Opinion
Turquie:
Vers un leadership régional à base d'un
Islam moderniste (part 1)
René Naba
René Naba
Samedi 23 juillet
2011
Une géopolitique sous tendue par
la géographie de sa minorité
Le premier ministre turc, Rejeb
Tayyeb Erdogan, a été reconduit le 12
juin 2011 pour un troisième mandat à la
tête de son pays, dans un contexte
marqué par le bouleversement de la carte
géopolitique régionale impulsé par la
dynamique révolutionnaire arabe, sur
fond d’ambition d’Ankara de propulser
une politique néo-ottomane visant à
ancrer la Turquie comme le nouveau point
de référence diplomatique du Moyen
orient
Suscitant par réaction la consolidation
d’un front pétro-monarchique
conservateur par adjonction du Maroc et
de la Jordanie, ce bouleversement a
incité les Etats-Unis à renouer une
grande alliance avec la frange
moderniste de l’Islam sunnite pour
pallier ses avatars du printemps dans
une conjonction turco-américaine à
l’effet de lever l’ostracisme qui frappe
les «Frères Musulmans» dans les pays
arabes.
I – La jonction Asie Europe
Point de jonction entre l’Europe et
l’Asie, la Turquie constitue un pays
central de la configuration régionale.
Frontalière de huit pays (Bulgarie, la
Grèce, la Syrie, l’Irak, l’Iran,
l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie),
elle est bordée par trois mers la mer
Noire au nord, la mer Egée à l’ouest et
la mer Méditerranée au sud. Elle
contrôle de surcroît le détroit du
Bosphore et le détroit des Dardanelles.
Seul dirigeant musulman assuré d’une
visibilité politique à moyen terme, sauf
accident de parcours, M. Erdogan
ambitionne de se poser en modèle de
gouvernance islamique comme sous
bassement à sa diplomatie néo-ottomane
en vue de promouvoir son pays comme le
chef de file de la nouvelle
configuration régionale.
Dans l’ordre symbolique, il se
propose d’ailleurs d’assurer, sur le
plan urbanistique, la jonction entre
l’Europe et l’Asie, par l’édification de
deux villes balises anti sismiques dans
la zone tellurique d’Istanbul.
L’ancien maire d’Istanbul souhaite,
en effet, neutraliser par anticipation
les effets des séismes dont l’ancienne
capitale de l’Empire en est la cible
potentielle de par sa localisation
géologique, en construisant des villes
satellites, l’une en Anatolie (Asie),
l’autre dans la zone européenne, ayant
vocation à absorber l’exode des 14
millions habitants d’Istanbul en cas de
séisme. Le projet d’une valeur de 200
milliards de dollars prévoit que ces
deux villes seront reliées par un pont
de 45 km, d’une largeur de 150 mètres et
d’une profondeur faisant la jonction
entre l’Anatolie et la zone européenne.
Parallèlement, Ankara devrait se
doter d’importantes structures
militaires et hospitalières, à l’effet
de propulser la capitale turque au rang
de mégapole de l’industrie d’armement et
de vaste complexe hospitalier à bas
prix, de dimension transcontinentale. Un
troisième pole de développement est
prévu à Diyarbakir, chef lieu de la zone
kurde.
II- La géographie des
minorités de Turquie sous tend sa
géopolitique
Lors de cette mandature de quatre
ans, l’AKP, le parti pour la justice et
le développement, devra débattre de deux
dossiers déterminants pour l’avenir du
pays: une nouvelle constitution et la
question kurde dans la perspective de la
relance du débat sur l’admission de la
Turquie au sein de l’Union européenne.
La politique de Turquisation menée
par Kamal Atatürk et ses successeurs
dans la foulée du démembrement de
l’Empire avait tendu à une
homogénéisation de la société. Elle
s’est traduite par le refus de la
reconnaissance des minorités dans le
droit fil de la politique de
l’exaltation de l’esprit nationaliste et
de la mise en avant d’une politique de
modernité, visant à compenser les effets
psychologiques de la défaite de la
première guerre mondiale (1914-1918) et
du démembrement de l’empire qui s’est
ensuivi.
Près d’un siècle plus tard, le nouvel
infléchissement initié par M. Erdogan se
traduit par une politique d’ouverture
envers les minorités, qui constitue
désormais le véritable centre de gravité
de la politique turque. Le projet de
constitution préconise d’ailleurs la
reconnaissance des droits des minorités
culturelles et religieuses.
