Opinion
La guerre des
clans : monétaristes contre fiscalistes
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 30 janvier
2013
Monétaristes contre fiscalistes
Moult
aristocrates ouvriers, quelques
bureaucrates syndicaux, et nombres de
«bobos» ayant thésaurisé tout l’été
demandent aujourd’hui à être conseillés
afin de planquer leurs deniers durement
gagnés en ces temps d’austérité
économique aggravée.
J’ai donc
visité Internet à la recherche
d’économistes avisés. Je suis tombé sur
une vidéo très instructive où un gang de
spécialistes pédants, probablement des
Républicains américains, se pourfend et
s’épand en conjectures contradictoires
(1). J’ai pensé utile de traduire, pour
la compréhension d’un béotien, leur
bavardage discordant. Je cite au hasard
trois phrases remarquables prononcées
par ces parangons du capital : « Nous
sommes tous esclaves du gouvernement
mondial dirigé par les banques centrales
», et « Le marché libre (sic) finira par
réagir et se mettre au diapason de la
réalité économique », et enfin « Nous
savons tous qu’il y aura un prochain QE3
» !?...
Dans le
milieu de l’oligarchie financière
mondiale, la bisbille fait rage au sein
de la famille capitaliste monopoliste
entre, d'une part, ceux que j’appellerai
– faute de mieux – le clan des «
monétaristes », et, d'autre part, le
clan des «
fiscalistes ». Les capitalistes
monopolistes partagent actuellement le
pouvoir politique avec les «
monétaristes » en opposition aux «
fiscalistes ». La vidéo précitée vous
présente les récriminations des «
fiscalistes ». Voilà pour le
portrait de famille, analysons
maintenant les propos de ces radicaux
(!)
Les «
monétaristes » – ministres des
finances, boursicoteurs, investisseurs,
Présidents de banques centrales –
utilisent pour faire face à la présente
dépression la seule arme qui demeure à
leur disposition, la
planche à billet – une métaphore
pour désigner l’action des banques
centrales et l’injection du carburant «
crédit-argent » dans l’appareil de
reproduction – Ceux-là impriment et
jettent du papier monnaie dans la
chaudière du Titanic financier-boursier
mondial en train de sombrer, ce
misérable rafiot économique plombé.
La triste
mondialisation-globalisation-néolibérale
inévitable
Conservez,
je vous prie, cette idée à l’esprit :
mondialisation, globalisation,
intégration économique néolibérale ne
sont pas de vains mots; la façon que la
présente crise s’approfondit le démontre
à l’envi. Il ne vous est plus offert une
variété d’économies nationales
indépendantes : l’étatsunienne, la
japonaise, la française, l’allemande ou
la canadienne… Ces temps sont révolus et
l’on ne peut revenir en arrière malgré
les cris futiles et désespérés des
conseillers économiques réclamant de «
démondialiser sans néolibéraliser » (2).
Il n’y a dorénavant, de gré ou de force,
qu’une seule et unique
économie-politique mondiale, l’économie
politique impérialiste où tous les
joueurs s’affrontent, banquiers,
financiers, firmes multinationales,
trust transnationaux, cartels
plurinationaux, gouvernements
impérialistes grands et petits et néo
colonies, tous imbriqués les uns dans
les autres, tous interdépendants les uns
vis-à-vis des autres, mais n’ayant pas
tous, tant s’en faut, la même puissance
de gouvernance.
C’est la
raison pour laquelle tous ces acteurs
déchirent leur chemise sur la place
boursière publique présentement : A)
Qui, pour réclamer un troisième QE ou
Quantitative Easing –
assouplissement quantitatif – ou plus
communément appelée une émission de
monnaie inflationniste et
dévaluationniste de la part de la
Reserve Fédérale américaine (3) ; B)
Qui, pour exiger des politiques fiscales
restrictives abolissant des services
publics, ou réduisant les salaires, et
le pouvoir d’achat des travailleurs, des
chômeurs et des étudiants afin de
rediriger cet argent directement dans
les goussets des banquiers, des
manufacturiers – ce que ces gens
appellent pudiquement et hypocritement
des sources d’« investissements ».
