Opinion
L'impérialisme est
l'ennemi des peuples :
le cas de la Syrie
Mohamed Belaali
Dimanche 1er
janvier 2012
L'impérialisme américain et son caniche
européen cherchent par tous les moyens à
déstabiliser
la Syrie
pour mieux l'asservir. Après la Libye,
c'est le tour de la Syrie.
L'impérialisme avait déjà, dans un passé
récent, détruit la Yougoslavie, envahi
l'Afghanistan, ravagé l'Irak et ruiné la
Côte d'Ivoire. Destructions, massacres,
génocides et violence extrême sont ses
caractéristiques essentielles. Poussé
par la recherche effrénée du profit,
l'impérialisme en tant qu'instrument du
pouvoir de la bourgeoisie, tente de
soumettre tous les peuples de la
planète. Esclavage, colonialisme,
néocolonialisme etc., son histoire
n'est, en dernière analyse, que pillage,
par la violence et la cruauté, des
richesses des peuples. Vouloir installer
en Syrie par la force un gouvernement à
sa botte, l'impérialisme ne fait que
perpétuer cette logique hégémonique et
despotique. L'impérialisme est toujours
et partout l'ennemi des peuples.
Dès
ses origines, le parti Baath éprouvait
une aversion profonde pour le marxisme
et la lutte des classes qui, selon ses
fondateurs, étaient étrangers aux
valeurs de la nation arabe. Le
communisme à leurs yeux était par
essence internationaliste, incompatible
avec l'union des peuples arabes. Leur
foi mythique dans cette « nation arabe»
et dans «le socialisme arabe» a fait du
Baath, en dernière analyse, un parti
plutôt nationaliste au service des
intérêts de la bourgeoisie et de la
classe moyenne syrienne.
En
1963, lors du sixième Congrès National,
l'aile gauche du parti avait adopté des
résolutions réellement progressistes. Il
faut préciser que les militants qui
animent cette tendance radicale du Baath
ont des origines sociales populaires
contrairement à la vieille garde dont
les dirigeants appartiennent à la
bourgeoisie citadine. La lutte des
classes s'est en quelque sorte
introduite, au grand dam des
conservateurs, à l'intérieur même du
parti !
Pour
contrecarrer ces résolutions et
renverser cette tendance, Michel Aflak,
Salah Bitar et leurs fidèles ont pris la
décision, lourde de conséquences, de
recourir à l'armée. En militarisant le
parti, les fondateurs ont de fait
éliminé toute possibilité de régler les
conflits et les divergences d'opinions
par le débat et les urnes. En Irak comme
en Syrie, deux pays où le Baath est
arrivé au pouvoir, le parti est devenu
un repère d'officiers assoiffés de
pouvoir. «La renaissance arabe»,
«L'unité arabe» et «le socialisme arabe»
ont été relégués aux calendes grecques.
Leur seul et unique objectif est de se
maintenir, vaille que vaille, au
pouvoir.
La
répression sous toutes ses formes est
devenue pour ces militaires le moyen le
plus efficace pour taire toute
contestation et éliminer toute
opposition. Les services de
renseignements, les redoutables «Moukhabarat»
pourchassent, torturent et éliminent
impitoyablement les opposants. Le
général Hafez Al Assad a pris le
contrôle de la Syrie en 1970. Trente ans
plus tard, il livre à son fils Bachar
une Syrie «nettoyée» de toute
opposition. Même les fondateurs
historiques du Baath n'ont pas échappé à
la répression. Michel Aflak et Salah
Bitar ont été condamnés à mort par
contumace avant d'être graciés. Mais
Salah Bitar a été assassiné rue Hoche à
paris en 1980.
Aujourd'hui encore, l'état d'urgence est
toujours en vigueur et l'article 8 de la
constitution donne au Baath le statut de
dirigeant exclusif de l'État et de la
société (1).
Mais
le Baath est le produit des rapports
sociaux de la société syrienne. Il
appartient au peuple syrien et à lui
seul, en fonction de ces mêmes rapports
sociaux, de le garder ou au contraire de
le renverser.
Les
soulèvements populaires en Tunisie, en
Égypte, au Yémen, à Bahreïn etc. ont
suscité d'énormes espoirs de changement
dans les masses arabes opprimées y
compris en Syrie.
Mais
l'impérialisme ne peut supporter cette
marche autonome des peuples vers la
démocratie et le progrès. Les maintenir
dans la soumission et la misère qui
bloquent leur vitalité et leur
émancipation reste pour lui le meilleur
moyen de les dominer pour mieux les
exploiter.
L'impérialisme s'immisce directement
dans les affaires des peuples en leur
refusant le droit de prendre eux-mêmes
en charge leur propre destin. C'est
ainsi qu'il a écrasé dans le sang, par
l'intermédiaire de l'Arabie Saoudite, la
révolution du peuple de Bahreïn pour
maintenir au pouvoir la dynastie des Al
khalifa, son fidèle serviteur local.
C'est toujours lui qui a financé, armé
et porté au pouvoir le Conseil National
de Transition (CNT) en Libye au prix de
milliers de morts et de destruction de
tout un pays. Et c'est encore
l'impérialisme qui a manœuvré au Yémen,
par le biais du Conseil de Coopération
du Golfe, pour confisquer la révolution
au peuple en demandant à Ali Abdallah
Saleh de mettre le pouvoir entre des
mains sûres avant de s'exiler en Arabie
Saoudite ou aux États-Unis.
L'impérialisme est la négation du Droit
des nations à disposer d'elles-mêmes.
L'hystérique propagande menée contre la
Syrie n'a d'égale que le silence sur les
révoltes réellement populaires au Yémen,
à Bahreïn, en Arabie Saoudite ou encore
au Maroc. Combien de citoyens américains
et européens savent que le peuple
marocain par exemple manifeste
massivement et pacifiquement tous les
dimanches depuis le 20 février 2011?
