La politique étrangère
risque de jouer un rôle plus important que d'habitude lors de
la campagne présidentielle. Tout d'abord parce que les Français
s'y intéressent de plus en plus. Qu'ils le déplorent ou qu'ils
s'en félicitent, ils sont conscients de l'impact de la
mondialisation et de ses conséquences économiques, sociales ou
sécuritaires sur leur vie quotidienne.
De surcroît, le
consensus traditionnel sur ces sujets n'existe plus. Les grandes
orientations stratégiques de la Vème République qu'on a
baptisées le " gaullo-mitterrandisme " sont
maintenant contestées. Et le clivage n'oppose plus la droite à
la gauche, mais passe à l'intérieur de chaque camp.
Il y a ceux qui prônent
un rapprochement avec les Etats-Unis au nom de l'alliance des démocraties
et de la solidarité occidentale. Une ligne qu'incarnent aussi
bien Nicolas Sarkozy que Dominique Strauss-Kahn en rupture avec
la tradition française. Ils prônent la fin de ce que l'on
appelle " la politique arabe de la France ", perçue
comme étant avant tout une compromission avec des régimes peu
recommandables. Ils sont favorables à un rapprochement accentué
avec Israël, présenté comme la seule démocratie du
Proche-Orient. La question palestinienne serait de ce fait reléguée
à l'arrière-plan.
En face, aussi bien à
droite qu'à gauche, il existe une opposition farouche à cette
volonté de rupture. Ségolène Royal et Laurent Fabius sont très
critiques sur la façon dont les Etats-Unis mènent la guerre
contre le terrorisme. Ils pensent que George W. Bush contribue
plus à aggraver le problème qu'à le résoudre. Ils ne sont
pas anti-américains, mais largement opposés à la politique étrangère
de Bush, comme l'est, selon eux, la majorité des Français.
Au sein de l'UMP, le
positionnement de " Sarko l'Américain " fait grincer
les dents de ceux qui veulent réaffirmer les principes
gaullistes, comme Dominique de Villepin et Michèle Alliot-Marie.
La Ministre de la Défense a d'ailleurs tenu à réaffirmer
fortement les principes de l'autonomie de la France lors de son
séjour aux Etats-Unis.
Néo-gaullistes et néo-mitterrandistes
partagent la même crainte : que la dénonciation de certains
aspects de la politique arabe de la France ne soit un prétexte
pour cesser d'avoir une politique active dans la région et y
perdre des positions. Les premiers privilégient l'approche de
gouvernement à gouvernement, et les seconds préfèrent
renforcer les contacts avec les sociétés civiles. Mais tous
pensent que la France doit redéfinir et réaffirmer une
politique spécifique dans la région, pas l'abandonner.