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Le Web de l'Humanité
Détruire
les murs et fuir la mort
Pierre Barbancey
Photo CPI
Jeudi 24 janvier 2008 Proche-Orient.
Des milliers de Gazaouis franchissent la frontière avec l’Égypte
pour se ravitailler et s’abriter des incursions militaires israéliennes.
Asphyxiés depuis des jours par Israël, soumis aux
bombardements quotidiens, des dizaines de milliers de Palestiniens
de la bande de Gaza ont pénétré en Égypte par des brèches
ouvertes à l’explosif dans le mur de métal de six mètres de
haut séparant les deux territoires. Si, la veille, les autorités
égyptiennes ont tenté d’enrayer ce flux, hier, la police anti-émeute
de Moubarak, envoyée en renfort à la frontière, a laissé
entrer librement les milliers de Gazaouis venus se ravitailler
(mais a arrêté plusieurs centaines de manifestants au Caire).
Certains conduisaient des charrettes et transportaient des valises
pour rapporter des produits de consommation courants et du
carburant qu’ils comptaient acheter en Egypte. De nombreux
Palestiniens entrés en Égypte ont trouvé un moyen de transport
pour rejoindre la ville côtière d’El Arich, à une quarantaine
de kilomètres de Rafah. D’autres se sont bornés à rester dans
la partie égyptienne de Rafah, où ils ont acheté de
l’essence, des cigarettes, de l’huile d’olive et d’autres
vivres qui manquent dans la bande de Gaza. « J’ai acheté
tout ce dont j’ai besoin pour la maison pendant des mois. J’ai
acheté de la nourriture, des cigarettes et même deux gallons de
diesel pour ma voiture », a expliqué l’un d’eux.
« Les boulangeries ne fonctionnent pas et c’est difficile
d’obtenir les choses dont nous avons besoin », a témoigné
une mère de famille. « Je suis venue acheter du lait pour
mes enfants et des médicaments pour le diabète. » En
Cisjordanie, le porte-parole du président palestinien Mahmoud
Abbas a fait assumer la responsabilité à Israël. « C’est
la conséquence du blocus imposé à Gaza », a-t-il dit.
Cynique, le ministre israélien des Affaires étrangères a
expliqué : « Nous attendons que les Égyptiens résolvent
le problème », se gardant de toute critique à l’encontre
des autorités du Caire, accusées pourtant il y a peu de laxisme
au sujet des trafics d’armes à la frontière de Gaza. Si, face
aux pressions internationales,Israël a allégé mardi son blocus
en autorisant une livraison de carburant destinée à la
principale centrale électrique du territoire, tout montre qu’il
n’est pas prêt à céder un pouce de plus. D’ailleurs, la
municipalité israélienne de Jérusalem a annoncé avoir obtenu
les autorisations nécessaires pour la construction de près de 2
500 logements dans les quartiers de colonisation de Jérusalem-Est
annexés. Pendant ce temps, Nicolas Sarkozy recevait le ministre
israélien de la Défense.
Le premier ministre du Hamas à Gaza a appelé mercredi à la
tenue d’une réunion d’urgence avec ses rivaux du Fatah et
avec le gouvernement égyptien pour trouver une solution aux problèmes
frontaliers dans la bande de Gaza, ce qui pourrait vouloir dire
que le Hamas serait prêt à céder une part du contrôle de ces
passages à Mahmoud Abbas. « Nous ne voulons pas être les
seuls à contrôler ces affaires », a déclaré Ismaïl
Haniyeh, qui s’exprimait depuis son bureau, à Gaza, en direct
sur la télévision du Hamas. Par ailleurs, le Hamas, le jihad
islamique et le Front populaire de libération de la
Palestine-Commandement général (FPLP-CG), basés à Damas, ont
ouvert mercredi une « conférence nationale » dans la
capitale syrienne avec l’ambition affichée de surmonter la
division des Palestiniens en pleine crise du blocus imposé à
Gaza. « C’est la réunion des droits et de la résistance »,
a lancé le chef en exil du Hamas, Khaled Mechaal, dans un
discours devant un parterre de personnalités palestiniennes. Mais
cette réunion se déroule sans les trois partis historiques, le
Fatah du président Mahmoud Abbas et les Fronts démocratique et
populaire de libération de la Palestine (FDLP et FPLP). « Nous
sommes devant une tromperie israélienne. Faire livrer du fioul et
de la nourriture n’est pas l’objectif. Nous voulons la levée
du blocus », a affirmé Mechaal. « Le blocus est une
tragédie, un crime immoral. J’appelle à la poursuite de la colère
populaire contre les sionistes et les Américains jusqu’à la
levée du blocus », a-t-il martelé. « Le combat ne se
terminera que par la libération de la Palestine, toute la
Palestine », a-t-il ajouté.
© Journal l'Humanité
Publié le 25 janvier 2008 avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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