Europolitique
Le
rapport Védrine et l'adolescence de la
raison (2)
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Samedi 22 décembre
2012
Avertissement
Au cours
de mon analyse précédente de l'évaluation
de la politique étrangère de la
France que M. Hubert Védrine a rédigée à
la demande du Président de la
République, j'avais fait quelques pas
dans les souterrains de notre diplomatie
et j'avais observé divers champignons de
la servitude, dont la dispersion sur le
sol de la caverne ne conduisait nulle
part les pas hésitants du spéléologue.
Mais maintenant, un champignon immense
se dresse devant vous, celui d'une
scolastique dont le venin empoisonne
depuis des siècles l'encéphale des
évadés titubants de la zoologie.
Or, dans les dernières pages de son
rapport, M. Védrine semble avoir
rencontré cette plante hallucinogène. Le
récit de son dialogue avec ce puissant
personnage achèvera de vous instruire du
regard que vous devrez apprendre à
porter sur l'encéphale de l'histoire et
de la politique.
Car l'humanité ne se trouve en état de
veille qu'entre deux sommeils, celui de
l'enfance et celui de l'âge où de
puissants narcotiques lui permettent de
dormir jusqu'à ce que mort s'ensuive.
Entre ces deux assoupissements, votre
adolescence vous offre quelques années
d'un éveil cérébral précaire. Alors
votre cheminement vous fait escalader à
petits pas le champignon de la
scolastique. Mais cet Himalaya bouche
l'horizon, cet Himalaya vous interdit de
porter un vrai regard sur votre propre
espèce, cet Himalaya sécrète le poison
universel de la sophistique, cet
Himalaya fait prendre à notre espèce une
chose pour une autre, les "idées pures"
pour la parole du ciel. Puis, le pain et
le vin de chaque jour ont passé, aux
yeux de vos ancêtres, pour la chair et
le sang d'une divinité et longtemps,
l'auteur de votre extermination sous les
eaux a passé pour votre bénisseur,
longtemps, les tortures éternelles qu'il
vous infligeait sous la terre ont
alimenté vos prières. Et maintenant,
votre sauveur et votre délivreur
dressent leurs garnisons sur vos terres
; et l'apocalypse mécanique qu'ils
laissent se rouiller entre vos mains,
vous la prenez pour l'instrument de
votre liberté.
1 - Retour à
notre public d'adolescents
L'adolescence se
trouve donc conviée, disais-je (-
Le rapport
Védrine et l'adolescence de la raison
(1),
15 décembre 2012)
à lire l'histoire contemporaine avec des
bésicles d'anthropologues et de
logiciens, donc de peseurs d'une raison
bancalisée à l'œil nu. A l'aide de
quelles lunettes décoderez-vous le
passage suivant, censé relater l'"échec"
de la tentative du retour de M. Chirac
dans l'OTAN, s'il s'agit d'apprendre, au
préalable, à évaluer le ramassis des
encéphales aveuglés par les vanités de
l'auto-vassalisation? M. Védrine
explicite deux raisons principales de
l'avortement de la manœuvre cousue de
fil blanc de la diplomatie française en
1995: "L'échec de la mise en place
d'un système de double chaîne de
commandement à l'intérieur de l'OTAN
(qui aurait théoriquement permis à
l'adjoint du SACEUR [à la France]
d'activer [seule] la chaîne de
commandement européenne si les
États-Unis décidaient de ne pas
intervenir " et ensuite " le refus
américain d'octroyer à la France le
commandement Sud [installé] à
Naples [et qui sert de] base à la VIème
flotte américaine)."
Il faut savoir que, depuis 1945, ce port
- rattaché à l'Italie en 327 avant notre
ère - se trouve purement et simplement
annexé au territoire américain sous le
couvert d'une fiction
juridico-diplomatique nullement
déshonorante en soi: les ambassades
bénéficient dans le monde entier d'un
statut flatteur et qui les soustrait à
la souveraineté de l'Etat sur le
territoire duquel la géographie les a
placés. Mais vous devez comprendre, les
enfants, que toute la péninsule est
devenue une gigantesque ambassade
déguisée en porte-avion du Nouveau Monde
et amarrée au cœur de la Méditerranée.
Sans une exterritorialité
artificiellement étendue au bénéfice de
l'occupant, la ruée des divisions de
service vers l'Irak en 2003 aurait été
empêchée par Rome et par Berlin: toutes
ont transité par Pise, Florence et
Bologne en provenance de la gigantesque
base stratégique - pardon, ambassade
américaine - de Ramstein en Allemagne,
dont le même modèle sera implanté en
Irak - mais ce sera la plus titanesque
"délégation" du mythe démocratique dans
le monde.
2 - La
vassalisation démocratique
La
question est donc, pour vous, de savoir
si, oui ou non, le rapport de M. Védrine
évalue, même indirectement, le
poids de la souveraineté de fait que
l'Empire d'outre-Atlantique exerce sur
une Europe domestiquée depuis 1949 sous
le drapeau d'une Liberté vassalisante.
