Opinion
Mali: Lettre ouverte à Ahmadou Aya
Sanogo
René Naba
Mardi 5 mars
2013 Paris – Le 19 Mars 2012, vous
vous êtes emparé du pouvoir à Bamako à
la faveur d’un coup d’état, interrompant
le processus électoral visant à
l’élection d’un nouveau président de la
République au terme d’un double mandat
calamiteux du titulaire du poste, le
général Amadou Toumani Touré. Un double
mandat marqué notamment par la déroute
de l’armée malienne dans le Nord du Mali
face à la nébuleuse djihadiste.
Bakary Mariko, un membre fondateur du
Front National Contre la Constitution
(FNC), un organisme qui se proposait de
relancer le Mali sur de nouvelles bases
démocratiques, opérait son ralliement à
votre mouvement, par une retentissante
proclamation qui se voulait digne d’un
Maréchal d’Empire, qui s’est révélée
celle d’un homme aux ordres.
Militant de base de la cause
africaine, témoin assidu des travaux du
FNC, j’avais alors fustigé cette
forfaiture dans une lettre ouverte au
déserteur. Un an après, je reviens sur
cette affaire pour dresser avec vous le
bilan de la gestion des prétendus
sauveurs de la nation
Capitaine,
N’en doutez pas un
instant et autant vous le dire tout de
suite: Je ne suis pas du genre à me
mettre au garde à vous devant un
quelconque pouvoir, mais pour faire le
bilan de ce que certains ont qualifié de
«coup d’état» et beaucoup d’autres de
«coup de folie».
Nous voilà donc un après pour dresser le
bilan de la junte militaire. Et quel
bilan? Un bilan qui aurait été drôle
s’il n’était tragique.
Voilà donc un an,
votre porte-parole, Mariko Bakary,
rompait subitement sa solidarité
militante avec ces compagnons de route
pour vous rallier, emportant avec lui,
en butin à votre junte aventuriste, sans
légitimité, sans compétence, tous les
secrets des délibérations de ces anciens
camarades de lutte, désorientés et
désolés par son opportunisme éhonté.
Dans un communiqué,
où la démagogie suintait de chaque mot,
il pensait enflammer l’imagination des
foules, sur vos instructions, il n’a
fait qu’enfumer ses compatriotes. Il
s’imaginait galvaniser leurs ardeurs, il
n’a fait que décourager leur engagement
par l’étalage de son carriérisme et
votre aventurisme.
Un an après, La France, votre ancien
colonisateur, est intervenue
militairement pour sauver votre pays
d’un désastre annoncé, avec l’aide de
ses supplétifs, dans un tragique retour
du refoulé.
Un an après, comme
le prédécesseur que vous avez dégommé,
vous êtes taiseux, vous et votre
porte-parole, à la tête d’un pactole
chacun d’entre vous désormais, assurance
tout risque contre les lendemains
incertains pour vous, et plus sûrement
pour votre peuple.
La ficelle est grosse et malsain de
cautionner de tels comportements tant il
importe d’abolir cette pratique honteuse
pour l’édification des générations
futures.
Soyons clair:
Commettre un forfait et se planquer avec
son magot ne sauraient constituer un
mode opératoire viable et crédible pour
quelqu’un qui nourrit l’ambition de
porter les plus nobles ambitions de sa
nation.
Sur ce sujet voir à
ce propos :
http://www.renenaba.com/mali-le-tonitruant-silence-du-planque-de-dakar/
Ne comptez pas sur
moi pour épiloguer ou polémiquer, mais,
en peu de mots, prenez note de
l‘essentiel de ce que j’ai à vous dire:
Serval a bouleversé
les données géostratégiques et créé une
nouvelle dynamique, dont la Mali en
pâtit et en paiera longtemps le prix.
Serval a blanchi la France de son passif
colonial en ce que le recours au pouvoir
colonial pour restaurer son indépendance
plombe définitivement tout discours sur
l’indépendance et la dignité du fait de
la vénalité et la couardise de la classe
politique malienne, son indignité et son
absence de sens patriotique. Cette
observation vaut pour l’ensemble de la
clientèle africaine de la France.
Sur ce sujet, voir
à ce propos:
http://www.renenaba.com/francafrique-honte-a-l’afrique/
Recourir pour le
service après-vente au Tchad exonère un
criminel de guerre mercenaire de la
France de toutes ses turpitudes et
couvre de ridicule le Mali, héritier du
grand empire éponyme.
Ce Mali, fierté de tant d’Africains à la
recherche désespérée de leur gloire
passée pour y puiser les bases d’un
meilleur avenir. Un Mali ridiculisé par
un lilliputien, jadis raillé pour sa
dépendance postcoloniale.