Pourquoi de nouvelles sources de capital
d’investissement peut-on demander ? Le
capital-argent, qui croitrait de 14% par
an ne manque pourtant pas sur le marché
boursier international [Challenges,
6.03.2008]. À titre d’exemple, au
Canada, 578 milliards de dollars
canadiens sont en réserve, inutilisés,
présentement sur les comptes bancaires
des firmes impérialistes canadiennes
(!).
Le deuxième
clan, que nous appellerons pour les
besoins de la cause les «
fiscalistes », arguent qu’ils sont
pris en otage par les politiciens et les
Présidents des banques centrales – en
fait par les «
monétaristes » – qui refusent de se
plier à leurs remontrances.
De la contradiction dans le camp des
profiteurs
Quelles
sont les exigences de cette engeance de
«
fiscalistes » ? Les voici : Que les
États souverains surendettés et les
banques centrales discréditées cessent
de frapper monnaie et qu’ils frappent
les travailleurs et les petits
employeurs de nouvelles taxes et de
nouveaux impôts et qu’ils osent
rediriger ce capital-argent extorqué
directement
dans les goussets du moins de un demi de
un pourcent d’aristocrates financiers
mondiaux multi milliardaires qui les
feront fructifier, du moins ils
l'espèrent (4). Reagan, Madame Thatcher
et Bush avaient déjà colporté ce bobard
auparavant !
Mais
pourquoi les politiciens de tous poils,
les Présidents de banques centrales et
les «
monétaristes » en tout genre ne se
plient-ils pas à ces exigences ?
Subodorent-ils une manigance ? Pourquoi
Barak Obama et les chefs d’État
européens, japonais, australiens,
canadiens ne se rendent-ils pas aux
raisons des «
fiscalistes » ? Tout simplement
parce qu’ils ne le peuvent pas, du
moins, pas aussi vite que le
souhaiteraient la clique des «
fiscalistes ».
Ce sont les
pions politiciens et les larrons «
monétaristes » qui sont au front, ce
sont eux qui tiennent les rênes du
pouvoir et qui font face à la résistance
ouvrière et populaire, aux chômeurs et
aux désœuvrés saqués, aux pauvres
affamés, aux petits bourgeois
paupérisés, aux autochtones enragés et
aux étudiants masqués et casqués (5).
Ceux-là savent que s’ils forcent la note
ils auront une insurrection sur les
bottes. D’autant qu’ils ont déjà, ces
ministres et députés, ces banquiers, ces
policiers militarisés,
perdu le contrôle de leurs mercenaires
essaimés à travers le désert incendié.
Les corsaires du désert
La bride
sur le cou, après avoir rompu leur
licou, les corsaires du désert mènent
leurs affaires pour leur propre compte
et font monter les enchères que la
France tente de faire taire, hier en
Côte d’Ivoire, aujourd’hui au Mali,
demain qui sait en Algérie ! Mais ces
flibustiers débridés, que la CIA et la
DGSE-DST ont armés, sont à l’œuvre aussi
en Mauritanie, au Niger, en Algérie, en
Syrie, en Somalie, en Tunisie, en
Égypte, au Yémen, en Irak, en
Afghanistan, au Soudan, au Congo, en
République Centre Afrique, autant de
foyers de résistance où les prétendants
au titre de « gendarme international »
ne parviennent pas à maintenir le
couvercle sur l’autoclave social
mondial. Alors de grâce gémit le
sous-fifre, que nul n’ordonne aux
politiciens et aux « monétaristes »
d’envenimer la situation en Grèce, en
Italie, en Espagne, en France, au Canada
et au Portugal par des mesures anti
sociales radicales.