Une évaluation de cette
occupation rédigée sur demande à un
ancien ministre des affaires étrangères
de la France, donc validée, en principe,
par le génie diplomatique des Richelieu
ou des Talleyrand, peut-elle soupeser
publiquement les effets des
retrouvailles de la France avec le joug
militaire de l'OTAN si cette servitude
se réclame aussi officiellement
qu'autrefois de l'ubiquité et de
l'universalité des valeurs séraphiques
de la démocratie? Mais, en réalité,
l'Elysée a demandé à ce diplomate de
légitimer de sa main et au nom des
fondements mêmes des Républiques - et
pourtant, le plus discrètement et le
plus habilement qu'il se pourra - la
connivence officieuse de la France
post-gaulliste avec la vassalisation
continue et feutrée du Vieux Continent à
laquelle les Etats-Unis procèdent avec
succès depuis soixante treize ans.
M. Védrine aurait pu refuser tout net
une mission qualifiée "d'informative",
mais qui demandait à son autorité
professionnelle de passer sous un
silence précautionneux l'évidence qu'en
droit diplomatique, les gouvernements
italiens, allemands, espagnols, belges,
japonais et d'autres sont illégitimes
par nature et passibles d'une
condamnation pour haute trahison dans le
cas où une maturation de l'esprit public
et une meilleure information des
citoyens conduiraient un suffrage
universel jamais consulté sur
l'essentiel à un verdict sévère des
patries à leur égard. Mais la lettre et
l'esprit du droit international public
actuellement censé légitimer une
occupation qualifiée de "libératrice"
par antiphrase se trouveront un jour
invalidés.
L'anthropologie politique, elle, obéit à
l'éthique de la pensée logique, donc à
la rigueur du raisonnement. A ce titre,
elle scrute les processus
psychogénétiques irrationnels par
définition qui conduisent insensiblement
une Europe libérée depuis un quart de
siècle de toute menace militaire à une
auto- domestication évangélisante, donc
subjectivement tenue pour apostolique,
mais sur le modèle d'une félonie parée
d' un vêtement messianique asservissant.
Vous devez donc introduire votre
connaissance anthropologique des
mentalités magiques dans votre science
politique.
3 - La réflexion
anthropologique sur les dévotions
domesticatrices
Washington dispose de deux cents
places-fortes du mythe de la Liberté en
Allemagne et de cent trente sept
garnisons sotériologiques en Italie, où
elles demeurent, de surcroît, en
expansion rédemptrice continue et
intensive, donc sans que la chute du mur
de Berlin en 1989 ait mis un terme à
leur eschatologie, bien au contraire. La
France peut-elle, dans un rapport
officiel, ne rien dire de l'occupation
militaire de type démocratico-doctrinal
que subissent les deux grands vaincus
européens de la dernière guerre? Comment
se fait-il que, soixante-huit ans après
la fin de la seconde guerre mondiale,
Rome et Berlin demeurent soumis au même
statut de vaincus idéologiques à
perpétuité que le Japon et pourquoi tous
trois y mettent-ils un empressement
parareligieux dont la forte odeur de
conversion monte maintenant des autels
de la démocratie?
Telle
est l'optique proprement anthropologique
dans laquelle il vous appartient de vous
poser avec le sérieux de la jeunesse
intelligente de votre temps la question
décisive de la signification pieuse d'un
retour de la France laïque à
l'orthodoxie régnante, alors que sa
docilité catéchétique apparente échappe
à l'essentiel de la vassalité
confessionnelle dont elle s'est délivrée
en 1966, à savoir le quadrillage de son
territoire par la force d'un glaive
convertisseur. Sachez que, dès le 17
sept. 1958, donc antérieurement à la
chute de la IVe République, le Général
de Gaulle, alors Président du Conseil
aux côtés des Guy Mollet et des Pinay,
avait senti le fagot: il avait osé
demander au Saint Siège de la démocratie
que la direction, tant politique que
militaire de l'Alliance appartînt
exclusivement au trio des Etats-Unis, de
la Grande Bretagne et de la France. Car,
en 1961, déjà comme M. Védrine le
souligne sans fard, non seulement les
modes de "décision et de
subordination" - c'est moi qui
souligne - des prétendus "alliés" au
sein d'une "alliance" de vassaux
n'avaient changé en rien de fumet; le "commandement
en chef" des forces de l'OTAN "a
même interdiction de révéler aux
autorités nationales, et donc au
Président français, sur quelles bases
sur leur propre territoire sont
entreposées les armes nucléaires de
l'Alliance." [Le soulignement
sera toujours de mon fait]
M.
Védrine peut-il évaluer une
vassalité en diplomate averti si la
dimension hérétique du Général de Gaulle
échappe à une science du politique
encore privée d'un regard
d'anthropologue de la servitude? Dans sa
préface de la traduction française des
Mémoires de Mme Madeleine Albright,
ex-secrétaire d'Etat de 1997 à 2001 (Dieu,
l'Amérique et le monde, éd.
