convoi est déterminé à briser le siège pour
apporter l’aide nécessaire. Le moral est haut dans notre camp, à
Aquaba, et nous n’irons nulle part ailleurs qu’à Gaza. »
Seule la pression de
l’opinion publique pourra finir par contraindre l’Egypte,
associée à Israël dans le blocus de Gaza, à ouvrir les portes de
l’enfer, et à obliger les gouvernements occidentaux, et leurs
autres alliés parmi les dictateurs arabes, à se départir de leur
criminelle complicité et à agir enfin pour qu’Israël soit
sanctionné.
Les manifestations
organisées, du 27 décembre à mi janvier, pour accompagner la
Campagne internationale « Marche de la liberté »
montrent la voie à suivre [9].
L’engagement courageux et admirable de milliers de citoyens,
impliquant 42 pays, se développe en ce moment comme une vague
irrésistible, sera-t-il suffisant pour obliger nos gouvernements
à agir enfin ?
Notes:
[1]
Voir par exemple : « Conflit
israélo-palestinien - Jimmy Carter dénonce le blocus israélien à
Gaza », ledevoir.com,
17 juin 2009.
[2]
Voir par exemple :
« U.N.
official pleads for opening of Gaza borders »,
par Louis Charbonneau, Reuters, 3 avril
2009.
Dans une déclaration faite à New York le 24
décembre 2009, à l’approche du triste anniversaire du carnage
israélien, Richard Falk, rapporteur des Nations Unies pour les
Droits de l’Homme dans les territoires occupés, a appelé à
sanctionner l’occupation et à l’obliger à lever le blocus contre
Gaza. Il a déclaré que « les souffrances d’un
million et demi de personnes affectées par le siège sioniste se
poursuivait sans aucune objection de la part de la communauté
internationale » et noté que « la présente
situation constitue un échec catastrophique des principaux
gouvernements à honorer leurs responsabilités ».
[3]
Voir : « United
Nations Fact Finding Mission on the Gaza Conflict »,
29 septembre 2009 (texte en plusieurs langues).
[4]
Plusieurs bateaux du Mouvement « Free Gaza » sont parvenus à
briser le siège. Voir à ce sujet :
« Nous
l’avons fait », par Silvia Cattori,
silviacattori.net, 25 août 2008.
[5]
Voir le site web de Viva Palestina :
http://www.vivapalestina.org/home.htm
[6]
Voir le site web de la campagne de Boycott, Désinvestissement et
Sanctions (BDS) contre Israël :
http://www.bdsmovement.net/
[7]
Voir : « L’Egypte
et les Etats-Unis mettent tout en œuvre pour étouffer Gaza »,
info-palestine.net, 15 décembre 2009.
Selon de toutes
récentes révélations choquantes, des officiers français
participent avec des militaires étatsuniens à la supervision de
la construction de ce nouveau mur métallique ; voir :
« Gaza :
la France supervise le prolongement du Mur de séparation »,
Réseau Voltaire, 26 décembre 2009.
Il y a lieu de noter que, la nouvelle
politique de la France mise en œuvre par Sarkozy depuis son
arrivée au pouvoir a aggravé la situation déjà terrifiante des
Palestiniens. Elle est porteuse de très grands malheurs et
dangers. Encore récemment, au sein de l’Union Européenne, c’est
la France de Sarkozy et Kouchner qui, sur la question de
Jérusalem, a défendu la position d’Israël en s’opposant à celle
de la Suède qui était plus juste à l’égard des Palestiniens.
[8]
Voir :
Site de
Viva Palestina :
http://www.vivapalestina.org/home.htm
« Egypt
urged to allow Gaza aid »,
aljazeera.net, 26 décembre 2009.
[9]
Voir :
« International
Campaign in Support of the Gaza Freedom March : Hundreds of
Unison Actions Assembled around the World »
Liste
des actions de solidarité prévues :
http://salsa.democracyinaction.org/o/424/p/salsa/event/common/public/index.sjs ?distributed_event_KEY=548
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