Youssef Nada : Un homme dont les droits sont
violés
Lettre ouverte à Madame Micheline
Calmy-Rey
Silvia Cattori
21 juin 2008 Madame la
Ministre des Affaires étrangères,
C’est dans le cadre de mon
activité de journaliste que j’ai été amenée à étudier le cas de
M. Youssef Nada, et à le rencontrer. Mais c’est en qualité de
simple citoyenne suisse, attachée aux valeurs de droit et aux
principes humanitaires défendus par notre pays, que je prends la
liberté de m’adresser à vous.
J’aimerais porter à votre
connaissance l’entretien ci-joint (1), en espérant que la voix
brisée de M. Youssef Nada, puisse être entendue de vous et de
vos collègues du Conseil fédéral.
Vous avez le pouvoir, si vous
le décidez, d’agir pour faire cesser l’injustice intolérable qui
est faite à M. Nada, en faisant savoir à l’ONU que la Suisse ne
peut continuer d’appliquer contre lui des sanctions qui violent
les droits et les libertés fondamentales garanties par l’Etat de
droit suisse et par la Convention européenne des droits de
l’homme, que la Suisse a toujours affirmé défendre.
Alors que, après trois ans et
demi d’enquête, le Ministère public de la Confédération n’a rien
trouvé à reprocher à M. Nada et a classé l’affaire, il est
incompréhensible que le Conseil fédéral continue d’appliquer des
sanctions non fondées de l’ONU, qui privent injustement et
illégalement M. Nada de sa liberté, depuis novembre 2001.
Le fait que vous-même, en
votre double qualité de ministre des Affaires étrangères et de
membre du parti socialiste suisse, n’interveniez pas de manière
énergique pour que le nom de M. Nada soit radié de la liste des
« présumés soutiens au terrorisme » de l’ONU, alors que le
Tribunal fédéral a invité le gouvernement suisse à intervenir
auprès de l’ONU, nous paraît incompréhensible.
Les membres du gouvernement
suisse sont issus de partis qui ont œuvré pour que la
Confédération helvétique devienne membre de l’ONU, en affirmant
qu’elle pourrait ainsi mieux « faire entendre sa voix » pour
défendre les principes de droit et les valeurs humanitaires
auxquels elle croit.
Où est le respect de cet
engagement si la Suisse cède aux pressions des Etats-Unis en
maintenant contre des personnes injustement accusées, des
sanctions qu’elle sait parfaitement iniques ?
Tout ce que nous savons, le
gouvernement suisse le sait.
M. Dick Marty dans son
rapport du 19 mars 2007 au Conseil de l’Europe, sur les « listes
noires » de l’ONU, notait : « Il est franchement
choquant de voir qu’une organisation internationale dont le but
est d’affirmer les principes de paix, de tolérance et de
justice, ait elle-même recours à des moyens qui ne respectent
pas les principes fondamentaux qui sont à la base de toute
restriction de la liberté individuelle dans n’importe quel pays
civilisé : droit d’être entendu, droit de recourir à une
autorité judiciaire indépendante, droit à un procès équitable,
principe de la proportionnalité ».
Il nous paraît
incompréhensible, et particulièrement choquant, que les
autorités suisses continuent de refuser à M. Nada, malade, le
droit de sortir de sa minuscule enclave de Campione d’Italia
pour aller se faire soigner, en Suisse, par les médecins
spécialisés que son état de santé requiert. Cela nous paraît
contrevenir à tous les principes humanitaires que défend la
Suisse.
Cela fait sept années que la
vie de ce banquier, avenant et cultivé, qui n’a rien à se
reprocher, a été brutalement cassée par des sanctions qui
portent atteinte aux droits de l’homme. Son calvaire a assez
duré.
La justice voudrait que vous
interveniez énergiquement pour y mettre un terme, d’une part en
agissant auprès de l’ONU pour faire radier son nom de la « liste
noire », et d’autre part en faisant cesser immédiatement
l’application par la Suisse des sanctions de l’ONU contre lui.
Veuillez agréer, Madame,
l’expression de ma considération distinguée.
Le 20 juin 2008
(1) Voir l’entretien
mentionné :
en version
française :
http://www.mondialisation.ca/index.php ?context=va&aid=9319
en version
allemande :
http://www.silviacattori.net/article462.html
en version
anglaise :
http://www.informationclearinghouse.info/article20120.htm
Copie à M. Youssef Nada
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