Tendances au Moyen-Orient - La Syrie
Les signes de la
faillite de l'opposition
Pierre Khalaf
Une équipe
d'observateurs internationaux visite les
villes de Homs et de Hama
Photo: Sana
Lundi 23 avril 2012
La Syrie célébrait lundi 16 avril le 66e
anniversaire de son indépendance, qui
commémore l'évacuation de l'armée
coloniale française, en 1946. Ces
cérémonies interviennent alors que la
violence se poursuit même si elle a
baissé d'intensité. Les médias syriens
ont saisi l'occasion pour dresser un
parallèle entre les occupations ottomane
et française et les menaces
d'intervention militaire proférées
récemment par Ankara et Paris au nom
d'un "droit d'ingérence humanitaire".
Plus d'un an après le début des
troubles, une évaluation s'impose.
Depuis le début de la crise, en mars
2011, les groupes armés tentent de
reproduire, sans succès, le modèle
libyen à travers la création d'un
"Benghazi" syrien tour à tour à Deraa, Jisr al-Chaghour, Tal Kalakh, Deir Ezzor,
et finalement à Homs. L'espoir de
renverser dans de brefs délais le régime
syrien s'est estompé après la bataille
de Baba Amro, qui a constitué un
tournant dans la crise. Ce fiasco
militaire, précédé par deux doubles
vetos sino-russes au Conseil de sécurité
de l'Onu, contre des projets concoctés
unilatéralement par l'Occident, ont
brisé l'espoir des pays occidentaux et
de leurs alliés arabes, anciens et
nouveaux (les islamistes), de
bouleverser les équilibres régionaux et
internationaux, d'endiguer l'influence
grandissante de l’Iran et surtout, de
contenir la Russie et la Chine. Ces deux
superpuissances remettent aujourd'hui en
cause l'ordre unipolaire américain. Le
régime syrien en est sorti renforcé et
rien n'indique qu'il soit sur le point
de tomber.
C'est dans ce contexte qu'intervient le
plan de Kofi Annan, qui, en
reconnaissant implicitement la
légitimité de l’État syrien et
l'existence de milices armées au sein de
l'opposition, souscrit désormais aux
positions russo-chinoises. Pour les
partisans du changement de régime, la
mission de Kofi Anan permet de
dissimuler leur échec et donne
l'impression qu'ils dominent toujours la
scène internationale.
Le soutien américain et européen au plan
de Kofi Anan, ainsi que le refus des
responsables occidentaux de l'armement
de l’opposition, reflètent le repli
occidental. Pendant cette trêve,
Washington et Paris sous-traitent le
dossier syrien à leurs alliés turc,
qatari et saoudien, qui déclarent
officiellement leur soutien politique et
militaire aux milices de l'opposition.
Les insurgés armés espèrent tirer
avantage du plan de l'Onu en exerçant
des pressions sur le pouvoir pour le
contraindre à respecter seul le
cessez-le-feu, réitérant ainsi le
scénario qui a suivi la mission des
observateurs arabes. Mais cette fois-ci,
l'armée syrienne l'a dit haut et clair:
elle n’abandonnera pas le terrain et ne
se retirera pas des villes, pour les
remettre aux groupes armés.
Dans ce contexte, l'avantage militaire
et internationale demeure nettement en
faveur du pouvoir. Et l'appel lancé par
le déserteur, le général Moustapha Ahmed
Al-Cheikh, pour l'intervention en Syrie
d'une "alliance militaire" sans l'aval
de l'Onu, est un signe qui ne trompe pas
de la faillite de l'opposition.
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