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Après une longue éclipse, le
patron d'Al-Qaïda revient au-devant de la scène
Nouveau
discours d'Oussama ben Laden
Merzak Tigrine
Photo: Al Manar TV
Mardi 15 septembre 2009
Ne faisant nullement référence aux attentats du 11 Septembre
2001, sujet revenant auparavant systématiquement dans ses
discours et dont le huitième anniversaire a été célébré
récemment,
le chef de la nébuleuse Al-Qaïda donne l’impression de changer
de fusil d’épaule. Simples impressions d’analystes ou changement
de cap chez Ben Laden ?
Un site Internet utilisé habituellement par Al-Qaïda a diffusé
un document vidéo attribué à Oussama Ben Laden dans lequel le
chef islamiste met en garde le peuple américain contre tout lien
avec Israël. Ce message, intitulé “Une déclaration au peuple
américain”, d’environ dix minutes a été perçu par les analystes
comme une modification dans les positions du patron d’Al-Qaïda.
Ils estiment qu’il apparaît “comme un homme affaibli, traqué et
cherchant une porte de sortie”.
Sur un ton toujours menaçant, Ben Laden appelle le peuple
américain à faire pression sur la Maison-Blanche pour qu'elle
mette fin aux guerres en Irak et en Afghanistan en échange d'un
arrêt de ses attaques. Pour Diaa Rachwane, l'un des meilleurs
analystes arabes en matière de terrorisme : “Le nouveau message
de Ben Laden traduit un véritable changement (...), il ne
comporte pas de menaces et cherche à justifier les attaques du
11 Septembre”. Selon la même source, ces attentats ont été
menées en réaction au soutien des États-Unis à Israël “et
d'autres injustices”.
Elle relève également que “pas une seule fois dans ce message,
et contrairement à son habitude, Ben Laden n'a mentionné les
"martyrs" qui ont mené les attaques du 11 Septembre et ne les a
salués”. Rachwane, qui est directeur adjoint du centre Al-Ahram
pour les études stratégiques et politiques, souligne que ce
message intervient trois semaines après celui du numéro deux
d'Al-Qaïda, Ayman Al-Zawahiri, portant sur la situation dans la
vallée de Swat, au Pakistan, et qui abondait de citations
religieuses appelant à l'unité des rangs des moujahidine. Il
souligne que “pour la première fois également, Ben Laden parle
positivement de trois présidents américains.
Obama, dont il mentionne le discours adressé au monde
arabe depuis Le Caire le 3 juin, Jimmy Carter, dont il relève
l'attitude à l'égard des Palestiniens, et John Kennedy
(assassiné en 1963) en affirmant qu'Obama connaîtra le même sort
s'il suit une politique différente de celle des
néoconservateurs”. L’analyste aboutit à la conclusion que “tout
cela démontre clairement qu'Al-Qaïda est affectée par les
développements sur le terrain”, en allusion aux coups portés à
Al-Qaïda dans les zones tribales pakistanaises. De son côté,
l’analyste saoudien Anouar Eshki, chef du Centre des études
stratégiques et légales basé à Djeddah (ouest), est plus
catégorique en assurant que “c'est la première fois que Ben
Laden apparaît aussi faible”, précisant au passage avoir connu
le chef d'Al-Qaïda du temps où il résidait en Arabie Saoudite.
Il estime que le message de Ben Laden “montre qu'il se trouve
dans une position difficile, surtout que, selon les informations
en notre possession, son réseau commence à être démantelé dans
les zones tribales pakistanaises en raison des coups durs qui
lui ont été portés, alors que beaucoup de ses fidèles ont quitté
le Pakistan pour le Yémen ou la Somalie”. Catégorique, il
affirmera que le chef d'Al-Qaïda “cherche une porte de sortie
pour arrêter ses attaques”. Par ailleurs, il se demandera si par
la tentative du chef terroriste de justifier les attaques du 11
Septembre, “Ben Laden tente de redorer son blason en affirmant
que les attaques du
11 Septembre ont été menées en raison de la politique américaine
en Palestine. Mais quel lien y a-t-il entre la Palestine et les
attaques d'Al-Qaïda en Arabie Saoudite et en Occident ?” Pour le
centre américain de recherche sur le terrorisme Intel Center,
Ben Laden qualifie le président américain Barack Obama
“d'opprimé” n'ayant pas le pouvoir de changer le cours des
guerres et le présente comme un otage “des groupes de pression
et notamment du lobby juif”.
Pour rappel, le dernier enregistrement audio de Ben Laden avait
été diffusé le 3 juin dernier. Il y rejetait l'ouverture du
président Obama envers le monde musulman. Depuis les attentats
du 11 Septembre, attribués à Al-Qaïda, une soixantaine de
messages ont été diffusés par Ben Laden et son adjoint,
l'Égyptien Ayman Al-Zawahiri. La traque de Ben Laden, lancée
après les attentats, avec l'invasion de l'Afghanistan, pourrait
prendre encore de longues années, voire ne jamais aboutir, avait
estimé en mars le secrétaire à la Défense américain, Robert
Gates.
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Publié le 15 septembre 2009 avec l'aimable autorisation de
Liberté.
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