Opinion
Toulouse, Gaza
Mohamed
Belaali
Mercredi 28
novembre 2012
« En 2012, ici, à Toulouse, un
meurtrier, alimenté par la haine, a
massacré trois petits enfants juifs»
disait Netanyahou, lors de la cérémonie
d’hommage aux victimes de Mohamed Merah,
à l’école Ozar Hatorah, le 1er novembre
2012 (1). «Nous vivons un moment
exceptionnel parce qu'ici s'est produite
une tragédie, elle-même, exceptionnelle»
lui répond François hollande (2).
Étrange cérémonie! Le même Netanyahou,
qui exploite le drame de Toulouse pour
gagner les législatives anticipées de
janvier 2013, massacre quasiment tous
les jours femmes, enfants et vieillards
palestiniens. Il est à la tête d'un État
qui depuis sa création en 1947 s'est
spécialisé dans les expulsions, les
meurtres et les massacres des
palestiniens comme le montre, une fois
encore, la nouvelle
offensive sur Gaza qui a fait des
dizaines de morts et des centaines de
blessés parmi la population
civile . Depuis la Nakba (catastrophe),
la vie au quotidien de ce peuple est
faite de drames, de malheurs et de
résistance. Si l'assassinat de «trois
petits enfants juifs» à Toulouse est
qualifié par François Hollande de
tragédie exceptionnelle, comment peut-on
alors nommer la réalité palestinienne?
Le
cynisme des deux hommes n'a pas de
bornes. Leur calcul politique se fait
sur les cadavres des victimes innocentes
à Toulouse comme à Gaza. L'un veut
gagner les élections législatives
anticipées du 22 janvier 2013 et
entraîner la France dans un un conflit
avec l'Iran, l'autre veut plaire à un
lobby sioniste extrêmement puissant et
influent. Dans son recueillement à
l’école Ozar Hatorah de Toulouse,
Netanyahou pensait probablement
davantage au 22 janvier qu'aux «trois
petits enfants juifs». La cérémonie
de commémoration est ainsi transformée
en meeting politique.Une fois qu'il a
harangué la foule, il s'est mis à
chanter «Am Israël Haï» (Le peuple
d’Israël est vivant!). Les victimes
n'étaient qu'un prétexte. Le mépris des
vies humaines est une constante chez les
dirigeants israéliens. Toute l'histoire
de l’État sioniste n'est qu'une longue,
très longue suite de massacres des
populations civiles palestiniennes qui
constituent pour Israël un obstacle
vivant à la réalisation du rêve sioniste
du Grand Israël. Contre l'oubli et pour
comprendre le nouveau massacre perpétré
par l'entité sioniste à Gaza, il est
peut-être utile de rappeler les tueries
les plus connues et reconnues sans
verser, par pudeur, dans une
comptabilité macabre des chiffres des
victimes.
A l'aube
du 9 avril 1948, les forces combinées de
l'Irgoun et de Lehi-Stern, dirigées par
deux futurs premiers ministres Begin et
Shamir, ont massacré, selon les sources,
entre 250 et 347 villageois palestiniens
de Deir-Yassine . Arie Yitzahi,
historien pourtant officiel, écrira plus
tard en 1972« si nous regroupons les
faits, nous réalisons que dans une très
large mesure, la bataille [de
Deir-Yassine] obéissait au schéma
habituel d'occupation des villages
arabes en 1948. (…) Au cours de ces
opérations, de nombreux vieillards,
femmes et enfants étaient abattus dès
qu'il y avait une résistance»
(3).
Sabra
et Chatila sont déjà entrés dans
l'histoire et reflètent comme un miroir
le visage hideux du sionisme et de tout
ce qu'il représente.
«La
solitude des morts, dans le camp de
Chatila était encore plus sensible parce
qu'ils avaient des gestes et des poses
dont ils ne s'étaient pas occupés. Morts
n'importe comment. Morts laissés à
l'abandon. Cependant, dans le camp,
autour de nous toutes les affections,
les tendresses, les amours flottaient, à
la recherche des palestiniens qui n'y
répondraient plus»
écrivait Jean Genet dans «Quatre heures
à Chatila».
«Rempart» (Jénine), «Plomb durci»,
«Pilier de défense» ne sont que des noms
qu'Israël donne à des massacres commis à
intervalles réguliers. Mais plus
important encore que les tueries
elles-mêmes, ce sont les répercussions
du soutien indéfectible des bourgeoisies
occidentales à l’État hébreux. Cette
complicité sans faille est un puissant
encouragement qui a permis aux
dirigeants israéliens de commettre leurs
forfaits sans scrupules et sans impunité
aucune. De nouveaux carnages viendront
s'ajouter aux anciens.