Cette intense propagande dans l'occident
impérialiste rappelle étrangement celle
qui a précédé l'invasion de l'Irak et de
la Libye.
L'impérialisme américain avec l'aide
notamment de la Grande Bretagne, de la
France, de la Turquie, de l'Arabie
Saoudite et du Qatar se prépare
activement à intervenir militairement en
Syrie pour installer un pouvoir qui
servira ses intérêts comme en
Afghanistan, en Irak ou encore en Libye.
Déjà l'Armée Libre Syrienne (ALS), pure
créature de la Turquie, revendique un
certain nombre d'actions sanglantes
contre l'armée régulière syrienne.
L'opposition au régime de Bachar Al
Assad, dominée par les Frères Musulmans
est de plus en plus violente. Il s'agit
d'affaiblir la Syrie avant de l'envahir
comme ce fut le cas en Libye.
Dans
le monde arabe, l'impérialisme brise
l'élan des soulèvements populaires
pacifiques et le remplace
par
la violence
d'une
opposition qui lui est soumise. Il
écrase les aspirations et les luttes des
peuples pour leur imposer des régimes
qui lui sont totalement acquis.
L'exemple de la Libye est édifiant à cet
égard. Aujourd'hui, il tente d'envahir
la Syrie pour servir ses intérêts et
tenir son peuple dans l'oppression et la
servitude.
Un
régime installé à Damas par la volonté
des États-Unis et de leurs satellites
est la pire chose qui puisse arriver au
peuple syrien, notamment pour ses
classes laborieuses. Il suffit de voir
dans quelle situation tragique se trouve
aujourd'hui la population irakienne sans
eau ni électricité pour s'en convaincre.
Avant leur départ tout relatif, les
américains ont laissé derrière eux, en
plus d'un pouvoir corrompu et à leur
solde, un pays divisé, ravagé, martyrisé
et meurtri : plus d'un million de
victimes et des centaines de milliers de
blessés (2). Ce crime contre l'humanité
«donne
la mesure de la cruauté dont le
capitalisme et la bourgeoisie qui le
porte sont capables»
(3).
Et on va taire par pudeur les pratiques
barbares des soldats américains sur des
prisonniers irakiens sans défense
notamment dans la tristement célèbre
prison d'Abou Ghraib. La
propagande
la
plus odieuse et les mensonges les
plus grotesques ont été utilisés pour
justifier l'invasion de l'Irak. La
bourgeoisie, on le voit, ne recule
devant rien pour assouvir sa soif du
pétrole irakien.
Ce qui
est vrai de l'Irak ne l'est pas moins de
la Libye où la population survit dans
des conditions dramatiques après les
destructions massives de l'OTAN, bras
armé de l'impérialisme. Pendant ce
temps-là, les grandes compagnies
pétrolières comme ENI, Total, BP,
ExxonMobil, Shell etc.,
continuent, tels des vampires, à pomper
allègrement le pétrole libyen !
Par
ailleurs, l'Alliance atlantique refuse
toujours de fournir le moindre chiffre
sur le nombre de civils innocents tués
par ses soldats. Ce silence en dit long
sur les massacres perpétrés par l'OTAN
et le CNT contre le peuple libyen.
Rappelons tout de même que ces crimes
ont été commis sous la bannière de la
protection des civils et de l'aide
humanitaire comme le précise la
résolution 1973
de
l'ONU :
« Le
Conseil de sécurité(...) se déclarant
résolu à assurer la protection des
civils et des secteurs où vivent des
civils, et à assurer l'acheminement sans
obstacle ni contretemps de l'aide
humanitaire»!
La
victoire de l'impérialisme en Syrie, est
la défaite non seulement du peuple
syrien mais de tous les peuples.
Mais
ces guerres que les bourgeoisies
américaines et européennes imposent
aux
peuples à travers le monde ne
sont, en dernière analyse, que le
prolongement des guerres économiques et
sociales qu'elles livrent
dans leur propre pays aux
travailleurs et aux salariés en général.
Les plans de rigueur et d'austérité qui
se succèdent aux États-Unis et en Europe
constituent une véritable guerre que la
bourgeoisie livre aux classes
populaires. «La guerre est la
continuation de la politique par
d'autres moyens» disait Clausewitz.
La guerre est directement liée à la
lutte des classes.
Guerres de classes à l'intérieur,
guerres impérialistes à l'extérieur,
voilà ce que l'histoire nous enseigne
sur cette classe sociale, la
bourgeoisie, dont la seule et unique
raison d'être est la maximisation du
profit par tous les moyens y compris par
le plus abject, la guerre sous toutes
ses formes. D'une manière générale, les
guerres intérieures et extérieures sont
intimement liées à l'exploitation des
uns par les autres. «Abolissez
l'exploitation de l'homme par l'homme,
et vous abolirez l'exploitation d'une
nation par une autre nation»
écrivaient Marx et Engels dans le
Manifeste (3).
Mohamed Belaali
(1)
«The leading party in the society and
the state is the Socialist Arab Ba'ath
Party. It leads a patriotic and
progressive front seeking to unify the
resources of the people's masses and
place them at the service of the Arab
nation's goals».
http://www.mideastinfo.com/documents/Syria_Constitution.htm
(2)
http://www.justforeignpolicy.org/iraq/iraqdeaths_fr.html
(3)
Voir, entre autres, «Les ravages de la
guerre impérialiste en Irak»
http://belaali.over-blog.com/article-les-ravages-de-la-guerre-imperialiste-en-irak-48981793.html
(4) K.
Marx et F. Engels dans le «Manifeste du
parti communiste», page 56. Éditions de
Pékin.
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