Salvator, 2008), M. Védrine rejette,
mais seulement d'un revers de la main,
la vision auto-apologétique de l'avenir
du monde de cette prêtresse. Mais si
Talleyrand n'avait pas connu en évêque
les ressorts anthropologiques du mythe
chrétien, il n'aurait pas triomphé de la
Sainte Alliance au congrès de Vienne en
1815.
4 - L'évolution du
cerveau des démocraties
L'heure
de votre entrée dans les périls de l'âge
pythique de la démocratie mondiale
approche à grands pas. Dès qu'elle aura
sonné au beffroi de votre citoyenneté
d'hérétiques de l'Europe des serfs, vous
devrez vous poser la question du danger
de mort que courent des Républiques mal
informées et placées sans le savoir sous
le joug militaro-religieux de l'étranger
- et cela en application d'une
disposition pseudo légitimante de leur
constitution naïvement laïque. Mais
comment cette interrogation à la fois
patriotique et théologique vous
fournira-t-elle également les
instruments intellectuels de votre
compréhension anthropologique des
ressorts "sacrés" de la conquête
de la Cisjordanie par Israël si la
France rationaliste n'a pas de
connaissance rationnelle des mythes
religieux, et d'abord du christianisme?
Car, sous les apprêts et les falbalas
des usages diplomatiques les plus
cartésiens d'apparence, sachez que la
subordination effective de l'Italie et
de l'Allemagne à Washington se trouve
étroitement liée à une occupation de
type calviniste de ces deux nations et
que les troupes du Nouveau Monde sont
aussi messianisées en sous-main par le
glaive du salut démocratique qu'Israël
par son eschatologie biblique.
Votre
évaluation de la portée mythique,
donc subrepticement religieuse du retour
pourtant tout nominal en apparence d'une
France ignorante sous la tutelle d' un
OTAN sotériologisé n'aura donc de sens
et de portée scientifiques que si vous
vous posez en anthropologue du sacré la
question du statut réel ou formel des
nations actuellement qualifiées de
souveraines, mais viscéralement
branchées sur un ciel étranger. Certes,
la France officielle ne se trouve
soumise que verbalement à un OTAN
messianisé, puisqu'elle n'est plus
occupée physiquement par les fidèles
d'une religion, tandis que l'Italie,
l'Allemagne et le Japon sont placés à
demeure et en temps de paix sous le
commandement réputé salvifique et
rédempteur des croyants incrustés sur
leur sol. Mais dès lors que les bases
militaires américaines ne sont pas
revenues piétiner le territoire
national, quelle est la portée actuelle
du rappel de M. Védrine qu'en 1966, "le
quartier général de l'OTAN est transféré
de Roquencourt près de Versailles à
Evere près de Bruxelles", si le
quartier général de Rocquencourt était
celui du "salut" que dispensait
l'orthodoxie doctrinale de la démocratie
mondiale? Dès lors que le scannage de
l'encéphale humain ne fait pas encore
partie intégrante de la politologie
scientifique, comment connaîtrions-nous
les effets sur le terrain d'un
déplacement du quartier général d'une
théologie?
5 - Un apôtre bien
corseté
Vous
remarquerez, les enfants, que, même aux
endroits où elle se veut franche du
collier et directe dans son expression,
l'évaluation de M. Védrine n'est
jamais agressive qu'en aval, donc en
retrait d'une pesée anthropologique et
critique de la révolution parareligieuse
dont se nourrit la Liberté américaine.
Or, celle-ci se trouve mythifiée par le
calvinisme depuis les origines. Dans ces
conditions, comment se fait-il que
l'analyse de l'élève de François
Mitterrand soulève page après page et
même paragraphe par paragraphe les
pistes diplomatiques libératrices
censées s'ouvrir avec insistance à la
France? Car, dans l'esprit de M.
Védrine, il s'agit de bout en bout
d'armer résolument une Europe pourtant
appelée, dans le même temps, à demeurer
définitivement corsetée par l'OTAN.
Supposons qu'il faille dévassaliser
crûment l'Angleterre, alors qu'on ne
dispose pas d'une science de la
vassalité: "Avec la Grande Bretagne,
cela signifie [qu'il faut] lui
demander jusqu'où elle est prête à aller
avec nous dans le cadre du Traité
de Lancaster House, si elle prendra des
décisions budgétaires cohérentes avec ce
Traité, à quels autres partenaires
européens elle est prête à ouvrir
certains aspects de ce Traité et si elle
accepte que soit créé un vrai centre
européen d'analyse, de réflexion et de
prévision stratégique."
Supposons ensuite qu'une ambition non
moins vaillante et non moins ignorante
conduise une France scientifiquement en
retard sur son siècle, mais
"décomplexée", à dévassaliser à son tour
l'Allemagne culinaire de Mme Merkel:
"Avec l'Allemagne, cela signifie
[qu'il faut] lui demander si le
renforcement politique de l'Europe,
qu'elle appelle de ses voeux, ne devrait
pas se traduire par plus de décisions
concrètes en matière d'industrie de
défense et par plus d'engagements en
matière d'opérations européennes
extérieures et par une concertation
franco-allemande sur les questions
traitées au sein de l'Alliance."
