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Venezuela

Venezuela : de la victoire électorale à l'amendement constitutionel
Salim Lamrani


Salim Lamrani

13 décembre 2008    

            Les élections régionales et municipales du 23 novembre 2008 ont une nouvelle fois démontré la popularité du gouvernement du président vénézuelien Hugo Chávez. Pour la douzième fois en dix ans, le leader bolivarien a remporté le processus électoral par une écrasante majorité. En effet, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV) a remporté 17 Etats sur 22 et 264 municipalités sur les 328 en jeu dont 18 capitales régionales sur 22, s’affirmant comme la première force politique du pays. Ainsi, Chávez et ses partisans ont remporté 77% des Etats et 80% des mairies. De son côté, l’opposition a ainsi perdu contrôle de deux Etats passant de sept à cinq, même si elle a remporté la mairie de la Caracas, capitale du pays1.  

            « Il s’agit d’une grande victoire du PSUV », a déclaré Chávez au sujet de son nouveau parti2. La participation a atteint les 65,25%, un chiffre sans précédent pour des élections régionales. « Il s’agit de la victoire du Venezuela et le chemin démocratique choisi par le peuple a été ratifié », a-t-il ajouté3. Ainsi, le PSUV a gagné 1,4 million de voix par rapport au référendum du 2 décembre 2007 sur la réforme constitutionnelle, ce qui représente une hausse de 20%, alors que l’opposition a subi une baisse de 10% par rapport au dernier scrutin4.

            Quatre des cinq gouverneurs élus avec les voix du chavisme en 2006 et qui étaient entrés en dissidence par la suite ont été sanctionnés par les électeurs et ont perdu les Etats de Sucre, Guárico, Trujillo et Aragua. « La dissidence a été pulvérisée », a souligné le leader bolivarien, en référence à la trahison politique de ses anciens partisans. Au total, l’opposition a obtenu 25,17% des voix5.

            « Le peuple, autant ceux qui ont voté pour les candidats de la révolution que ceux qui ont voté pour les autres candidats, a démontré qu’il y a ici un système démocratique et que l’on respecte les décisions du peuple », a affirmé Chávez. Le président vénézuelien a tenu à féliciter l’opposition : « Je veux féliciter les vainqueurs des partis d’opposition. Je reconnais leur victoire et je leur lance un appel au plus grand engagement démocratique ». Il les a mis en garde contre toute tentative « de reprendre les vieux chemins du putschisme », en référence au coup d’Etat d’avril 20026.

            Depuis son arrivée au pouvoir en 1998, le nombre de votes obtenus par Chávez n’a cessé d’augmenter. En 1998, il avait obtenu 32% des voix lors des élections régionales contre 41% pour l’opposition, avec une abstention de 47,6%. En 2000, le chiffre passa à 34% contre 45% pour l’opposition. En 2004, le leader bolivarien a obtenu 68% des voix contre 21% pour l’opposition. Ainsi, d’une mairie en 1998, Chávez est passé à 114 en 2000, 226 en 2004 et 264 en 20087.

            Malgré l’écrasante victoire des partisans de Hugo Chávez, malgré le fait que l’opposition ait perdu deux Etats et 38 mairies par rapport au statu quo préélectoral, les médias occidentaux tels que Associated Press, l’Agence France Presse ou Reuters ont tenté d’occulter le nouveau triomphe électoral du leader bolivarien, essayant de transformer une véritable débâcle en un succès pour ses adversaires8.

            L’extraordinaire popularité du président Chávez s’explique principalement par les spectaculaires réformes économiques et sociales entreprises depuis 1998, qui ont singulièrement amélioré le niveau de vie des catégories les plus fragiles de la population. De plus, l’opposition reste profondément divisée et n’a pas d’autre discours à proposer que celui d’une aversion viscérale à l’égard du gouvernement. Elle ne dispose pas de programme crédible et ne doit sa survie politique qu’à la forte campagne de soutien orchestrée par les médias privés, ainsi qu’au financement octroyé par Washington.

Vers une proposition d’amendement constitutionnel

            En dix ans, Hugo Chávez n’a souffert qu’un seul revers électoral. Le 2 décembre 2007, sa proposition de réforme constitutionnelle, pourtant progressiste mais complexe et mal expliquée à la population, a été rejetée par une infime majorité de 124 961 électeurs, représentant 1,41% des votants9. L’implacable campagne de désinformation nationale et internationale lancée par l’opposition à ce sujet avait été sous-estimée par les partisans du président. Ces derniers avaient fait preuve d’un excès d’optimisme, pensant que la bataille électorale était gagnée d’avance, et n’avaient pas réussi à mobiliser leurs électeurs, entraînant une abstention de plus de 40%, qui s’est révélée fortement préjudiciable. La victoire étriquée des détracteurs de Chávez fut néanmoins un échec pour le pouvoir en place.

