Tendances au Moyen-Orient
Les dernières
manœuvres de Washington et de ses alliés
européens, turcs et arabes
Pierre Khalaf
Photo:
Sana
Lundi 9 avril 2012
Les Etats-Unis et leurs alliés
européens, arabes et turcs, tentent
d'obtenir par des manœuvres politiques
et diplomatiques en Syrie ce qu'ils
n'ont pas réussi à avoir par le
financement, l'entrainement et
l'armement de groupes armés extrémistes,
dont certains sont affiliés à Al-Qaïda,
comme le reconnaissent désormais des
diplomates et des journalistes
occidentaux. Ils pensent pouvoir saper
la souveraineté de l'Etat et le priver
de son droit à contrôler son territoire,
par le biais d'une interprétation
unilatérale et particulière du plan de
Kofi Annan. Pourtant, Damas a fait
preuve de bonne volonté en acceptant ce
plan et en entamant le retrait de ses
troupes régulières de trois villes: Zabadani, Idleb et Homs. Le gouvernement
syrien avait réclamé dès le départ des
garanties, sans obtenir de réponse
claire et nette de la part de M. Annan.
Pour éviter tout malentendu après la
date du 10 avril -proposée, il faut le
rappeler, par Damas- pour l'arrêt des
opérations militaires, le pouvoir syrien
a réitéré sa demande de garanties,
exigeant, cette fois-ci, qu'elles soient
"écrites". Damas doute, en effet, que
les groupes armés tiennent leurs
promesses une fois que l'armée se sera
retirée des centres urbains, surtout
qu'ils ont intensifié leur attaques ces
dernières 48 heures. C'est ainsi que
l'armée a déjoué plusieurs tentatives
d'infiltration à partir de la Turquie et
du Liban.
Lors d'affrontements à Salama, près du
poste-frontière entre les villes
syriennes d'Azaz et turque de Kilis, les
insurgés ont tué au moins six membres
des forces de sécurité et des douanes
syriennes. Pendant les combats qui ont
suivi, cinq personnes ont été blessés,
dont deux ressortissants turcs, dans un
camp de réfugiés syriens en Turquie.
Même scénario à la frontière
syro-libanaise. Un groupe d'hommes armés
a attaqué un poste-frontière face à la
région de Wadi Khaled. Lors de l'échange
de tirs, une équipe de la chaine
indépendante libanaise NTV, a été prise
entre deux feux. Un caméraman, Ali
Chaabane, a été tué.
Ce durcissement de la position syrienne
intervient à un moment où certains
milieux de l'opposition syrienne
téléguidée par l'étranger croient
pouvoir rééditer le scénario des
observateurs arabes, lorsque les groupes
armés ont mis à profit la mission des
observateurs pour investir, occuper et
renforcer les positions évacuées par
l'armée syrienne. Or pour Damas, la
reprise de ces régions a nécessité
d'immenses sacrifices civils et
militaires, aussi n'est-il pas question
de les offrir aux insurgés. Ceux-ci
doivent s'engager à remettre leurs
armes, et Kofi Annan doit obtenir des
garanties de la Turquie et des pays du
Golfe qu'ils vont cesser le financement
et l'armement.
La Russie, qui accueille ce mardi le
ministre syrien des Affaires étrangères,
Walid Moallem, a réaffirmé que la
solution doit prendre en compte la
souveraineté de la Syrie.
Pour sa part, le vice-ministre turc des
Affaires étrangères, Naci Koru, a estimé
que la date de mardi fixée pour le
retrait des troupes syriennes n'avait
"plus de sens" et qu'une "nouvelle
étape" allait débuter mardi, quand Kofi
Annan fera étape en Turquie. Le
lendemain, l'émissaire des Nations unies
se rend en Iran.
Pour Catherine Ashton, porte-parole de
la diplomatie européenne, "il est
totalement inacceptable de poser de
nouvelles conditions à ce stade".
La Chine, de son côté, a appelé le
gouvernement syrien et l'opposition à
respecter le calendrier prévu par le
plan Annan.
Les Etats-Unis ont rejeté lundi la
demande syrienne d'une garantie écrite
de la part des insurgés, estimant qu'il
s'agissait d'une tactique dilatoire. "Ce
n'est qu'une nouvelle façon de gagner du
temps", a déclaré Victoria Nuland,
porte-parole du département d'Etat.
Il est clair que l'Occident et ses
alliés travaillent sur deux tableaux:
profiter du plan Annan pour reprendre
tout le terrain perdu depuis la chute de
Baba Amr, le 1er Mars; ou torpiller le
plan Annan à travers une recrudescence
des attaques contre les troupes
régulières, en faisant assumer au
pouvoir la responsabilité de l'échec.
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