Mais comment conduire le char d'une
nation attelée de cette façon dans le
cirque de l'histoire? Tous les cavaliers
savent qu'on ne monte pas un cheval avec
des rênes inégalement tendues. Et il ne
s'agit pas seulement de rênes: l'Europe
porte deux harnais de la politique,
celui du Moyen Age et celui de la
nouvelle Renaissance au large de
laquelle elle court à bride abattue.
6 - Penser le
nucléaire militaire
Pour l'heure, des mécanismes
pédagogiques liés à une éducation
politique théologisée dès le plus jeune
âge s'opposent à la percée d'une élite
trans-ecclésiale et trans-idéologique;
et toute l'élite dirigeante de la
planète demeure parquée dans l'enceinte
d'une civilisation théologisée en
sous-main - et cela de telle sorte que
la sélection tardive et toujours en aval
des élites tant politiques que
cérébrales exclut aussi subrepticement
qu'efficacement la promotion des esprits
porteurs d'un regard de l'extérieur sur
le mythe "rédempteur" de la "Liberté".
C'est redire que ces questions de fond
demeureront sans réponse aussi longtemps
que les paramètres anthropologiques qui
régissent l'histoire d'un monde
messianisé dès les bancs de l'école par
la sotériologie politique américaine
n'auront pas permis une percée
intellectuelle en amont.
Quant à
l' Eglise, on sait qu'elle hait
viscéralement l'individualisme cérébral,
qu'elle le juge luciférien par nature et
que si vous ne chantez pas dans le
chœur, vous serez fatalement ostracisé.
Mais toutes les sociétés sont fondées
sur le rejet instinctif de
l'indépendance d'esprit - ce n'est
jamais qu'une question de degré. Aussi
personne n'ose-t-il soulever la question
- tenue pour incivique, hétérodoxe et
démoniaque - de l'absence de crédibilité
stratégique de "l'arme nucléaire",
c'est-à-dire le problème de
l'impossibilité proprement militaire,
pour le simianthrope devenu du moins
semi-rationnel, de se faire sauter aussi
patriotiquement que stupidement la
cervelle. Et pourtant, dans
l'inconscient politique de notre espèce,
la dissuasion atomique se trouve
fidèlement construite sur le modèle de
l'apocalypse biblique. Pourquoi ni la
France dont le bistouri laïc s'est
émoussé, ni l'Allemagne des piétés
philosophiques des descendants de Kant
et de Hegel ne se posent-elles la
question du statut présupposé "militaire"
d'une arme inutilement héroïsée par sa
folie, sinon parce qu'il serait
voltairien en diable d'user du scalpel
de l'ironie socratique en politique.
"Force
est de constater que la divergence entre
la France et l'Allemagne sur la
dissuasion nucléaire - et sur le
nucléaire en soi - reste très actuelle,
que l'Allemagne privilégie le cadre de
l'OTAN (l'Allemagne reste un des plus
gros contributeurs au budget de l'OTAN
et ses forces conventionnelles sont très
importantes) pour la conduite
d'éventuelles opérations militaires et
que Berlin a donné, pour diverses
raisons, un coup d'arrêt brutal au
projet EADS/BAE (Nationalisme
industriel? Contexte 2012 -2013? Autre
?). Cependant, même si les ministres
français et allemand de la Défense
avaient signé, le 4 juin 2012, une
lettre d'intention pour promouvoir une
coopération capacitaire, la question
demeure: Y a-t-il à Berlin une vraie
volonté d'agir, en matière de défense,
en européen, et en franco-allemand?"
7 - Un " bibelot
d'inanité sonore " (Mallarmé)
Mais la
France du Quai d'Orsay ne saurait faire
progresser le débat sur la mythologie
nucléaire si elle demeure campée sur le
terrain d'une réflexion
pré-anthropologique et si la pesée
politique et stratégique de la
crédibilité de l'atome guerrier se
trouve dans le même état d'apesanteur
que la pensée théologique du Moyen Age,
qui n'osait se poser la question de la
fiabilité philologique d'une apocalypse
alors faussement attribuée à Saint Jean.
"Le Président Hollande a rappelé au
Sommet de l'OTAN à Chicago les principes
auxquels la France reste attachée en
matière de défense antimissile
balistique: le caractère complémentaire,
et non substituable, de la défense
antimissile à la dissuasion nucléaire,
l'adaptation du système à la menace, le
contrôle politique par les Alliés, la
maîtrise des coûts, la nécessité de
préserver la BITDE (base industrielle et
technologique de défense européenne); et
enfin la coopération avec la Russie."
On sait que les Etats-Unis tentent de
renforcer leur présence politique,
idéologique et militaire en Europe par
la substitution d'un bouclier
anti-missile classique au mythe atomique
français. Une saine politique de la
souveraineté répondrait sèchement que la
Russie ne représente aucun danger
militaire pour l'Europe et que si une
telle menace se dessinait dans un
lointain avenir, il n'appartiendrait
qu'à nous de nous armer, parce que les
Etats-Unis ne sont pas les secouristes
hors de prix des autres nations de la
terre. Mais si vous demandez au dieu
Atome d'assurer votre salut à votre
place, vous mettrez la charrue avant les
bœufs et vous vous enfermez dans une
diplomatie sottement ambitieuse de
ridiculiser la logique politique qui
régit le monde réel.