La géographie des minorités de Turquie
sous tend sa géopolitique. Héritage de
l’Empire Ottoman, la Turquie est un pays
multi ethnique et multi religieux.
Consubstantiels à son histoire, la
problématique des minorités arméniennes
et kurdes a longtemps conditionné les
choix diplomatiques de la Turquie post
Atatürk, quand bien même ils étaient
masqués du halo de la modernité et de
l’occidentalisation.
Au-delà des constructions théoriques,
le choix atlantiste de la Turquie
reposait sur un pacte tacite conclu avec
le camp occidental, fondé sur
l’occultation de la responsabilité de la
Turquie dans le génocide arménien en
contrepartie de l’implication de ce pays
de culture musulmane non seulement dans
la défense du «Monde libre» face à
l‘Union soviétique, mais aussi dans une
alliance stratégique avec Israël contre
le Monde arabe.
L’effet second de son adhésion à
l’Otan répondait au souci des Etats-Unis
de placer le contentieux gréco-turc, le
binôme Athènes Constantinople, au delà
le contentieux Islam-Chrétienté sous
contrôle de l’Occident, en ce qu’Athènes
constituait le berceau de la
civilisation occidentale et
Constantinople-Ankara, l’ultime empire
musulman.
Véritable «porte-avions» américains en
Méditerranée orientale, la Turquie a
loyalement servi l’Occident, y compris
la France, allant même jusqu’à se
prononcer contre l’indépendance de
l’Algérie, déniant, contre toute
évidence, au combat des nationalistes
algériens, le caractère de guerre de
libération, allant même jusqu’à mettre à
disposition de l’aviation israélienne
ses bases militaires et son espace
aérien pour l’entraînement de ses
chasseurs-bombardiers en opération
contre le monde arabe.
Jamais aucune puissance militaire
musulmane n’avait été aussi loin dans sa
collaboration avec l’Occident. Au point
que Washington et ses relais médiatiques
dans les pays occidentaux avaient
célébré le partenariat entre la Turquie
et l’Etat hébreu, conclu en 1993, comme
«un partenariat des grandes démocraties
du Moyen-Orient», sans s’offusquer
nullement d’une alliance contre-nature
conclue entre celui qui est présenté
dans l’opinion occidentale comme le
premier Etat «génocidaire» du XX me
siècle (génocide arménien toujours nié
par la Turquie) et les rescapés du
génocide hitlérien. L’objectif primait
alors toute autre considération morale:
le verrouillage du monde arabe, par
effet de tenaille, mené par l’ancien
colonisateur ottoman des Arabes et
l’État d’Israël, perçu dans l’ensemble
arabe comme «l’usurpateur de la
Palestine». Son rôle pivot au sein de
l’Alliance atlantique justifiait, pour
Ankara, tous les abus, et pour la presse
occidentale, toutes les indulgences.
La prise de distance turque tant
vis-à-vis d’Israël que de l’Occident a
relancé les démarches visant à la
reconnaissance du génocide arménien tant
aux Etats Unis, qu’en France, une des
conditions mises d’ailleurs par l’Union
européenne à l’admission de la Turquie
en son sein. Parallèlement, la
réactivation de l’irrédentisme kurde en
Irak, désormais constitutionnellement
présidé par un Kurde, de même que
l’aménagement d’une zone d’influence
israélienne dans ce secteur frontalier
de la Turquie, de l’Iran et de la Syrie,
a donné lieu à des expéditions punitives
de l’armée turque sur le territoire
irakien.
III- L’ Union pour la
Méditerranée, un leurre de dérivation à
la candidature de la Turquie à l’Union
Européenne
Par sa candidature à l’Union
européenne, la Turquie a cristallisé les
contradictions internes de l’opinion
occidentale, tiraillée, d’une part,
entre sa crainte d’un débordement
musulman sur l’Europe et, d’autre part,
son souci de préserver son partenariat
stratégique avec un État qui fut,
pendant un demi-siècle, le bouclier de
l’Occident sur son flanc méridional, au
paroxysme de la guerre froide
soviéto-américaine (1945-2000).
Le refus catégorique de Nicolas Sarkozy
d’envisager, même à long terme,
l’admission de la Turquie au sein de
l’Union européenne a remis à l’ordre du
jour le problème des ambiguïtés du Monde
occidental à l’égard de cet état
musulman se réclamant de la laïcité
institutionnelle.