            Fort de la nouvelle victoire du 23 novembre 2008, le PSUV a décidé de lancer un référendum en faveur d’un amendement de l’article 230 de la Constitution afin d’abolir la limite des mandats présidentiels et permettre à Hugo Chávez de se représenter en 2013. Pour cela, le projet doit avoir le soutien d’au moins 30% des parlementaires de l’Assemblée nationale ou de 15% des électeurs inscrits. Le PSUV a décidé d’utiliser la voie parlementaire tout en lançant une campagne de collecte de signatures auprès des électeurs10. Pourtant, pour simplifier les choses, Chávez aurait pu présenter lui-même le projet d’amendement en Conseil des ministres et le soumettre à référendum. Mais il a préféré laisser l’initiative aux élus et à la population, suite à l’échec de 200711. Le référendum devrait avoir lieu en février 200912.

            L’opposition vénézuelienne a déjà commencé son travail de sape, avec la complicité des médias occidentaux, qui tentent eux aussi de présenter cet amendement comme étant anti-démocratique. Pourtant, la limite des mandats présidentiels est inexistante dans de nombreuses démocraties occidentales telles que la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie ou le Portugal. De la même manière, le Congrès colombien vient d’approuver un projet de référendum similaire permettant la réélection du président Alvaro Uribe en 2014, sans déclencher d’hystérie médiatique13.

Par ailleurs, en mai 2005, les Français avaient rejeté le traité constitutionnel européen à une large majorité. En février 2008, passant outre la volonté populaire, le président Nicolas Nicolas Sarkozy l’a fait ratifier par le Parlement, dans un silence médiatique assourdissant.

Les raisons de cette collusion des transnationales de l’information sont relativement simples : Uribe et Sarkozy sont des dirigeants de la droite dure, farouche défenseurs de l’ordre économique dominant, alors que Chávez est un président progressiste qui prône un modèle d’intégration régionale où l’être humain est placé au centre du projet de société.

 

Notes

1 El Nuevo Herald, « Victoria en Caracas fue la gran sorpresa para la oposición », 24 novembre 2008 ; Agencia Bolivariana de Noticias, « PSUV ganó 77% de las gobernaciones y 80% de las alcaldías destacó Chávez », 24 novembre 2008.

2 Agencia Bolivariana de Noticias, « Chávez : Estamos viendo un mapa rojo, rojito », 23 novembre 2008.

3 Agencia Bolivariana de Noticias, « Chávez sostiene que la victoria es de Venezuela y su Constitución », 24 novembre 2008.

4 Agencia Bolivariana de Noticias, « Hemos obtenido una gran victoria », 24 novembre 2008.

5 Agencia Bolivariana de Noticias, « Presidente Chávez : Hemos obtenido una gran victoria », 24 novembre 2008 ; Agencia Bolivariana de Noticias, « Oposición obtuvo respaldo de sólo 15% de la población total del país », 27 novembre 2008. 

6 El Nuevo Herald, « Chávez se felicita por triunfo del PSUV y reconoce victorias de la oposición », 24 novembre 2008.

7 Agencia Bolivariana de Noticias, « Presidente Chávez destacó ascenso de votos obtenidos en distintas elecciones desde 1998 », 24 novembre 2008.

8 Jorge Rueda, « Oposición gana terreno en el mapa político venezolano », The Associated Press, 24 novembre 2008 ; Fabiola Sanchez, « Venezuela's Chavez Faces New Challenges », The Associated Press, 24 novembre 2008 ; Ramon Sahmkow, « Venezuela : Chavez repart à l’assaut de la réélection », Agence France Presse, 1er décembre 2008 ; Ana Isabel Martínez, « Chávez busca camino expedito para enmienda constitucional », Reuters, 3 décembre 2008 ; 

9 Agencia Bolivariana de Noticias, « Cronología de triunfos de la Revolución Bolivariana », 13 novembre 2008.

10 Agencia Bolivariana de Noticias, « Referendo para enmienda constitucional se viabilizará por Asamblea Nacional », 5 décembre 2008 ; Agencia Bolivariana de Noticias, « Enmienda constitucional: mecanismo del poder popular », 2 décembre 2008.

11 El Nuevo Herald, « Crean dirección contra la reelección indefinida en Venezuela », 7 décembre 2008.

12 The Associated Press / El Nuevo Herald, « Consulta sobre reelección de Chávez sería en febrero », 2 décembre 2008 ; Christopher Toothaker, « Chavez Seeks Indefinite Re-election, again », The Associated Press, 30 novembre 2008.

13 Luis Jaime Acosta, « Congreso colombiano abre paso segunda reelección de Uribe », Reuters, 26 novembre 2008.

 

Salim Lamrani est enseignant, chargé de cours à l’Université Paris Descartes et journaliste français, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Il vient de publier Double Morale. Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme (Paris : Editions Estrella, 2008).

Contact : lamranisalim@yahoo.fr



Source : Salim Lamrani


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