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AIC
Pourquoi
je ne participerai pas au Forum social de Madrid
Michel Warschawski
Michel Warschawski
13 décembre 2007
Le monde aujourd’hui est divisé entre ceux qui
sont pour une telle guerre mondiale et ceux qui s’y opposent :
la ligne qui les sépare doit être hermétique, car c’est la
ligne qui sépare la liberté de l’oppression, la coexistence
pacifique de l’agression, la vie de la mort.
Je n’ai aucun problème à participer à une
conférence où seraient invités des porte-parole sionistes pour
des débats qui sont partie intégrante d’une arène politique
saine. De même, je n’ai aucun problème si je suis invité à
des rencontres publiques officielles, organisées par des
organismes gouvernementaux, y compris israéliens. Mais j’ai
besoin toutefois de savoir exactement à quel type de réunion je
suis censé participer.
De par sa propre définition, le Forum
social de Madrid pour une juste paix au Moyen-Orient
appartient à la famille des « forums sociaux » tels
que définis à la charte de Porto Alegre, c’est-à-dire des
forums pour des organisations de terrain et populaires, sans
implication d’organismes étatiques, ni de partis politiques (ou
organisations armées). Le Centre
d’information alternative (AIC) et le PNGO
(Coordination des ONG palestiniennes), Ittijah,
le Comité
israélien contre les démolitions de maison ([ICAHD) et la Coalition
des femmes pour une juste paix (Israël), se sont beaucoup
investis au sein de la commission internationale qui a été créée
pour aider la commission locale dans la structuration du forum et
l’élaboration de la liste des organisations à inviter. Celui
qui s’est impliqué pour une politique progressiste au
Moyen-Orient est bien conscient qu’une telle liste est une
question politique majeure : la
plupart des organisations arabes, dont les organisations
palestiniennes, ne participent pas à des réunions politiques
avec les organisations israéliennes qui ne soutiendraient pas les
droits des Palestiniens, tels qu’ils sont définis par les
Nations unies et le droit international y compris, évidemment, le
droit au retour des réfugiés palestiniens. Ce qui exclut la
plupart des organisations sionistes israéliennes.
Pour éviter tout malentendu, le comité
organisateur de Madrid et la commission internationale ont publié,
dès le début, une Déclaration des principes qui définit le
cadre politique du Forum social de Madrid. Sur la base de cette Déclaration
des principes, la délégation israélienne s’est constituée et
les intervenants pour les différentes réunions plénières ont
été retenus. En un mot, Madrid est la première grande conférence
internationale anti-Annapolis et c’est pourquoi elle est si
importante.
La composition des délégations cependant,
surtout celle d’Israël, n’a pas convenu au ministre des
Affaires étrangères espagnol... ou au Centre Peres pour la paix !
Il est clair que le gouvernement espagnol a le droit de témoigner
plus de sympathie aux organisations sionistes et d’organiser sa
propre conférence. Néanmoins, il ne peut
pas s’immiscer dans le Forum social. Il y a peu, j’écrivais
sur le site d’AIC :
« L’implication d’un
ministre d’un gouvernement dans un forum social est, en soi, une
grave violation de la charte de Porto Alegre, laquelle instaure
une indépendance absolue des forums sociaux à l’égard des
gouvernements. Pourtant, le problème n’est pas seulement
statutaire, il est pleinement politique : que font des
organismes qui soutiennent ouvertement le néolibéralisme et la
guerre, à une conférence qui est totalement en opposition au néolibéralisme
et à la guerre ??!!! Ce n’est pas la première fois que
cette entité quasi gouvernementale tente de se glisser dans une
conférence d’organisations non gouvernementales, et nous avons
déjà dénoncé d’autres tentatives dans le passé [...].
Cependant, cette fois la question est plus grave car une majorité
des participants perçoit le Forum de Madrid comme étant
anti-Annapolis, et il est inadmissible que des partisans sans
vergogne d’Annapolis y soient présents pour tenter de faire des
adeptes du projet de guerre, un projet élaboré juste sous nos
yeux. (Anti-Annapolis
à Madrid, 29 novembre 2007). »
Par une méthode inacceptable, le ministre des
Affaires étrangères espagnol a monté une délégation israélienne
parallèle, plus importante que l’officielle, visant à changer
l’ordre du jour du Forum social de Madrid et à transformer la
conférence anti-Annapolis en une réunion « fourre tout »,
examinant le pour et le contre des projets de guerre élaborés à
Annapolis par George W. Bush et Ehud Olmert. La méthode est
inacceptable, le fond est scandaleux.
Le résultat est que la délégation palestinienne
a décidé, au dernier moment, de boycotter le Forum, ainsi que
des participants venant d’autres régions du monde arabe. On
peut rétorquer qu’ils auraient pu protester à Madrid même,
sur le lieu du Forum, même pour le boycotter. Telle fut, néanmoins,
la décision
du PNGO - (Voir
ci-dessous) et, alors que je roulais vers l’aéroport
pour me rendre à Madrid, j’ai reçu cette information et pris
la décision de rentrer à Jérusalem, en solidarité avec les
organisations de la société civile palestinienne.
Il ne faut pas sous-estimer ce qui est en jeu. La
question n’est pas que telle
personne ou telle organisation soit présente au Forum social de
Madrid ; ce n’est même pas l’implication importante du
gouvernement espagnol dans le Forum social. La question, c’est la
guerre et la paix au Moyen-Orient, ce que George W. Bush
appelle la Troisième Guerre mondiale, c’est la question
politique centrale du moment !