Le Mali, la
porte d’entrée d’Israël en Afrique?
Dans un mouvement
de fuite en avant destiné à occulter les
responsabilités de la classe
politico-militaire malienne dans ce
désastre national, l’intention est
prêtée au «Président transitoire en
titre» Dioncounda Traoré de mettre à
profit l’expédition militaire française
pour faire du Mali, la porte d’entrée
d’Israël en Afrique. Un coup de bluff?
Un chantage? Une volonté réelle
d’amorcer une nouvelle politique en
contradiction avec la ligne
traditionnelle du Mali, premier pays
africain à avoir dépêché dès son
indépendance, en 1960, un contingent en
Algérie pour sceller dans l’ordre
symbolique la fraternité d’armes des
peuples opprimés?
Sur les conseils de
la France, qui s’est méthodiquement
appliquée à travers ses porte-voix
médiatiques, Bernard Kouchner et Bernard
Henri Lévy, à favoriser la sécession du
Sud Soudan, pour en faire une plateforme
opérationnelle d’Israël sur le cours du
Nil? Seriez- vous à ce point-là dupe
d’une politique dont les concepteurs
cherchent à rééditer l’ancien scenario
français de relier les deux anciens
Soudan de l’époque coloniale, le Soudan
français et le Soudan anglais, via le
sud Soudan précisément et qui valut à la
France l’une de ses plus cuisantes
défaites militaires à Fachoda (1898)?
Israël et
l’accaparement des terres africaines
Israël? L’allié indéfectible du régime
d’Apartheid d’Afrique du sud? La garde
prétorienne de tous les dictateurs qui
ont pillé l’Afrique. De Joseph Désiré
Mobutu (Zaïre-RDC), à Omar Bongo
(Gabon), à Gnassingbé Eyadema (Togo), à
Paul Biya, le président off-shore du
Cameroun), le vacancier privilégie des
pâturages suisse, et, même Félix
Houphouët-Boigny (Côte d’Ivoire), le
prétendu sage de l’Afrique qui n’était
sage que par ce qu’il était le meilleur
serviteur de ses anciens colonisateurs
et de ses alliés israéliens.
Israël dont
l’expérience de la colonisation de la
Palestine l’a conduite à coloniser des
terres à travers le Monde représentant
vingt fois sa superficie au détriment
des populations et de l’environnement
des pays pauvres. En République
Démocratique du Congo pour la culture de
la canne à sucre; au Gabon pour la
culture du Jatropha, nécessaire à la
production de biocarburants; en Sierra
Leone où la colonisation israélienne
représente 6,9 pour cent du territoire
de ce pays de l’Afrique de l’Ouest (1).
Un président
éphémère et transitoire peut-il engager
un virage d’une telle ampleur au mépris
de la ligne traditionnelle de son pays
sans votre consentement? Ou sur vos
suggestions, vous, l’officier formé aux
Etats-Unis dont les turbulences
maliennes servent admirablement les
intérêts en vue du quadrillage militaire
de l’Afrique et participer à la
dislocation globale du Monde arabe et de
l’Afrique ?
Pour en savoir plus
sur ce sujet :
http://www.renenaba.com/le-quadrillage-en-douceur-de-l’afrique/
A l’intention des
lecteurs arabophones, ce lien du journal
transarabe de Londres «Al Qods
Al-Arabi»:Le Mali porte d’entrée
d’Israël?
http://www.alquds.co.uk/index.asp?fname=data\2013\02\02-14\14qpt999.htm&arc=data\2013\02\02-14\14qpt999.htm
Capitaine,
Ne soyons pas dupe:
Vous ne pouvez édifier un état sur des
fondements viciés. Il faut revoir à la
base les conditions d’émergence d’une
citoyenneté responsable.
La classe politique est gangrénée et les
concepteurs du nouvel état devront
nécessairement passer par les fourches
caudines de leurs libérateurs. Tel est
le triste constat que je soumets à votre
sagacité et à votre génie politique.
Le Mali doit rendre
justice à son Histoire, en faisant, sans
retard, sans ménagement, le procès de
l’institution militaire qui, en un
demi-siècle d’indépendance, a sinistré
le pays en phase de délitement du fait
de sa déroute militaire et sa
banqueroute économique.
De la déliquescence de l’État à la
régression nationale: Jamais un pays
n’aura connu pareille décélération. Du
fait d’une mafia politico-militaire. En
toute impunité. En cinquante ans
d’indépendance, le Mali n’aura connu
qu’un seul mandat de bonne gouvernance,
celui du premier président du Mali
indépendant, Modibo Keita (1960-1968).