Chaque
chose en son temps, répliquent les «
monétaristes » prévaricateurs aux «
fiscalistes » intempestifs. Les
malins politiciens savent que
le prochain QE3 (émissions de
capital-argent inflationniste)
approfondira davantage la crise
économique et que toutes les banques
centrales du monde – sauf peut-être la
banque centrale de Chine – dévalueront
leur monnaie (dont souffriront
énormément les 15 pays sous le joug du
Franc CFA. D’autres soulèvements et
d’autres guerres «humanitaires» en
perspective) (6).
Par cet
audace monétaire tous ces voraces
chacals obtiendront le bénéfice
recherché – la dévaluation de la
marchandise « monnaie » et par ricochet
la dévaluation de la marchandise la plus
convoitée qui soit, la « force de
travail », d’où une revalorisation
relative des autres marchandises – une
revalorisation de la valeur du
surtravail et de la
plus-value et aussi, par la bande
croient-ils, une réévaluation du Yuan
chinois – quasi seule monnaie nationale
présentement sous-évaluée.
Par la même
occasion, les gouvernements nationaux
dégraisseront leurs dettes souveraines
et spolieront les petits et les grands
épargnants – [les fonds de pension
spéculatifs notamment] – et tous ceux
qui n’auront pas planqué leur «blé» dans
les paradis fiscaux comme ces messieurs
Depardieu et Arnault (7).
Pour conclure
Morale de
cette guerre des clans entre «
monétaristes » et «
fiscalistes », messieurs et mesdames
convertissez votre capital-argent en
Yuan chinois, en Franc suisse ou en
Or-métal si vous le pouvez. Mais je sais
très bien pauvres gens qu’il y a
longtemps que vous ne contrôlez plus
votre argent dont le banquier s’est
emparé. S’il est un investisseur argenté
qui lit ce papier, convertissez votre
capital-argent en denrée de première
nécessité, dont les prix seront bientôt
majorés. La famine pousse à manger quel
que soit les prix sur les marchés, mais
cela, vous le savez.
Pour les
ouvriers, les employés, les
travailleuses, les étudiants, les
autochtones et les petits rentiers
paupérisés, laissez-moi vous conseiller
de vous braquer, de résister;
manifestez; refusez de payer;
gardez-vous que l’on vous désarme, que
l’on vous taxe, que l’on vous impose
toujours davantage, que l’on vous saque.
Ouvriers et travailleuses «investissez»
dans la solidarité et résistez,
voilà la recommandation de votre
«conseiller financier».
(1)
http://www.youtube.com/watch?v=ZxIwwqfRMGk
(2) Richard
Le Hir.
Démondialiser, et vite ça urge!
9.01.2013.
http://www.vigile.net/Demondialiser-et-vite-Ca-urge
(3)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Assouplissement_quantitatif
(4)
http://www.centpapiers.com/quand-la-science-decouvre-les-1-qui-dirigent-leconomie/
(5) Robert
Bibeau.
Gratuité ou marchandisation de
l’éducation. Quelle solution? 23.01.
2013.
http://www.centpapiers.com/gratuite-ou-marchandisation-de-l%e2%80%99education-la-resistance-etudiante/
(6)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Franc_CFA
(7)
Robert Bibeau.
La crise économique dans tous ses
méfaits. 26.09.2012.
http://www.alterinfo.net/LA-CRISE-ECONOMIQUE-DANS-TOUS-SES-MEFAITS_a81805.html
ANNONCE
Dans le volume Impérialisme et question
nationale (le modèle canadien) (2012)
nous présentons l’évolution de la lutte
de classe au Québec du soulèvement
patriote (1837) jusqu’à aujourd’hui
(2012). Le volume est disponible
GRATUITEMENT en téléchargement (format
PDF Acrobat) à cette adresse :
http://www.robertbibeau.ca/imperialisme.pdf
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