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Le Lobby
Paul Craig Roberts

13 novembre 2007

Les experts en Occident et les gens ordinaires en terres arabes ont compris depuis de nombreuses années que les États-Unis n'ont pas de politique indépendante envers le Moyen-Orient. Le président Jimmy Carter, un homme de bonne volonté, a essayé d'utiliser l'influence des USA pour régler le conflit israélo-palestinien, une dangereuse source d'instabilité au Moyen-Orient. Pourtant, Israël a réussi à bloquer la tentative de Carter tout en rejetant la faute sur Yasser Arafat. Le plan de Carter aurait donné naissance à un État palestinien. Israël ne veulent pas d'un tel État pour la raison évidente que l'agression militaire est nécessaire pour voler le territoire d'un État aux frontières définies. Il est beaucoup plus facile de voler des terres non étatiques.

En empêchant l'avènement d'un État palestinien, Israël a été en mesure de poursuivre son vol de la Cisjordanie. Les Palestiniens qui n'ont pas été expulsés ont été forcés dans des ghettos, coupés des écoles, des hôpitaux, de l'eau, de leurs oliveraies et de leurs terres agricoles. Dans un livre récent, le président Carter appelait « apartheid » la situation actuelle. Carter fut diabolisé par le lobby d'Israël pour avoir utilisé ce mot, mais certains experts considèrent que le choix des mots de Carter est un euphémisme pour la continuation de ce que I. Pappe et NG Finkelstein appellent « le nettoyage ethnique de la Palestine. »

Le fait que la grande majorité des Étasuniens ne sache rien de tout ça témoigne de la puissance du lobby israélien.

Un certain nombre d'auteurs ont exposé l'inconduite d'Israël et la puissance du lobby, mais jusqu'à présent, celui-ci a réussi à marginaliser ses détracteurs en les traitant d'« antisémites, » de « nazis » et d'« ennemis des Juifs. » Dans un nouveau livre, John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt ont brisé le pouvoir du lobby israélien à étouffer la vérité en diabolisant et en intimidant tous ceux qui critiquent Israël.

Mearsheimer et Walt sont de distingués savants tenant des positions importantes à l'Université de Chicago et à l'Université de Harvard, deux des plus éminentes universités des USA. Leur ouvrage, The Israël Lobby and US Foreign Policy (Le lobby d'Israël et la politique étrangère US), publié par l'éditeur étasunien réputé, Farrar, Straus et Giroux , est un chef-d'œuvre d'érudition et de documentation. Les notes prennent 23 pour cent des pages du livre.

Mearsheimer et Walt réussissent facilement à construire leurs arguments qui démontrent que le soutien des USA à Israël ne peut s'expliquer par des raisons ni stratégiques ni morales. Seul le pouvoir du lobby d'Israël peut expliquer l'amenuisement des causes morales et stratégiques qui ne cesse de s'amplifier avec le soutien d'Israël par les États-Unis, même au détriment de leurs intérêts stratégiques et nationaux. En fait, le pouvoir exécutif et législatif sont si totalement compromis par le lobby, que les différents éléments de la politique US sur le Moyen-Orient « ont été conçus entièrement ou en partie au profit d'Israël, contre ses divers rivaux. »

Chapitre après chapitre, Mearsheimer et Walt démontrent les effets délétères que le lobby a eu sur les relations avec les Palestiniens, l'Irak, la Syrie, l'Iran et le Liban. Les deux chercheurs concluent :
L'influence du lobby a aidé à amener les États-Unis dans une guerre désastreuse en Irak et a paralysé les efforts pour négocier avec la Syrie et l'Iran. Elle a aussi encouragé les États-Unis à avaliser l'attaque mal conçue d'Israël contre le Liban, une campagne qui a renforcé le rapprochement du Hezbollah avec la Syrie et l'Iran, et a encore terni l'image mondiale des USA. Le lobby porte la responsabilité considérable, mais pas complète, de tous ces développements, et aucun d'entre eux n'était bon pour les États-Unis. Il est difficile d'échapper aux problèmes, même si les difficultés US dans la région du Moyen-Orient ne disparaissaient pas si le lobby était moins influent, les dirigeants US trouveraient plus facile d'explorer d'autres approches, et seraient plus enclins à adopter une politique plus conforme aux intérêts US.

Il n'y a rien d'antisémite à propos de ce livre. Mearsheimer et Walt ne remettent pas en cause le droit d'Israël à exister ou la légitimité de l'État israélien. Ils estiment que les États-Unis doivent défendre Israël contre les menaces à sa survie. Ils ont même de la considération pour l'AIPAC, l'American Israel Public Affairs Committee, à titre de lobby US légitime et non pas en tant qu'agent d'un État étranger.

