En Syrie, la
propagande est une arme comme les autres Mounadil
al Djazaïri
Système
antichar Konkurs
Dimanche 23 juin 2013
Et l’Occident
en a la maîtrise la plus aboutie.
Un article paru hier dans le New
York Times sous la plume de CJ Chivers
évoque les armes venues de Libye qui
équipent les «rebelles» en Syrie.
Cet article est repris par la
presse française qui n’analyse cependant
pas sa place dans le dispositif
propagandiste que les puissances
occidentales ont mis en marche depuis le
début de la crise syrienne.
Ce que la presse ordinaire ne fait
pas, le blog Moon of Alabama le fait et
expose la réalité de la machine de
propagande simplement en mettant en
relation le dernier article de CJ
Chivers avec son reportage précédent
transmis depuis la Syrie le 12 juin
dernier, il n’y a pas même quinze jours.
Ce que montre Moon of Alabama est
que le dernier article de Chivers
contredit le précédent. En effet, dans
l’article du 12 juin, le journaliste du
New York Times parlait de rebelles
réduits à fabriquer artisanalement
eux-mêmes armes et munitions du fait de
la rareté des approvisionnements en
provenance des pays étrangers.
Une situation complètement
inversée dans l’article du 21 juin
qui parle d’un effort multinational et
complexe financé en partie par le Qatar
pour acheminer en Syrie armes et
munitions venues de Libye.
Pr, dans le même article Chivers
remarque que les armes libyennes ne
constituent qu’une partie de l’arsenal
des rebelles. Et que cet arsenal, loin
d’être de nature artisanale comprend des
canons sans recul et des missiles
antichars évolués.
Cette mise au jour de la démarche
propagandiste d’un quotidien américain
réputé par Moon of Alabama demande,
outre de la perspicacité, une qualité
qui fait défaut dans ce monde où prime
l’instantané en matière d’information :
la mémoire.
Mounadil al Djazaïri
Moon of Alabama, 22 juin 2013 traduit
de l’anglais par Djazaïri
Le 12 juin dernier, CJ Chivers du New
York Times était en Syrie pour reportage
dans lequel il parlait d’ateliers qui
fabriquent quelques munitions pour
l’insurrection en Syrie qui est soutenue
par l’étranger. L’article, à commencer
par le titre, était une longue
complainte sur la prétendue insuffisance
d’armement pour ces pauvres tueurs.
L’article était illustré par des photos
des ateliers prises par son
complice Tyler Hicks.
"Tout le monde sait que nous
n’avons pas les armes dont nous
avons besoin pour nous défendre",
déclare Abou Trad, un commandant du
Front des Rebelles de Saraqib, peu
de temps avant de permettre aux
visiteurs d’entrer dans cet atelier
de fabrication d’obus de mortier.
"Mais nous avons la volonté, et nous
avons de modestes moyens, et nous
avons des outils."
…
Les ateliers d’armement restent
un élément important de la
logistique de l’opposition car le
flux des armes en provenance du
monde arabe ne parvient pas à suivre
la demande.
…
“Tout ce dont nous avons besoin,
c’est d’armes efficaces,” dit Khaled
Muhammed Addibis, un commandant
rebelle. «Des armes efficaces, rien
d’autre.»
Quand Chivers a écrit ce qui précède,
la ligne officielle de la propagande
disait que les Etats Unis n’armaient pas
activement les «rebelles» mais qu’Obama
«résistait aux pressions pour ce faire»
[armer les opposants]. C’était absurde
et Chivers le savait. Alors même qu’il
racontait son histoire sur ces pauvres
«rebelles» qui devaient fabriquer des
armes eux-mêmes parce qu’ils n’en
recevaient pas par ailleurs, Chivers
avait pu voir de nombreuses armes
modernes venues de Libye et d’ailleurs
et il savait que la CIA participait à
leur distribution. Il n’en a jamais
parlé, mais il a au contraire raconté
les mensonges ci-dessus. Comment
savons-nous qu’il a menti ? Eh bien,
jetez juste un œil sur
ce que Chivers écrit aujourd’hui :
Les informations recueillies en
Syrie , ainsi que les données du
contrôle aérien et des entretiens
avec des membres des milices, des
contrebandiers, des rebelles, des
analystes et des officiels dans
plusieurs pays, dressent l’image
d’un effort multinational complexe
et actif, financé en grande partie
par le Qatar, pour transporter des
armes en provenance de Libye aux
combattants de l’opposition
syrienne.
…
Si ce système semble réussir à
acheminer des armes à travers de
multiples frontières et à faire un
tri parmi les organisations
rebelles, une fois en Syrie, le flux
d’armement se ramifie. Les
combattants islamistes, dont
certains sont alignés sur al Qaïda,
ont l’argent pour acheter les stocks
qui viennent d’arriver, et beaucoup
de rebelles sont prêts à les vendre.
…
Mais les apports venus de Libye
semblent représenter au moins une
partie des armes antichars que nous
avons vues dans le conflit ce
printemps, dont des projectiles de
fabrication belge pour des canons
sans recul M40 et certains des
missiles guidés Konkurs-M de
fabrication russe qui ont détruit
des blindés syriens ces derniers
mois.
…
La présence de munitions venant
de l’ancien arsenal de Kadhafi est
aisément visible.
Fin mai dernier, le New York
Times a trouvé des caisses, des
gaines de stockage et des douilles
de munitions antichars en provenance
de Libye et en possession d’ Ahfad
al-Rasul, une importante
organisation combattante affiliée au
Conseil Suprême Militaire.