Car vous vous contraindrez, à l'aide de
cent artifices, à magnifier la capacité
cérébrale pourtant fort réduite d'un
animal censé bénéficier, du moins depuis
le paléolithique supérieur, d'une
évolution lente, mais sûre du volume de
sa boîte osseuse; et vous ne verrez pas
que la faiblesse native dans laquelle la
raison simiohumaine est actuellement
demeurée résulte nécessairement - comme
il est rappelé plus haut - d'une carence
interne à la logique moyenne de notre
temps, dont l'étiage est demeuré
semi-animal, donc inscrit d'avance dans
une incohérence intellectuelle enracinée
au cœur des raisonnements élémentaires
d'aujourd'hui.
Vous
trouverez une illustration exemplaire de
ce point dans l'évaluation de M.
Védrine: ou bien la dissuasion aura
fonctionné à ravir, si je puis dire, et
l'on ne voit ni comment, ni pourquoi
elle devrait se trouver, de surcroît,
dûment confirmée au canon, ni
qu'il soit néanmoins indispensable de se
lécher les babines de satisfaction après
coup et à titre soi-disant "complémentaire",
puisque la guerre n'aura pas eu lieu, du
fait qu'elle se sera révélée hors de la
portée des pattes d'une bête
mythologisée de naissance. Et si, par un
prodige incroyable de Zeus, de Jahvé,
d'Allah ou d'Osiris, la pulvérisation
auto punitive d'une planète placée
depuis belle lurette au-dessus de la
rôtissoire des châtiments éternels s'est
produite au grand jour du nucléaire
enfin victorieux, l'on ne voit pas non
plus comment " compléter " à
merveille un monde expédié tout
bouillonnant dans le post-apocalyptique
et le méta- vaporisé.
Vous
devez donc vous persuader, les enfants,
que le cerveau de l'humanité
post-darwinienne à laquelle vous
appartenez n'est pas encore devenu
intensément cogitant et que, pour
l'instant, c'est spectaculairement et à
l'échelle de l'astéroïde sur lequel il
trottine que cet animal déraisonne sur
le modèle de la sécrétion verbale de "bibelots
d'inanité sonore", comme disait le
poète.
8 - Votre avance
cérébrale sur votre siècle
Il
faudra donc que vous tentiez de faire
débarquer dans les neurones de vos
congénères une question anthropologique
primordiale sur la nature et les
fondement des subterfuges
psychobiologiques dont notre espèce
demeure l'otage . Car l'absurdité
proprement militaire d'une dissuasion "nucléaire"
qui sert de masque à la lâcheté de la
"raison" dans les décadences, vous
contraindra à vous forger une grille de
lecture nouvelle, que vous qualifierez
de "comparative".
Vous
vous direz d'abord que la croyance
officielle en l'existence proprement
militaire d'une arme fantasmagorique
par nature et par définition - puisque
disproportionnée à la condition humaine
- révèle la même bancalité que toute la
théologie de la dissuasion posthume que
l'Eglise a développée sur le fondement
anthropologique du manichéisme de la
Perse d'Artaxerxés. Or, M. Védrine écrit
que la "dénucléarisation du monde ne
peut être récusée", mais seulement
en tant "qu'espérance à long terme",
donc à fonds perdus, comme si les
mécanismes mentaux qui commandaient la
croyance terrorisée en l'excommunication
majeure était soudainement devenue une
arme substantifiée et dont le statut
proprement théologique dans l'éternité
relèverait tout à coup de son
enracinement dans le temporel. "Néanmoins
le monde n'est pas assez sûr et ne le
sera pas assez avant longtemps pour que
l'on puisse envisager de se priver de
la garantie ultime que représente la
dissuasion nucléaire."
Le
serpent de la Genèse en est réduit à se
mordre la queue, puisqu'il prétend
maintenant nous procurer une arme dont
toute l'efficacité censée mesurable sur
un champ de bataille résidera
précisément dans l'impossibilité, pour
ce reptile, de retourner le dard et le
venin contre lui-même. La pensée
stratégique contemporaine se révèle donc
embryonnaire, c'est-à-dire
contradictoire et semi-animale ab ovo,
puisque ce ne sera jamais la morsure
fantasmée de la foudre biblique qui se
révèlera "garante", mais
seulement une foudre imaginaire et
condamnée à ne jamais démontrer que son
vain matamorisme. Que signifie la notion
de "garantie ultime", puisque,
par définition, une dissuasion tenue
pour "garante", donc pour
effective, ne méritera son nom que
lorsque l'adversaire se sera démontré,
ainsi qu'à ses congénères,
l'inefficacité sur la terre de sa
théologie de l'épouvante apocalyptique
et, par conséquent, le caractère
seulement onirique d'une catastrophe
universelle?