A Annapolis, les Etats-Unis et leurs alliés ont
finalisé les plans d’une nouvelle guerre, n’hésitant pas à
parler même de frappes nucléaires. Il s’agit d’une guerre
contre l’Iran, contre le Liban et le Hezbollah, contre le Hamas
et le peuple palestinien, qui fait partie d’une guerre mondiale
planifiée par les néoconservateurs de Washington et Tel Aviv. Le
monde aujourd’hui est divisé entre ceux qui sont pour une telle
guerre et ceux qui s’y opposent : la ligne qui les sépare
doit être hermétique, car c’est la ligne qui sépare la liberté
de l’oppression, la coexistence pacifique de l’agression, la
vie de la mort.
Certaines des organisations israéliennes
nouvellement invitées à Madrid sont, c’est le moins que l’on
puisse dire, nullement opposées aux projets de guerre de leur
gouvernement ou de leur grand frère américain. Pour n’en citer
que deux : Shimon Peres (fondateur du Centre Peres pour la
paix) appelle à une guerre préventive contre l’Iran après
avoir soutenu la dernière agression contre le Liban ; la
Paix Maintenant a approuvé la guerre contre le Liban en été
2006 - avant qu’elle ne tourne au fiasco militaire. C’est une
question de morale privée : je ne veux pas, aujourd’hui,
être dans le même forum que ces gens-là. Le sang des martyrs de
Tyr et Bint Jbail n’est pas encore sec, et les bruits de bottes
d’une prochaine guerre, une guerre qu’ils ne manqueront pas de
soutenir, résonnent déjà à nos oreilles.
Post scriptum : Il nous faut
insister sur la façon inadmissible dont certains de nos collègues
israéliens ont joué un rôle dans tout cela. Ils ont passé les
limites, dans les deux sens, entre les organisations de la société
civile et le ministère des Affaires étrangères espagnol, créant
tout ce gâchis et déterminant la décision des organisations
palestiniennes de boycotter le Forum.
Texte original :
http://www.alternativenews.org/blogs/michael-warschawski/...
La
délégation palestinienne annule sa participation au Forum de
Madrid pour une juste paix en protestation contre de graves
manquements
La délégation de la société civile
palestinienne au Forum pour une juste paix au Moyen-Orient, prévu
du 14 au 16 décembre à Madrid, a décidé de ne pas participer
au Forum en raison de graves manquements de dernière minute.
Les coordinateurs de la délégation qui devait être
conduite par le PNGO (réseau des ONG palestiniennes) ont appris
hier soit qu’en raison de pressions sans précédent de la part
de l’establishment israélien, une délégation israélienne
importante (n’ayant rien à voir avec la délégation
progressiste de la société civile israélienne conduite par AIC
qui devait participer au Forum) était invitée de façon antidémocratique
et sournoise à participer au Forum, sans avoir approuvé le document
de référence du Forum. Il ne s’agit pas seulement
d’une violation caractérisée de la règle clé pour la
participation, mais aussi d’une violation de la volonté
expresse de la majorité écrasante de la Commission
internationale, qui a autorité pour prendre les décisions pour
la conférence.
La Commission internationale, qui comprend les
représentants du PNGO, d’AIC, et d’autres réseaux déterminants
de la société civile arabe et internationale, a décidé, dès
juillet, que tout groupe qui souhaitait prendre part au Forum
devait d’abord approuver le document de référence, condition
« indispensable » à sa participation. Ce document de
référence énonce les principes « consensuels »
approuvés par les divers groupes internationaux organisateurs du
Forum, ainsi que les projets d’une vision alternative pour la
justice et la paix, fondée sur le droit international et les
droits humains universels. Nous, avec pratiquement tous nos
partenaires, considérons la violation de ce critère fondamental
comme une tentative dépourvue de toute conscience professionnelle
et totalement inadmissible, par certains, de vouloir imposer une
volonté gouvernementale sur une initiative éminente de la société
civile. Protestant contre ce manquement aux principes démocratiques
et reconnaissant qu’il ouvre, efficacement, la porte pour
imposer un ordre du jour en contradiction avec la vision du Forum,
plusieurs de nos partenaires locaux et internationaux ont décidé
de ne pas participer. Ceci concerne la délégation israélienne
conduite par AIC, la délégation du Haut Plateau du Golan occupé,
de même que de nombreuses personnalités et institutions arabes
et internationales.
Nous sommes profondément déçus, attristés et
surpris par cette tournure, pas si innocente que cela, des évènements.
Nous regrettons sincèrement qu’une initiative vraiment
enthousiasmante et démocratiquement organisée, militant pour une
paix fondée sur la justice et la solidarité entre les nations,
ait été récupérée par des groupes extérieurs qui, après
n’avoir pas réussi à influencer la plateforme progressiste du
Forum et sa visée politique, ont eu recours à un coup antidémocratique
pour imposer leur volonté. Leur ordre du jour politique rentre
essentiellement en contradiction avec le principe fondamental que,
seule, une paix bâtie sur la justice, sur le droit international
et les droits humains, comme stipulé dans le document de référence
du Forum, peut être viable, équitable et durable.
Nous apprécions grandement les efforts nobles et
infatigables des organisations de la société civile espagnole
pour l’organisation de ce Forum dans la démarche la plus
professionnelle, progressiste et tolérante. Ils sont nos
partenaires pour le long terme dans le combat contre les forces
d’occupation, le racisme et l’hégémonie impériale. Nous
partageons avec eux, les mêmes aspirations à une juste paix.
Texte original : http://www.alternativenews.org/news/...
Traduction pour les deux textes : JPP
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