“Les promesses
n’engagent que ceux qui les écoutent“ : l’adage est bien
connu et Barack Obama doit aujourd’hui en faire l’amère
expérience. Malgré les promesses israéliennes de geler
l’extension des colonies israéliennes dans les Territoires
palestiniens, condition sine qua none pour une
relance de feu le processus de paix, Benyamin Netanyahou a
récemment annoncé le lancement de centaines de nouveaux
logements en Cisjordanie. Ceux-ci s’ajoutent aux 2500 dont
la construction avait déjà été approuvée par le cabinet
israélien il y a quelques semaines. Pour bien comprendre la
stratégie en trompe-l’œil d’Israël, il faut ajouter que le
« gel des colonies », expression si répétée ces
derniers temps au Proche-Orient qu’elle est devenue le
refrain de la communauté internationale, ne concernera pas
ces projets d’extension et qu’il n’est pas question de
toucher à l’entreprise de judaïsation à marche forcée que
subit Jérusalem-Est. Malgré les appels répétés de
l’administration américaine, le gouvernement israélien fait
donc la sourde oreille. Les colonies se poursuivront et même
s’il accepte du bout des lèvres une « suspension »
de quelques mois, il n’est bien sûr pas question pour le
gouvernement très à droite de Benyamin Netanyahou de
« gel durable ».
La période actuelle
est donc celle du “splendide isolement“ israélien. Malgré
l’insistance du monde entier, on fait donc comme si de rien
n’était. En réussissant la prouesse de fouler aux pieds les
règles du droit international tout en bénéficiant d’une
respectabilité sur la scène internationale que bien de pays
lui envient, Israël se hisse désormais dans le groupe très
fermé des Etats au dessus du droit. On promet une chose et
on fait l’inverse. L’insistance du Président américain ? Pas
grave, il s’en remettra. La légalité internationale ? On
s’en fout. L’Autorité palestinienne ? Comme si elle avait
les moyens d’imposer quoi que ce soit… Les capitales
européennes ? Comme d’habitude, elles avaleront la couleuvre
sans broncher. Comme en 2005, celles-ci n’ont même pas
daigné sortir du tiroir le rapport accablant des services de
l’Union européenne sur la judaïsation de Jérusalem-Est
datant de décembre 2008. Il est vrai que les auteurs du
rapport y dénonçaient la volonté d’Israël de «poursuivre
l'annexion illégale de Jérusalem-Est»[1]…
Ainsi va la vie au
Proche-Orient : on fait croire à la paix mais on poursuit
l’occupation. On évoque courageusement la perspective d’un
“Etat palestinien“ tout en le dépouillant de tous ses
attributs : c’est globalement la vision de la paix qui se
cache derrière les décisions du Premier ministre israélien.
Autant dire que le calvaire des Palestiniens risque de durer
encore longtemps. On voit mal en effet, quelles forces
pourraient contraindre Israël à appliquer le droit
international. Les Etats-Unis, seule puissance véritablement
à même de faire plier Israël, ne prendront pas le risque.
D’ailleurs, ils n’en ont plus les moyens. Même avec toute la
bonne volonté du monde, Obama risque de prêcher dans le
désert pour un moment. La raison ? L’ancien ministre
israélien de la Défense, Moshe Dayan l’avait avancé voilà
près de 30 ans dans les colonnes de l’International
Herald Tribune : « Vous, les Américains, vous
pensez que vous nous forcerez à quitter la Cisjordanie. Mais
nous sommes là et vous êtes à Washington. Que ferez-vous si
nous maintenons nos implantations ? Pousser un cri ? Que
ferez-vous si nous maintenons notre armée là-bas ? Envoyez
des troupes ? »[2]
Chronique diffusée sur le site
www.saphirnews.com
le 6 octobre 2009
[1] L’observateur du monde, Jérusalem au
crible, René Bacmann, Nouvel Observateur N°
2315, semaine du Jeudi 19 mars 2009.
[2] Cité in Les 100 portes du
Proche-Orient, Alain Gresh et Dominique Vidal,
Les Editions de l’Atelier, Paris, 1996, p. 246.
Nabil Ennasri,
diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence, est
actuellement étudiant en théologie musulmane à l’Institut
européen des sciences humaines de Château-Chinon. Il a
séjourné dans plusieurs pays du Golfe (Qatar, Emirats Arabes
Unis). Son mémoire « Le champ politico-religieux du Qatar :
une vision estudiantine » obtenu en vue de la validation du
Master II (Recherche) « Politique Comparée » à été rédigé
sous la direction du professeur François Burgat. Il est
également membre du Collectif des Musulmans de France.