Ce que
prouve une dissuasion précisément "réussie"
par un effet de l' échec de son mode
d'emploi fantasmagorique, c'est que le "champ
d'honneur" a été retiré de dessous
les pieds de tous les
pseudo-combattants; et cet
évanouissement magique de la plateforme
traditionnelle des opérations militaires
des deux partis ne devient nullement la
clé de la victoire de la sagesse d'un
guerrier sur la folie de l'autre, mais
seulement de l'impossibilité, pour le
singe pseudo apocalyptique, de jamais
engager réellement les hostilités entre
plusieurs serpents de mer armés d'un
venin mythologique par nature. L'examen
de ce cercle vicieux vous aidera à
élaborer une dialectique militaire enfin
fondée sur la mise en parallèle du mythe
de la dissuasion par le recours à
l'excommunication scripturaire de
l'Eglise avec celle du mythe mécanisé
dont vos congénères acéphales
s'imaginent maintenant effectivement
pourvus sur la terre.
9 - Un génocide
raté
Mais
pourquoi, vous direz-vous, la dissuasion
exclusivement mythologique des croyants
est-elle plus difficile à terrasser dans
les esprits que celle du nucléaire -
autrement dit, pourquoi le Saint-Siège
se garde-t-il bien de renoncer à son
sceptre théologico-satrapique - sinon
parce qu'il sait que les vraies armes de
guerre de l'humanité ne sont autres que
ses croyances ? Si les armées d'Henry IV
d'Allemagne avaient éclaté de rire à
l'annonce de leur expédition instantanée
en enfer par une décision motu
proprio du Vatican, l'empereur des
Germains ne se serait pas gelé les pieds
à Canossa.
Quant à l'efficacité indirecte et
latente des armes nucléaires, elle
durera le temps de l'inhibition et de la
paralysie d'une réflexion militaire
prudemment placée sous le contrôle
étroit de l'orthodoxie nucléaire des
Etats du Moyen Age actuel. Mais si tout
le monde sait désormais qu'Hiroshima et
Nagasaki seraient encore debout dans le
cas où le Japon aurait possédé l'arme
atomique en 1945, nos stratèges ne
reçoivent pas encore à Saint-Cyr et à
l'Ecole militaire la formation
anthropologique et théologique qui seule
leur permettrait de placer le
polythéisme nucléaire sur l'échiquier de
la raison militaire de demain.
De plus, l'argumentation demeurée
semi-rationnelle des anthropologues
officiels, des psychologues d'école, des
historiens et des philosophes
tridimensionnels n'exerce aucune prise
sur les neurones traditionnels du sacré
simiohumain, et cela du simple fait que
les tortures éternelles de l'enfer ne
seraient réfutables que si l'ignorance,
la crédulité et la sottise figées se
laissaient terrasser par des arguments
d'infirmes à leur tour. Pour l'instant
le fantasmagorique religieux classique
peut dormir sur les deux oreilles,
puisqu'il a disqualifié toute réfutation
de l'absurde. Au contraire, dit la foi,
s'il faut croire, c'est justement parce
que seul l'absurde connaît le vrai et
l'exprime à coup sûr.
10 - La raison et
le "Connais-toi"
Mais le
nucléaire militaire offre prise, lui, à
la vérification impie de son inanité
stratégique, donc à la pertinence de la
mécréance qui en réfute l'absurdité:
jamais, disent les satanés logiciens,
jamais une bombe atomique ne sera
larguée par un Zeus ridiculement
débarqué dans les dévotions que distille
le temporel à son tour dès lors que
l'adversaire se trouvera armé du même
sceptre du suicide que lui-même. Si deux
ou plusieurs matamores du néant, tous
mollement assis sur des coussins de
velours, tiennent la même mèche des
ténèbres à la main - celle de leur
vaporisation dans une nuit éternelle -
observez avec les yeux distanciateurs de
Lucifer, le "porteur de lumière",
la paralysie mentale des héros de leur
propre trépas. L'instinct de
conservation est armé de syllogismes
tellement opiniâtres qu'ils ne se
laissent pas mettre catéchétiquement
a quia.
Depuis un
demi-siècle, toute l'humanité du funèbre
le sait pertinemment, et si elle se
cache encore le secret de ses
funérailles manquées, c'est exactement
sur le même modèle d'enfouissement et
d'ensevelissement des lois du temporel
que l'Eglise, qui n'est pas près de
dénucléariser sa théologie des tortures
posthumes. Mais déjà Israël sort peu à
peu du cocon de son paradis
spéléologique pour s'avouer qu'il lui
faut se hâter, parce que l'Iran ne sera
plus explosable dans l'atmosphère quand
il serrera dans son poing une tombe
rendue efficace par son irréalité. Seul
Dieu a réussi son coup de dés, mais par
une ruse dont il est facile d'éventer
l'odeur : s'il ne s'était pas
malignement gardé un survivant non
vaporisé pour témoin, son saint génocide
ne jouirait pas de sa seule existence
véritable, celle qu'il occupe dans
l'imagination religieuse de la créature.
