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au cycle attentat-répression au Proche-Orient
Pierre Barbancey Mardi
5 février 2008 Israël-Palestine
. Après qu’Israël a été frappé par une attaque suicide,
Tel-Aviv a intensifié ses raids sur Gaza.
Bande de Gaza, envoyé spécial.
Depuis un an - c’était le 29 janvier 2007, à Eilat -,
aucun attentat suicide ne s’était produit en Israël. Ce qui
n’avait pas empêché Tel-Aviv de poursuivre ses incursions
militaires en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Depuis la conférence
d’Annapolis, au mois de novembre, plus de quatre-vingt-dix
Palestiniens ont ainsi été tués par Israël. Hier, un
Palestinien s’est fait - exploser dans une galerie commerçante
de Dimona, dans le désert du Néguev (site de l’armement nucléaire
israélien), tuant une passante et faisant une dizaine de blessés.
Un autre kamikaze, choqué par la première déflagration, n’a
pas eu le temps d’actionner ses explosifs avant d’être abattu
par la police.
L’attentat a été revendiqué, depuis Gaza, par les Brigades
des martyrs d’alaqsa. Les auteurs seraient deux jeunes, l’un
du Fatah et l’autre du Front populaire de libération de la
Palestine (FPLP), l’un venant de Gaza City, l’autre du village
d’Abbassane, près de Khan Younès. Une information confirmée
à l’Humanité par Rabah Mohanna, membre du bureau politique du
FPLP, bien qu’il semble que son organisation n’ait pas pris la
décision politique d’une telle - action.
« L’attentat-suicide est quelque chose de compliqué,
tente-t-il de justifier. Ce sont des opérations inhumaines, mais
qui se comprennent au vu du contexte dans lequel nous nous
trouvons. Nous sommes dans une situation difficile, nous subissons
une punition collective. Israël utilise des avions F-16 contre
les enfants palestiniens. Il y a donc une idée de vengeance qui
imprègne les esprits. Je suis médecin de formation. Je suis sincèrement
désolé lorsque des femmes et des enfants israéliens sont tués.
Mais je le suis tout autant lorsqu’il s’agit de Palestiniens. »
Notre interlocuteur est cependant plus évasif sur la portée
politique de tels attentats. Quant aux réactions de la communauté
internationale, il se contente de demander, sur la défensive :
« Est-ce que l’attitude des États-Unis et de l’Union
européenne vis-à-vis des Palestiniens est vraiment correcte ? »
L’attentat suicide a été condamné par le président de
l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Il a condamné
simultanément les coups de main israéliens contre des militants
palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, qui se sont poursuivis
lundi avant et après l’attentat de Dimona.
Un responsable des Comités de résistance populaires (CRP),
Ameur Karmout, a été grièvement blessé, ainsi que deux autres
militants par une frappe aérienne israélienne, alors qu’ils se
déplaçaient en voiture dans le nord de la bande de Gaza. Un peu
plus tôt, une unité des forces spéciales israéliennes avait
abattu deux dirigeants locaux du djihad islamique et en avait
blessé un troisième dans un village proche de Djénine.
Selon Abou Fouad, un porte-parole des Brigades des martyrs
d’alaqsa qui tenait une conférence de presse hier dans une rue
de Gaza City, l’attaque était programmée depuis longtemps,
mais a été rendue possible par l’ouverture de la frontière
avec l’Égypte, la semaine dernière, et refermée ce week-end.
De fait, Le Caire a annoncé avoir arrêté plusieurs Palestiniens
détenteurs d’explosifs, dans le Sinaï.
Le mouvement islamiste Hamas s’est félicité de cet
attentat, mais, d’une certaine manière, cela sonne le glas de
ses ambitions frontalières et de toute reconnaissance de près ou
de loin de son coup d’État opéré en juin 2007 à Gaza.
Samedi, le Hamas proclamait qu’il était parvenu à un accord
avec l’Égypte concernant le passage de Rafah. Ahmed Youssef,
porte-parole du Hamas, expliquait ainsi à l’Humanité :
« Nous espérons que, dans quelques jours, quelques
semaines, le point de passage de Rafah sera ouvert. » Après
l’attentat de Dimona, les Égyptiens ne permettront aucun
arrangement impliquant seulement le Hamas. En réalité, les
islamistes ont voulu égarer les médias. Car l’Égypte a
toujours dit qu’elle s’en tenait aux arrangements de 2005
(supervision européenne, contrôle par l’Autorité
palestinienne et droit de veto israélien) et qu’en l’état,
elle laisserait passer des convois humanitaires dans un sens et
des malades dans l’autre.
Il reste que le siège de la bande de Gaza se poursuit. Si des
provisions ont pu entrer ces derniers jours à partir de l’Égypte,
les Israéliens continuent de fermer les points de Karni et
d’Erez, laissant augurer de nouveaux drames dans les prochaines
semaines. Et les Palestiniens, qui en veulent de plus en plus au
Hamas, comprennent de moins en moins de quel processus de paix on
leur parle et pourquoi Mahmoud Abbas continue à s’afficher avec
Ehoud Olmert, plutôt que de faire pression, y compris en en
appelant à la communauté internationale, pour la levée du siège
de Gaza.
© Journal l'Humanité
Publié le 7 février 2008 avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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