Opinion
Les premières
urgences de François Hollande
Mohamed Belaali
Jeudi 1er novembre
2012
«Nous devons agir. Agir ensemble et
agir vite, car il y a urgence.
La première des urgences s'appelle la
Syrie».
L'autre priorité qui préoccupe le
guerrier Hollande est le Sahel africain:
«La dernière
urgence, et c’est peut-être la première
qui doit nous mobiliser cette semaine,
est le Sahel(...) Oui, il faut que le
Mali retrouve l’intégrité de son
territoire et que le terrorisme soit
écarté de cette zone du Sahel»,
disait le président belliqueux devant
l'Assemblée générale des Nations Unies
le 25 septembre 2012 (1). Alors que le
chômage, la précarité et la misère
matérielle et morale qui en
découle font ravage en France,
François Hollande déclare solennellement
à New York que l'urgence aujourd'hui est
l'intervention militaire en Syrie et au
Sahel ! Guerre économique et sociale à
l'intérieur et menaces de guerre à
l'extérieur sont deux faces d'une seule
et même politique. Ce fétichisme de la
guerre va de pair avec le mépris de la
social-démocratie pour les intérêts des
classes populaires. La fabrication des
ennemis à combattre, à l'intérieur comme
à l'extérieur, permet aux
sociaux-démocrates au pouvoir de mieux
servir les intérêts de la classe
dominante.
Les guerres extérieures désirées par
le président Hollande, ne sont en fait
que le prolongement de la guerre
économique et sociale livrée sans trêve
à l'intérieur par les sociaux-démocrates
aux travailleurs et aux salariés en
général. Pendant que François Hollande
déclarait la guerre à la Syrie et
poussait à l'intervention militaire au
Mali, les députés, eux, se préparaient
dans l'ombre à ratifier cette terrible
arme économique que constitue le Traité
européen de stabilité, de coordination
et de gouvernance (TSCG). La
quasi-simultanéité des déclarations
guerrières de François Hollande aux
Nations Unies et le vote du budget
européen montrent que les deux
dimensions de cette politique
belliqueuse sont intimement liées. Les
menaces de guerre proférées par François
Hollande n'ont de sens que par rapport à
la guerre de classes que la
social-démocratie mène contre de larges
couches de la population. Cet activisme
guerrier à l’extérieur s'accompagne par
une croisade à l'intérieur contre les
intérêts des classes populaires. Son
agressivité à l'égard des autres peuples
n'est que l'expression de la violence
économique qu'elle exerce à l'intérieur
sur les travailleurs. Car la
social-démocratie reste un rouage
essentiel de l'exploitation capitaliste
et un instrument redoutable de
l'impérialisme. Elle est, à l'intérieur
comme à l'extérieur, au service des
classes dominantes.
Avec ces menaces guerrières à
l'extérieur, les sociaux-démocrates
tentent d'avoir la paix intérieure pour
mieux mener à bien leur politique de
misère contre les classes populaires. La
fabrication des ennemis extérieurs leur
permet de détourner la lutte des
travailleurs contre les véritables
responsables de la situation économique
désastreuse pour la diriger et la
concentrer sur des ennemis inventés de
toutes pièces. Pour la social-démocratie
au pouvoir, l'ennemi n'est pas le
chômage, la précarité et la misère
matérielle et morale qui rongent au
quotidien la vie de millions d'hommes et
de femmes en France, mais les
«terroristes» qui occupent le Nord-Mali
et le régime syrien. D'un côté, de
véritables problèmes que l'on peut
mesurer et quantifier, de l'autre, des
ennemis créés et présentés comme
dangereux et hostiles à l'intérêt de la
nation, de la démocratie, des droits de
l'homme etc. Alors que la France n'a pas
véritablement d'ennemis, la bourgeoisie
française et la social-démocratie qui
sert ses intérêts inventent en
permanence des ennemis à combattre.
Derrière cette construction de l'ennemi,
qui change selon les circonstances et le
rapport de force, se cache la volonté du
pouvoir de soumettre et de rassembler
autour de sa politique ceux-là mêmes qui
en sont les victimes, les classes
populaires. Servir les oppresseurs
nécessite le consentement et la
soumission des opprimés.
Mais
comme l'ennemi extérieur ne suffit pas,
le gouvernement Hollande, comme celui de
Nicolas Sarkozy avant lui, invente des
ennemis intérieurs. «Je
veux ainsi affirmer la détermination du
gouvernement à lutter contre le
terrorisme, de le faire tant à
l’intérieur de notre pays qu’à
l’extérieur de nos frontières»
déclarait Jean-Marc Ayrault
premier ministre (2). Car «La France
doit être rassemblée, elle doit être
rassemblée pour venir à bout de tous
ceux qui croient pouvoir, par la
violence, remettre en cause l’unité de
la Nation»
(3).