Mais les peuples
sépulcraux d'aujourd'hui ne sont pas
encore dotés de la capacité cérébrale de
s'esclaffer devant le nucléaire
auto-neutralisé comme ils éclateraient
de rire si Benoit XVI excommuniait d'une
chiquenaude les Juifs, les musulmans ou
les protestants du XXIe siècle; et les
prophètes de l'intelligence crient dans
le désert que l'homme est un animal
guerrier à titre inguérissable et que
s'il se repose sur le fantasmagorique
funéraire censé le protéger, il sera
terrassé sur son sol avec les armes
proportionnées à sa taille que l'ennemi
aura perfectionnées.
11 - Le nucléaire
et la politique du fantastique
Dans
cette optique, l'aspect le plus
saisissant de la théorisation des
lauriers du nucléaire que M. Védrine a
esquissée en aval n'est autre que les
retrouvailles de l'alliance du
fantastique infernal contemporain avec
la plus vieille connaissance des
neurones du genre humain: la
scolastique. C'est ainsi que son
évaluation énumère avec un
haussement d'épaules à peine dissimulé
les divers commandements tout formels
que la France des nouveaux sorbonagres
et sorbonicoles a obtenus du fabuleux
otanien, alors que ces "commandements"
sont verbifiques, fantomatiques et
oniriques par nature et par définition.
Voyez comme leur nature purement idéelle
les condamne à l'inanité militaire et
politique de la scolastique qui gangrène
leur concept même de "guerre":
aucun Tamerlan ne consent à se profiler
à l'horizon, aucun Gengis Khan ne fait
étinceler sa cuirasse dans le lointain,
aucun géant à réduire en poussière ou à
tailler en pièces ne défie la vaillance
des don Quichotte du néant. Mais M.
Védrine ne voit pas que la planète est
devenue la risée d'une sophistique du
nucléaire; et pourtant, il semble
quelquefois rire sous cape des vaines
fulgurances de cette scolastique.
Comment cela est-il possible?
Ecoutez-le évoquer en passant et
négligemment, semble-t-il, le "plaisir
d'exister" des moutons de Panurge ou
de ceux de Don Quichotte confondus dans
le vide et le rien d'un attrape-nigaud
digne de la théologie du Moyen Age. "Même
s'il n'est pas question de mener à tout
prix des opérations pour le plaisir
d'exister (…), seules trois opérations
militaires sont en cours, dont une seule
est véritablement importante:
l'opération Atalante de lutte contre la
piraterie maritime au large de la
Somalie."
Mais
alors, que penser du "plaisir
d'exister" auquel s'exerce le "service
européen d'action extérieure", qui
demeure purement gesticulatoire, que
penser du "Système national d'alerte
avancée" (radar et satellites) qui "vise
à surveiller les missiles balistiques, à
déterminer l'origine des tirs et à
favoriser l'aide aux populations?"
Qu'enseigne à l'anthropologie critique
la scolastique du "plaisir d'exister"?
Car
l'Occident de la raison est né de la
victoire cruelle d'Abélard (1079-1142)
sur la scolastique des idées pures de
son maître Guillaume de Champeaux, qu'il
a réfuté devant tous ses élèves et dont
il a pris la place. Quatre siècles plus
tard, la Renaissance n'a fait que
prendre le relais de ce pionnier
extraordinaire de la dissection du
concept; puis cinq siècles encore ont
passé pour qu'apparaisse le spectacle
ridicule du triomphe d'une scolastique
militaire dont le fabuleux verbal
enserre désormais la planète des armées
et des cervelles. M. Védrine frôle à
chaque pas la découverte de la
titanesque scolastique des modernes
quand il raconte sans rire le "plaisir
d'exister" qui inspire "l'action
extérieure" des "missiles
balistiques", dont l'origine demeure
aussi mystérieuse que le pain de la
messe, mais contre le tir imaginaire
desquels il est urgent de " favoriser"
- c'est la moindre des choses - la
protection des populations!
Mais sachez, les enfants, que l'histoire
est riche en découvreurs qui n'ont rien
compris ce que leur inconscient savait
déjà et leur enseignait en secret. Le
génie foudroyant d'Abélard lui fait
réduire l'idée mythique de Platon au
concept, puis le concept à l'instrument
rudimentaire d'une parole orpheline de
toute science du singulier. Mais si
l'individu échappe à la saisie
langagière depuis le Théétète de Platon,
il n'y a plus de "plaisir d'exister"
pour la scolastique! Décidément, M.
Védrine réfute la scolastique comme M.
Jourdain faisait de la prose sans le
savoir. Cela donne à réfléchir: comment
se fait-il que le cerveau humain ne
découvre jamais que ce qu'il savait déjà
sans seulement s'en douter?
