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Les oubliés de la République... soixante
ans après... Enfin
René Naba
Paris, le 14 juillet 2010
Epilogue de soixante ans d’une aberration morale, Nicolas
Sarkozy a annoncé mardi 13 juillet l’alignement des pensions de
tous les anciens combattants résidant à l’étranger, quelle que
soit leur nationalité, à l’occasion de la commémoration du
cinquantenaire de l’indépendance de l’Afrique francophone.
Cet
alignement devrait bénéficier à quelque 30 000 personnes sur les
quelques 173 000 combattants indigènes qui constituaient
l’ossature de la première armée d’Afrique.
La
contribution globale de colonies à l’effort de guerre français
pour la 1ère Guerre Mondiale (1914-1918) s’est élevée à 555.491
soldats, dont 78.116 ont été tués et 183.903 affectés à
l’arrière à l’effort de guerre économique en vue de compenser
l’enrôlement de soldats français sur le front (1). L’Algérie, à
elle seule, a fourni 173.000 combattants musulmans, dont 23.000
ont été tués, et 76.000 travailleurs ont participé à l’effort de
guerre, en remplacement des soldats français partis au front. La
contribution totale des trois pays du Maghreb (Algérie, Tunisie,
Maroc) s’est élevée à 256.778 soldats, 26.543 tués et 129.368
travailleurs. L’Afrique noire (Afrique occidentale et Afrique
équatoriale) a, pour sa part, offert 164.000 combattants dont
33.320 tués, l’Indochine 43.430combattants et 1.123 tués), L’Ile
de la Réunion 14.423 combattants et 3000 tués, Guyanne-Antilles
(23 000 combattants, 2037 Tués).
Pour
la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945): La première armée
d’Afrique qui débarqua en Provence (sud de la France), le 15
août 1944, avait permis d’ouvrir un deuxième front en France
après le débarquement du 6 juin 1944 en Normandie. Cette armée
de 400.000 hommes, comptait 173 000 arabes et africains dans ses
rangs. De juin 1940 à mai 1945, cinquante cinq (55 000)
Algériens, Marocains, Tunisiens et combattants d’Afrique noire
furent tués. 25 000 d’entre eux servaient dans les rangs de
l’armée d’Afrique. Durant la campagne d’Italie, marquée par la
célèbre bataille de Monte Cassino, qui fit sauter le verrou vers
Rome, et, à ce titre, célébrer comme la grande victoire
française de la II me guerre mondiale, sur les 6.255 soldats
français tués, 4.000, soit les deux étaient originaires du
Maghreb et parmi les 23.5000 blessés, 15.600, soit le tiers
étaient du Maghreb. Ahmad Ben Bella, un des futurs chef de file
de la guerre d’indépendance algérienne et premier président de
l’Algérie indépendante figurait parmi les blessés de la bataille
de Monte Cassino. Il en est de même de la campagne d’Allemagne,
sur les 9.237 tués, 3.620 étaient des enrôlés du Maghreb, et sur
les 34.714 blessés, 16.531 étaient Maghrébins.
« C’est pour témoigner de notre reconnaissance indéfectible
envers les anciens combattants originaires de vos pays que nous
souhaitons les voir bénéficier désormais des mêmes prestations
de retraite que leurs frères d’armes français »,
a déclaré M. Sarkozy lors d’un déjeuner réunissant les
dirigeants de 13 anciennes colonies françaises en Afrique
Répondant en tant que doyen des chefs d’Etat africains invités
aux propos de Nicolas Sarkozy, le président camerounais, Paul
Biya, s’est réjoui de cette mesure. « Votre décision sera
unanimement saluée non seulement par les Etats ici, mais aussi
par l’ensemble de nos opinions publiques », a lancé M.
Biya.
Le
président PS de la région Aquitaine, Alain Rousset, et l’élue
régionale PS Naïma Charaï, présidente de l’association « Les
oubliés de la République », voient dans cette annonce du
président de la République, une « victoire historique et la
fin d’une injustice qui déshonorait notre pays depuis 50 ans ».
« Jusqu’alors ‘oubliés de la République’, la France reconnaît
enfin la bravoure dont ces hommes ont fait preuve au service de
notre pays et met fin à une situation indigne », ajoutent
les deux élus socialistes dans un communiqué.
30 000
PERSONNES CONCERNÉES
Selon
l’Elysée, un projet de loi devrait être déposé à cette fin
devant le Parlement « dès la rentrée prochaine ». Dans
une décision rendue le 28 mai, le Conseil constitutionnel avait
estimé non contraire au principe d’égalité que les pensions
soient différentes, selon que l’ancien combattant réside en
France ou à l’étranger.
Mais,
répondant pour la première fois à une « question prioritaire
de constitutionnalité », les « Sages » avaient alors
censuré des dispositions législatives qui réservaient un sort
différent aux bénéficiaires français et étrangers qui résident à
l’étranger.
Selon
le secrétariat d’Etat aux anciens combattants, cet alignement
devrait bénéficier à quelque 30 000 personnes. L’arrêt du
Conseil constitutionnel exigeant cet alignement, réclamé depuis
des décennies, avait été salué comme une « décision
historique ».
POLÉMIQUE
APRÈS LE FILM « INDIGÈNES »
En
novembre 2006, l’Assemblée nationale avait pourtant adopté à
l’unanimité un amendement du gouvernement revalorisant au 1er
janvier 2007 prochain les pensions des soldats des ex-colonies,
dans le cadre du budget 2007 des anciens combattants.
Le
dossier avait alors été débloqué fin septembre par Jacques
Chirac lors de la sortie du film Indigènes,
qui mettait au premier plan le sort des anciens combattants
d’Afrique, de Madagascar et d’Indochine.
Cela
ne portait toutefois que sur « la retraite du combattant »,
distincte de la pension de retraite et versée au titre de la
détention d’une « carte de combattant ». Les pensions
de retraites, versées en fonction du grade ou de la durée
d’engagement sous les drapeaux, n’avaient en revanche été que
partiellement alignées.
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Publié le 22 juillet 2010 avec l'aimable autorisation de René Naba.
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