Le président français a justifié son
opposition à l’admission turque
notamment par des considérations
géographiques arguant que la Turquie se
trouvait en «Asie mineure». L’argument
est partiellement vrai dans la mesure où
une portion du territoire turc est
située en Europe. Un tel argument aurait
gagné en crédibilité s’il était frappé
du sceau de la cohérence en ce que ce
qui est considéré aujourd’hui comme un
obstacle géographique n’avait pourtant
pas entravé l’inclusion de la Turquie
dans l’Otan, le pacte militaire des pays
occidentaux riverains de l’Atlantique
nord, un océan avec lequel la Turquie
n’a pas le moindre rapport.
Singulier est la position de la France
dans cette affaire. Le pays qui passe
pour être aujourd’hui le plus en pointe
contre l’admission de la Turquie au sein
de l’Union européenne, le protecteur des
chrétiens d’Orient n’avait pas hésité,
en ce son temps, à gratifier la Turquie
de son forfait, le génocide arménien, en
détachant le district d’Alexandrette de
la Syrie pour l’offrir à celui qui était
son ennemi de la première guerre
mondiale, de surcroît auteur du premier
génocide du XX e siècle.
L’accueil des Arméniens en France
tant à Marseille, qu’à Alfortville, à
Clamart ou à Issy Les Moulineaux ne
saurait gommer de la mémoire la
monstruosité de cette opération, une
aberration de l’esprit vraisemblablement
unique dans l’histoire du monde,
pathétique illustration d’une confusion
mentale au nom de la préservation de
prétendus intérêts supérieurs de la
nation au détriment de la victime.
Maintenue à distance de la famille
européenne, la Turquie a été néanmoins
sollicitée, après les revers militaires
israéliens au Liban, l’été 2006, pour
apporter sa contribution à la
stabilisation de la situation dans la
région frontalière libano-israélienne
dans la cadre de la FINUL (Force
intérimaire des Nations-Unies au Liban),
dans le souci de donner une caution
musulmane à une force à dominante
européenne.
Au terme de vingt ans de tergiversations
européennes, la question se posait donc
de savoir si la Turquie demeurera ad
vitam une force supplétive de l’Occident
ou un membre de plein droit de la
famille européenne.
Les rebuffades qu’elle a essuyées de la
part des Européens cumulées à la relance
de l’irrédentisme kurde dans le nord de
l’Irak du fait de l’invasion américaine
de l’Irak, en 2003, ont conduit la
Turquie à se rapprocher de l’Iran et la
Syrie, les deux pays frontaliers qui
abritent, de surcroît, une forte
minorité kurde, en vue d’établir un
cordon sanitaire à l’égard du problème
kurde par une coopération régionale.
Pour contourner le paradoxe européen,
Nicolas Sarkozy, le chef de file
européen du néo conservatisme américain,
a alors proposé la mise sur pied d’une
«Union pour la Méditerranée» en vue
d’arrimer la Turquie à l’Europe sans
pour autant l’inclure dans l’Union
européenne. Un lot de consolation par un
ancrage au rabais pour l’ancienne
sentinelle avancée de l’OTAN.
L’idée sous-tendant ce projet était de
réduire à minima la présence musulmane
dans l’ensemble européen comme en
témoigne l’offre concomitante faite à la
Serbie d’intégrer, elle, l’Union
européenne, en compensation de la perte
du Kosovo, c’est-à-dire la portion
musulmane de son ancien territoire.
L’admission de la Turquie (70
millions de personnes), puis plus tard
de l’Albanie (5 millions), surajoutées
aux 12 millions de musulmans déjà
présents en Europe, porterait le nombre
des musulmans en Europe à 90 millions,
soit 15 pour cent de la totalité de la
population de l’ensemble européen. Un
chiffre qui a conduit les dirigeants
européens à émettre la crainte que cette
présence n’altère le caractère chrétien
et occidental de l’Union Européenne.
Le 2eme objectif de l’UMP était de
fondre dans un même espace de
coopération Arabes et Israéliens. D’une
manière incidente, la conjonction au
sein d’un forum méditerranéen de la
Turquie et d’Israël, les deux principaux
leviers de la stratégie américaine au
Moyen orient, tendrait de surcroît à
diluer l’ensemble arabe dans une
structure protéiforme à l’effet de
réduire son homogénéité et à le placer
dans une situation de minorité face à
ses autres partenaires.