12 - La
signification anthropologique de la
scolastique
C'est
ici que le concept de scolastique
accède à son sens anthropologique
ultime: car de même que l'Eglise romaine
s'était construite, en plusieurs siècles
de pieux efforts, une cosmologie verbale
dont l'ubiquité dans les imaginations
imposait le vocabulaire célestiforme et
les armes dévotes de sa sophistique à
tout l'univers, l'Amérique a réussi à
son tour et en trois générations
seulement, le tour de force et de
passe-passe de tisser un réseau
para-théologique dont la puissance
vassalisatrice dépasse désormais celle
de la foi du Moyen Age. Voyez comme les
porte-avions d'une scolastique mondiale
de la Liberté tracent maintenant sur
tous les océans du monde les sillons
d'une profondeur sans précédent et non
moins omnipotente dans les esprits
qu'autrefois la cosmologie de la
Genèse, voyez l'ubiquité
impérieuse des songes exercés à leur
propre "plaisir d' exister" dans
les têtes. Si la France s'engageait dans
un combat à l'échelle mondiale contre la
scolastique politique, si un nouvel
Abélard étudiait, la loupe à l'œil, la
greffe du vocabulaire et de la syntaxe
du mythe de la Liberté sur l'histoire du
monde , si le nominalisme moderne
redonnait à la planète tout entière le
souffle d'une civilisation de la
lucidité, elle retrouverait également
l'universalité de sa vocation cérébrale
et elle occuperait à nouveau la place
d'une avant-garde invincible de
l'intelligence de l'humanité qu'elle
avait conquise au XVIIIe siècle.
On voit
que le rapport Védrine ne révèle toute
sa portée que si sa signification cachée
s'éclaire à la lumière d'une
problématique anthropologique elle-même
articulée avec une politique et une
histoire en évolution; car l'échiquier
mental sur lequel l'évaluateur -
l'aestimator des Anciens -
déplace ses pièces montre à chaque pas
les lacunes et les failles de sa
dialectique, comme si la vassalisation
scolastique ne parvenait à se donner en
spectacle qu'incidemment, sporadiquement
et à l'aide de quelques lucarnes
entrebâillées. C'est que toute
l'entreprise de M. Védrine se trouve
prise en aval dans le réseau vaporeux,
mais tyrannique, de la déraison
nucléaire dominante, alors qu'en amont,
il s'agit d'escalader l'Olympe d'une
scolastique du mythe de la Liberté et de
réfuter les songes de la démocratie -
celle qui permet précisément aux
Etats-Unis de régner à l'école de
l'irréalité de ses potentats du langage.
Mais voyons combien la cécité
intellectuelle devient semi volontaire
dans les décadences et émascule la
diplomatie rationnelle. Le mythe
nucléaire brandi comme une ligne Maginot
mentale permet, en réalité, aux
Etats-Unis de rendre la France et
l'Europe complices d'une humiliation
inutile et irrationnelle de la Russie
post-soviétique. Car l'extension des
Etats-Unis jusqu'aux murs du Kremlin,
qui demeure le seul objectif réel de la
Maison Blanche, se trouve pleinement
satisfait au prix d'une régression
européenne de la connaissance
scientifique du genre humain.
"Au
Sommet de Lisbonne, en novembre 2010, la
France a obtenu (malgré les demandes de
l'Allemagne et grâce à un arbitrage
américain) qu'il soit réaffirmé que la
stratégie de l'Alliance reste fondée sur
la dissuasion nucléaire, comme le
souligne le Concept stratégique adopté à
cette occasion : " tant qu'il y aura des
armes nucléaires dans le monde, l'OTAN
restera une alliance nucléaire. Lors
de ce Sommet de Lisbonne la France a
aussi accepté que l'OTAN décide de se
doter d'une capacité de défense des
territoires et des populations contre
les missiles balistiques, sur la base
d'une extension du programme de défense
de théâtre (ALTBMD : Active Layered
Theatre Ballistic Missile Defence)."
Autrement dit, la gestuelle atomique de
la France n'est que le masque
matamoresque de la capitulation totale
sur le fond.
Mais comment se fait-il que le terme de
théâtre fasse irruption comme à point
nommé sur les planches de la scolastique
diplomatique et que le Tartuffe de
Molière s'empare soudainement de toute
la scène?
13 - L'avenir de
l'Europe de l'intelligence
Le
nouveau siècle des Lumière sera celui
d'une France fondatrice de
l'anthropologie politique et critique du
IIIe millénaire, et cette anthropologie
étudiera la seconde chute de l'humanité
dans la scolastique, donc les fondements
les plus originels d'une espèce
vassalisée à l'école de la mythification
tartuffique de son propre langage. Alors
seulement, le même parallélisme qu'à
l'époque de Voltaire apparaîtra entre le
combat pour les droits civiques et pour
les pouvoirs de l'intelligence
rationnelle; et, à nouveau, on verra
qu'il n'y a pas de libération de la
pensée politique sans coalescence avec
l'émancipation de l'encéphale
méta-théocratique de l'humanité.
Simplement, l'exploration des
souterrains vassalisateurs du sacré
conduira à la découverte des arcanes
anthropologiques de la pensée dogmatique
et de son Dieu scindé entre
l'administration de ses tortures
éternelles sous la terre et l'octroi de
ses récompenses corporelles dans le
ciel.
Alors le "Connais-toi" d'une Europe de
l'intelligence répondra à nouveau à une
question têtue: "Qu'est-ce que
l'esprit?"
La pause
hivernale prendra fin le 5 janvier.
Reçu de l'auteur
pour publication
Les textes de Manuel de Diéguez
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