Les mobiles de ces deux savants, mis à part le respect de la vérité et l'obligation de parler, sont de servir les intérêts légitimes d'Israël et des USA. Mearsheimer et Walt, en accord avec de nombreux historiens et commentateurs israéliens sur le fait que la politique israélienne envers la Palestine et les Arabes, de concert avec la répression des critiques du lobby, ont été « directement nuisibles pour Israël. » La rigidité qu'Israël a imposé à la politique étrangère des USA a enlisé ces derniers dans des guerres, vieilles maintenant d'une demi décennie ou plus, en Irak et en Afghanistan. Alors même que les Musulmans en colère menacent de submerger la marionnettes des USA au Pakistan, le vice-président Dick Cheney, Israël et ses alliés néo-conservateurs s'efforcer d'amorcer la guerre avec l'Iran.

C'est un prix élevé à payer pour l'expansion territoriale d'Israël même si la politique de guerre et de coercition US-israélienne réussit. Si l'agression militaire ne parvient pas à placer le Moyen-Orient sous l'hégémonie des USA et d'Israël, les dangers qui pèseront sur les flux d'énergie et l'existence d'Israël pourraient aboutir à l'utilisation d'armes nucléaires. Il est littéralement fou pour les États-Unis d'exposer le monde à de tels risques pour les intérêts de la politique malavisée d'Israël envers la Palestine.

D'autres chercheurs, surtout ceux dont le sens de justice est blessé par l'oppression cruelle dont souffrent les Palestiniens aux mains d'Israël, sont plus critiques que Mearsheimer et Walt. Ces derniers font d'Israël et du lobby une question de bons offices en définissant le problème comme l'un des intérêts nationaux légitimes des États-Unis et d'Israël plutôt qu'une affaire de crimes, d'inhumanité et d'injustice.

Plutôt que les intérêts nationaux légitimes, James Petras, professeur émérite de sociologie à l'Université de Binghamton à New York, voit « un niveau de crimes parallèle à celui des nazis durant la Seconde Guerre Mondiale » (The Power of Israel in the United States (Le pouvoir d'Israël aux Etats-Unis), 2006). Petras écrit que « les architectes de la guerre d'Iraq ont planifié une série de guerres de conquêtes agressives, basées sur le principe de la domination par la violence, de la torture, du châtiment collectif, de la guerre totale contre les populations civiles, leurs maisons, leurs hôpitaux, leur patrimoine culturel, leurs églises et leurs mosquées, leurs moyens d'existence et leurs institutions éducatives. Ce sont les plus grands crimes contre l'humanité. »

« Les pires crimes, » écrit Petras, « sont commis par ceux qui prétendent être un peuple élu divinement, un peuple avec la revendication justifiée de victime suprême. »

Il reste à voir combien plus de sang et de trésors de fanatisme les Sionistes vont tirer des Étasuniens. Mais une chose est certaine : le lobby israélien est beaucoup trop puissant pour les gens estimables des USA et d'Israël.

Il y a quarante ans, le lobby était assez puissant pour forcer le président Lyndon Johnson à dissimuler l'attaque israélienne intentionnelle contre l'USS Liberty, qui faisait 34 Étasuniens morts et 174 blessés. L'amiral Thomas Moorer, chef des opérations navales et président de l'état-major déclarait : « Nul président étasunien ne peut tenir tête à Israël. »

Quarante ans plus tard, le lobby d'Israël est en mesure de suborner les universités catholiques et d'annuler les décisions de titularisation. Le savant courageux Norman Finkelstein s'est vu refuser une fonction à l'Université DePaul de Chicago dans l'Illinois, pour avoir effectivement critiqué la politique israélienne.

En Amérique aujourd'hui, les universitaires et les intellectuels qui omettent de s'aligner sur le lobby ont peu de chances de recevoir le soutien des institutions conservatrices ou libérales. Même l'article de Mearsheimer et de Walt, The Israel Lobby, commandé par Atlantic Monthly et duquel a été développé leur livre, a dû être publié à l'étranger par The London Review of Books lorsque l'éditeur d'Atlantic Monthly n'en a pas eu le courage.

Les Étasuniens patriotes qui se glorifient de la position de leur pays comme « unique superpuissance » ont beaucoup à apprendre sur la soumission de leur politique extérieure à un petit pays de cinq millions d'habitants.

Pour commencer à apprendre, il n'y a pas meilleur chose que The Israel Lobby de Mearsheimer et de Walt.

Paul Craig Roberts fut Secrétaire Adjoint au Trésor dans l'administration Reagan. Il est l'auteur de Supply-Side Revolution : An Insider's Account of Policymaking in Washington ; Alienation and the Soviet Economy et Meltdown: Inside the Soviet Economy, et est coauteur avec Lawrence M. Stratton de The Tyranny of Good Intentions : How Prosecutors and Bureaucrats Are Trampling the Constitution in the Name of Justice. Clic ici pour l'entrevue [en anglais] de Peter Brimelow de Forbes Magazine avec Roberts au sujet de la récente épidémie d'inconduite des procureurs.

Original : http://www.informationclearinghouse.info/article18714.htm
Traduction au mieux de Pétrus Lombard pour Alter Info



Source : Alter info  
http://www.alterinfo.net/...


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