Son renversement
par un coup d’État d’un lieutenant
fantasque, Moussa Traoré, va inaugurer
une ère de plus de quarante années de
mensonges et de corruption, dont le Mali
ne connaitra l’épilogue tragique qu’avec
le régime calamiteux d’Amadou Toumani
Touré (ATT) et votre coup d’État
pathétique.
Cinq officiers
supérieurs, les fameux planqués de la
République, sont particulièrement visés
par ce propos:
-Le dictateur Moussa Traoré, parricide
du symbole de l’indépendance malienne,
deux fois condamnés à mort, puis gracié,
vivant désormais une retraite pieuse
mais très confortable aux frais de
l’État, à Bamako, narguant de sa
présence aux cérémonies les proches de
ses victimes.
-Le velléitaire cumulard Amadou Toumani
Touré, le planqué de Dakar, planqué avec
son magot dans un silence tonitruant.
-Vous-même, putschiste planqué à l’ombre
de ses 60 Humvee (High Mobility
Multipurpose Wheeled Vehicle), affectés
à votre protection, qui doivent être
impérativement réaffectés au champ de
bataille et non plus servir à votre
parade, de même que doivent être
reversés au budget de guerre, les 600
millions de francs maliens ponctionnés
mensuellement sur le budget malien pour
votre dépense personnelle.
Enfin les deux
planqués de la déroute militaire, les
deux grands vaincus de la bataille de
2012, le Colonel Gamou, responsable de
la base de Kidal jusqu’à sa chute en
février 2012, réfugié au Niger avec
cinq-cents soldats ainsi que le colonel
Maydoun, son alter ego de la base Gao.
Décréter la mobilisation générale,
rétablir le service militaire
obligatoire. Mener sa propre guerre de
libération nationale, à l’exemple de son
voisin et ami l’Algérie, qui a vaincu le
colonialisme avant de vaincre le
terrorisme. En un mot se débarrasser de
sa mentalité d’assisté… Tel doit être le
mot d’ordre du Mali pour reconquérir sa
dignité avant sa souveraineté.
Pour toutes ces
raisons, j’étais si triste devant cet
aventurisme militaire qui a précipité le
Mali vers l’inconnu. J’en avais fait
part publiquement, sans ménagement, à
votre porte-parole, car il importait de
provoquer en vous un électrochoc
salutaire.
Il eut été plus sage pour vous de
présenter des doléances au prochain
président démocratiquement élu et
d’exiger des comptes de son
prédécesseur. Une démarche qui aurait eu
valeur de pédagogie et de thérapie.
La place d’une
armée est aux frontières pour la défense
de l’intégrité territoriale du pays et
sa souveraineté non dans les palais
présidentiels. Vous, militaires, vous
avez été formés, éduqués, nourris et
blanchis sur le budget de la nation.
Pour la défendre non pour se substituer
à elle. Sans le moindre mandat légitime,
sans le moindre pouvoir autre que celui
de la force.
Le Sénégal, voisin
du Mali et son ancien partenaire au sein
de la Fédération du Mali, vient
d’administrer à la face du Monde une
belle leçon de démocratie, en mettant en
œuvre une alternance paisible.
La grandeur du Mali
aurait été de donner cet exemple là et
non de souiller son image par une
équipée incontrôlée d’un quarteron de
putschistes. Il n’est pas sain de donner
au pays et au monde, l’image d’un
opportunisme hideux. Sauf à se muer en
«larbin de service», conséquence de ce
nouvel aventurisme militaire, il
t’importe pour votre dignité d’en rendre
compte, vous et vos prédécesseurs.
Pour mémoire, vous
voudrez bien relire, en annexe, le texte
de votre proclamation enflammée à
soumettre à votre examen critique, au
terme d’un an d’exercice d’un pouvoir
erratique pour un résultat pathétique.
Avec l’expression de mon exigence, dès
lors qu’il s’agit d’un pays, le Mali,
d’un continent, l’Afrique, qui ont tant
souffert de la dépersonnalisation et de
la dépossession.
Signé René Naba-Militant
de base de la cause africaine.
