Des sources
diplomatiques occidentales à Beyrouth
révèlent que les rebelles syriens
s'apprêtent à lancer, très
prochainement, leur plus vaste offensive
contre les troupes régulières depuis le
début des troubles en Syrie, il y a deux
ans. Les préparatifs pour cette attaque,
qui sera lancée simultanément dans
plusieurs régions du pays, ont duré près
de trois mois et ont nécessité un gros
effort de coordination entre une
quinzaine d'Etats arabes et européens,
en plus de la Turquie, le tout sous la
supervision directe des Etats-Unis. Le
Front al-Nosra, proche d'Al-Qaïda, sera
associé à cette action militaire
d'envergure.
Ces mêmes sources ajoutent que
d'énormes quantités d'armes de tout
calibre ont été acheminées en Syrie via
la Turquie, le Liban et la Jordanie. En
plus des armes légères et moyennes, des
missiles antichars Milan (Missile
d'infanterie léger Nato) de fabrication
française, et américaine M47 Dragon
(FGM-77), ont été livrés aux insurgés,
ainsi que des missiles sol-air Sam 7
(9K32 Strela-2), des mortiers de 120 mm
et des fusils de précision de
fabrication américaine et autrichienne.
Cet énorme arsenal a été acheté en Libye
et en Croatie, alors que les armes
qualitatives ont été fournies par la
Grande-Bretagne ou prélevées dans les
dépôts de l'armée américaine en Europe.
Les armes ont été transportées dans des
avions cargos turcs et jordaniens ou
transportées par voie de mer dans des
navires banalisés. La source
diplomatique indique que cette vaste
opération a été financée par l'Arabie
saoudite, le Qatar et les Emirats arabes
unis.
Une source de sécurité libanaise a
déclaré que le trafic d'armes entre le
Liban et la Syrie avait
exponentiellement augmenté ces dernières
semaines, notamment pour les armes
moyennes et lourdes, alors que les armes
légères, qui existent désormais en
abondance en Syrie, sont maintenant
vendues sur le marché libanais.
Ce transfert massif d'armes vers la
Syrie a été confirmé par l'influent
journal croate Jutarnji List, dans son
édition de vendredi. Le quotidien
rapporte que la capitale Zaghreb a servi
pendant des mois comme «point de transit
pour les armes destinées aux rebelles
syriens». Selon le journal, quelque 75
avions affrétés par la Jordanie et la
Turquie ont transporté «entre novembre
2012 et février dernier près de 3000
tonnes d'armes et de munitions». «Les
armes provenaient de Croatie -notamment
des fusils, des roquettes et des
lance-grenades- ainsi que de plusieurs
autres pays européens, dont la
Grande-Bretagne», écrit Jutarnji List.
Fin février, le New York Times (NYT)
rapportait que l'Arabie saoudite a
ravitaillé les rebelles syriens avec des
armes achetées à la Croatie. Citant des
responsables américains et occidentaux,
le quotidien de la côte Est révélait que
ces armes, dont l'achat est financé par
l'Arabie saoudite, faisaient parties
d'un «surplus non déclaré» d'armes de la
guerre des Balkans dans les années 1990.
«Elles ont commencé à arriver aux
combattants anti-régime via la Jordanie
en décembre», avait ajouté le NYT.
Recrutement et entrainement
La source diplomatique occidentale à
Beyrouth ajoute que cet effort
d'armement exceptionnel s'est accompagné
d'un recrutement de combattants
extrémistes dans une trentaine pays «via
les réseaux djihadistes» pour être
envoyés en Syrie. Ces militants viennent
essentiellement de Tunisie, de Libye, de
pays du Golfe, du Pakistan, mais aussi
de pays européens. «Ces quatre derniers
mois, 5000 à 8000 combattants étrangers
ont afflué en Syrie», poursuit la
source.
Cette information, connue des
services de renseignements du monde
entier et des journalistes
depuis longtemps, a été une nouvelle
confirmée vendredi par le quotidien
belge la Libre Belgique. Citant la
présidente de l'agence européenne
Eurojust, Michèle Coninsx, le journal
écrit que «des centaines de jeunes
Européens, dont des dizaines de
Flamands, se battent en Syrie aux côtés
d'islamistes radicaux». Mme Coninsx
«s'est déclarée préoccupée par le nombre
croissant de jeunes faisant
l'aller-retour entre l'Europe et la
Syrie». «Selon l'Eurojust, chargé de
coordonner les activités des autorités
judiciaires nationales, cette tendance
inspire de l'inquiétude, car des jeunes
entrent en contact avec des mouvements
radicaux souvent liés à Al-Qaïda et
représentent un danger à leur retour en
Europe», conclut la Libre Belgique.
Dans le même temps, des milliers de
combattants ont suivi un entrainement
intensif dans des camps installés en
Turquie, en Jordanie et en Syrie même,
sous la supervision directe
d'instructeurs militaires de ces deux
pays, ainsi que d'officiers
britanniques, français et américains. Le
Times britannique avait révélé, fin
février, que des officiers américains
entrainaient des rebelles syriens dans
des camps de l'armée jordanienne, non
loin de la frontière syrienne.
Le quotidien libanais Al-Akhbar
rapporte dans son édition de vendredi
que des «groupes de rebelles reçoivent
des formations spécialisées dans des
Etats du Golfe, notamment le Qatar,
l’Arabie saoudite et les Emirats arabes
unis». Le journal fait état également de
«l'intensification de l’activité des
services de renseignements arabes,
occidentaux et israéliens à l’intérieur
de la Syrie».
La source diplomatique indique que
des structures de coordination ont été
mises en place pour fournir aux rebelles
syriens des informations précises sur
les mouvements, les effectifs engagés et
les lieux de déploiement de l'armée
régulière syrienne. «Plusieurs
satellites sont actuellement
opérationnels en permanence au dessus de
la Syrie et ils fournissent en temps
réel des informations à des chambres
d'opérations basées en Turquie et en
Jordanie, qui les transmettent à leur
tour aux groupes rebelles en Syrie»,
ajoute la source précitée.
Une source politique libanaise
affirme que «l'annonce par la Ligue
arabe qu'elle laissait aux Etats membres
la liberté d'armer les rebelles syriens
ne vient que confirmer des activités qui
sont en vigueur depuis déjà plus d'un an
et qui se sont intensifiées ces quatre
derniers mois».
Dans ses déclarations lors de sa
tournée au Moyen-Orient, le secrétaire
d'Etat américain, John Kerry, a fourni
la couverture politique à ce plan
complexe. A travers cette vaste
offensive, qui n'attend plus que le
signal des Etats-Unis pour commencer,
Washington espère modifier en sa faveur
les rapports de forces sur le terrain,
avant de commencer sérieusement les
négociations avec la Russie à partir
d'une position avantageuse.
Cependant, le régime se prépare sur
tous les plans à faire face à cette
nouvelle offensive. La reconstitution de
ses réseaux de renseignements lui a
d'ailleurs permis, ces dernières
semaines, d'anticiper les mouvements des
rebelles, notamment autour de Damas, à
Homs et à Alep. Il a par ailleurs achevé
l'entrainement de 60000 recrues de la
force paramilitaire appelée l'Armée
nationale de défense.
Le combat s'annonce donc féroce.
Source: moqawama.org