Le mot «rassemblée»est
utilisé deux fois dans la même phrase!
Rassembler la France autour de la
politique d'austérité qui ravage la vie
d'une partie de la population de plus en
plus grande reste l'objectif à
atteindre. Pour les sociaux-démocrates,
ce qui est bon pour les puissants doit
l'être également pour toute la
population. Les intérêts des uns ne
peuvent que coïncider avec les intérêts
des autres. Les conflits de classes
n'existent pas !
Les
politiques d'austérité imposées par la
bourgeoisie et appliquées avec un zèle
singulier par le gouvernement en place,
qui détruisent progressivement les
droits et les acquis sociaux arrachés de
haute lutte par la classe laborieuse au
prix d'énormes sacrifices, sont bonnes
pour l'ensemble de la population. Il y a
longtemps que les sociaux-démocrates ont
abandonné le marxisme et la lutte des
classes. Ils sont par contre subjugués
par le capitalisme, et les guerres
impérialistes. La trahison des
intérêts des travailleurs et la
collaboration
de
classes sont une constante dans
l'histoire de la social-démocratie (4).
Il faut donc, vaille que vaille,
rassembler toute la nation autour du
gouvernement et de sa politique.
C'est dans ce cadre qu'il faut situer
cette «mobilisation la plus
totale de l’État pour lutter contre
toutes les menaces terroristes»comme
le déclarait François Hollande lui-même
(5).
Car pour rassembler une population de
plus en plus traumatisée par les effets
des plans d'austérité à répétition, il
faut lui trouver un ennemi ou des
ennemis intérieurs qui puissent
l'occuper et la détourner de ses
véritables préoccupations. La
théâtralisation et la médiatisation à
outrance des opérations policières de
«lutte contre le terrorisme» montrent
que le pouvoir tente de convaincre la
population que l'urgence du moment est
la guerre contre «le terrorisme» (bien
entendu «islamiste»). Les interventions,
interpellations et autres perquisitions
se font le plus souvent sous les
projecteurs des caméras et les flashs
des photographes. Les membres du
gouvernement, du ministre de l'intérieur
jusqu'au président de la République,
prennent la relève et commentent à chaud
les tenants et aboutissants du dossier
et assurent la population de leur
détermination totale à combattre «le
terrorisme».
Par contre le gouvernement est
beaucoup plus discret sur les opérations
de licenciements massifs opérés par les
patrons des grandes et petites
entreprises un peu partout en France et
dans tous les secteurs de l'activité
économique. Le sort des victimes de ce
«terrorisme économique» n'intéresse pas
vraiment les sociaux-démocrates au
pouvoir. La « mobilisation la plus
totale de l’État» est réservée à la
lutte contre «le terrorisme» à
l'intérieur comme à l'extérieur mais en
aucun cas contre le chômage et la
misère. Pire, la politique d'austérité
menée avec beaucoup de cynisme par
François Hollande et son gouvernement
produit chaque jour qui passe de
nouvelles victimes qui iront grossir les
rangs des millions d'autres chômeurs.
Les sociaux-démocrates sont ainsi très
éloignés des préoccupations et des
souffrances des classes populaires dont
ils prétendent pourtant servir les
intérêts.
Leur mépris des masses et
leur vénération des puissants ont fait
des sociaux-démocrates un instrument
redoutable du capital. Par leur
opportunisme et leur trahison des
intérêts des travailleurs et de
l'ensemble des classes populaires, les
sociaux-démocrates perpétuent les
injustices et les privilèges de ceux qui
ont déjà tous les pouvoirs. Leur
engagement total aux côtés de la classe
dominante dans son
offensive contre
toutes les avancées sociales montre
qu'ils sont résolument pour l'ordre
établi avec toutes ses tares et tous ses
dangers pour l'homme et la nature.
Conservateurs, ils constituent un
véritable obstacle à la transformation
radicale de la société et au dépassement
du capitalisme.
Mohamed Belaali
(1)
http://www.elysee.fr/president/...
(2)
http://www.gouvernement.fr/...
(3)
ibid.
(4) Voir sur ce
sujet « Social-démocratie et
collaboration de classes»:
http://www.belaali.com/...
(5)
http://www.elysee.fr/president/...
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