In Memoriam des
temps heureux où l’espérance et la
détermination constituaient le moteur de
l’action de tout un continent.
http://imagesdupasse.free.fr/senegal/dakar32.html
Référence :
1-«Israel et le contrôle des terres dans
le Monde» Cf. Golias Hebdo N° 275-
semaine du 14 au 20 Février 2013, se
référant à une étude de The Journal of
the National Academy of Sciences of the
United States, étude intitulée «Global
Land and Water Grabbing (accaparement
mondial de la terre et des eaux). Israël
est à la tête des pays qui contrôlent
les terrer dans les pays pauvres, avec
les Etats Unis, la Grande Bretagne et la
Chine. Selon l’étude 90 pour cent de ces
terres se trouvent dans 24 pays situées
pour la plupart en Afrique, en Asie et
en Amérique latine. En Colombie, Israël
a pris le contrôle d’immense superficie
pour cultiver la canne à sucre. Aux
Philippines, la proportion des terres
confisquées atteint 17,2 pour cent de la
surface des terres agricoles. Depuis la
crise alimentaire de 2007-2008, les
sociétés étrangères s’emparent de dix
millions d’hectares annuellement de
terres arables. Les nouvelles cultures
se font souvent au détriment des jungles
et des zones d’importance
environnementales, menacées ans leur
biodiversité. Elles utilisent engrais et
pesticides et libèrent d’importantes
quantités de gaz à effet de serre. Au
final, le phénomène sape les bases e l
souveraineté alimentaire et détourne en
particulier les ressources en eau.
Annexe
documentaire: La proclamation de Bakary
Mariko
Communiqué n°1 du porte-parole du CNRDR
en Europe
Mesdames, Messieurs,
Il y a, dans la vie d’une nation comme
dans celle d’un homme, un moment où
tombe le dernier voile pour laisser
crûment paraître la vérité.
Les crises
inextricables dans lesquelles
s’enfonçait notre pays depuis quelques
mois étaient autant de signaux d’urgence
qu’il n’était plus possible d’ignorer.
Après des années d’échappatoires et de
solutions illusoires, de rapetassages et
de ravaudages, d’atermoiements,
d’hésitations, d’aveuglement volontaire
et de surdité collective orchestrés par
un seul homme. Aujourd’hui, la réalité
nous a rattrapés, nous sommes au bout du
bout et notre vaillante Armée nationale,
creuset de la nation malienne par
excellence, a, une fois de plus, décidé
d’assumer son devoir et sauver la
République et ses institutions!
Ainsi, face à l’incapacité indiscutable
du régime de M. Amadou Toumani TOURÉ à
gérer la crise qui sévit au nord du pays
en dotant les forces armées et de
sécurité des moyens matériels et
d’équipements adéquats; devant le risque
croissant de la partition du pays et la
disparition de l’unité nationale; dans
le contexte d’impossibilité de la tenue
des élections générales en 2012, en
raison de la mauvaise qualité du fichier
électoral délibérément provoquée par le
pouvoir en place.
Les composantes des Forces Armées de
Défense et de Sécurité du Mali,
organisées en Comité National pour le
Redressement de la Démocratie et la
Restauration de l’État (CNRDRE), ont, le
22 mars 2012, mis fin au régime
autocratique de M. Amadou Toumani TOURÉ.
Mesdames, Messieurs,
Ce sauvetage des Institutions de la
République vise à créer des conditions
appropriées devant permettre à
l’ensemble des forces vives de la
Nation, sans aucune distinction, de
travailler à la préservation et au
développement du pays; restaurer le
patriotisme et assurer la défense de la
souveraineté nationale en mettant
l’homme qu’il faut à la place qu’il faut
élaborer une liste électorale fiable et
incontestable, aux fins d’organisation
des élections transparentes ; restituer
le pouvoir à un Président
démocratiquement élu dès que l’Unité
nationale et l’intégrité territoriale
seront rétablies.
En ces moments particulièrement graves
pour notre pays, où les citoyens ont un
besoin vital de s’informer, il n’est
nullement question d’un individu et de
son gouvernement, mais du Mali. Le
CNRDRE, par ma voix, s’engage à
travailler avec chaque malienne et à
chaque malien de l’intérieur comme de
l’extérieur épris de paix et de justice.
Le CNRDRE a besoin d’être accompagné
avec les bénédictions de l’ensemble de
nos compatriotes pour la réussite des
nobles missions que l’Histoire lui a
assignées. En ces moments critiques de
la vie de notre nation, le CNRDRE lance
un vibrant appel à toutes les maliennes
et à tous les maliens épris de paix et
de justice, d’œuvrer à la mise en œuvre
de la réconciliation et du pardon.
Vive le Mali, Vive le CNRDRE Debout sur
le champ d’honneur et de la dignité,
unis et déterminés nous allons
triompher. Dieu bénisse le Mali
P/le CNRDRE-Paris, le 23 mars 2012, Le
Porte-parole en Europe Monsieur Bakary
MARIKO
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