Opinion
Les forces du 14
mars à la recherche
de facteurs de mobilisation
N. Raad
Mercredi 31 octobre
2012
Une fois de plus, les forces du 14
mars s’évertuent à consolider leurs
rangs comme au lendemain de l’assassinat
de l’ancien Premier ministre Rafic
Hariri. Mais celles-ci semblent avoir du
plomb dans l’aile. Alors qu’en 2005,
cette coalition regroupait la plupart
des partis politiques libanais, elle
manque aujourd’hui de deux composantes
clés : le courant patriotique libre du
général Michel Aoun et le parti
socialiste progressiste du député Walid
Joumblatt. Donc, un nombre considérable
de partisans des deux partis vient
diminuer aujourd’hui la masse populaire
desdites forces.
Autre facteur à prendre en
considération. Les partis politiques qui
se sont ralliés à la coalition du 14
mars en 2005 ont pu convaincre leurs
partisans de leur choix grâce aux
slogans patriotiques véhiculés par la «
révolution du Cèdre » : liberté,
souveraineté, indépendance.
Mais, y aurait-il quelqu’un dans ce
monde qui puisse rejeter des principes
pareils ? Ce grand appel à
l’émancipation de l’homme a ainsi attiré
tout Libanais aspirant à la liberté, à
la souveraineté, et à l’indépendance,
surtout que les alibis étaient à la
disposition des dirigeants du 14 mars :
« Les armes du Hezbollah » ont été
l’outil d’une mobilisation massive des
partisans de ce camp politique.
Déjà, une bonne partie des chrétiens
du 14 mars ne croyait pas à l’efficacité
de la résistance, même à l’époque de
l’occupation israélienne du Liban. Quant
aux partisans sunnites qui défendaient
jadis la lutte armée contre les
Israéliens, ils étaient émus par le
tremblement qui a frappé le Liban à
travers l’assassinat de Rafic Hariri et
ont pointé du doigt la Syrie et ses
alliés libanais, à leur tête le
Hezbollah.
Avec l’appui des grandes puissances,
les rencontres périodiques, parfois
quotidiennes, des ambassadeurs
américains et occidentaux avec les
dirigeants de la fameuse coalition, la
révolution du Cèdre a pu réaliser ses
objectifs primordiaux, à savoir
l’accélération du retrait de l’armée
syrienne du Liban et la victoire au
scrutin législatif.
Mais dans la conjoncture actuelle,
bon nombre de facteurs avantageux
pouvant aider les forces du 14 mars à
mobiliser leur public ont disparu.Les
armes du Hezbollah ne sont plus un outil
de provocation efficace, malgré la
poursuite d’une campagne acharnée
appelant à son désarmement. Hier mardi
justement, les forces du 14 mars ont
tenu une réunion à Beit elWassat (maison
du chef du courant du Futur Saad Hariri)
dont le communiqué final a accusé le
Hezbollah et ses armes de tous les maux
dans le pays.
L’ancien Premier ministre Fouad
Siniora, qui a lu le communiqué final, a
appelé au nom des participants à cesser
de se cacher derrière le mot «
résistance » et à fixer un ultimatum
pour intégrer les armes du Hezbollah à
l’Etat.
Tout en avertissant que l’assassinat
de Wissan elHassan (chef du département
des renseignements des FSI) ne passera
pas sous silence, Siniora a accusé le
gouvernement libanais de couvrir « les
agissements du Hezbollah », selon le
texte du communiqué.
« Nous n’acceptons plus que les
autorités libanaises se taisent sur
l’implication jihadiste du Hezbollah
auprès du régime syrien, ou sur l’envoi
d’un drone (au-dessus de la Palestine
occupée) à des fins iraniennes au sujet
desquelles les Libanais n’ont aucun mot
à dire. Nous n’acceptons plus que des
services de l’État soient infiltrés et
empêchés d’accomplir leur mission et de
faire la lumière sur les complots et les
assassinats, depuis 2004
jusqu’aujourd’hui », a poursuivi Siniora
entre autre.
Bien que les médias du 14 mars
applaudissent ce qu’ils considèrent être
un véritable manifeste politique, des
analystes politiques proches de la
coalition pro-occidentale ont affirmé
que cette réunion n’a apporté aucune
nouveauté qui puisse mobiliser le public
du 14 mars.
Depuis 2005, les forces du 14 mars
ont prétendu vouloir débarrasser le
Liban des armes du Hezbollah. Mais les
obsèques de Wissam elHassan, il y a déjà
deux semaines, ont terni l’image de ces
dernières à travers la présence
remarquable de partisans armés dans les
rues de la capitale, au Nord Liban et à
la Békaa, semant la terreur et agressant
la population.
C’est ainsi que le prétexte de la
possession d’armes s’est retourné contre
les dirigeants de la coalition du 14
mars. Même les autorités religieuses
officielles sunnites et chrétiennes, qui
étaient jadis leurs alliés, ont critiqué
avec virulence la tentative de renverser
le gouvernement dans la rue et condamné
le recours aux armes.
De retour à la réunion extraordinaire
de mardi, il importe de souligner
l’absence des « fondateurs » du
secrétariat général de la coalition en
question : Fares Soueid, Samir Frangiyeh,
et Elias Atallah ont refusé de prendre
part à la rencontre, accusant le courant
du Futur, les Forces Libanaises et les
Phalanges Libanaises de monopoliser la
décision politique de toutes les autres
composantes.
Si des éléments clés de la coalition
du 14 mars expriment aussi ouvertement
leur désarroi de leur direction, comment
cette dernière parviendra-t-elle à
consolider ses rangs, voire, à mobiliser
son public ? Saura-t-elle rectifier le
tir avant les élections législatives ?
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