D’une manière subséquente, elle
tendrait aussi à substituer l’Iran à
Israël comme le nouvel ennemi
héréditaire des Arabes, exonérant les
Occidentaux de leur propre
responsabilité dans la tragédie
palestinienne, en banalisant la présence
israélienne dans la zone au détriment du
voisin millénaire des Arabes, l’Iran,
dont le potentiel nucléaire est
postérieur de soixante ans à la menace
nucléaire israélienne et à la
dépossession palestinienne.
3eme objectif: Arrimer enfin le Maghreb
au marché européen, au détriment du
marché commun arabe en voie de
gestation, pour en faire, avec le secret
espoir d’assécher le flux migratoire,
une zone de délocalisation des
entreprises européennes et de
sous-traitance de produits bas de gamme
par la conjugaison de la «main d’œuvre
arabe», par définition bon marché, et de
l’intelligence française», forcément à
haute valeur ajoutée. Au vu de ces
considérations, l’Union pour la
Méditerranée est apparue comme un
dérivatif destiné à consolider l’ancien
marché captif de l’Europe au moment où
la Chine, -désormais deuxième
investisseur en Afrique devant la France
avec des placements de l’ordre de 50
milliards de dollars-, faisait une
percée remarquée sur le flanc méridional
du continent européen.
Sur fond de gesticulation et
d’esbroufe, le projet phare de la
mandature présidentielle de Nicolas
Sarkozy a ainsi tourné à la bérézina
diplomatique absolue et les principaux
pivots de l’influence française en
Méditerranée, Hosni Moubarak (Egypte),
au Machreq, et Zine El Abidine Ben Ali
(Tunisie), renvoyés dans les poubelles
de l’Histoire.
Son rejet par l’Occident a fait l’effet
d’un électrochoc, conduisant la Turquie
à sortir de son amnésie, renouant avec
son passé ottoman, dont la conséquence
la plus immédiate à été son ouverture
vers son voisinage arabe.
M Erdoğan a ainsi pris la tête de la
croisade humanitaire visant à briser le
blocus de Gaza, suscitant l’admiration
internationale, fulminant contre Tel
Aviv, reprochant aux Israéliens le
massacre des militants pacifistes à bord
de la Flottille de la Liberté. Pour la
2eme édition de la flottille, en juin
2011, il a paru toutefois se doter d’une
posture médiane, en décommandant pour
des raisons techniques la participation
du navire amiral de ce convoi
humanitaire le Navi Marmara, à bord
duquel neuf ressortissants turcs avaient
été tués, le 31 Mai 2010, par un
commando israélien lors d’un assaut
naval en haute mer.
Suivra…… rn
Références:
A- Le Kurdistan turc
Le Kurdistan turc est une région du
Sud Est de la Turquie principalement
peuplée d Kurdes et de Turcs. Les
autorités turques refusent la
dénomination de «Kurdistan» et
préfèrent parler de Sud Est
anatolien. Le Kurdistan turc occupe
une grande partie du Sud Est de la
Turquie, représentant 210 000 km² et
41,7 % de la superficie totale du
Kurdistan7. Principalement située
sur le plateau anatolien et l haut
plateau arménien, la région est
montagneuse, le sommet culminant, le
mont Ararat étant à 5165 m
d’altitude.
Selon le dernier recensement turc de
2008, la zone prise en compte par
les autorités (délimitée à l’ouest
par Urfa, Adiyaman et Malatya, au
nord par Tunceli, Bingöl, Muş et
Agri) serait habitée par environ dix
millions d’habitants, ce qui
représenterait près de 14% de la
population nationale.
En 1920, le traité de Sèvres
prévoyait la création d’un État
kurde sur les restes de l’Empire
ottoman détruit, comme pour les
autres peuples de la région. Mais
par le traité de Lausanne de 1923,
le Moyen-Orient est divisé en
plusieurs pays qui ne prennent pas
en compte le droit des Kurdes à
disposer de leurs terres. En effet,
d’une grande importance géopolitique
dans la région, le Kurdistan est
également riche en pétrole et en
eau.
À la création de la République
turque en 1923 par Mustafa Kemal
Atatürk, les autorités interdisent
la langue et les noms de famille
kurdes, le mot «kurde» lui-même est
interdit et les Kurdes sont désignés
par l’expression « Turcs des
montagnes » par des politiciens3,4.
Face à cette négation du fait kurde
et de l’identité kurde, les Kurdes
se sont soulevés à plusieurs
reprises. Les soulèvements ont été
violemment réprimés par l’armée
turque3,4.
