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Le Web de l'Humanité
Rencontres
politiques et solidaires au pays d'Arafat
Pierre Barbancey
Les écoliers de Yanoun - Photo ccippp
Mercredi 21 novembre 2007
Palestine . Dans le cadre de la campagne
pour le droit à l’éducation des enfants palestiniens, le
directeur de l’Humanité accompagnait une délégation de villes
françaises jumelées avec des camps de réfugiés.
Cisjordanie, envoyé spécial.
Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard
Kouchner, peut bien parler de « l’aspiration légitime »
d’Israël à vivre en paix avec ses voisins, pour les
Palestiniens en général et ceux des camps de réfugiés en
particulier, cette aspiration est loin d’être évidente.
C’est ce qu’ont pu constater la trentaine de personnes - élus,
syndicalistes, militants associatifs… - qui viennent de se
rendre dans les territoires palestiniens, à l’initiative de
l’Association de jumelage des camps de réfugiés palestiniens
avec des villes françaises (AJPF), dirigée par Fernand Tuil. Le
directeur de l’Humanité, Patrick Le Hyaric, était également
du voyage pour rencontrer les bénéficiaires de la campagne
« Des cartables pour les enfants palestiniens », menée
conjointement par notre journal, l’AJPF et l’association Forum
pour un autre monde. À la Fête de l’Humanité, au moment de la
rentrée scolaire, un chèque de 20 000 euros avait d’ailleurs
été remis aux représentants des camps, ce qui a permis d’équiper
des milliers d’écoliers de Cisjordanie qui sont souvent près
de cinquante par classe. Comme le soulignait Fernand Tuil,
« un jumelage avec un camp de réfugiés, c’est d’abord
un acte politique » (1).
Une aspiration à la paix d’autant moins évidente que la délégation
a dû patienter près de deux heures que ceux qui avaient des noms
à consonance arabe en finissent avec les interrogatoires de la sécurité
israélienne. Mais c’est dans les camps de réfugiés eux-mêmes
que le constat est flagrant. Des dizaines de milliers de personnes
vivent dans des conditions lamentables. La plupart des familles
ont l’un des leurs qui croupit dans une geôle israélienne (70
sont emprisonnés depuis trente et un ans) et l’avenir de la
jeunesse s’inscrit dans les limites imposées par le bouclage
israélien. C’est ce que dit Dov Khenin, député du Parti
communiste israélien, en recevant la délégation. « Il y a
un écart flagrant entre les discussions, les déclarations et les
réalités sur le terrain. » Ce qu’a bien montré Michel
Warshawski, pacifiste israélien et antisioniste, en faisant faire
un tour des colonies et démasquant « l’israélisation de
l’espace » qui permet, incognito, l’accroissement du
taux de colons dans les territoires palestiniens.
Tous les interlocuteurs de la délégation ont mentionné les
obstacles qui se présentent, mais personne ne rejette vraiment
l’initiative d’Anapolis. « Les États-Unis ont décidé
de faire les choses de façon unilatérale », regrette ainsi
Azzam Al Ahmad, chef du groupe parlementaire Fatah. « Ils ne
veulent gêner Israël en aucun cas. Les États-Unis ne jouent pas
leur rôle de partenaire intègre, c’est pourquoi nous
souhaitons la participation du plus grand nombre de pays. »
Il ajoute cependant : « Nous ne serons pas à
l’origine de l’échec de cette réunion. On veut nous pousser
à renoncer. Nous voulons une réunion de travail avec de vraies
discussions afin d’arriver à la paix et mettre la communauté
internationale devant ses responsabilités. » Fouad Rizek,
secrétaire général du Parti du peuple palestinien (PPP,
communiste), n’a pas caché qu’il y a « une inquiétude »
chez les Palestiniens mais entend « exploiter l’intérêt
des États-Unis pour la question afin que la communauté
internationale entende à nouveau les revendications des
Palestiniens ».
Au cours des multiples rencontres que la délégation a eues,
outre le premier ministre Salam Fayad (voir l’Humanité du 18
novembre), celle avec Fadwa Barghouti, la femme de Marwan,
emprisonné à vie en Israël et pour la libération duquel l’Huma
a lancé une campagne, a été particulièrement émouvante.
« Le peuple palestinien continuera à se battre »,
a-t-elle lancé, en remerciant notre journal ainsi que Catherine
Hanriot, maire de Pierrefite qui a nommé Marwan Barghouti citoyen
d’honneur de la ville. Émotions encore avec le dépôt d’une
gerbe au mausolée d’Arafat. Séance de travail aussi pour les
syndicalistes des fédérations CGT de l’énergie et de la métallurgie,
avec Swaïl Khader, représentant la Fédération générale des
syndicats palestiniens. L’occasion de nouer des liens plus serrés
et d’envisager des coopérations. « Nous avons besoin de
vous dans tous les domaines, y compris politique », a lancé
Abou Khalil Laham, député, dans le camp de Deisheh, près de
Bethléem. « Nous avons entendu cet appel à redoubler d’énergie
dans l’action politique », a répondu Patrick Le Hyaric.
« Il n’y aura pas d’avancées sans un arrêt de la
colonisation. Nous multiplierons les interventions sans nous
laisser intimider par des campagnes contre votre cause. » Il
a insisté sur la campagne emblématique pour le droit à l’éducation
des enfants palestiniens, « car il faut leur donner les
moyens d’être des citoyens. Ensemble, construisons cette
Palestine que nous appelons de nos voeux ».
(1) Francis Wurtz, président du groupe GUE-GVN, Robert Bret, sénateur,
ainsi que des conseillers régionaux, généraux et des maires,
participaient à la délégation.
© Journal l'Humanité
Publié le 22 novembre avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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