Dès le
début de la nouvelle offensive
israélienne sur Gaza, Barack Obama s'est
empressé, comme d'habitude, pour
apporter le soutien total des États-Unis
à Israël. Alors que Gaza était sous les
bombes, François Hollande, lui, a
préféré, apporter directement son
soutien en téléphonant à son ami,
l'extrémiste Netanyahou : «je lui ai
dit que nous étions conscients de
l'exigence pour Israël de sa propre
sécurité mais qu'il y avait aussi à
éviter justement de tomber dans des
provocations qui pourraient dégénérer.
Nous continuerons d'utiliser toute notre
influence pour éviter une escalade ».
Si la
position de Barack Obama est directe,
brutale et somme toute franche, celle de
François Hollande est hypocrite, lâche
et cynique.
Elle
ne dénonce nullement le massacrede
la population civile palestinienne. La
tuerie devient un acte de légitime
défense. Seule compte la sécurité de
l'agresseur. Hollande qui est
prêt à livrer la guerre en Syrie pour
«sauver des vies humaines», se
taitlâchement
sur les assassinats et les mutilations
des hommes, des femmes et des enfants de
Gaza !
La
social-démocratie, et en particulier le
Parti Socialiste français, n'a jamais eu
le courage de regarder en face le
problème israélo-palestinien.
La
négation de l'existence et des
souffrances du peuple palestinien rend
les dirigeants de ce parti incapables
d'apporter une réelle contribution à
l'édification de la paix entre les deux
peuples dans cette région tourmentée.
De
Léon Blum à François Hollande en passant
par François Mitterrand, l'alignement
des dirigeants «socialistes» sur le
sionisme est total. Selon F. Hollande«C’est
sans doute au PS que l’on trouve le plus
grand nombre d’amis d’Israël et du
peuple juif»
(5).
Manuel Valls va encore plus loin en
déclarant lors des primaires socialistes
«Je suis lié de manière éternelle à
Israël»
(6).
Mais c'est Pierre Moscovici qui résume
relativement bien les convictions de
nombreux dirigeants du parti: «Si
j’ai adhéré au Parti socialiste, en tant
que juif, français et socialiste, c’est
aussi en pensant à Léon Blum. Il faut
réfléchir et essayer de savoir pourquoi
il se serait battu aujourd’hui. Or, cet
homme s’est battu pour la République,
pour la gauche et le socialisme, ainsi
que, sur la fin de sa vie, pour le
sionisme, porteur à son sens d’une paix
pour le Proche-Orient»
(7).En
guise
de la paix, ce sont les expulsions, les
assassinats ciblés, les tueries, les
«check points»,le
mur, les destructions massives
d'hôpitaux, d'écoles, de mosquées,
d'infrastructures civiles etc. qui
rythment la vie quotidienne des
palestiniens. Voilà de quoi est porteur
le sionisme! Car sa nature et son projet
sont radicalement incompatibles avec la
paix. Réaliser le «Grand Israël» suppose
la négation totale du peuple
palestinien.
Hollande
n'a jamais brillé par son courage. S'il
a fait le fanfaron à l'Onu le 25
septembre 2012 en déclarant «que
l’urgence aujourd’hui est l’intervention
militaire en Syrie et au Sahel!»(4),
alors que le chômage et ses conséquences
ravagent la France, il a rapidement
courbé l'échine devant les dirigeants
israéliens extrémistes qui n'ont aucun
respect ni pour la vie humaine ni pour
les lois et les conventions
internationales. Les résolutions des
Nations-Unies sont systématiquement
violées par l’État hébreux. Israël est
la négation même du Droit international.
En France, François Hollande et son
parti, multiplient les cadeaux aux
patrons et paupérisent les travailleurs
et les classes populaires. Un pouvoir
qui méprise tant sa propre population ne
peut respecter la résistance et le
combat des peuples qui souffrent des
injustices. Il ne peut être que du côté
des puissants, des oppresseurs à
l'intérieur comme à l'extérieur.
(1)
http://jssnews.com/2012/11/02/disc-neta-toul/
(2)
http://www.elysee.fr/president/les-actualites/discours/2012/intervention-de-m-le-president-de-la-republique.14191.html
(3) Il s'agit d'un article publié le 14
avril 1972 dans le Yediot Aharonot. Voir
L. Soliman «Pour une histoire profane de
la Palestine». La Découverte, page 126.
(4)
http://www.belaali.com/
(5)
http://www.crif.org/fr/lecrifenaction/fran%C3%A7ois-hollande-re%C3%A7oit-le-crif
(6)
http://jforum.fr/forum/france/article/francois-hollande-et-israel
(7) Ibid.
Mohamed Belaali
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