Le dernier soulèvement en date
contre la Turquie est le fait du
Parti des travailleurs du Kurdistan
(PKK). Il a pris la forme d’une
guérilla qui débuta en 1984 en
faisant des dizaines de morts par
semaine. Depuis l’arrestation en
1999 au Kenya, et la condamnation à
la prison à perpétuité du chef du
PKK, Abdullah Öcalan, les
affrontements ont diminué
d’intensité, avec notamment le repli
des troupes du PKK vers le Kurdistan
de l’Est (ou Kurdistan iranien) et
le Kurdistan du Sud (Kurdistan
irakien). Au total, la guerre a fait
plus de 37 000 morts dans la région.
Depuis 2005, la population kurde de
Turquie avait une représentation
politique avec la création du parti
de la société démocratique (DTP).
Comptant vingt-et-un députés à
l’Assemblée nationale turque, le DTP
est dissout le 11 décembre 2009 par
la Cour constitutionnelle turque qui
le soupçonne d’entretenir des liens
proches avec le PKK, considéré comme
terroriste par la Turquie. Vivement
critiquée en Europe et par le
Premier ministre turc, cette
décision met fin au principal parti
pro-kurde du pays et affaiblit les
efforts de l’AKP pour améliorer ses
rapports avec l’importante minorité
kurde du pays6.]
B- Les Arméniens de
Turquie
Au total 60 000 Arméniens vivraient
en Turquie, principalement à
Istanbul qui abrite près de 45 000
personnes. Il reste des résidus
d’implantation arménienne, près
d’Antioche (village de Vakif) et,
plus au nord, autour de Van, un des
centres spirituels de l’Arménie
historique (église d’Aghtamar). Les
arméniens sont établis,
historiquement, depuis des
millénaires dans l’est de l’Asie
mineure et au sud du Caucase. Mais,
au XIe siècle, les Turcs, venus
d’Asie centrale, s’imposèrent sur
cette région, et fondèrent
ultérieurement l’Empire ottoman. Les
Arméniens devinrent alors une
minorité de plus en plus en proie à
des discriminations. Durant la
Première Guerre mondiale, la majeure
partie des Arméniens fut victime
d’une politique de massacres et de
déportations organisée par le
gouvernement des Jeunes-Turcs. À la
fin de la guerre, l’Empire ottoman
est démembré et laisse la place à la
Turquie moderne. Les Arméniens
d’Istanbul, évalués à 45 000
personnes (approximativement 75 % de
la population turque arménienne),
possèdent 33 églises apostoliques,
12 églises catholiques et 3 églises
protestantes; 2 hôpitaux (Surp
Pirgitch et Surp Agop), 2
orphelinats, 19 écoles et 3 journaux
en langue arménienne, dont Jamanak
(fondé en 1908), actuellement le
plus vieux quotidien de Turquie.
C- La communauté arabe
Une importante communauté arabe est
présente le long de la frontière
avec la Syrie. Les Turcs sont eux
fortement concentrés dans les
régions de Malatya et d’Elazig, mais
également présent en tant que
fonctionnaires dans toutes les
villes du Kurdistan turc. Les Zazas
habitent les régions d’Elazig,
Diyarbakir, Tunceli et à l’est de la
région de Urfa. Il existe une petite
communauté arménienne encore
présente à Diyarbakir, et la région
de Mardin abrite encore une petite
communauté syriaque. D’après un
sondage de l’institut de recherche
turc Konda réalisé en 2008, 62 % de
la population de la région se
considèrent d’origine kurde8 ;
Les alévis sont très minoritaires
par rapport aux sunnites et se
concentrent à Tunceli, dans l’est de
la région d’Elazig (en particulier
Karakoçan) et à Malatya.
Il y aurait environ douze millions
de Kurdes (16 % de la population
nationale) dans toute la Turquie.
Présente à une conférence se
déroulant à Diyarbakir concernant
les droits de l’homme en Turquie,
Leyla Zana, grande figure de la
cause kurde, a parlé de quinze
millions de Kurdes (20 % de la
population nationale), dont au moins
cinq millions seraient assimilés aux
Turcs. Selon d’autres sources, les
Kurdes de Turquie constituent la
moitié des Kurdes du Moyen-Orient,
soit de 15 à 20 millions d’individus
(28 % de la population nationale).
© René Naba
Publié le 30 juillet 2011 avec
l'aimable autorisation de René Naba.
Publié sur René Naba.com
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