Alors qu’ils écrivaient sur des
insurgés “privés d’armes”, Chivers et
son photographe Hicks avaient en réalité
vu les canons sans recul, les missiles
guides et quantités de caisses de
munitions venues de Libye. Mais à ce
moment là, le thème officiel de la
propagande était ces «pauvres rebelles
sous-armés » et Chivers avait
obligeamment suivi cette ligne.
Quad de
l’armée chinoise équipé d’un canon sans
recul
Ce thème de la propagande avait pour
but de créer un certain soutien dans
l’opinion à une escalade de la guerre en
mettant encore plus d’armes entre les
mains des rebelles. L’histoire des
«rebelles privés d’armes» était fausse
et Chivers le savait depuis la «fin du
mois de mai» lors de son séjour en
Syrie.
Comme souvent, ainsi qu’on le
constate ici, les journalistes sont
incités, ou obligés silencieusement, à
coller à la ligne officielle livrée par
la Maison Blanche. Les rares fois où le
New York Times va contre la propagande
américaine officielle sont juste un
moyen de diversion pour entretenir
l’image d’une presse libre.
—
Les onze pays qui forment le groupe
des amis pour la destruction de la Syrie
se sont réunis aujourd’hui au Qatar.
Avant le commencement de la réunion, le
Secrétaire d’Etat Kerry avait prévu
d’unifier la distribution des armes via
le Général Idriss , le chef de l’Armée
Syrienne Libre contrôlée par la CIA pour
mettre un tant soit peu les djihadistes
à l’écart du flot d’armement :
Les opposants Arabes et
Occidentaux à Bachar al-Assad se
sont réunis au Qatar ce samedi pour
renforcer la coordination de leur
soutien aux rebelles qui luttent
pour renverser le président Syrien.
Les ministres de onze pays, dont
les Etats Unis, des puissances
européennes et régionales musulmanes
Sunnites, ont tenu des discussions
qui, selon les Etats Unis, devraient
engager les participants à acheminer
toute l’aide via le Conseil
Militaire Suprême soutenu par
l’Occident, dont Washington espère
qu’il pourra compenser la rapide
montée en puissance des forces
rebelles djihadistes.
Cette démarche a été jugée nécessaire
parce que l’Arabie Saoudite tout comme
le Qatar distribuaient librement des
armes aux différentes organisations
terroristes takfiristes :
Deux sources du Golfe ont indiqué
à Reuters que l’Arabie Saoudite, qui
a joué un rôle de chef de file parmi
les opposants Arabes à Assad, a
aussi accéléré la livraison d’armes
sophistiquées aux rebelles.
“Il y a eu ces dernières semaines
des arrivages supplémentaires
d’armes sophistiquées. Ils en
reçoivent plus fréquemment ,»
déclare une source sans donner de
détails. Une autre source du Golfe
parle de ces armes comme de
fournitures de nature à
«potentiellement faire pencher la
balance.»
L’Armée Syrienne Libre a proposé
aux puissantes organisations
rebelles islamistes une part des
nouvelles armes sophistiquées si
elles s’unifient sous la bannière de
l’ASL.
«Idriss a proposé de soutenir
les factions islamistes en
partageant les armes qu’il s’attend
à recevoir si elles rejoignent une
alliance avec l’ASL et acceptent
certaines conditions, » a déclaré
hier le rebelle basé à Damas.
…
Il a également déclaré qu’une
délégation du Qatar était
présente – la seule présence non
syrienne à cette réunion [à Ankara
jeudi dernier]. Cela a surpris les
participants mais était sans doute
en lien avec la réunion des soutiens
de l’opposition, connus sous
l’appellation d’Amis de la Syrie,
qui doit se tenir à Doha aujourd’hui
La conférence de Doha est maintenant
terminée et Kerry a [encore] échoué :
Les ministres des onze principaux
pays qui forment le groupe des Amis
de la Syrie s’est mis d’accord «pour
fournir urgemment tout le matériel
et l’équipement nécessaires pour
l’opposition sur le terrain, chaque
pays le faisant à sa propre manière,
afin de la mettre en capacité de
contrer les brutales attaques du
régime et de ses alliés.»
“Chaque pays a sa propre manière”
signifie que Kerry a échoué –
complètement – à unifier le flux
d’armement. Il semble alors que le Qatar
et l’Arabie Saoudite continueront à
livrer des armes au Jabhat al-Nosra et
aux autres organisations terroristes
takfiristes en Syrie.
Cette désunion devrait amener
l’administration Obama à admettre que
ses arguments pour donner des armes aux
“bons rebelles” pour en priver les
takfiristes ne marchera pas. Le Qatar et
l’Arabie Saoudite continuant à fournir
ces armes «à leur propre manière», les
takfiristes resteront la plus forte
composante de l’insurrection.
Compte tenu de l’afflux de nouvelles
armes, l’armée syrienne devrait
probablement stopper son offensive en
cours et rester sur la défensive en
attendant de définir de nouvelles
tactiques contre ces armes. Des chars
avançant à découvert ou restant
immobiles à des checkpoints sont des
cibles faciles et ne pourront pas
échapper à des attaques menées avec des
Konkurs-M, des Kornets [le Kornet un
missile russe] ou d’autres armes
antichars modernes. Il est possible de
les contrer mais cela nécessite du temps
pour se préparer et se former.
Entretemps, les importants transports
d’armes peuvent être surveillés et
attaqués par surprise et détruits dans
des raids éclair.
PS : je le dis à l’intention d’un
certain crétin sioniste (pléonasme) :
Moon of Alabama est le titre d’une
chanson écrite en anglais par
Bertolt Brecht et mise en musique
par Kurt Weill.
Moon of Alabama a été interprétée
par de nombreux artistes dont les Doors,
Nina Simone, Dalida où, comme on le voit
dans la vidéo ci-dessous, David Bowie.
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